Introduction.
Jeanne Lanvin est l'une des couturières les plus
connues du début du XXème siècle. D'origine
bretonne, elle vient au monde en 18671. C'est l'aînée
d'une famille de onze enfants2. Elle naît dans une famille aux
revenus modestes, fréquemment aidée sur le plan financier par
l'écrivain Victor Hugo (1802-1885), un proche du grand-père
Jacques Firmin Lanvin. Dans ce contexte difficile, Jeanne est rapidement
obligée de travailler, elle devient alors modiste à l'âge
de treize ans, suivant des formations dans différentes maisons de Haute
Couture comme la maison Félix ou Cordeau & Laugaudin jusqu'en 1885
où elle s'établit à son compte. Jeanne Lanvin se marie en
1896 avec Emilio di Pietro et ils ont une fille, Marguerite en 1897. La
couturière ouvre une maison de Haute Couture en 1889 consacrée
à la création de vêtements pour enfants, et ouvre en 1909
un département « Femme ». Par la suite, la maison Lanvin ouvre
d'autres départements, dont un « Homme » et un « Sport
»3.
La fin du XIXème siècle et le
début du XXème siècle marquent les
prémices de la Haute Couture Française, dans toute son
élégance avec ses tissus rares et précieux. C'est une
période qui voit apparaitre la création de nombreuses maisons de
Haute Couture Française ainsi que des mutations vestimentaires
importantes, telles que l'arrivée du pantalon pour les femmes, mais
aussi des tenues plus confortables, ou des jupes plus courtes qu'auparavant.
Les femmes de ce nouveau siècle sont de plus en plus actives, leurs
tenues doivent être plus adaptées à leur quotidien et donc
plus confortables4. Le marché de la Haute Couture
connaît une révolution suite aux nouveaux modes de consommation et
de dépenses, permise par le progrès industriel qui amène
des productions en série et des innovations dans le système de
vente5.
De 1900 à la fin de la Première Guerre mondiale,
durant cette période appelée la « Belle époque
», le milieu de la mode est dominé par des maisons de Haute Couture
comme Worth ou Doucet. Charles-Frédéric Worth (1825-1895) peut
être désigné comme le pionnier de la Haute Couture
française6. Il crée des robes encore traditionnelles
marquant la fin du XIXème siècle. Jacques Doucet
(1853-1929) crée des tenues appréciées par les
comédiennes, usant de matériaux délicats et de tons
pastel. Les vêtements de cette décennie sont composés de
lignes
1 MERCERON, Dean L., Lanvin, Paris,
Éditions de la Martinière, 2007, p. 366.
2 PICON, Jérôme, Jeanne Lanvin,
Paris, Flammarion, 2002, p. 26.
3 MERCERON, Dean L., Op. Cit., p. 366.
4 DESLANDRES, Yvonne ; MLLER, Florence,
Histoire de la mode au XXème siècle, Paris, Somogy,
1986, p. 39.
5 Ibid., p. 56.
6 Ibid., p. 42.
8
souples mettant la dentelle à l'honneur. De
manière générale, au début du
XXème siècle, la silhouette féminine perd de
l'ampleur7. Les robes se raccourcissent, coïncidant avec
l'indépendance récemment conquise par les femmes pendant la
guerre. L'un des couturiers les plus importants de cette nouvelle image de la
femme et de son style est Paul Poiret8. En effet, c'est le couturier
qui libère les femmes du corset en créant des robes droites. Le
début du XXème siècle reconnaît aussi
l'illustration de mode comme une forme d'art, grâce à Paul Poiret
(1879-1944), qui demande au décortateur Paul Iribe (1883-1935)
d'illustrer ses modèles pour un opuscule de promotion, Les robes de
Paul Poiret en 19089 (ill. 1).
Les années 1920 sont caractérisées par
des petites robes droites et plates sans aucun volume, nommées «
robes tubulaires »10. En effet, les années 1920
connaissent deux tendances : d'une part une continuation du classicisme
d'avant-guerre et de l'autre l'émergence « des années folles
» amenées par les artistes et les intellectuels. Les femmes de ces
années frivoles portent des robes plus courtes couvrant parfois à
peine le genou, et aspirent à une émancipation sociale. Elles ne
souhaitent plus retrouver la mode contraignante d'avant-guerre, et font preuve
d'un goût nouveau pour la sobriété11. Les
créateurs montants sont alors Jean Patou (1887-1936), Edward Molyneux
(1891-1974) et Gabrielle Chanel (1883-1971) 12 . La
couturière Gabrielle Chanel innove dans le secteur de la mode en
proposant des ensembles en jersey ou en tweed qui révolutionnent le
mouvement des femmes dans leurs vêtements. Elle lance aussi les pulls
over pour femmes ou encore la petite robe noire ; des vêtements simples
et élégants dans une époque où les tenues sont
souvent richement décorées. Ainsi, le style Chanel est
régulièrement associé à des vêtements dits
« pauvres »13. Il est rapidement décrié par
des couturiers plus classiques comme Paul Poiret, qui cite à son propos
: « Jadis, les femmes étaient architecturales comme des proues de
navires... Maintenant, elles ressemblent à de petits
télégraphistes sous-alimentés »14.
