3-4-Face à la persistance du spectre alimentaire,
notre réflexion.
Nous avons vu que dans leur vécu quotidien, les
populations rurales font face fréquemment à
des périodes de soudure. Ces périodes ne sont
pas nouvelles. Elles se posaient dans un passé
récent, mais elles étaient souvent moins longues
et elles étaient résolues par les « Vivres de
soudures » ou par les stocks familiaux. Aujourd'hui en
revanche, du fait de la péjoration
pluviométrique, les greniers sont vides dès les
mois de mars et d'avril dans la zone de savane. Le même
phénomène se pose également dans des zones jusqu'à
une période récente autosuffisantes comme la région des 18
montagnes et celle du Moyen Cavally. L'extension des zones affectées par
la soudure régulière et la récurrence des déficits
posent alors une question fondamentale pour l'agriculture ivoirienne: Les
filières vivrières en vigueur dans l'agriculture ivoirienne
sont-elles capables d'offrir la production nécessaire par année
pour atteindre l'autonomie alimentaire et réaliser la
sécurité alimentaire tant recherchée ?
En effet, en voyant l'extension temporelle et spatiale des
périodes de soudure et la multiplication des zones en
insécurité alimentaire, l'on serait tenté dans un premier
temps de répondre par la négative. Et pourtant, depuis quelques
années, on observe une remontée de la production
céréalière, car indique t'on la production vivrière
brute est estimée à plus de 11.000.000 tonnes par an qui
équivaut à environ 7% du PIB (ANADER, 2009). Les performances
ainsi notées, certes fluctuantes, conduisent à penser que la
thèse des faibles productions en céréales ne suffit pas
pour expliquer les déficits vivriers qui sont observés dans
certaines régions et l'insécurité alimentaire. La presse
nationale rapporte régulièrement les paroles de responsables des
pouvoirs publics ou des organisations paysannes qui expliquent que ce sont le
marché national et l'organisation du système alimentaire qui ne
sont pas préparés, voire aptes pour absorber les productions
vivrières réalisées. Janin (1998) donne son explication en
indiquant que la persistance de l'insécurité alimentaire
malgré une production suffisante est à rechercher dans les
modalités de répartition des denrées disponibles,
importées ou nationales, dans la politique de stockage et de prix comme
dans les modes de régulation du système alimentaire et de
répartition intra-familiale de la nourriture. Une étude
réalisée par le PAM, FAO, et le MINAGRA en 2008 atteste aussi que
la commercialisation des produits vivriers est entravée par les
tracasseries et les taxes routières, le mauvais état des pistes
rurales, le coût élève des frais de transport,
l'inorganisation des organisations professionnelles agricoles (faible pouvoir
de négociation et à la merci de nombreux pisteurs) et cela
entraîne la pourriture de près de 100 milles tonnes de vivriers
dans les campagnes. Cette situation est d'autant plus déplorable que la
vente d'une telle production sur le marché national aurait permis, de
baisser le prix des denrées alimentaires. Ce bon résultat en
production vivrière conforte l'idée soutenue par les
organisations de producteurs et les professionnels du vivrier en Côte
d'Ivoire. En effet, les raisons sont là pour que les prix baissent si
l'Etat le veut et la preuve est faite que les producteurs ont les
capacités, de faire face à la question globale de la
sécurité alimentaire.
|