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Rôle du ministère tchadien chargé des droits de l'homme dans l'instauration d'une culture de droit et de démocratie.

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par SINGABE JEAN-CLAUDE BERAMGOTO
CIFADDEG - Yaoundé - DIPEC (Master Professionnel) 2010
  

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2nde Partie :

APPROCHES POSSIBLES D'UNE CULTURE DES DROITS ET DE
DEMOCRATIE

La question de l'instauration d'une culture des droits de l'homme au Tchad doit être perçue dans toute sa dimension, et peut nécessiter un recul pour prendre en compte les multiples conflits armés que le pays a connu depuis son accession à l'indépendance jusqu'à l'ère de sa démocratie.

En effet, pour que les droits de l'homme puissent éclore et s'enraciner durablement dans la société, il faut la réunion de deux pré-conditions : un environnement politique favorable et un environnement socio-économique juste. En d'autres termes, ces droits ne peuvent véritablement être garantis que dans un contexte de tolérance, d'acceptation de l'autre, de soumission de tous à la loi qui est générale et impersonnelle, et dans un cadre de juste répartition des richesses nationales.

Or, l'analyse de la situation politique et socio-économique du pays montre clairement que ces deux pré-conditions ne sont pas réunies. Car, depuis son indépendance, le Tchad a connu successivement des régimes de monopartisme et de dictature pendant au moins trois décennies. La succession de la démocratie qui fait son chemin depuis plus de vingt ans trébuche à tout moment. On en voudra pour preuves, le manque d'alternance politique institué par la modification de la constitution tant au niveau de l'exécutif (à travers le troisième mandat d'avril 2006) qu'au niveau du législatif (à travers la prorogation anticonstitutionnelle du mandat des députés). Aussi malgré la rente pétrolière, l'environnement socio-économique semble davantage se détériorer par les expropriations des populations, le coût de vie de plus en plus cher, les détournements massifs des deniers publics et l'enrichissement illicite du seul clan au pouvoir, créant ainsi des inégalités sociales démesurées.

Rôle du ministère tchadien chargé des droits de l'homme dans la promotion et l'instauration d'une culture de droits et de démocratie

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Mais au delà de toute considération politique partisane, les approches d'une mise en oeuvre dynamique des droits de l'homme au Tchad peuvent s'opérer à travers des efforts réels à consentir dans l'exécution des actions concrètes susceptible d'instaurer une culture des droits de l'homme (Chapitre I). Ces actions supposent une reformulation ou redéfinition des priorités du ministère des droits de l'homme ainsi qu'une extension de ses actions à plusieurs niveaux ; Puis à travers les facteurs d'enracinement d'une culture de droits (Chapitre II) que sont l'appropriation des droits de l'homme par les citoyens pour favoriser leur consolidation.

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CHAPITRE I - LES ACTIONS SUSCEPTIBLES D'INSTAURATION
D'UNE CULTURE DES DROITS

Le Tchad a vécu une période bien longue d'instabilité politique marquée par les conflits armés successifs. Il s'est épuisé, vidé de ses bras valides, de ses fils et filles. Il mérite une ère de tranquillité, une période sans trouble pour favoriser l'éclosion d'un développement durable et une cohésion sociale entre tous ses fils.

La bonne cohésion sociale exige de l'Etat, un rétablissement normal (retour à la normale) de cette situation qui s'est suffisamment détériorée au profit d'un sursaut permettant de transcender les abus de droit, les traumatismes issus du drame tchadien et leurs velléités pour fonder une nouvelle société plus juste et plus digne.

Ce rétablissement normal doit s'inscrire dans le cadre d'une part de la reformulation des stratégies d'actions des institutions impliquées dans la mise en oeuvre des droits de l'homme y compris leurs partenaires, mais aussi, tous les autres acteurs qui contribuent de manière indirecte à cette mise en oeuvre et d'autre part dans l'extension de ses activités à plusieurs niveaux de la société.

C'est des actions de longue haleine, dont les effets immédiats ne seront pas facilement perceptibles, mais qui au bout de quelques années, peuvent montrer leurs efficacités. Assurément, c'est un projet à long terme (10 à 15 ans), qui nécessite des études préalables, l'identification des actions concrètes et l'investissement de gros moyens financiers.

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Section 1ère : La redéfinition des priorités du ministère

La redéfinition des priorités du ministère n'est pas une action qui remet en cause la noble mission de ce ministère ni une reformulation des différents volets d'activités contenus dans sa mission.

Bien au contraire, c'est une remise en ordre dynamique de ses actions en accordant la priorité aux oeuvres de grande nécessité avant certaines autres actions, pour permettre une efficacité idéale dans l'application des droits de l'homme.

La redéfinition des priorités du ministère impose à celui-ci des rencontres de concertation, d'échanges et un cadre de réflexion centré sur les grandes priorités susceptibles d'avoir des résultats et effets immédiats.

Cette action de redéfinition passe par des actions cohérentes et respectueuses des standards de la législation internationale et le renforcement des capacités opérationnelles.