Les années 1930 sont le point culminant de l'industrie
de la confection15. Malgré le contexte économique
difficile avec la crise de 1929, le secteur de la Haute Couture est en
expansion, comptant environ quatre-vingts maisons de Haute Couture à
Paris à cette période16. En ce qui
7 Ibid., p. 46.
8 Ibid., p. 100.
9 Ibid., p. 33.
10 GARNIER, Guillaume, Op. Cit., p. 9.
11 DESLANDRES, Yvonne ; MLLER, Florence, Op.
Cit., p. 122.
12 Ibid., p. 120.
13 GARNIER, Guillaume, Op. Cit., p. 27.
14 Ibid.
15 Ibid., p. 9.
16 Ibid.
9
concerne les vêtements, les années 1930 sont
marquées par un rallongement de la robe, amorcé en 1928 par
l'anglais Norman Hartnell (1901-1979) et adopté en France en 1929 par
Lucien Lelong17. C'est le retour de la robe tridimensionnelle,
disparue avec les robes tubulaires des années 1920. Les couturiers
apportent alors du volume dans leurs vêtements, dans le but de modeler le
corps18. De plus, les années 1930 sont une période de
prédilection pour les combinaisons graphiques19. Ces
décors exigent une grande maîtrise technique. Tous les couturiers
de cette période utilisent ces combinaisons de motifs, mais le couturier
Cristóbal Balenciaga (1895-1972) est le plus représentatif de ce
courant20. Entre 1929 et 1939, la ville de Paris est la capitale de
la mode, et une capitale cosmopolite21. En effet, c'est là
que plusieurs créateurs d'origines étrangères souhaitent
s'installer et inaugurer leur entreprise dans la capitale parisienne. Les
nationalités les plus présentes sont les nationalités
russes, anglaises, américaines et allemandes22.
La Seconde Guerre mondiale a un fort impact sur les
vêtements et les accessoires des femmes. La mode connaît rapidement
une influence militaire avec l'apparition de tailleurs, une multiplication des
poches, des calots et l'utilisation plus importante de couleurs comme le bleu
militaire ou le kaki23. À cette époque, on
privilégie l'option d'une mode utilitaire. Parallèlement, «
l'élégance à la française » fait tout pour
perdurer et la création de robes de jour et du soir continue,
persévérant dans l'idée d'un « devoir
d'élégance » à entretenir24. Malgré
tout, même ces robes de créateurs sont marquées par des
préoccupations utilitaires, les vêtements se doivent d'être
plus chauds et d'être adaptés aux nouveaux moyens de transport
utilisés, telles que la bicyclette. Les couturiers doivent eux aussi
faire face au rationnement des Allemands pour de nombreux matériaux
comme la laine ou le cuir ou à des métrages de tissus plus
stricts.
La première partie du XXème
siècle est souvent considérée comme « l'âge
d'or » de la Haute Couture française, avec la création de
nombreuses maisons, l'utilisation de matériaux précieux ou encore
des ateliers d'artisans de grande réputation. Le monde de la Haute
Couture
17 Ibid.
18 Ibid., p. 12.
19 Ibid.
20 Ibid. p. 22.
21 GARNIER, Guillaume, Op. Cit., p. 115.
22 Ibid.
23 « Rencontre avec Marie-Laure Gutton »,
responsable du département accessoire au Palais Galliera de la Mode de
la Ville de Paris. Conférence : « 1940-1945 : les femmes et la mode
pendant la guerre », Fondation Pierre Bergé Yves Saint-Laurent, 5
mai 2015. Vidéo disponible sur le site de la fondation Pierre
Bergé Yves Saint-Laurent.
24 Ibid.
10
à cette période est symbolisé par un
esprit de solidarité et de famille entre les couturiers25.
Ces derniers se rassemblent fréquemment lors d'événements
annuels comme le Bal de la Couture à l'Opéra de Paris ou encore
dans des circonstances plus graves comme le décès de Jean Patou
en 193626. C'est notamment durant cette période que sont
fixées les saisons des défilés, qui sont encore les
mêmes aujourd'hui. C'est après la Première Guerre mondiale
que les couturiers décident de rassembler les défilés lors
de deux semaines, l'une en février et l'autre en juillet, afin de
présenter tous leurs modèles en même temps27. La
première partie du XXème siècle est une
période de savoir-faire inouïe28 et synonyme d'un
passage entre la Haute Couture du XIXème siècle
caractérisée par un certain classicisme et une nouvelle
génération de couturiers au style plus épuré,
concrétisée dans les années 1920-1930.
