A.2.2. Un mécanisme de défense
D
ifférents modes de défense sont
répertoriés dans la quatrième édition du Manuel
diagnostique et statistique des troubles mentaux, connu sous le titre de DSM IV
(1996). L'humour y est défini ainsi : « mécanisme par
lequel le sujet répond aux conflits émotionnels ou aux facteurs
de stress internes ou externes en faisant ressortir les aspects amusants ou
ironiques du conflit ou des facteurs de stress ».
Freud (1927) définit l'attitude humoristique comme
« l'attitude dans laquelle une personne refuse la souffrance en
accordant une importance à l'invincibilité du moi dans la
continuité de la vie réelle, en sustentant de façon
victorieuse le principe du plaisir ». L'humour est décrit
comme un moyen de contourner ce qui est susceptible de conduire à une
souffrance de notre être. En subtilisant une émotion incompatible
à notre développement psychoaffectif, en une émotion
teintée de joie et de gaieté, nous réalisons ainsi
« un détournement actif des pensées, objets ou
situations qui sont chargés en conflit » (Ionescu, 1997).
L'humour apparaît comme un moyen de détourner le
réel pour le rendre davantage supportable aux yeux du professionnel de
santé. En tant que mécanisme d'évitement, l'humour combat
les tensions intérieures de manière à résister
à l'épuisement professionnel. Confronté à des
situations de stress permanent, le soignant semble être la cible
privilégié du burn-out. Rire permet de subtiliser en l'espace
d'un instant nos problèmes personnels ou professionnels, en une
gaieté démesurée. Cependant, il ne s'agit pas d'ignorer
nos soucis du quotidien, il s'agit de percevoir nos problèmes d'une
autre manière, de les voir sous un autre angle. L'autodérision
prend ici tout son sens. Se moquer de soi-même, c'est accepter ses
défauts. Tout en les prenant en considération, le soignant adopte
une attitude positiviste, centrée sur l'amélioration, de
manière à ne pas se dévaloriser.
L'humour est aussi décrit comme une stratégie de
« coping ». Le modèle transactionnel du stress,
développé par Lazarus et Folkman (1984), définit le coping
comme « l'ensemble des efforts cognitifs et comportementaux,
constamment changeants, [déployés] pour gérer des
exigences spécifiques internes et/ou externes qui sont
évaluées [par la personne] comme consommant ou excédant
ses ressources ». Le rôle du coping est donc de gérer
les réponses émotionnelles induites par une situation faisant
entrave au bon développement de la personne et à son
épanouissement psychosocial.
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ETIENNE CORDIER - Promotion 2013/2016
Côté soignant, l'humour serait un
mécanisme de défense face au stress du travail. Côté
patient, ce serait un moyen de diminuer leur anxiété face
à la maladie ou à l'examen, en tenant à l'écart les
émotions négatives et en privilégiant les émotions
positives. Ainsi, rire et humour permettent d'accéder à un
degré plus haut d'acceptation de soi, ou de dédramatiser une
situation que nous percevons comme inacceptable au Moi. Quel meilleur moyen de
nous libérer de nos tensions internes que par l'expression d'une bonne
humeur partagée ?
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