Paragraphe 2 : L'influence des acteurs
internationaux
Les acteurs internationaux ont été unanimement
favorables au règlement pacifique du conflit frontalier entre le
Cameroun et le Nigeria. Aussi, certains Etats (A) et Organisations
Internationales (O.I.) (B) ont-ils explicitement ou non «
recommandé au Nigeria et au Cameroun la procédure judiciaire,
comme alternative crédible pour régler leur différend
frontalier »445.
A. Le rôle des acteurs étatiques
443 André-Hubert ONANA MFEGUE, 2002, op cit, p.
168.
444 En effet, selon Pierre de SENARCLENS et Yohan ARIFFIN,
« les Etats autoritaires adoptent des projets nationalistes agressifs pour
renforcer leur unité intérieure, et consolider l'autorité
de leur régime. En 1982, la junte argentine s'engage dans la guerre des
Malouines (Fakland) pour masquer ses échecs économiques et ses
contradictions internes. » (Voir Pierre de SENARCLENS et Yohan ARIFFIN,
2006, op. cit. p. 62.). En l'espèce, la décision du
Général Sani ABACHA, d'envahir la péninsule de Bakassi,
peut également être analysée dans cet esprit.
445 MGBALE MGBATOU Hamadou, 2001, op. cit., p. 211.
108
La France est l'Etat qui s'est le plus impliqué
auprès du Cameroun pour un règlement pacifique du conflit
frontalier (1). A côté d'elle, d'autres pays se sont
prononcé en faveur d'une solution définitive propre à
préserver la paix entre les deux pays (2).
1. L'influence française
L'influence française sur le choix du Cameroun
s'analyse essentiellement en termes d'absence de certitude quant à
l'intervention de Paris en cas de guerre ; et de soutiens manifestés en
faveur d'un règlement pacifique.
La politique camerounaise de défense repose
essentiellement sur la préservation de l'indépendance nationale
et de l'intégrité territoriale446. En matière
de défense, le Gouvernement a pour préoccupation majeure de
« rechercher une assurance contre les risques d'une agression,
s'assurer la certitude de n'être point attaqué ou de recevoir, en
cas d'attaque, l'aide immédiate et efficace d'autres Etats
»447. Ceci revient à dire que, pour le
Cameroun, l'engagement dans une guerre est subordonné à l'appuie
d'autres Etats. Augustin KONTCHOU-KOUOMEGNI parle à ce propos de
l'extraversion du système de sécurité des Etats africains
; et explique cela par le caractère dérisoire de leurs moyens de
défense448.
Bien qu'un Accord de défense ait été
conclu entre la France et le Cameroun le 14 février 1974, cette
dernière n'avait pas intérêt à ce qu'une guerre
éclate entre Yaoundé et Abuja ; car, cela l'aurait obligé
à intervenir militairement, mettant ainsi en péril ses
intérêts économiques au Cameroun et a fortiori au
Nigeria. La visite le 18 mars 1994 au Cameroun de Philippe JAFFRÉ,
Président du Groupe ELF Aquitaine (société de
nationalité française), est à ce titre
illustratif449. Elle peut être analysée comme
s'inscrivant dans le cadre des différentes initiatives françaises
en vue de promouvoir un règlement pacifique et définitif du
conflit.
En effet, dans le secteur de l'énergie, le groupe Elf
Aquitaine était à l'époque de la prise de décision
d'une importance indéniable pour la France et les pays d'Afrique noir
Francophone producteurs de pétrole. Aussi disait-on que « qui
dirige Elf gère des centaines de milliards de francs par an et
pèse sur la politique industrielle de la France et sur la politique des
pays africains producteurs de pétrole » 450.
Le groupe Elf avait alors d'importants intérêts au Nigeria.
Elf Nigeria
446 Narcisse MOUELLE KOMBI, 1996, op cit, p. 62.
447 Joseph OWONA et Antoine ZANGA, « Les doctrines de
sécurité en Afrique centrale », in Le Mois en
Afrique, n°235-236, août-septembre 1985, p. 3, cité par
Narcisse MOUELLE KOMBI, 1996, op cit, p. 62.
448 Augustin KONTCHOU-KOUOMEGNI, « L'Etat africain, mythe
ou réalité : à la recherche de la souveraineté
», RJPIC, n° 1, janvier-février 1988, pp. 46-47,
cité par Narcisse MOUELLE KOMBI, Ibid., p.63.
