CHAPITRE I
LA PERCEPTION DE LA QUALITÉ DE
SERVICE
Au vue de l'importance du rôle du consommateur pour les
entreprises de service, il est primordial de connaitre leur perception de
celle-ci. Différents auteurs se sont intéressés à
la conception et à la modélisation de cette qualité de
service aperçue. Les études et définitions
proposées précédemment permettent de mieux comprendre les
éléments et les dimensions qui composent, articulent et
déterminent la perception de la qualité de service. Dans ce
chapitre, nous présentons les concepts et modèles les plus
appropriés au cadre de ce mémoire ainsi qu'une analyse critique
pour déterminer l'utilité de ceux-ci dans le contexte.
1.1. Définitions de la qualité de service
La perception de la qualité de service est un sujet
ambigu à traiter. Il implique plusieurs concepts en même temps.
D'un côté la perception du consommateur et de l'autre la
qualité de service. Après la revue de la littérature
existante, nous présentons une brève description des concepts,
des définitions et des modèles les plus connus par rapport
à la perception de la qualité de service. Une analyse fine de ces
éléments permet de cerner les aspects le plus importants afin
d'extraire les informations pertinentes qui seront utiles dans la suite de ce
mémoire.
En ce qui concerne la qualité de service de trois point de
vue émergent :
? L'école américaine : Parasuraman, Zeithaml et
Berry ? L'école française: Eiglier et Langeard
? L'école nordique: Grönroos.
Tous ces auteurs proposent différents modèles de
la qualité de service. Ils analysent l'ensemble des
caractéristiques qui influencent celle-ci, puis ils présentent
leur définition à partir d'une vision analytique en utilisant les
travaux antérieurs réalisés dans le domaine et l'ajout de
nouvelles idées.
La conceptualisation de la qualité de service a
évoluée considérablement à travers le temps, en
fonction d'émergence des nouveaux besoins et de la concurrence
acharnée. Initialement, l'étude de la qualité de service,
« QdS », se focalise sur l'étape de
réalisation du service. Certains auteurs tels que Grönroos
(1982), Zeithaml (1988) et Crosby
(1991) abordent la qualité de service de manière
similaire au traitement de la qualité d'un bien. Avec le temps, la
conceptualisation se centre sur le consommateur. Certains auteurs l'assimile
à la notion de niveau de satisfaction du service reçu . Le
concept initial subit une métamorphose, la qualité devient peu
à peu une qualité subjective et donc moins objective
(Morin et Jallais, 1991).
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Ces différents auteurs ont défini la perception
de la qualité de service de différente manière et selon
différents points de vues. Cependant il est possible de regrouper toutes
ces définitions de qualité de service en deux grands groupes :
celles basées sur l'optique des perceptions du consommateur et celles
basées sur l'optique des expectatives et des perceptions des
consommateurs.
Dans le première groupe, Zeithaml
(1988) définie la qualité perçue comme : «
Le jugement du consommateur concernant le degré d'excellence ou de
supériorité attribué à une entité
». Collet et autres (1989), à leur tour,
affirment que c'est « La conformité aux besoins réels du
consommateur ».
En 1989, Eiglier et Langeard introduisent
l'idée que « Un service de bonne qualité, est celui qui
dans une certain situation, satisfait le consommateur ».
Zimmerman et Enell (1993), présentent la qualité de
service comme « Le degré selon lequel le service satisfait avec
succès les besoins des consommateurs, elle est déterminée
par certaines caractéristiques du service que le consommateur reconnait
comme des bénéfices pour lui ».
Heckmann (2004) considère la perception de la qualité de
service comme « Le jugement global du consommateur à propos de
l'excellence ou la supériorité du service rendu ». Dans
cette même perspective, d'autres auteurs ont proposé leur propre
définition. Tous celles-ci se basent sur le même principe,
plusieurs se superposent, et proposent, au final, les mêmes concept avec
des mots différents. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas
mentionné intégralement toutes les définitions existantes
dans la littérature mais seulement les plus appropriées pour le
développement de mon sujet.
Dans le deuxième groupe, les auteurs arrivent à
la conclusion que la définition de la qualité de service est
basée sur la comparaison entre ce que le consommateur perçoit et
la performance qu'il en attend (attentes et expectatives). Dans cette
perspective, nous présentons les définitions de la perception de
la qualité de service à partir de l'optique des expectatives et
des perceptions des consommateurs. L'une des premières
définitions est donnée par Lewis et Booms
(1983). Ils expliquent comment « La divergence entre
expectatives et perceptions du résultat, c'est-à`-dire, le
résultat d'une évaluation où le consommateur compare
l'expérience perçue du service et les expectatives qu'il avait
pendant l'achat...C'est une mesure du niveau de service rendu et de ses
expectatives sur une base consistante ». La même année,
Grönroos propose sa définition en affirmant que
« La qualité de service dépende de la comparaison du
service attendu et du service perçu. De ce fait, la qualité est
le résultat d'un processus d'évaluation en continu
».
D'ailleurs, Parasuraman et autres (1985),
considèrent la qualité de service comme « La comparaison des
expectatives du consommateur avec le résultat actuel du service rendu
». Zeithaml (1992), à son tour, affirme que c'est
« le résultat de comparaison des expectatives et perceptions
». Rust et Oliver (1994), présentent
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également la qualité de service comme «
Le résultat de l?écart perçu par le consommateur entre
ses expectatives et sa perception du résultat ».
Il est important de noter qu'au début les auteurs
définissent la qualité par rapport aux biens : comment le
consommateur perçoit la qualité de certain produits, à
travers les caractéristiques tangibles : durabilité, performance,
etc...C'est plus tard, dans l'ère de la révolution des services,
que les définitions et les concepts de « servuction » et
qualité de service ont commencé à émerger. A cette
période, Parasuraman, Zeithaml et Berry (1998)
affirment que la perception de la qualité dans le service est
« un jugement global, une attitude, lié à la
supériorité du service ».
A partir de ces définitions, il est important de noter
que la qualité, tant dans le domaine des produits tangibles que celui
des services est ce que le consommateur perçoit
(Grönroos, 1994). Ceux-ci jugent et donnent leur avis sur
la qualité en fonction de leurs besoins (Devlin et
Dong, 1994). Cependant, du fait de certaines
caractéristiques particulières des services :
l'intangibilité, l'atomicité,
et l'hétérogénéité, la perception de la
qualité de service devient plus complexe à évaluer.
? L'intangibilité des services. La plupart de services
sont intangibles (Lovelock, 1983). On réalise les
transactions commerciales sans pouvoir vérifier et s'assurer que la
qualité de service est bonne. Le consommateur ne pourra pas juger de la
qualité de service qu'après son utilisation. C'est la raison pour
laquelle les entreprises ont du mal à comprendre comment leurs
consommateurs perçoivent la qualité de service offert
(Zeithaml, 1981).
? L'hétérogénéité. Les
services sont hétérogènes dans la mesure ou les
résultats de la prestation dépendent des intervenants, l'ambiance
et de nombreux facteurs. Un même service offert par deux entreprises
différentes ne sera jamais strictement identique.
? L'atomicité. Dans la plupart des services, la
production et la consommation sont très associées
(Grönroos, 1978). Il y a une forte atomicité car
les ressources humaines interagissent avec les consommateurs. Cela va affecter
fortement la qualité et son évaluation (perception).
Toutes ces caractéristiques ont une influence
particulière sur la perception de la qualité selon l'opinion du
consommateur. Elles font du service un phénomène différent
à évaluer. Grâce à celles-ci, nous pouvons
identifier les facteurs que les consommateurs utilisent pour évaluer le
service, ainsi que déterminer la perception qu'ils ont de celui-ci
(Grönroos, 1994). De cette perspective, nous croyons que
la
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détermination de la qualité de services est
essentiellement basée sur la perception des consommateurs.
Nous pouvons donc voir la qualité de service
aperçue sous deux angles différents : la qualité
perçue par le consommateur et la qualité offerte par
l'entreprise, appelée « Qualité Objective » dans la
littérature.
La première est la qualité perçue par le
consommateur. Elle prend en compte tout ce qui concerne et influence la prise
de décision du consommateur : son expérience, ses
préférences, ses goûts, ses habitudes, etc...Elle devient
abstraite et variable pour chacun des consommateurs. Chaque consommateur peut
juger différemment un même service et avoir une perception de la
qualité positive ou négative.
Dans la deuxième, la qualité objective est
déterminée par des caractéristiques techniques offertes
par l'entreprise. De cette côté, les entreprises travaillent dans
un cadre de comparaison constante avec la concurrence, elles prennent en compte
les offres du marché pour offrir un meilleur service, car elles savent
que le consommateur a une vaste gamme des offres similaires pour support de
cette comparaison. Dans la mesure où le consommateur a
évolué et est devenu plus « locace » au moment
de donner son avis de la perception, les entreprises ont amélioré
leurs offres dans le but de bien satisfaire ces besoins.