Jeanne Lanvin tend à se distinguer des autres
créateurs de cette époque pour différentes raisons. Tout
d'abord, par ses broderies d'une grande finition qui deviennent sa marque de
fabrique29. La création d'une couleur symbole de sa maison,
le « bleu Lanvin », participe également à sa
reconnaissance. Ensuite, la couturière établit un style
dès la Première Guerre mondiale, et arrive à se renouveler
jusqu'à la fin de sa vie en 194630. Jeanne Lanvin est une
couturière qui fait la transition entre la fin du
XIXème siècle marquée par le savoir-faire de
ses artisans et une nouvelle génération de couturiers qui se fait
connaître après la Première Guerre mondiale. La
créatrice sait adapter ce savoir-faire et un certain classicisme avec
une modernité absolue, se distinguant ainsi de ses concurrents. Jeanne
Lanvin est respectée par les anciens comme Paul Poiret et êtres
tout à la fois modernes pour une nouvelle génération de
couturiers.
L'historiographie de la couturière Jeanne Lanvin est
peu abondante en comparaison de son rôle dans l'histoire de la mode du
XXème siècle. En effet, jusqu'à sa mort en
1946, la couturière est régulièrement citée dans la
presse présentant l'actualité de la mode parisienne. Des journaux
comme Vogue, Minerva ou la Gazette du Bon Ton
réalisent de nombreux articles sur la couturière. Ils
présentent alors des croquis des dernières collections ou bien
des entretiens avec elle, et ces derniers permettent à Jeanne Lanvin
d'expliquer son processus créatif ainsi que ses sources d'inspirations.
De nombreux articles de l'époque font référence
à
25 GARNIER, Guillaume, Op. Cit., p. 76.
26 Ibid,
27 Ibid., p. 77.
28 Ibid., p. 9.
29 Ibid., p. 34-35.
30 Ibid.
11
sa bibliothèque composée d'ouvrages en tout
genre ainsi qu'à ses textiles, mais aussi à son impressionnante
collection d'oeuvres d'art. Cependant, après la mort de la
créatrice et jusqu'aux années 1970, son nom disparaît peu
à peu des journaux pour différentes raisons. La maison Lanvin est
tout d'abord reprise par d'autres créateurs, dont Antonio Canovas del
Castillo (1908-1984), jusqu'en 1963. Les journalistes ne mentionnent donc plus
Jeanne Lanvin, mais les modèles de Castillo-Lanvin. De plus, de 1963
à 2001 de nombreux autres couturiers se succèdent à la
maison Lanvin : Jules François Crahay (1964-1984), Maryll Lanvin
(1981-1989), Claude Montana (1990-1992), Dominie Morlotti (1993-1996), Ocimae
Versolato (1996-1997) et Cristina Ortiz (1997-2001). Les années 1990
marquent la fin de la Haute Couture pour la maison Lanvin en 1993, qui fait le
choix de se concentrer sur le prêt-à-porter féminin de
luxe, les accessoires et les départements « Homme » et «
Sport »31. Cette succession de couturiers ne voit
émerger aucune figure aussi emblématique que celle de sa
fondatrice, et la maison Lanvin, ainsi que le nom de sa fondatrice, tombent
lentement dans l'oubli.
L'absence de Jeanne Lanvin dans l'historiographie est
également due à une autre raison. En effet, la Haute Couture
n'est pas encore totalement reconnue par les spécialistes de l'art, et
les ouvrages sur la Haute Couture sont encore rares. Cependant, entre les
années 1970 et 1985, quelques livres commencent à paraître
sur le sujet. Ce sont des livres qui regroupent l'histoire de plusieurs
créateurs avec très peu d'analyses détaillées des
modèles. Pendant cette période, les spécialistes analysent
principalement les oeuvres de Gabrielle Chanel en omettant l'importance
d'autres noms de la Haute Couture, tout aussi révolutionnaires.
L'ouvrage de Caroline Rennolds Milbank, Couture : The Great Fashion
Designers, paru en 198532, redonne ses lettres de noblesse
à la maison Lanvin avec notamment une citation : « Of all the
houses in Paris, Lanvin is the oldest and the one that has displayed the most
continuity »33. L'ouvrage établit aussi des
rapprochements entre les créations de Jeanne Lanvin et les arts
plastiques : « Lanvin's sense of color and pattern had its roots in an
active appreciation of the visual arts [É] Throughout her collections,
embroideries appear that are reminiscent of Aztec, Renaissance,
eighteenth-century, Impressionnist or Cubist art »34.
31 MERCERON, Dean L., Op. Cit., p. 366.
32 RENNOLDS MILBANK, Caroline, Couture : The Great
Fashion Designers, Paris, Robert Laffont, 1985.
33 Ibid., p. 48. Traduction de l'auteur :
« De toutes les maisons parisiennes, Lanvin est la plus ancienne et celle
qui a affiché le plus de continuité ».
34 Ibid., p. 53. Traduction de l'auteur :
« Le sens Lanvin de la couleur et du motif avait ses racines dans une
appréciation active des arts visuels [É] Tout au long de ses
collections, des broderies apparaissent avec des réminiscences de l'art
aztèque, de la Renaissance, du XVIIIème siècle,
de l'art impressionniste ou du cubisme.
