L'investisseur victime d'une infraction boursière en zone CEMAC.( Télécharger le fichier original )par francois xavier Bandolo Université de Yaoundé II - Master II Droit des affaires 2015 |
1. L'INTERVENTION RECOMMANDEE DU GENDARME BOURSIER DEVANT LE JUGE CIVILUne précision doit être faite à l'endroit des raisons de l'intervention ainsi que sur les moyens de cette intervention. Le bon aboutissement des actions civiles en réparation susceptibles d'être intentées par les victimes se heurte fréquemment à des difficultés de preuves. En effet, conformément aux règles de la responsabilité civile et du procès, il incombe à ces victimes de rapporter la preuve du dommage qu'elles prétendent avoir subi, du fait fautif qui en est à l'origine et d'un lien de causalité entre cette faute et le dommage. Cette démonstration peut s'avérer mal aisée en matière boursière et financière, dans la mesure où elle doit s'appuyer sur des éléments souvent hors de portée des victimes. En revanche, ces mêmes éléments auront pu êtres recueillis soit par la CMF soit par la COSUMAF, au cas où les faits en cause auraient donné lieu à une enquête ou à un contrôle et figurer dans le rapport qui en est issu. Ces autorités boursières mobilisent souvent dans le cadre de ces enquêtes et contrôles, d'importants moyens d'investigations ainsi que les capacités d'expertise qui leur permettent d'établir, tant la preuve matérielle de ces faits que leur qualification juridique332(*). Aussi, les victimes peuvent-elles dans le cas d'une action en responsabilité contre l'auteur d'un manquement, se trouver démunies, et hors d'état d'apporter les preuves nécessaires au succès de leur prétention, alors que ces mêmes éléments peuvent avoir été déjà réunis333(*) soit par la CMF soit par la COSUMAF. En matière boursière et financière cette solution présenterait en outre l'avantage de détourner les victimes de la voie pénale qu'elles empruntent souvent aux seules fins d'obtenir les éléments de preuve nécessaire à l'indemnisation de leur préjudice. Le rapport de J.-M COULON propose d'ailleurs pour les victimes « de disposer d'un Droit d'accès à l'enquête de l'AMF (leur) permettant de posséder des éléments de preuve afin d'intenter une action devant la juridiction civile »334(*). Il devient alors intéressant d'exposer les moyens de cette intervention. De prime à bord, il convient de noter que les différentes législations en zone CEMAC n'apportent pas de solution claire et précise à cette préoccupation. Dans le cas de la CMF, il est écrit que « la commission peut ordonner la cessation des actes ou pratiques contraires et susceptibles de porter atteinte aux droits des épargnants ou d'entraver le fonctionnement régulier du marché, le cas échéant, elle peut s'en référer aux tribunaux »335(*). De cette manière de rédiger la loi, propre au législateur camerounais, on peut valablement en déduire que la CMF peut valablement intervenir devant le juge civil en matière d'urgence notamment. Il s'agirait en effet pour le président de la CMF ou de la COSUMAF, de demander au président du tribunal une injonction d'adopter ou de mettre un terme à un certain comportement. En Droit français, ces pouvoirs consistent d'abord à pouvoir demander au président du tribunal de grande instance de prononcer la mise sous séquestre des fonds, valeurs titres ou droits appartenant aux personnes mises en cause par l'AMF336(*) ; ensuite, le président de l'AMF peut demander en justice, qu'il soit ordonné de mettre fin à l'irrégularité ou d'en supprimer les effets. Ce n'est donc pas l'intervention du gendarme boursier qui pose problème en zone CEMAC tout comme en France, il s'agirait plutôt du secret des affaires. En effet, « le secret professionnel ne peut être opposé aux membres de la commission, ni aux inspecteurs agissant dans le cadre de leurs fonctions »337(*). Il en découle que si le secret des affaires ne peut être opposé au gendarme boursier, la question est de savoir si celui-ci peut valablement transmettre ce secret au juge dans le cadre d'un procès devant les juridictions civiles. Il semble en effet raisonnable de considérer que ces autorités communiqueraient les pièces et documents en leur possession, non directement aux parties, mais à la demande du juge si l'une des parties lui en fait la demande338(*). Cette communication pourrait s'appliquer aux pièces et documents, y compris les procès verbaux et rapports afférents à un contrôle ou à une enquête. Par ailleurs, au cas où les documents demandés par le juge comporteraient des informations relevant du secret des affaires ou de la vie privée des mis en cause, ces informations doivent êtres écartées de la communication. Dans ces conditions, le tri entre les informations communicables et les informations non communicables pourrait être fait par le juge, organe neutre et indépendant. L'intervention du gendarme boursier est également possible devant le juge répressif. * 332 Rapport indemnisation des épargnants et des investisseurs, op.cit. p. 25. * 333 Rapport indemnisation des épargnants et des investisseurs, op.cit. p. 25. * 334 La dépénalisation du Droit des affaires, rapport au garde des sceaux, ministre de la justice, du groupe de travail présidé par JEAN MARIE- COULON, la documentation française, 2008, p.67. * 335 Art. 105 (2) Règlement Général CMF. * 336 Art. L 621-13 et 621-14 du code monétaire et financier français. * 337 Art. 26 décret n° 2001/213 du 31 juillet 2001 précisant l'organisation et le fonctionnement de la commission des marchés financiers. * 338 Rapport indemnisation des épargnants et des investisseurs, op.cit. p. 26. |
|