5.8. Contraintes et stratégies des
exploitations agricoles
Les contraintes dont les exploitations agricoles de la zone
d'étude sont confrontées ne sont pas les mêmes
dépendamment du mode de gestion, des pratiques culturales
adoptées et des facteurs climatiques. En effet, l'exploitant agricole
qui vit aux dépens de l'agriculture n'a pas droit à
l'échec et développe en ce sens un ensemble de stratégies
pouvant l'aider à réussir la plus forte possible de ses cultures
de façon à répondre aux besoins de son ménage.
5.8.1. Les contraintes des exploitations agricoles
Les enquêtes menées dans la zone d'étude
montrent que les contraintes auxquelles les exploitations sont
confrontées varient en fonction du type de culture au mode
d'élevage. Parmi les contraintes observées et
évoquées, les plus courantes demeurent :
La variation et l'irrégularité climatique
l'inaccessibilité aux intrants importants agricoles et de
matériels agricoles
Le manque d'espace de production végétale et
animale
L'instabilité de la structure
Le faible revenu des EA et le découragement de certains
exploitants agricoles
En plus de ces contraintes, les faits montrent que plus de 80%
des exploitants agricoles ne prennent en compte les caractéristiques des
organes récoltables (racines, tiges, fruits) des espèces
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associées de façon à éviter la
compétition pour les mêmes éléments. De même,
la distance trop rapprochée des poquets se révèle un
facteur de compétition dans la zone d'étude qui tient à
réduire le niveau du rendement agronomique.
Pour ce qui concerne la quantité de semences mise par
poquet, on l'estime en moyenne à 4 par poquet pour les semences
multipliées par voie sexuée et à 2 par poquet pour les
semences multipliées par voie végétative.
5.8.2. Les stratégies développées par
les exploitations agricoles
Considérant ces contraintes et bien d'autres encore,
l'exploitant ne devrait pas laisser décider uniquement la nature, mais
aurait dû chercher à influencer la donne par une mise en oeuvre
des stratégies dotées d'une durabilité de production
allant au contexte de la demande et du milieu. Par ailleurs, vu que bon nombre
d'exploitants se contente de donner des solutions ponctuelles aux contraintes,
il arrive que celles-ci ne soient que passagères et reviennent au fil du
temps. Malgré tout, ils se concentrent vers un calendrier cultural et
des systèmes de culture qui sont présentés ci-après
(voir le tableau 32).
Tableau 32: Répartition des cultures par aire
topographique
Aire topographique
|
Plaine
|
Montagne
|
Piémont
|
Espèces cultivées
|
sèche
|
Marécage
|
Agroforesterie,
|
Taro,
igname, manioc, banane-figue
|
Banane, canne-à-
sucre, maïs, haricot, pois congo, patate
|
Marécage Riz,
mazombelle
|
manioc, certaines espèces
|
|
|
pluriannuelles
|
Source : Enquête de l'auteur, Octobre et
Novembre 2015
Ce tableau (32) présente les principales espèces
cultivées au niveau de 3 aires topographiques. Cette forme de mise en
valeur permet aux exploitants agricoles de tenir compte de la
réalité des différentes aires topographiques de la zone
d'étude.
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Tableau 33: Système de culture mise en
oeuvre
Système de culture
|
Association culturale
|
Culture pure
|
|
Espèces cultivées
|
1-
|
Banane, taro, giraumont, igname
|
|
1-
|
Canne-à-sucre
|
|
2-
|
Riz
|
|
2-
|
Maïs, haricot, canne-à-sucre
|
|
3-
|
Mazombelle
|
3-
|
Maïs, pois congo
|
|
|
4-
|
Arachide
|
4-
|
Maïs, haricot
|
|
5-
|
Patate, manioc, pois congo
|
|
Source : Enquête de l'auteur, Octobre et
Novembre 2015
Dans le tableau (33) ci-avant, l'étude montre que
l'association Maïs, haricot, canne-à-sucre se fait surtout lors de
la première plantation de la parcelle en canne-à-sucre. Il arrive
parfois que le riz soit associé au mazombelle sous forme de contour. Le
système d'association culturale est la plus pratiquée dans la
zone d'étude, elle représente presque 2/3 du système
cultural. En grande partie, les exploitants pratiquent l'association culturale
en vue de réduire les marges de perte des récoltes. Car, si les
conditions climatiques ne favorisent l'une, ils espèrent que les
conditions favorisent l'autre. Il faut relater que le système
d'association implique grandement les arbres fruitiers suivant : Oranger, Noix
d'acajou, Manguier, citron, chadèque, arbre véritable,
arbre-à-pain, grénadia, corossolier, cachiman, papayer, ananas,
quénepier, avocatier, cacaoyer, caféier, cocotier.