12
À partir de la fin des années 1980 et au cours
des années 1990, les ouvrages sur la thématique de la Haute
Couture se développent, et sont principalement anglophones. Tout
d'abord, on peut citer le Dictionnaire de la mode écrit par
Georgina O'Hara Callan35 qui définit le travail de la
couturière ainsi : « Le savoir-faire de Jeanne Lanvin et sa science
de la broderie permettent de reconnaître immédiatement ses
créations »36. Il existe aussi Le Livre de la Haute
Couture par Mary Vaudoyer37 rappelant la place de Jeanne Lanvin
dans la première partie du XXème siècle, «
À la fin de la Première Guerre mondiale, Jeanne Lanvin est
déjà un couturier très réputé
»38. À cette période, une nouvelle ère
dans la mode se profile avec la création de maisons de Haute Couture
internationales comme Versace ou Dolce & Gabbana. La Haute Couture prend
une nouvelle dimension internationale et commerciale. Dans cette mouvance, la
publication d'ouvrages sur le sujet se développe. Ces derniers
souhaitent retracer l'histoire de la mode du début du
XXème siècle jusqu'aux années 1990. Certains
spécialistes comme Florence Müller s'y attèlent, avec par
exemple, son ouvrage Histoire de la mode au XXème
siècle paru en 198639, qui redonne à Jeanne
Lanvin sa place de couturière primordiale au XXème
siècle :
« [É] Elle conquit dès les premières
années du XXème siècle une des plus
élégantes et des plus fidèles clientèles de Paris.
[É] Elle se fit, dès le début, une
spécialité des entrelacs de passementerie, puis des broderies
pour lesquelles elle forma ses propres ouvrières ; sa maison fut ainsi
l'une des rares à posséder ses ateliers de broderie personnels.
[É] La couturière sut ainsi imposer son propre style, quelques
que fussent les modes et la longueur qu'elles enjoignaient d'adopter. C'est
ainsi qu'elle se spécialisa dans la réalisation de robes que
caractérisaient leur taille basse et leur ample jupe, qui ne
s'arrêtaient qu'à la cheville. [É] »40.
Ces publications des années 1990 démontrent un
regain d'intérêt pour des périodes clés de la mode,
par exemple l'exposition au Palais Galliera en 1987 sur les années
193041. Généralement, les spécialistes publient
des livres s'intéressant majoritairement aux années 1920 et 1930
comme ceux de Madeleine Ginsburg42 qui définit Jeanne Lanvin
en ces termes : « Lanvin s'intéressait à l'art contemporain
et à toutes les tendances de la mode, mais elle était surtout
aimée par sa simplicité pleine de grâce et son romantisme
»43. L'ouvrage de
35 O'HARA CALLAN, Georgina, The Encyclopaedia of
Fashion, Londres, Thames & Hudson, 1986.
36 Ibid., p. 158.
37 VAUDOYER, Mary, Le livre de la Haute
Couture, Neuilly-sur-Seine, V & O Éditions, 1990.
38 Ibid., p. 242.
39 DESLANDRES, Yvonne ; MLLER, Florence,
Histoire de la mode au XXème siècle, Paris,
Somogy, 1986.
40 Ibid., p. 96.
41 GARNIER, Guillaume, Paris Couture-
Années 30, Cat. Expo, (Palais Galliera. Musée de la Mode et
de la Ville de Paris, 7 mai 1987 - 30 septembre 1987, Paris), Paris,
Éditions des musées de la ville de Paris, 1987.
42 GINSBURG, Madeleine, Les années folles
de la mode : 1920/1932, Paris, Édition française : Celiv,
1990.
43 Ibid., p. 64.
13
Jean-Luc Dufresne44, au sujet des femmes
créatrices dans les années 1920, décrivant Jeanne Lanvin
comme un « exemple de réussite spectaculaire »45.
Dans ces ouvrages, le nom de Jeanne Lanvin se fait plus fréquent. Les
auteurs mentionnent ses différents départements (enfants, femme,
homme, sport). Ainsi, l'idée d'un style Lanvin commence à
être évoquée, reconnaissant des caractéristiques qui
lui sont propres. Jusqu'à aujourd'hui, de nombreux ouvrages
généraux citent donc de plus en plus Jeanne Lanvin comme,
étant une créatrice de référence au début du
XXème siècle en France, au même titre que
Gabrielle Chanel, Elsa Schiaparelli ou Madame Grès (1903-1993). Il
s'agit d'ouvrages tels que La Mode du Siècle de François
Baudot46 qui se réfère ainsi au talent de la
couturière : « Outre un métier qu'elle a poussé au
plus haut degré de perfection [É] »47 ou
réussit à définir des caractéristiques qui lui sont
propres :
« [É] Madame Lanvin a su créer un style
original, dénué de révolutions fracassantes. Il
épouse la sensibilité du temps. Développe un raffinement
exceptionnel d'entrelacs en passementerie, de broderies virtuoses, de perlages
aux harmonies florales légères et fraîches. Lanvin s'en est
fait une spécialité »48.