449 A la suite de l'audience à lui accordé par
le Chef de l'Etat du Cameroun, M. JAFFRE a affirmé à la presse
avoir évoqué avec le Chef de l'Etat le conflit frontalier entre
le Cameroun et le Nigeria. (Voir Archives SOPECAM, Cameroon Tribune, N°
5557, Lundi 2 mars 1994, p. 3.)
450 Lire Zacharie NGNIMAN, 1996, op cit, pp. 23-24.
109
Ltd par exemple était classée
3ème sur la liste des plus importantes entreprises
exerçant au Nigeria, avec un chiffre d'affaires d'environ 170 milliards
de FCFA pour l'année 1990. De même, Elf Marketing Ltd, une autre
filiale présente au Nigeria, avait un chiffre d'affaire de 9 milliards
de FCFA pour la même année. Le Nigeria occupait à
l'époque, le rang de troisième fournisseur mondial de la France,
et celui de premier fournisseur en Afrique subsaharienne451.
« Si un pays comme le Cameroun ne représentait que 20 mille
barils dans la production quotidienne d'Elf, le Nigeria lui, en
représentait plus de 135 mille »452.
Les intérêts français n'étaient pas
uniquement présents dans le secteur de l'énergie. En 1974, une
vingtaine de firmes françaises opéraient au Nigeria. Dix ans plus
tard, elles étaient plus de 180 à travailler dans des secteurs
aussi divers que le commerce, la banque, l'agriculture, la construction, les
télécommunications, et l'assemblage de véhicules. A titre
illustratif, dans l'industrie automobile, depuis 1962, l'usine Michelin avait
fourni environ 60 % de tous les pneumatiques vendus au Nigeria ; en 1983,
l'usine Peugeot avait produit 55 000 véhicules au Nigeria, soit
respectivement 70 et 25 % des voitures et véhicules commerciaux vendus
cette année là453. Selon Shehu OTHMAN, « les
ventes d'armes, qui ont pour origine des fournitures accordées aux
forces fédérales au début de la guerre civile, ont
continué à se développer »454.
Bien qu'ils ne soient pas aussi importants que les
intérêts économiques nigérians de la France, les
intérêts de Paris au Cameroun n'étaient pas
négligeables. Ainsi, au Cameroun, ELF était
représenté par sa filiale ELF SEREPCA qui opérait sur onze
concessions et sept permis. Avec 70 % de la production totale de
pétrole, Elf SEREPCA était le leader dans la production, mais
également dans la distribution pétrolière au Cameroun
depuis le rachat en 1993 des parts de la British Petroleum455. Le
Cameroun était également le premier partenaire commercial de la
France parmi les pays d'Afrique noire francophone, juste avant la Côte
d'Ivoire456. Au-delà de ces intérêts
économiques, le principal intérêt de Paris au Cameroun
était stratégique457.
Alors, tout en soutenant le Cameroun, la France mettait tout
en oeuvre pour que le conflit connaisse une issue pacifique458.
C'est sous son initiative que le Parlement européen avait
voté,
451 Daniel BACH, « Dynamique et contradictions dans la
politique africaine de la France : les rapports avec le Nigeria (1960-1981)
», Politique Africaine II, 1982, cité par Hamadou MGBALE
MGBATOU, op. cit., p.177.
452 MGBALE MGBATOU Hamadou, op. cit., p.177.
453 Shehu OTHMAN, « Les relations internationales
globales du Nigeria », in D.C. BACH, J. Egg et J. Philippe (dir.),
Nigeria, un pouvoir en puissance, Paris, Karthala, 1988, p. 79.
454 Idem.
455 Lire Zacharie NGNIMAN, 1996, op cit, p. 24.
456 Narcisse MOUELLE KOMBI, 1996, op. cit, p. 131.
457 En raison de l'appartenance du Cameroun à l'Afrique
Francophone.
458 A titre illustratif, dès le 23 février 1994,
après l'audience qu'avait accordé le Chef de l'Etat au
Général Français de brigade RIGAUD, Chef de mission
militaire de coopération, on a signalé la présence au port
de Douala d'un bâtiment de guerre de la marine française, le
« Ventose F-733-Valeur » équipé de radars, d'une piste
d'atterrissage pour les
110
malgré l'opposition de la Grande Bretagne, une
résolution appelant à porter le conflit frontalier entre le
Cameroun et le Nigeria devant la C.I.J.