Dans cette évolution des consommateur, des besoins et
des offres, nous remarquons que certains auteurs comme
Parasuraman, Zeithaml et Berry
(1991) argumentent sur le fait que les expectatives du consommateur
par rapport à la qualité de service se présentent à
deux niveaux : la qualité souhaitée et la qualité
adéquate. La première, indique le niveau de service que le
consommateur attend de recevoir à propos de ses attentes. La
qualité adéquate est celle que le consommateur considère
acceptable et est basée sur la valorisation de service. Entre l'une et
l'autre, il existe une zone de transition, appelée la zone de
tolérance (voir Figure N° 1.1).
Figure N° 1.1 : Les expectatives au sujet du Niveau de
Service
Adéquat Souhaité
Bas Haut
Zone de
tolérance
EXPECTATIVES
Source : Parasuraman, Zeithaml et Berry (1991). «
Understanding customer expectation service » Sloan Management Review, 32,
p.42.
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Dans ce schéma, il existe un seuil marqué par
les tendances du marché et par la concurrence. Ce seuil est
défini par ce que le consommateur attend de recevoir comme minimum pour
avoir une perception de qualité non négative. Cette attente
minimum est dépendante des offres du marché. Si toutes les
entreprises offrent une même « valeur ajoutée » (service
additionnel) afin d'améliorer la qualité, pour le consommateur
cela cesse d'être une valeur ajoutée et tend a être
perçu comme un service standard. Selon lui, il doit être
déjà compris dans le service. Dans le cas contraire, le service
est perçu comme manquant ou incomplet. Le consommateur s'habitue
facilement à ce seuil et il en tient compte pour son prochain achat.
Il est important de noter que certains auteurs ont
réfléchi et discerné longuement sur la théorie du
paradigme et de la disconformité1. Cette théorie est
basée sur l'hypothèse que le consommateur forme d'abord ses
expectatives à propos du service avant l'achat ou la consommation,
ensuite il évalue les performances pour enfin les comparer avec ses
attentes. La qualité de service perçue résulte de
l'écart entre les performances et les expectatives du consommateur. Dans
cette perspective, si les performances sont mieux perçues que les
attentes, la qualité de service est positive ou de bonne qualité.
Le consommateur reste satisfait. Dans le cas opposée, quand les attentes
sont supérieures à la performance, la qualité de service
est perçue comme négative ou de mauvaise qualité et le
consommateur reste insatisfait.
Finalement, nous voulons présenter plus
précisément la définition de la qualité de services
dans le commerce électronique car certains auteurs se sont
prononcé sur ce sujet du à l'augmentation de la de la demande
dans ce secteur. L'une des premières définitions de la
qualité perçue dans le commerce électronique ont
été donnés par Zeithaml,
Parasuraman et Malhorta (2002). Ils proposent
la définition de la qualité dans une environnement
électronique et l'introduction d'un nouveau terme : «
e-qualité ». Selon eux, ce terme corresponde au«
degré selon lequel un site Web facilite un magasinage, un achat et
une livraison efficace et efficiente des produits ». Une
deuxième définition proposée par Sloïm
(2003) remarque que la qualité de service dans le commerce
électronique est la « résultante de la conjonction d'un
bon fonctionnement technique, d'un réel potentiel de séduction et
du respect des promesses affichées ».
Il existe des points communs et des différences entre
les définitions concernant la qualité de service traditionnel et
la qualité de service en ligne (e-qualité). Les points commun
sont :
? Elles sont mufti-dimensionnelles, même si les
dimensions pour chacune sont différentes.
? Elles sont issues du jugement du consommateur
(évaluation subjective).
? Elles sont relatives, c'est-à-dire,
évaluées en fonction d'une référence.
1 Grônroos (1994) qualité de service aperçue
est née de la comparaison
Elles présentent aussi des différences. Dans le
Tableau N° 1.1, nous montrons la comparaison entre la qualité
traditionnelle et la qualité de service en ligne. Nous nous sommes
aperçues que l'impersonnalité du service proposé
déclenche les principales différences de la qualité de
service en ligne.
Tableau N° 1.1 : Les différences entre la
Qualité traditionnel et la Qualité de service en
ligne
Qualité de Service en ligne Qualité de
Service Traditionnel
Transactionnel Relationnel
|
Évaluation cognitive Évaluation cognitive et
émotionnelle
Impersonnelle Personnalisée
|
Interaction homme-machine Interaction homme-homme
Pas de sentiments positifs Présence de sentiments
d'attachement,
de chaleur
|
Si mauvais, faible intensité d'exprimer les sentiment
négatifs (colère, irritation, frustration)
|
Si mauvais, forte intensité d'exprimer les sentiment
négatifs (colère, irritation, frustration)
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Source : Bressolles, « La Qualité de Service
Traditionnelle versus La Qualité de Service Electronique :
Similarités, Différences et Voies Futures de Recherche »,
2002 .
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