A.5. L'HUMOUR PEUT AUSSI ENGENDRER DES EFFETS
NÉGATIFS
Des rires aux larmes. Au cours de cette partie
théorique, nous avons évoqué les limites et contraintes
à l'humour dans les soins. Un humour trop systématique est
susceptible d'entraver les valeurs morales du patient et de compromettre la
relation entre soignant et soigné. Cet outil complexe est à
manier avec précaution et subtilité, et à adapter en
fonction du patient et de la situation (Patenaude, 2006).
En abordant l'humour comme technique de distraction à
court terme, nous posons le problème de l'humour en tant que
mécanisme d'évitement à long terme. Il survient alors un
déni de la réalité qui consiste à
déprécier l'importance d'une situation pourtant capitale
(Panichelli, 2007).
Suite à l'analyse de nos données qualitatives,
nous avons remarqué que seul un faible nombre de soignants a pu
être confronté à un effet négatif de l'humour dans
leur pratique. Ce dernier résulte le plus souvent de la
personnalité du patient qui réceptionne mal le message
humoristique soit parce que le sujet n'est pas en « humeur de jeu »
(Eastman, 1958), soit parce que l'humour est source d'incompréhension.
Le risque principal étant de rire à un moment inapproprié
et face à des propos qui font ressurgir une situation de vie
émotive, voire douloureuse, au soigné.
B. MANIPULATEURS, DIPLÔMÉS ET FUTURS DIPLÔMÉS,
SONT FAVORABLES À
L'APPRENTISSAGE DE L'HUMOUR DANS LEUR PRATIQUE SOIGNANTE
|
Notre seconde hypothèse de recherche est partiellement
validée. Certes, l'intérêt de former professionnels et
étudiants à l'humour semble indiscutable, du fait des nombreux
bénéfices apportés à la fois dans la vie
personnelle et dans la pratique soignante.
Si la perspective d'une formation séduit, pour autant
tous les professionnels ne se déclarent pas favorables à sa mise
en place. Entre inné et acquis, les positions demeurent divisées.
Abordons désormais point par point les réponses aux questions
énoncées lors de notre seconde partie.
B.1. L'ASPECT CLIVANT DE L'HUMOUR : FACULTÉ
INNÉE OU ACQUISE DE L'HOMME
Quelle fameuse controverse que l'opposition entre inné
et acquis ! Cependant, ces deux termes sont-ils nécessairement à
confronter ? Lors de la partie théorique, nous avons mis en
évidence le soignant comme facteur d'expression, et le soigné
comme facteur d'adhésion, à l'humour. En d'autres termes, la
personnalité de l'individu influe sur la facilité ou non à
employer l'humour dans les soins (Freud, 1927).
74
ETIENNE CORDIER - Promotion 2013/2016
Si la singularité de chaque personne nous fait
concevoir l'humour en tant que prédisposition naturelle, pour autant,
l'expérience acquise au fil des années dans notre métier
affûte notre démarche soignante et nous aide à identifier
quels contextes paraissent favorables à l'usage de l'humour.
Notre étude exploratoire illustre des avis plutôt
partagés quant à cette question. Certains soignants se montrent
catégoriques : l'humour ne s'apprend pas, on naît avec la
faculté de rire et de faire rire. D'autres se montrent plus conciliants
: nous apprenons à parfaire notre sens de l'humour au travers des
épreuves de la vie et de notre pratique, à force de côtoyer
des situations diverses et variées.
|