Paragraphe 1. La cohérence des actions du ministère et des lois

Pour réussir à créer une bonne cohérence dans les actions du ministère, il faudra nécessairement une saine collaboration avec le ministère de la justice, ainsi qu'une participation effective et complémentaire réciproque des deux ministères dans toutes les activités. De cette collaboration, naitra l'échelonnement des activités, suivant les priorités et la cohérence avec les exigences et standards existant. Ce qui aboutira à la révision même de plusieurs dispositifs de lois tchadiennes.

Car, parmi les réalisations énumérées à l'actif du ministère, on peut facilement constater qu'il y manque une cohérence ; ou soit les mesures ne sont pas adaptées : c'est le cas de l'interdiction de la torture alors qu'elle n'a pas été préalablement définie et incriminée dans le code pénal conformément à la Convention contre la Torture. Le ministère des droits de l'homme devra revoir cette situation avec celui de la justice pour que ce manquement soit pris en compte ;

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Parfois certaines lois sont inappropriés dans le sens qu'elles peuvent porter atteintes aux droits à la sécurité ; ou elles manquent d'efficacité : cas des violences domestiques par exemple. Mais il y a aussi des lois qui ne sont pas appliquées avec rigueur ; cas des mutilations génitales féminines.

Il existe aussi beaucoup de règles qui ne sont pas claires : application de l'état d'urgence par exemple. Ainsi que d'autres mesures manquent d'effectivité : la séparation des détenus majeurs/mineurs établi par l'article 234 du Code pénal tchadien qui n'est jamais respectée.

Aussi, certaines mesures correctives prises ne s'inscrivent pas dans la durée. C'est le cas des enfants victimes de traite ; d'autres ne sont pas étendues à l'ensemble des groupes cibles : c'est le cas de l'information sur la Convention des droits de l'enfant ;

Beaucoup d'autres mesures manquent d'intensité (prise en compte du principe de l'intérêt supérieur de l'enfant) ou sont incomplètes. C'est le cas par exemple des campagnes de sensibilisation contre la torture qui ne traitent pas du caractère interrogeable de l'interdiction de la torture, etc.

Ces exemples permettent de se rendre compte qu'il y a un besoin urgent d'avoir parmi les priorités, la confrontation des textes nationaux aux textes régionaux et internationaux ratifiés par le Tchad. Cette confrontation permettra de déceler avec exactitude les textes et lois non conforme à la législation internationale. Cette démarche favorisera la mise sur pied d'une équipe pour réviser ces textes et lois, puis créer une conformité avec la législation internationale, et au besoin, créer de nouvelles dispositions ou de nouveaux textes pour combler les manques et insuffisances des textes et lois incriminés, en accord avec les autres autorités compétentes.

Mais avant cette démarche, un diagnostic à fond de la situation des droits de l'homme s'inscrit aussi dans les priorités. Ce diagnostic sera basé sur l'étude des obstacles et solutions à l'édification d'une société de droits au Tchad. Ce qui déterminera les grands axes de mise en oeuvre d'une culture de droits au Tchad.

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Ensuite, il sera question pour le ministère d'assainir ses problèmes de collaboration avec les organisations de la société civile. Deux actions doivent être menées à ce niveau. La première action consistera à redéfinir les actions du ministère par rapport à celles des associations de droits de l'homme.

En effet, il y a des actions que le ministère peut bien faire et que les associations ne peuvent pas faire telles que les instructions à des institutions de l'Etat. De même le ministère ne peut pas se dénoncer lui-même car on ne peut être juge et partie. D'où une redéfinition claire de leurs actions réciproques. La deuxième action concerne la redéfinition des activités des associations entres elles-mêmes : qui fait quoi, quand et comment. Ceci pour éviter la dispersion dans les mêmes activités.

Une fois que les textes et lois sont harmonisés conformément aux normes internationales, et que les activités sont partagées entres les associations de défense des droits de l'homme ainsi que l'intervention et actions de l'Etat à travers le ministère des droits de l'homme. Ce dernier s'attèlera d'abord à la résolution des problèmes d'éducation civique et de la formation citoyenne, avant de chercher à mettre en oeuvre sa stratégie de lutte contre les violations des droits de l'homme et d'instauration d'une culture de droits, issue de son diagnostic ci-dessus exprimé.

Le diagnostic à fond de la situation des droits de l'homme d'où sortira la stratégie d'instauration d'une culture de droits comportera les besoins en termes de ressources humaines nécessaires qui bénéficieront d'un renforcement de capacité. Mais le renforcement de capacité ne se limite pas qu'aux ressources humaines nécessaires, mais aussi à la formation de tout le personnel.

En effet, le domaine des droits de l'homme est complexe et multiforme. Au stade actuel, le Ministère ne dispose pas de toutes les ressources humaines dont il aurait besoin et le personnel dont il dispose n'a pas toutes les qualifications requises. Il importe donc de permettre à ce personnel de renforcer progressivement ses capacités opérationnelles et ses performances, notamment à travers des formations. Les formations tiendront compte des besoins des différentes directions. Ce qui

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suppose au préalable, que chaque direction connaisse ses besoins en fonction de son cahier de charges.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld