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Foncier et stratégies d'accès et de contrôle dans les anciennes plantations coloniales au Cameroun. L'exemple de la compagnie ouest Cameroun.

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par Jonas Aubert Nchoundoungam
Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne - Master 2016
  

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II.LES STRATEGIES D'ACCES ET DE CONTROLE DE LA TERRE A LA C.O.C.

Pour accéder véritablement à la terre et y déployer des systèmes de productions, les paysans développent des stratégies à la fois collectives et individuelles :

? Stratégie collective dans ce sens où il s'agit d'un groupe. À ce niveau l'individu en tant que entité propre n'apparait pas encore. L'installation des paysans, migrant ne peut se faire que par une autorité puissante qu'incarne le roi des Bamoun. Aucun Nji Ngwèn ne peut installer un migrant sur ses terres sans le consentement et l'approbation du roi. De tels actes nécessitent très souvent une sorte de reconnaissance du groupe vis-à-vis du sultanat et de l'autorité traditionnelle qui leur a facilité l'accès à la terre. Ces paysans doivent en contre partie des parcelles qui leurs sont cédés, payer des tributs aux autorités traditionnelles en l'occurrence le Nji Ngwen qui se chargera de l'apporter au sultan lors de la fête du Ngouon; lesquels tributs très souvent se font en dons de produits issus des parcelles reçues.

? Parlant des stratégies individuelles d'accès à la terre à la C.O.C, l'avènement de l'idéologie capitaliste a fait de la recherche du profit, un pilier essentiel de sa stratégie d'action, favorisant ainsi le développement des comportements opportunistes des uns au détriment des autres. Plutôt que l'intérêt du groupe, l'on pense d'abord à soi-même. Ainsi, pour accéder à la terre dans les plantations de la C.O.C, les paysans usent plusieurs moyens à savoir :

? le don : la reconnaissance de l'autorité Bamoun sur le territoire donne aux étrangers des facilités à s'installer sur le territoire Bamoun, d'obtenir des terres à cultiver. Pour obtenir un service en pays Bamoun d'un autochtone ou de l'autorité traditionnelle (Nji Ngwen), et parlant, de la terre, le migrant doit faire preuve d'une grande humilité qui s'apparente à la servilité et reconnaitre le pouvoir Bamoun et son roi. Les paysans Bamilékés mieux que les autres tribus présentes à la C.O.C, l'ont bien compris, car en offrant des présents de cultures aux chefs traditionnels, ils traduisent par là leur reconnaissance des structures foncières Bamoun, ainsi l'autorité du roi sur l'ensemble de ces terres.

? La location des terres comme stratégie individuelle d'accès à la terre, est la plus répandue dans les plantations de la C.O.C. La terre est à louer mais pas encore à la vente, pour des sommes comprises entre (30000- 400000 francs CFA / ha pour une durée n'excédant pas trois ans), selon la superficie demandée. Ce mode de cession des droits sur la terre à la C.O.C obéit à une structuration assez particulière. Outre les chefs traditionnels (Nji Ngwen), les gardiens de cette plantation qui ont été mandaté par la famille Fochivé sont les personnes à la base de ces transactions dans cette plantation. Les entretiens avec les paysans nous permettent de relever qu'à la C.O.C, cette stratégie d'accès à la terre est la plus utilisée sinon la plus répandue.

Pourquoi me demander comment je fais pour avoir des terres à cultiver... ? Il est très clair, l'autre jour même l'un des gardiens de la C.O.C. m'a dit qu'il fallait que je pense à venir renouveler mon contrat de location si je veux continuer d'exploiter mes parcelles, vu que celui-ci arrive à expiration cette année.

Tout comme moi, les autres personnes qui travaillent les champs dans la C.O.C. sont des locataires, en dehors de la famille Fochivé et des personnes qui ont obtenu d'eux le fait d'exploiter des parcelles gratuitement, tout le monde payent pour travailler là-bas.

Depuis bientôt six ans, le prix des parcelles a augmenté. Je paye de nos jours pratiquement le double du prix que je payais il y a quinze ans pour une même parcelle d'environ 800 m2. Et j'ai l'impression que bientôt je n'aurai plus de terre, puisque j'aurai plus les moyens de les louer, c'est devenu trop cher....

Source : enquête de terrain, Juin 2016

Encadre 9 : entretien avec Bopda, 60 ans, paysan Bamiléké à la C.O.C

La demande des terres est devenue trop importante ici à la C.O.C. durant cette dernière décennie, car dans les environs il en manque. Nous, nous ne sommes que des gardiens. Notre rôle se limite au contrôle. On se rassure que les personnes qui travaillent dans la plantation ont bien un laisser passer (certificat de location) encore valide, sinon on vous expulse tout simplement.

C'est vrai que la terre ici à la C.O.C. on la loue à tous ceux qui en éprouve le besoin, que pouvions nous faire d'autres ? Nous n'allons pas tout simplement donner des terres aux gens gratuitement or nos patrons ont payé pour l'avoir. Il faut bien qu'on rentabilise et qu'on justifie notre travail devant nos patrons sinon, notre rôle ne sert à rien ici.

70

Source : enquête de terrain, Juin 2016

Encadre 10 : entretien avec Danger., 63 ans, gardien à la C.O.C

? L'héritage des terres par succession comme moyen d'accès à la propriété foncière. L'héritage est important et stratégique dans le processus de déroulement des générations au sein des familles et des lignages (Fortes 1962). Il occasionne la négociation des identités des individus et structure les rapports de pouvoir et d'autorité au sein de la parenté. Il est le mode dominant des dispositifs coutumiers d'accès et d'appropriation de la terre dans les sociétés agraires africaines (Hill 1964; Gulliver 1961). Son importance politique, économique et symbolique en fait une source de tensions et de conflits ; Et ces tensions intrafamiliales autour de l'héritage peuvent se transformer en conflits intercommunautaires (Colin 2004).À la C.O.C, ce moyen d'accession à la propriété foncière est permanent. Non pas d'être le plus dominant, elle y existe néanmoins et conditionne l'accès à la terre d'un certain nombre d'autochtones dont les parents décédés, laissent des terres en partage.

don

héritage

location

15

28

157

0 20 40 60 80 100 120 140 160 180

Source : enquête de terrain février- juillet 2016

Graphique n°3 : Mode d'acquisition des terres dans les plantations de la C.O.C et ses environs

71

L'acquisition des terres ici à la C.O.C. ne se fait pas au hasard, puisque c'est une zone conflictogène, les acquéreurs et les demandeurs de terre suivent ont une logique qui semble se concevoir de la manière suivante : « ne passons pas plus de temps à la C.O.C. car l'on ne sait jamais quand est-ce que surgira un autre conflit sanglant, allons-y juste lors des périodes de mise en cultures...». À cet effet, des sujets enquêtés entre février et juillet, à la C.O.C., le graphique suivant a été élaboré.

20

100

30

2 0

10

1 0

31

4 2 0

Source : gestionnaire C.O.C. (2015), Mars 2016

Graphique n°4 : Tendance de location et d'acquisitions des terres à la C.O.C.

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon