CHAPITRE III LE DROIT D'INGERENCE HUMANITAIRE ET LA
RUSSIE.
Ce chapitre traitera du Droit d'ingérence humanitaire
au regard du Droit international classique et de la mise en oeuvre d'une
intervention préventive et de l'ingérence humanitaire Russe
SECTION I LE DROIT D'INGERENCE AU REGARD DU DROIT
INTERNATIONAL CLASSIQUE.
La question de l'existence d'un droit d'ingérence,
permettant à un ou plusieurs Etats d'intervenir de manière
militaire ou non sur le territoire d'un autre pour mettre fin à des
violations graves des droits de la personnes qui se déroulent sur le
territoire de cet Etat ne fait pas l'unanimité au sein des juristes de
droit international.
La majorité des juristes s'accorde néanmoins
pour dire qu'une action militaire dans le cadre de l'ingérence
humanitaire n'est pas consacrée par la charte des Nations Unies et
contrevient à l'article 2§4 de cette charte. Les pères de
l'ingérence humanitaire estiment quant à eux que, même si
ce droit contrevient aux dispositions de la charte, interprétée
restrictivement, la pratique subséquente à la charte et en
particulier celle postérieure à la guerre du Golfe permet
d'attester de l'émergence d'un tel droit, reflet de l'adaptation
nécessaire des principes de la charte aux exigences du droit
humanitaire.64Ainsi, en pratique, de nombreuses interventions
peuvent s'analyser en termes d'ingérence humanitaire.65 Les
Etats auteurs de ces ingérences n'invoqueront cependant jamais
l'émergence d'une nouvelle règle juridique à l'appui de
leurs interventions. Au contraire, ils se baseront sur des concepts de droit
existants tels que l'autorisation du Conseil de Sécurité ou le
consentement de l'Etat concerné, aux fins de justifier leurs actions.
§1 Le Droit International et la mise en oeuvre du
Droit d'ingérence
On pourrait imaginer que l'on assiste à la naissance
d'un nouveau droit de par la pratique qui en a été faite dans les
relations internationales contemporaines. Cette pratique peut tout d'abord
s'analyser en terme d'un accord implicite des Etats sur une nouvelle
interprétation de l'article2, §4 de la charte des Nations Unies.
Ainsi, l'exercice du droit d'ingérence militaire à des fins
humanitaires serait un usage de la force compatible avec la charte et ne
contreviendrait pas à l'interdiction formulée par cette
disposition. Dans ce cas, la nouvelle interprétation devrait recevoir
l'assentiment de l'ensemble des Etats parties à la
64 MARIO BETTATI, « Un Droit
d'ingérence », R.G.I.P tome 95,1991/3, P.665
65 PIERRE MARIE DUPUY, Les grands textes de Droit
International Public, 2ème éd Dalloz, Paris, 2000,
PP34-37
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charte en vertu de l'article31 la convention de vienne sur le
droit des traités.66 Ceci nous semble peu probable eue
égard aux positions des Etats en matière puisque très peu
d'entre eux réclament de l'ingérence humanitaire lorsqu'il s'agit
de justifier des interventions militaires au regard du droit. On pourrait, en
un second temps estimé que cette pratique permet d'attester de la
formation d'une nouvelle règle coutumière, située hors du
cadre de la charte des Nations Unies. Encore une fois, s'agissant de
restreindre la portée d'une règle du « ius gogens »,
l'établissement de cette nouvelle règle devra emporter la
totalité des suffrages des membres de la communauté
internationale dans son ensemble. En effet, selon l'article53 de la convention
de vienne précitée, une norme à caractère
impératif ne peut être modifiée que par une autre norme de
caractère identique et ayant rencontré l'approbation de la
communauté internationale dans son ensemble. On peut donc conclure de
ces diverses analyses que la notion de droit d'ingérence est
incompatible avec les principes de droit international classique. Cela ne veut
pas dire ce droit n'est pas susceptible d'évoluer.67
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