Un autre ouvrage, Le Dictionnaire Universel des
créatrices est écrit en 201349 et définit
la maison Lanvin ainsi : « Elle réussit rapidement à asseoir
la renommée de sa maison, qui devient l'une des plus
réputées de Paris avec la multiplication des lignes : sport,
fourrure, entres autres »50 et rappelant ses créations
modernes : « [É], mais elle se passionne aussi pour la
modernité, créant des robes à la coupe et au décor
audacieux »51.
Au début des années 1980 est découvert le
« trésor Lanvin », une collection de cinq cents modèles
non archivés. La maison Lanvin décide suite à cette
découverte, de créer un service patrimoine, ayant pour objectif
de s'occuper de toutes les créations antérieures de la maison
Lanvin, dont celles de la fondatrice Jeanne Lanvin. Cette découverte
tardive d'autant de modèles explique également la reconnaissance
tout aussi tardive des créations de Jeanne Lanvin après sa mort,
même dans sa maison de Haute Couture.
44 DUFRESNE, Jean-Luc ; MESSAC, Olivier (dir.),
Femmes créatrices années vingt, Paris, Éditions
Arts & Culture, 1988.
45 Ibid., p. 48.
46 BAUDOT, François, Mode du
siècle, Paris, Éditions Assouline, 2006.
47 Ibid., p. 68.
48 Ibid., p. 66.
49 CALLE-GRUBER, Mireille ; DIDIER, Béatrice
; FOUQUE, Antoinette, Le Dictionnaire universel des Créatrices,
Paris, Éditions des femmes, 2013.
50 Ibid., p. 2463.
51 Ibid.
14
La légitimation de Jeanne Lanvin est aussi à
rattacher au musée des Arts décoratifs de Paris, qui
décide en 1985 de réinstaller dans ses salles une restitution
d'une partie de l'appartement de Jeanne Lanvin, dont la chambre et le boudoir,
décorés par Armand-Albert Rateau (18821938). Cette installation
met en lumière la collaboration de la couturière avec le
décorateur. Les années 1990 voient la publication des deux
premières monographies sur la maison Lanvin. La première
monographie est celle d'Élisabeth Barillé en 1997 qui publie dans
la collection Mémoire de la mode un ouvrage portant sur la maison
Lanvin52. Dans un premier temps, le livre aborde de manière
romancée les archives de la maison Lanvin, et ensuite la vie personnelle
de Jeanne Lanvin. Dans le reste des paragraphes, Élisabeth
Barillé traite de la fondation de la maison Lanvin, mais n'aborde que
brièvement le département « décoration ». L'un
des derniers paragraphes évoque le bureau de Jeanne Lanvin comme un lieu
d'enchantement. L'auteur fait pour la première fois un lien entre le
« bleu Lanvin et l'artiste italien Fra Angelico. Elle établit une
chronologie à la fin de son ouvrage, mais ne présente aucune
bibliographie. Bien évidemment, l'ouvrage traite de Jeanne Lanvin, mais
l'analyse n'est pas plus approfondie que dans les ouvrages
généraux, et elle est surtout très romancée. De
plus, le livre est assez concis et rassemble essentiellement des images.
En 1998 apparaît la seconde monographie sur Jeanne
Lanvin. Elle est écrite conjointement par des journalistes
spécialisés dans la mode : Janine Alaux, François Baudot,
Sylvie de Chirée et Patrick Mauriès53. La
particularité de cet ouvrage est qu'une partie est écrite en
français et l'autre en italien. Chaque chapitre est rédigé
dans les deux langues. Il donne une vision générale de l'oeuvre
de Jeanne Lanvin. Dans une première partie, le livre s'intéresse
à la vie personnelle de la couturière. Puis, un chapitre
divisé en trois parties est consacré à ses
créations de modes féminines, les créations de chapeaux et
ses créations de modes masculines. Ensuite, le livre se termine sur deux
chapitres. Le premier traitant des collaborations de la couturière avec
le théâtre et le deuxième traitant du parfum
Arpège. C'est la première monographie sur Jeanne Lanvin
qui offre des rapprochements entre les modèles de la couturière
et les arts plastiques, notamment avec des peintres italiens comme Raphaël
et Botticelli ou les mosaïques byzantines. L'ouvrage est tiré
à peu d'exemplaires et offre de riches photographies, mais il ne
présente aucune note de bas de page ou encore de bibliographie.
52 BARILLÉ, Élisabeth,
Mémoires de la mode : Lanvin, Paris, Éditions Assouline,
1997.
53 ALAUX, Janine (dir.) ; BAUDOT, François ;
CHIRÉE, Sylvie de ; MAURIÈS, Patrick, Jeanne Lanvin,
Milan, Franco Maria Ricci, 1998.
15
La maison Lanvin est reprise en 2001 par le directeur
artistique Alber Elbaz (né en 1961), qui redonne un souffle nouveau et
une couverture médiatique à l'entreprise, dont le temps avait
émoussé les succès et la reconnaissance.
Jérôme Picon publie en 2002, une nouvelle
monographie sur la couturière54. L'ouvrage est le premier
à retracer entièrement la vie de Jeanne Lanvin. Dans cet ouvrage
de quatre cents pages, l'auteur fait découvrir tous les aspects de la
vie de Jeanne Lanvin de manière chronologique. Tout d'abord, il traite
tous les événements de sa vie personnelle dont son enfance, ses
mariages, la naissance de sa fille et leur relation ou encore les achats de ses
maisons. Ensuite, l'auteur démontre l'importance de la maison Lanvin et
de la couturière dans la mode du XXème siècle.
Il explique la place importante de Jeanne Lanvin dans les expositions
universelles ou encore la création de départements, alors
inexistants au XXème siècle comme le
département « Homme » dans la maison Lanvin. L'aspect de la
décoration dans ses intérieurs et ses collaborations avec
Armand-Albert Rateau sont traités. L'ouvrage est particulièrement
référencé en ce qui concerne les modèles
créés par Jeanne Lanvin, et l'auteur propose une courte
description ainsi que le nom de chaque modèle quand cela est possible.
À la fin de l'ouvrage se trouve même un index des modèles
cités dans le livre avec leurs dates, leurs noms et leurs collections.
Cependant, l'ouvrage ne propose que peu de représentations visuelles
illustrant les propos, laissant parfois le spectateur imaginer les
modèles grâce aux descriptions. Dans le chapitre « Aux
sources d'une inspiration », l'auteur évoque les livres, les
étoffes collectionnées et le processus créatif de la
couturière. Jérôme Picon est le seul à fournir
autant d'informations sur la bibliothèque de Jeanne Lanvin, avec la
liste de la plupart de ses ouvrages. Dans un autre chapitre, il évoque
les tableaux de Jeanne Lanvin. Cependant, l'auteur offre très peu de
parallèles entre les modèles de Jeanne Lanvin et les arts
plastiques, analysant seulement un léger rapprochement entre le «
bleu Lanvin » et le peintre Fra Angelico. En définitive,
Jérôme Picon rédige un ouvrage complet, dont l'exactitude
des dates et des événements a grandement servi à la
rédaction de cette étude.
L'historienne de l'art Hélène
Guéné écrit en 2006 un livre sur la collaboration entre le
décorateur Armand-Albert Rateau et Jeanne Lanvin, offrant ainsi une
étude complète sur les rapports de la couturière à
la décoration55. L'ouvrage propose une analyse des
collaborations de Jeanne Lanvin avec le théâtre, et illustre son
ouvrage de rares photographies comme celles des demeures de la
couturière.
54 PICON, Jérôme, Jeanne Lanvin,
Paris, Flammarion, 2002.
55 GUÉNÉ, Hélène,
Décoration et haute couture : Armand Albert Rateau pour Jeanne
Lanvin, Paris, Éditions Les Arts Décoratifs, 2006.
16
Une nouvelle monographie sans précédent est
publiée sur Jeanne Lanvin en 200856. Cet ouvrage écrit
par Dean L. Merceron est réalisé en collaboration avec la maison
Lanvin. Ainsi, c'est l'actuel directeur artistique Alber Elbaz qui en signe la
préface. L'historien de la mode Harold Koda réalise une
sous-partie sur la place de Jeanne Lanvin dans l'histoire de la Haute Couture
au début du XXème siècle. L'ouvrage est
richement illustré avec de nombreuses représentations de
modèles encore inconnus du public, ce qui est rendu possible ici
grâce à la collaboration avec la maison Lanvin. De plus, chaque
modèle de l'ouvrage est accompagné d'une légende proposant
une description et une datation du modèle, malheureusement parfois le
nom des modèles manque dans l'ouvrage, même lorsqu'il s'agit de
pièces au nom connu. Le livre traite les aspects les plus importants de
la carrière de Jeanne Lanvin : ses créations de chapeaux, sa
ligne pour enfants, la robe de style, son lien avec sa fille ou encore
l'importance des détails dans son oeuvre. L'ouvrage de Merceron est le
premier à aborder de manière plus précise les inspirations
de Jeanne Lanvin et surtout leurs impacts sur ses modèles. Tout d'abord,
il insiste sur l'influence des différents voyages effectués par
Jeanne Lanvin sur l'ensemble de son oeuvre, et se retrouve autour du travail
sur les textiles. Il aborde ensuite les inspirations familiales, notamment
celles de sa fille, avant de s'intéresser à l'influence des
vêtements liturgiques. La plupart du temps, il démontre son propos
en juxtaposant deux représentations : la source d'inspiration et le
modèle concerné. La ressemblance est généralement
frappante aux yeux du spectateur. Sans précédent, l'ouvrage est
le premier à offrir des analyses sur la relation entre les
modèles de Jeanne Lanvin et les arts plastiques. Dean L. Merceron
propose plusieurs rapprochements, notamment celui avec Fra Angelico qu'il ne
réduit pas au simple « bleu Lanvin », puisqu'il pousse la
comparaison jusqu'aux motifs des robes du peintre et de la couturière.
