A.1.4. De faire soin à prendre soin
L
e mot « soin » provient du latin « soniare
» signifiant « s'occuper de ». En définissant
l'ensemble des soins comme « l'ensemble des moyens mis en oeuvre pour
s'efforcer de restituer la santé à un malade » (Bagros,
2004), on évoque aussi bien le « prendre soin » - to care - du
« faire soin » - to cure, en anglais. Le rôle du soignant se
transmettra au travers de ses deux dimensions : l'une dans le domaine de
l'action - le cure - qui vise à traiter une pathologie en pratiquant des
soins techniques ; l'autre dans le domaine de la perception - le care -
où il s'agit de faire attention au patient, de se soucier de l'individu.
La démarche soignante vise donc à associer l'aspect scientifique
et technique du soin aux qualités humaines du professionnel de
santé.
Orlando (1961) fut à l'origine du terme de «
démarche de soins », en définissant l'objectif des soins
infirmiers comme « l'aide qu'un patient requiert pour que ses besoins
soient satisfaits ». Les besoins en santé des patients
n'étant pas toujours d'origine biologique et physiologique, le soignant
engage alors « une démarche qui détermine le besoin
immédiat du patient et l'aide à répondre à ce
besoin directement ou indirectement ». Déterminer les besoins
du patient contraint le soignant à porter de l'intérêt
à l'autre, non pas seulement pour rétablir l'état de
santé physique de l'individu, mais aussi
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ETIENNE CORDIER - Promotion
2013/2016
pour maintenir un bien-être constant malgré ce
qui pourrait y faire obstacle au moment présent. Le soin est donc une
attention adressée envers autrui en vue de restaurer et de promouvoir sa
santé.
Nadot (2005) assimile le « prendre soin » à
une activité tridimensionnelle : « il faut en effet prendre
soin de l'humain à tous les âges de la vie ; prendre soin de la
vie du groupe, car l'action soignante s'opère au sein d'une
communauté ; et prendre soin de la vie du domaine (c'est-à-dire
de l'environnement du soin) ». En plus de détenir un aspect
biologique et psychologique, le soin présente un aspect social dans la
relation que le soignant a avec le patient. Pour Hesbeen (2008), prendre soin
c'est aussi « être attentif à la famille, à
l'entourage de la personne malade, pour la simple raison que le comportement de
la famille ou de l'entourage influe sur le cheminement de la personne malade
».
La situation de soin correspond donc à une situation
professionnelle où le praticien met en oeuvre un raisonnement clinique
permettant de placer la singularité de l'individu d'un point de vue
physique, mental et social, au coeur de la démarche de soins. Cette
analyse comprend à la fois la capacité du soignant à
adopter une juste relation de soin, mais aussi la capacité du
soigné à s'interroger sur ses propres ressources pour devenir
acteur de son propre parcours de soin.
Ainsi, il paraît important d'analyser l'ensemble des
dimensions du patient étant donné « que la connaissance
des différentes caractéristiques de la vie est indispensable pour
comprendre les réactions humaines » (Rogers, 1970). Le soin
dans sa globalité implique donc à la fois une intervention
active, technique et curatrice sur le malade, mais également un apport
affectif, humaniste et empathique de la part du soignant lors d'une relation
avec le patient. D'ailleurs, ne parle-t-on pas communément de «
personne soignée » et non de « pathologie à soigner
» ? Qu'il serait malvenu et antipathique de nommer un patient par la
maladie dont celui-ci est atteint ! Nous abordons alors un sujet de soin
à part entière, en totale opposition à la notion d'objet
de soin.
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