2. La position des autres Etats
La campagne diplomatique internationale entreprise par le
Cameroun afin de démontrer la vacuité des thèses
nigérianes sur la souveraineté de Bakassi, les
velléités guerrières d'Abuja et surtout la
nécessité d'un retrait pacifique de l'armée
nigériane, a permis aux autorités camerounaises de se rendre
compte de l'appuie de nombreux pays africains à une issue pacifique du
conflit459. Néanmoins, aucun Etat africain n'a pris le risque
de se prononcer officiellement sur la question. Le seul pays qui est intervenu
activement pour une solution politique du problème est le Togo à
travers la médiation du Président Étienne GNASSINGBE
EYADEMA.
Hors de la sphère africaine, les Etats ont
appelé les protagonistes à régler le problème sans
aboutir à un conflit armé. Les Etats-Unis ont invité les
parties à faire preuve de modération et à ne pas engager
de nouvelles actions militaires. L'examen des rapports entre le Cameroun et les
USA à cette période, permet d'affirmer que les autorités
de Yaoundé ne pouvaient s'attendre à aucun soutien d'ordre
militaire de la part des Américains. En effet, non seulement leurs
relations restaient tendues du fait de l'Ambassadeur Américain Frances
COOK, jugée par le pouvoir trop favorable à
l'opposition460, mais aussi, les USA et les pays aujourd'hui dits
émergents, commençaient juste a manifesté
l'intérêt qu'ils ont actuellement pour les Etats du Golfe de
Guinée461. La Grande Bretagne
hélicoptères de combat, et d'un long canon. Le
lendemain, des parachutistes français venus de Bangui (République
Centrafricaine) à bord de deux hélicoptères « Puma
» et d'un avion de transport militaire de type « Transaal », ont
débarqué à la base militaire de Yaoundé.
Parallèlement, les autorités françaises ont
dépêché à Yaoundé une mission
diplomatico-militaire conduite par le Général QUESNOT, Chef
d'Etat major particulier du Président François MITTERRAND. Cette
mission était composée de Bruno DELAYE, Conseiller du
Président Français pour les Affaires Africaines et Malgaches,
Jean-Marc ROCHEREAU DE LA SABLIERE, Directeur des Affaires Africaines au Quai
d'Orsay, et du Colonel BENTEGEAT, dont les attributions officielles n'avaient
pas été précisées. Après avoir
été reçue en audience par le Président Paul BIYA,
ladite mission s'est rendue à Abuja afin de rencontrer les
autorités nigérianes. La composition de cette mission illustrait
bien la stratégie adoptée par la France. En l'espèce il
s'agissait selon le précepte de LYAUTEY de : « montrer sa force
pour ne pas avoir à s'en servir ».
459 Lire à cet effet Zacharie NGNIMAN, 1996, op cit,
p. 107-117.
460 A l'époque, au cours d'une émission
télévisée le 13 mars 1994, le Ministre Camerounais Douala
MOUTOME avait dénoncé « le silence coupable des
Américains devant l'agression nigériane », et avait
conclut à l'endroit des USA, « il faudra que l'on nous
embête un peu moins dès lors qu'il s'agit de juger notre
démocratie ». (Lire à cet effet, Zacharie NGNIMAN,
1996, op cit, p. 94)
461 AWOUMOU Cômes Damien Georges affirme à cet
effet que : « la pose des fondations de l'actuelle ruée vers le
continent africain, qui est le fait surtout des Etats-Unis, a
débuté avec les années 90 ». Selon Philippe
COPINSCHI et Pierre NOÊL, Elf a ainsi pu rester un acteur central du jeu
pétrolier au Gabon, au Congo-Brazzaville ou encore au Cameroun (pays
francophones ayant subit une influence coloniale française) jusque dans
les années 1990, malgré les éventuels aléas des
relations de la France avec ces pays. Pour de plus amples informations sur la
ruée actuelle vers le Golfe de Guinée, lire Cômes Damien
Georges AWOUMOU, « Le golfe de Guinée face aux convoitises »,
In Enjeux, N°22 janvier-mars 2005, pp.15-20 ; Philippe COPINSCHI et Pierre
NOÊL, « L'Afrique dans la géopolitique mondiale du
pétrole » in Afrique Contemporaine, N° 216 2005/4,
2005, pp. 29 à 42.
111
quant à elle, avait toujours manifesté
« un désintérêt relatif pour son ancien pupille
»462. Ce facteur, conforté par le contentieux
camerouno-britannique à propos de l'affaire du Cameroun
septentrional devant la C.I.J., et l'insertion de fait du Cameroun
à l'ensemble francophone463, ne permettait pas à
Yaoundé d'espérer une quelconque aide militaire de la part de
Londres. Par ailleurs, la Grande Bretagne paraissait avoir plus
d'intérêts au Nigeria, avec qui, malgré des tensions
ponctuelles, elle entretenait des relations privilégiées.
B. Les recommandations des O.I.
L'Afrique, continent « sinistré » selon le
terme employé par le Directeur Général du FMI de
l'époque Michel CAMDESSUS, devrait aujourd'hui plus qu'hier se passer du
règlement militaire des situations conflictuelles464. Aussi,
l'ONU (1), les Organisations Internationales Africaines
intéressées (2), et l'Union Européenne (U.E.) ont
instamment, explicitement ou implicitement, encouragé le Nigeria et le
Cameroun à une solution pacifique conforme au droit international.
1. Le rôle de l'ONU
Le leitmotiv qui conduit à la naissance de
l'ONU en 1945, est la préservation de la Paix et de la
Sécurité internationale. Cette Organisation Internationale de
caractère universel attache une importance capitale au règlement
pacifique des conflits, qui fait l'objet du Chapitre VI de sa Charte. Le
Cameroun qui a été administré pendant près de
quarante et une année (1919-1960) par l'ONU, et avant elle la SDN,
accorde beaucoup de crédit à cette institution dont il reste
très fidèle aux principes465.
C'est ainsi que le 28 février 1994, Yaoundé a
saisi le Conseil de sécurité de l'affaire Bakassi. Suite à
cela et à une lettre envoyée par le Nigeria audit Conseil, le
Président de cet organe a encouragé, conformément à
la philosophie de l'ONU, le règlement pacifique du
conflit466.
Tout en affirmant le caractère impératif du
règlement pacifique des conflits, l'organisation universelle laisse aux
Etats la possibilité de choisir les procédés qui leur sied
le mieux. L'article 33 de la Charte dresse à cet effet, une liste non
limitative où se mêlent procédés politiques et
462 Narcisse MOUELLE KOMBI, 1996, op. cit., p. 134.
463 Idem.
464Archives SOPECAM, Cameroon Tribune,
N° 5546, mercredi 02 mars 1994, p. 3.
465 Le Préambule de la Constitution du Cameroun du 2
Juin 1972 révisé par la loi N° 96/06 du 18 janvier 1996
affirme ainsi la volonté du Cameroun d'entretenir « avec les
autres nations du monde des relations pacifiques et fraternelles
conformément aux principes formulés par la Charte des Nations
Unies. »
466 Affaire de la frontière terrestre et maritime entre
le Cameroun et le Nigeria, Observations de la République du Cameroun
sur les exceptions préliminaires du Nigeria, op. cit.,
Chapitre 2, Deuxième exception préliminaire : les parties
auraient l'obligation de résoudre toutes les questions
frontalières au moyen des dispositifs bilatéraux existants,
paragraphe 2.42.
112
juridiques. Aux termes dudit article, « les parties
à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer
le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent
chercher la solution, avant tout, par voie de négociation,
d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de
règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords
régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix ».
Le Cameroun qui avait déjà expérimenté les
procédés politiques de règlement a, dès lors,
choisit dans le respect des recommandations de la Charte, la voie
judiciaire.
Dans ce cas précis, le système international a
offert une opportunité au Cameroun d'atteindre ses objectifs.
2. Les Organisations Intergouvernementales africaines
intéressées
Dans la sphère africaine, deux O.I. se sont
exprimées sur la situation entre le Cameroun et le Nigeria dans le Golfe
de Guinée. Il s'agit de l'O.U.A. et de la Communauté Economique
et Monétaire de l'Afrique Centrale (CEMAC).
L'O.U.A. dont le Cameroun est l'un des membres fondateurs a
instamment encouragé les parties à une solution pacifique sur la
base des principes de la Charte de l'organisation panafricaine et des Nations
Unies. Le 24 mars 1994, le Conseil ministériel du Mécanisme sur
la Prévention, la Gestion, et le Règlement des conflits, a
invité le Cameroun et le Nigeria à travers une
Déclaration, « à faire preuve de retenue et à
prendre les mesures appropriées pour rétablir la confiance
réciproque, y compris le retrait des troupes et la poursuite du dialogue
» 467.
Au niveau sous-régional, les Etats de la CEMAC ont
affiché une attitude de neutralité468. Aucun Etat
membre de cette organisation d'intégration sous-régionale auquel
appartient pourtant le Cameroun, n'a ouvertement soutenu Yaoundé. En
revanche, lors d'un Sommet informel organisé le 28 février 1994,
les Chefs d'Etat de cette institution ont souhaité « que les
démarches en cours aboutissent très rapidement à une
solution préservant la paix et l'unité africaine
»469.
3. La position de l'Union
Européenne
467 Suite aux travaux de la deuxième session ordinaire
de l'Organe Central du Mécanisme de l'O.U.A. sur la prévention,
la gestion, et le règlement des conflits en Afrique, les 24 et 25 mars
1994 à Addis Abeba, l'Organe a adopté une Déclaration,
relative au conflit de Bakassi, dans laquelle elle a retenue les principales
positions camerounaises notamment : la réaffirmation des principes
fondamentaux des Chartes des Nations Unies et de l'O.U.A. comme cadre de
résolution pacifique de ce conflit à savoir :
l'inviolabilité des frontières héritées de la
colonisation, le respect de la souveraineté, de
l'intégrité territoriale et de l'indépendance de tous les
Etats. C'est de cette Déclaration dont il est question plus haut. (Voir
Archives SOPECAM, Cameroon Tribune, N 5562, Lundi, 28 mars 1994, p. 3)
468 Pour une analyse du comportement des Etats de la CEMAC
durant le conflit de Bakassi, lire ALIYOU Sali, L'attitude des Etats de la
CEMAC face au conflit de Bakassi et ses effets sur l'institution,
Mémoire de DEA, Université de Dschang, 2008. Seule la
Guinée Equatoriale est intervenue plus tard au cours du
procès.
469 MGBALE MGBATOU Hamadou, 2001, op cit, p. 204.
113
L'U.E. est un important partenaire du Cameroun. Son poids dans
les relations internationales, et ses diverses contributions au
développement du pays470 sont autant de facteurs qui
favorisent son audience auprès des autorités camerounaises.
Début mars 1994, elle s'est exprimée par le biais d'un
Communiqué471 diffusé à Yaoundé par
l'Ambassade de la République Fédérale d'Allemagne, au nom
de la Grèce qui assumait alors la Présidence de l'U.E. Par ce
Communiqué, l'U.E. a affirmé qu'elle « croit fermement
qu'il n'existe qu'une voie unique pour résoudre ce problème
à savoir le règlement pacifique ». Pour y parvenir,
elle a « instamment » demandé aux parties de
rechercher une solution à travers « l'arbitrage ou la
médiation de n'importe quelle institution régionale ou
internationale », et de mettre tout en oeuvre pour éviter
toute action militaire qui aggraverait la situation.
Bien qu'il soit intervenu à l'initiative de la France,
le Parlement Européen est une institution propre dont il est important
d'évoquer indépendamment l'action. En mars 1994, après le
Communiqué de l'U.E. précité, cette institution
européenne a incité le Cameroun et le Nigeria à
régler définitivement leur opposition frontalière par la
voie judiciaire. Elle a en effet voté une résolution appelant
instamment à porter le conflit frontalier camerouno-nigérian
devant la C.I.J. Par ce vote, les députés européens ont
exprimé l'opinion des populations européennes qu'ils sont
chargés de représenter.
Au terme de ce chapitre, il convient de relever la
prépondérance des variables systémiques sur celles
sociétales dans l'explication du processus de prise de décision
du Cameroun ; et plus particulièrement du facteur relatif au
caractère particulier de l'adversaire. En effet, la puissance du
Nigeria472, sa promptitude à remettre en cause les accords
négociés, et le degré des relations que le Cameroun
entretenait avec lui ont exercé une influence décisive sur le
choix du mode de règlement de conflit.
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