L'auteur rédige un chapitre entier sur les relations entre l'Art
déco et les modèles de Jeanne Lanvin. Il met en valeur
également des liens entre les tableaux de Vélasquez et les robes
de la couturière. Au début de l'ouvrage, l'auteur offre de
manière rapide des rapprochements entre les oeuvres
collectionnées par la créatrice et ses modèles, sans pour
autant proposer de comparaisons directes. Grâce à ses
rapprochements inédits entre les arts plastiques et les modèles
de Jeanne Lanvin, l'ouvrage de Merceron est le plus complet à ce jour,
même si l'analyse pourrait encore être approfondie. L'auteur
établit aussi une liste complète des directeurs artistiques
depuis la mort de Jeanne Lanvin. Bien que les photographies d'une grande
qualité aient été utiles pour cette étude, le
manque de précision dans le nom des modèles est regrettable.
L'ouvrage présente un dernier
56 MERCERON, Dean L., Lanvin, Paris,
Éditions de la Martinière, 2007.
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chapitre sur les oeuvres d'Alber Elbaz, actuel directeur
artistique des collections féminines, mais aucun chapitre sur les
oeuvres de ses prédécesseurs.
En 2008, la famille Polignac, descendante de Jeanne Lanvin,
décide de mettre en vente une partie de sa collection d'oeuvres d'art.
Ces ventes sont rapidement médiatisées, et les
spécialistes et le public découvrent une collection d'oeuvres
d'art riche en peintures de grands maîtres comme Edgar Degas, Auguste
Renoir et Pablo Picasso. Ces ventes aux enchères font l'objet d'une
couverture médiatique relativement importante, avec, notamment, des
articles dans le Figaro et le Figaro Magazine. Ces
découvertes permettent au public de redécouvrir le nom de Jeanne
Lanvin, comme celui d'une couturière de renom et d'une femme
cultivée. Ces catalogues de vente sont précieux, ils permettent
de connaître une partie des oeuvres d'art acquises par Jeanne Lanvin au
cours de sa vie, puisqu'aucune liste complète n'est établie
à ce jour. Malheureusement, ces catalogues de ventes précisent
rarement si ce sont des oeuvres acquises par Jeanne Lanvin ou par la famille
Polignac.
L'année 2014 marque les cent vingt-cinq ans de la
fondation de la maison Lanvin. Cet anniversaire est marqué par la
création d'un site internet de la maison Lanvin, proposant une
chronologie de la vie de Jeanne Lanvin et la description des principales
caractéristiques de son travail avec des croquis de modèles. Le
site propose aussi deux onglets sur les actuels directeurs artistiques, Alber
Elbaz pour la ligne femme et Lucas Ossendrijver (né en 1970) pour la
ligne homme. Cependant, le site ne propose aucune information à propos
des créateurs ayant travaillé entre la mort de Jeanne Lanvin et
les actuels directeurs artistiques, soit une dizaine de créateurs sur
cinquante ans.
Jeanne Lanvin obtient sa consécration avec la
première rétrospective de son travail en 2015. L'exposition est
organisée au Palais Galliera, au musée de la mode et de la Ville
de Paris. Elle se déroule du 8 mars 2015 au 23 août 2015. Cette
exposition est organisée en collaboration avec la maison Lanvin qui
détient la majorité des modèles de la couturière.
Grâce à cette collaboration, c'est le directeur artistique Alber
Elbaz qui aide à la scénographie de l'exposition, et fait le
choix conjointement au Palais Galliera de ne pas organiser l'exposition
chronologiquement, mais par thématique. Ainsi, l'exposition est
divisée en trois grandes parties : l'histoire du logo, le « bleu
Lanvin » et la gamme chromatique, le savoir-faire Lanvin, le noir et le
blanc, la robe de style, les chapeaux et le département enfants, les
broderies, l'exposition de 1925, les inspirations exotiques, l'influence
religieuse et médiévale, le géométrisme, les robes
de mariées et les robes du soir. L'objectif pour Alber Elbaz et Olivier
Saillard, directeur du Palais Galliera, est de marquer le spectateur par la
splendeur des robes de Jeanne Lanvin et non pas de présenter son oeuvre
de manière chronologique.
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L'exposition connaît une couverture médiatique
importante, son vernissage s'étant fait durant la Semaine de la Mode.
Des grands noms de la mode s'y sont rendus comme Anna Wintour, actuelle
rédactrice en chef du Vogue édition américaine.
