I. 2. L'effet mitigé sur le faux et l'usage de
faux
La facture normalisée produit un effet mitigé
dans la lutte contre le faut et l'usage de faux. En effet, s'il est certain
qu'elle permet de réduire les cas de falsification de factures (I.2.1),
la facture normalisée ne met pas fin aux déductions fictives de
charges et de TVA (I.2.2).
I.2.1. La réduction des cas de falsification de
factures
La facture normalisée n'est valable que lorsqu'elle est
sécurisée par l'apposition d'un sticker au moment de sa
délivrance. Or, l'achat de stickers pour le compte d'une entreprise
exige la présentation de l'un des documents suivants : une procuration
en bonne et due forme, un bon de commande de stickers ou un acte de
désignation d'un représentant pour l'achat des stickers.
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LANKOANDE Richard
L'efficacité des moyens de lutte contre la fraude
fiscale au Burkina Faso : cas de la facture normalisée
De plus, le mandataire ou le promoteur pour le cas d'une
entreprise individuelle doit présenter une pièce
d'identité valide et une copie du certificat d'immatriculation IFU de
l'entreprise. Ce formalisme légitime permet d'empêcher qu'une
personne acquiert frauduleusement des stickers au nom d'une entreprise
donnée. Et lorsqu'une entreprise achète des stickers, toute la
série de stickers achetées est attribuée à son nom
de sorte qu'elle ne peut les apposer utilement que sur ses propres factures.
Par conséquent, s'il est toujours possible de nos jours pour une
entreprise A de copier l'entête d'une autre entreprise B afin de se
délivrer une fausse facture, il est désormais difficile voire
impossible pour cette entreprise A de se faire passer, aux yeux du fisc, pour
l'entreprise B puisque la facture normalisée n'est prise en compte que
si elle a fait l'objet d'apposition d'un sticker attribué à
l'entreprise émettrice de la facture. Pourtant, les mesures de
sécurité qui entourent l'acquisition de stickers, ne permettent
pas à l'entreprise A d'acheter des stickers au nom de l'entreprise B
dont elle falsifierait les factures, sans l'autorisation de celle-ci. Du point
de vue de l'origine de la facture, le système de la facture
normalisée semble être un moyen imparable de lutte contre le
phénomène de la falsification de factures.
Il convient tout de même de noter que la facture
normalisée comporte des limites dans le domaine de la fausse
facturation. D'abord, même s'il permet de garantir l'origine de la
facture normalisée et même le nombre de factures
normalisées émises, le système de la facture
normalisée ne garantit pas que les montants inscrits sur les factures
sont les montants réels. En effet, ces montants peuvent être
majorés ou minorés par entente entre les cocontractants sans que
le système de la facture normalisée puisse déceler la
falsification. En outre, le système ne garantit pas que
l'intégralité des opérations réalisées ont
été constatées par facture puisque certaines
opérations occultes notamment la vente de biens ou une prestation de
service sans délivrance de facture sont toujours possibles surtout
lorsque les clients sont des consommateurs finaux. Cette situation
empêche l'administration fiscale de déterminer le chiffre
d'affaires réel du contribuable et lui permet ainsi de dissimuler des
sommes sujettes à l'impôt. Il en ressort que même si elle
permet de réduire la falsification de factures, la facture
normalisée ne met pas fin à toute possibilité pour les
contribuables, d'émettre de fausses factures ou de réaliser des
transactions commerciales non facturées. Cette possibilité
d'émission de fausses factures entraine la survivance des
déductions de TVA et de charges fictives.
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LANKOANDE Richard
L'efficacité des moyens de lutte contre la fraude
fiscale au Burkina Faso : cas de la facture normalisée
I.2.2. La survivance des déductions de TVA et de
charges fictives
Avant la mise en oeuvre de la facture normalisée au
Burkina Faso, les cas de déductions de TVA fictive étaient une
manifestation de fraude fiscale à la facturation bien
connue98. Il en était de même pour les cas de
déductions de charges fictives. Ces formes de fraude fiscale commencent
généralement par la falsification de factures. Cette
falsification peut être l'oeuvre de l'entreprise qui souhaite effectuer
les déductions frauduleuses ou celle d'une autre entreprise en
complicité avec celle-ci. En la matière, certaines entreprises
s'étaient spécialisées en commercialisation de fausses
factures. La mise en oeuvre de la facture normalisée se voulait
être un remède pour le moins efficace contre cette pratique. Si la
traçabilité de la facture normalisée
sécurisée permet d'empêcher la falsification de la facture
d'une entreprise donnée par une autre, elle ne met pas le fisc, à
l'abri des cas de déductions de TVA ou de charges fictives. Bien au
contraire, cette pratique frauduleuse semble résister à la
facture normalisée puisque le système de la facture
normalisée, en plus des limites soulignées plus haut, ne garantit
pas la réalité de l'opération constatée sur la
facture. Pour exemple, notons que dans une vaste affaire de fraude, un
contribuable A pourrait dans un premier temps, délivrer une facture
normalisée répondant aux exigences de la loi99 mais
constatant une opération fictive de vente ou de prestation de service,
à son complice B, afin de permettre à celui-ci d'opérer
une déduction de TVA fictive et de réduire sa marge
bénéficiaire par la prise en compte de cette charge fictive. Dans
un second temps, elle pourrait déclarer le chiffre d'affaires fictif
tout en jouant sur ses charges afin d'annuler son effet. Cette pratique qui a
une apparence légale ne peut guère être mise à nue
par le système de la facture normalisée.
Même si la facture normalisée présente des
limites non négligeables dans la lutte contre le faux et l'usage de
faux, ces limites n'entament pas sa capacité à renforcer la
mobilisation des recettes fiscales.
II. UN MOYEN DE RENFORCEMENT DE LA MOBILISATION DES
RECETTES
FISCALES
En sécurisant les transactions commerciales, la facture
normalisée permet de renforcer également la mobilisation des
recettes fiscales. Ce renforcement de la mobilisation des recettes
98 Voy. supra., p. 8.
99 Il faut entendre par là, les
différentes mentions de la facture normalisée et l'apposition du
sticker de la société émettrice.
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LANKOANDE Richard
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fiscale au Burkina Faso : cas de la facture normalisée
fiscales est perceptible tant du point de vue de la TVA (II.
1) que des recettes des impôts sur le bénéfice (II. 2).
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