Tableau 34: Calendrier cultural adopté dans la
zone d'étude
|
Septembre à Décembre
|
|
|
Février à Juillet
|
|
|
1.
|
Patate
|
6-
|
Maïs
|
|
|
1.
|
Haricot
|
6.
|
Igname
|
6.
|
Manioc
|
7-
|
Banane
|
2.
|
Pois congo
|
7.
|
Banane
|
7.
|
Igname
|
8-
|
Pois congo
|
3.
|
Maïs
|
8.
|
Riz
|
4.
|
Giraumont
|
9-
|
Canne-à-sucre
|
4.
|
Manioc
|
|
5.
|
Riz
|
|
5.
|
Patate
|
Source : Enquête de l'auteur, Octobre et
Novembre 2015
Le type de calendrier (tableau 34) utilisé par les
exploitants agricoles est similaire au calendrier scolaire haïtien
où l'ouverture de classe est faite en mois de septembre. Cette
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comparaison n'est pas sans effet vu qu'une grande part des
revenus agricoles est destinée à la scolarité des membres
du ménage.
Les exploitants agricoles travaillent de façon à
récolter le plus de cultures possibles avant l'ouverture des classes. De
ce fait, ils divisent l'année culturale en deux saisons, dont l'une
petite saison appelé couramment Ti-sezon (de Septembre à
Décembre) et l'autre grande saison (de Février à
Juillet).
En outre, dans certains cas, l'exploitant agricole en vue
d'atteindre les objectifs fixés utilise un itinéraire technique
allant des travaux de préparation de sol (labourage à la pioche
et à la houe, le sarclage), du semis direct, de l'entretien des
cultures, jusqu'á la récolte.
Du même angle, pour combler le manque de fourrage,
l'affouragement (feuilles d'avocatier) est utilisé. Contre le risque
d'élevage en liberté, ils procèdent à la
clôture des parcelles par des espèces du genre cactus.
Face aux contraintes liées à
l'instabilité du foncier, plus de 40% des exploitants agricoles ne
pratiquent pas la jachère alors que 60% de ces exploitants
préfèrent pratiquer le brulis dans leurs parcelles de
canne-à-sucre et de riz pour augmenter la fertilité des sols en
diminuant les résidus de récolte. Certaines fois, le brulis est
pratiqué à des fins de défrichage. Ce qui est
déconseillé.
Face aux contraintes liées à la perte de
fertilité des sols de la zone d'étude, Moins de 40% des
exploitants fertilisent certaines de leur culture. A cet effet, le type de
fertilisants apportés à certaines cultures demeure l'organique
dont les plus communs sont le fumier et le paillage.
En conclusion, les stratégies développées
par les exploitations agricoles face aux contraintes dont elles font face
concernent surtout l'occupation des parcelles, les systèmes de culture
et l'application d'un calendrier cultural selon l'aire topographique, la saison
et les moyens de production dont elles disposent. De toute façon, ces
stratégies aident dans la mesure qu'elles évitent de cultiver
n'importe quelle semence n'importe où. En plus, elles permettent aux
chefs d'exploitation agricole de planifier les campagnes agricoles en fonction
de la saison à venir. Par ailleurs, les pratiques culturales ayant
rapport aux rotations, associations et successions culturales ne semblent-elles
pas assimilées par les chefs d'exploitation agricole de la zone
d'étude.
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