Le lancement de l'exposition pendant cette période a permis de mettre en
lumière le défilé d'Alber Elbaz et d'y chercher des
références aux modèles de Jeanne Lanvin. Par
conséquent, bien qu'il s'agisse de la première
rétrospective de Jeanne Lanvin, la présence de l'actuelle maison
Lanvin par la scénographie d'Alber Elbaz est à relever. Le nom de
Jeanne Lanvin n'est pas encore totalement détaché de la direction
actuelle de la maison Lanvin. Le catalogue de l'exposition est principalement
rédigé par les deux commissaires d'exposition : Sophie Grossiord
et Christian Gros57. La participation de spécialistes de
Jeanne Lanvin comme Hélène Guéné et Dean Merceron
est également à relever. Contrairement à l'exposition, le
catalogue est rédigé de manière chronologique, en se
divisant par décennies : les années 1910, 1920 et 1930. Chaque
décennie-chapitres propose des repères chronologiques sur la vie
de Jeanne Lanvin et son entreprise. Chaque période est
présentée selon ses caractéristiques reconnaissables et
appuyées de modèles. De plus, chaque partie propose des focus sur
différents points, il s'agit parfois d'une robe, ou de sa collection
d'oeuvres d'art, ou bien de ses collaborations avec le théâtre ou
de son rôle dans les expositions internationales. La fin du catalogue
d'exposition propose une liste de tous les modèles exposés avec
leur croquis, le nom du modèle, sa date et une description
précise du vêtement. Cette liste est divisée entre les
modèles du Palais Galliera qui en représente la majorité,
et celle des modèles exposés du patrimoine Lanvin. Le catalogue
d'exposition est le premier ouvrage sur Jeanne Lanvin à fournir de
telles descriptions et analyses de ces créations, ainsi que des
représentations des modèles dépouillées de
mannequins. Pour la rédaction de cette étude, ces descriptions et
photographies ont été de bonnes bases de travail, même si
l'exposition n'aborde pas les rapports directs entre l'inspiration des arts
plastiques et les modèles de Jeanne Lanvin. L'exposition conduit
à un certain engouement pour le sujet et inévitablement la
publication d'ouvrages autour de la couturière comme le roman racontant
la vie de Jeanne Lanvin d'Isabelle Mestre, nommé Jeanne Lanvin :
Arpèges, parus comme l'exposition en mars 201558.
L'historiographie sur Jeanne Lanvin et sa maison de couture
nous permet d'établir quelques rapprochements entre les arts plastiques
et les créations de la couturière. Malheureusement,
57 GROSSIORD, Sophie (dir.), Jeanne
Lanvin, Cat. Expo, (Musée de la Mode et du Costume Palais Galliera,
8 mars 2015 Ð 23 août 2015, Paris), Paris, Musée de la Mode et
du Costume Palais Galliera, 2015.
58 MESTRE, Isabelle, Jeanne Lanvin :
Arpèges, Paris, Le Passage Eds, 2015.
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ces études se limitent souvent à la collection
privée de Jeanne Lanvin ainsi qu'à une comparaison entre le
« bleu Lanvin » et l'art de Fra Angelico. Dans les différents
ouvrages cités, de nombreuses pistes d'inspirations picturales
utilisées par Jeanne Lanvin pour ses modèles sont
mentionnées, mais leur analyse n'est jamais poussée. La mode
à l'époque du XXème siècle offre de
multiples rapprochements avec les arts plastiques. On peut donc naturellement
s'interroger sur de tels liens entre les créations de Jeanne Lanvin et
les arts plastiques. Afin de mieux cerner les limites de cette vaste question,
il nous faut donc nous interroger plus précisément à la
nature des liens, et donc des possibles influences, qui rapprochent les arts
plastiques de l'art de Jeanne Lanvin :
Tout d'abord, quelle place tenaient les arts dans la vie et la
carrière de la couturière ? Jeanne Lanvin s'est-elle
inspirée d'oeuvres picturales ou de motifs décoratifs comme
certains de ses confrères ? Il y a-t-il eu des influences artistiques
plus conséquentes que d'autres dans ses oeuvres ? La couturière
se distingue-t-elle des autres couturiers par ses inspirations ou
s'inscrit-elle dans une lignée de l'époque ?
Le premier axe d'étude se concentrera sur la place des
arts plastiques dans la vie personnelle et professionnelle de la
couturière : son processus créatif, sa collection de livres
(d'art ?) et son implantation dans les différentes sphères
artistiques seront abordés.
Puis, l'étude présentera de manière
détaillée les grandes inspirations plastiques
réinterprétées par Jeanne Lanvin dans ses modèles.
Il sera ainsi question de l'influence de sa propre collection d'art
contemporain dans ses créations, mais aussi de l'impact plus large des
arts plastiques en général dans ses couleurs et ses broderies,
éléments particulièrement centraux du travail de la
couturière. Les maîtres du quattrocento tiendront une
place toute particulière dans cette analyse, avec la
réinterprétation de leurs vêtements féminins.
Enfin, la relation très étroite entre les
créations de Jeanne Lanvin et les oeuvres de Fra Angelico fera l'objet
d'une étude à part entière. Cette dernière partie
de l'étude tentera de s'appuyer sur l'historiographie des analogies
entre les deux artistes tout en essayant de les réactualiser à
travers de nouvelles propositions.
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