Le retrait d'agrément aux compagnies d'assurance dans la zone CIMA.( Télécharger le fichier original )par Emilienne Michou Goghoue Tchomte Université de Dschang - master II 2010 |
CHAPITRE1 : LE DROIT APPLICABLE A LA LIQUIDATIONDES COMPAGNIES D'ASSURANCELa question du droit applicable à la liquidation des compagnies d'assurance relève de la diversité des normes de procédure dans l'espace CIMA. Le code CIMA, entré en vigueur depuis le 15 février 1995 a prévu des dispositions relatives à la liquidation des compagnies d'assurance. Par ailleurs L'OHADA, dont l'objectif fondamental est la réalisation d'une uniformisation progressive et générale des législations dans le domaine de droit des affaires entre ses pays membres, a permis l'élaboration d'Actes Uniformes qui forment aujourd'hui un véritable système O.H.A.D.A. on compte parmi ces actes, l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif (AUPCAP) entrée en vigueur en 1998. Or les pays membres de la CIMA sont aussi membres de l'OHADA. Ainsi les espace des deux ordres juridiques sont enchevêtrés et peuvent engendrer une concurrence entre eux (S1). Cependant, on pourra constater que le caractère technique et spécial des compagnies d'assurance lui impose un régime particulier pour sa liquidation du moins en cas de retrait d'agrément. (S2) S1- CONCOURS ENTRE LES NORMES DE PROCEDUREDE LA CIMA ET L'AUPCAP OHADA
Il importe pour nous d'identifier d'entrée de jeu les sources de ce concours (Para I) avant de voir comment il peut être solutionné (Para II).
Para I- LES SOURCES DU CONCOURS ENTRE LES NORMESDE PROCEDURE CIMA ET L'AUPCAP OHADALe concours entre les normes de procédure de la CIMA et l'AUPCAP OHADA a pour origine l'identité du champ d'application de ces deux ordres juridiques (A) et l'antinomie qui les caractérise (B). A. IDENTITE DE CHAMPS D'APPLICATIONS DES NORMES DE PROCEDURE CIMA ET DE L'AUPCAP OHADALa CIMA et l'OHADA sont deux organisations supranationales. A ce titre, le droit qui en dérive s'insère et s'impose immédiatement dans l'ordre juridique interne des Etats membres. Elles ont toutes les deux une valeur supra législative et infra constitutionnelle. Il n'ya donc pas lieu d'établir une hiérarchie entre elles, l'une ne pouvant être subordonnée à l'autre. Elles ont donc une égale vocation à s'appliquer aux situations entrant dans leurs domaines respectifs. Il s'ensuit que la CIMA et l'OHADA sont deux ordres juridiques autonomes. Cette autonomie découle même de la définition que la doctrine donne à l'ordre juridique. Ainsi celui-ci est définit par Guy ISSAC comme étant « un ensemble organisé et structuré de normes juridiques possédant ses propres sources et doté d'organes et de procédures aptes à les émettre »55(*). Cette identité de valeur, associée à leurs espaces inextricables favorisent le concours entre les deux ordres juridiques. Le domaine d'application de l'AUPCAP OHADA est déterminé par son article 2 dont l'alinéa 4 dispose « le redressement judiciaire et la liquidation des biens sont applicables à toute personne physique ou morale commerçante, à toute personne morale de droit privé non commerçante, à toute entreprise publique ayant la forme d'une personne morale de droit privé qui cessent ses payements. » Deux conditions sont donc posées pour que l'AUPCAP soit appliqué : une condition juridique qui tient à la personne du justiciable et une condition économique reposant sur la situation financière de cette dernière. S'agissant de la condition juridique, nous en limitant aux personnes morales, il s'agit d'abord des personnes morales commerçantes, c'est-à-dire les sociétés commerciales par la forme suivant l'art 6 de l'AUSC dont l'alinéa 2 dispose « sont commerciales à raison de leur forme et quelque soit leur objet, les sociétés en nom collectif ; les sociétés en commandite simple, les sociétés à responsabilité limitée et les sociétés anonymes ». L'AUPCAP s'applique ensuite aux personnes morales de droit privé non commerçantes. Ainsi on pourrait en relever les sociétés coopératives, les associations, les organisations non gouvernementales, les sociétés civiles (immobilière, agricole ou professionnelle) ; les groupements d'intérêt économique, les syndicats, les fondations, les ordres professionnels... l'AUPCAP vise enfin et expressément « toute entreprise publique ayant la forme d'une personne morale de droit privé ». On constate dès lors que toutes les personnes morales peuvent bénéficier de cette procédure, qu'elles soient de droit privé ou de droit public, qu'elles exercent une activité commerciale ou civile. N'y échappent donc finalement que les personnes physiques non commerçantes, le but du législateur étant de donner une clarté et une transparence à l'activité économique en général. Par ailleurs Selon l'article 301 du code CIMA "toute entreprise d'assurance d'un Etat membre mentionnée à l'article 300 doit être constituée sous forme de société anonyme ou de société d'assurance mutuelle. Toutefois une société d'assurance ne peut se constituer sous la forme d'une société anonyme unipersonnelle". Les entreprises d'assurance sont constituées sous la forme de sociétés commerciales au sens de l'art 6 alinéa 2 de l'AUSCGIE en l'occurrence les sociétés anonymes. Pour ce qui est des sociétés d'assurance mutuelle, elles peuvent être comprises dans le contenu de « personne morale de droit privé » que vise l'AUSC. Quant à la condition économique l'assujetti doit être en état de cessation de paiement. Pendant longtemps a prévalu une conception dualiste de la cessation des paiements distinguant : - la cessation des paiements ouverte qui se traduit par l'arrêt matériel du service de caisse, autrement dit le non-paiement d'une ou de plusieurs dettes certaines, liquides, exigibles, de nature commerciale ou civile, et qui sert à ouvrir la procédure ; - la cessation des paiements déguisée qui se traduit par l'utilisation de moyens frauduleux, ruineux ou factices, en d'autres termes la gêne financière, et qui sert à reporter dans le temps la cessation des paiements56(*) L'article 25 de l'AUPCAP définit la cessation de payement comme la situation du débiteur qui est dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Cette définition résulte d'une longue évolution jurisprudentielle. En adoptant cette qualification du fait juridique que constitue la cessation des paiements, le législateur OHADA fait prévaloir la conception économique et financière sur celle strictement juridique. Théoriquement, la cessation des paiements est différente de l'insolvabilité, caractérisée, elle, par le fait que l'actif total est inférieur au passif total. Dans les faits cependant, il arrive fréquemment que la cessation des paiements recouvre une véritable insolvabilité. Mais, d'une manière générale, l'on peut estimer que la cessation des paiements correspond à une situation qui est irrémédiablement compromise Pour le code CIMA, la première cause de liquidation est la faillite de l'entreprise d'assurance. Le dictionnaire de français Larousse définit la faillite comme l'état d'un commerçant qui cesse ses payements. Il faut donc comprendre par faillite ici, toute procédure collective ouverte pour cause de cessation de payement et devant conduire à la liquidation des biens de l'entreprise57(*). Lorsqu'il est question de retrait d'agrément, on constate qu'il est généralement motivé par l'insuffisance de la marge de solvabilité requise et l'impossibilité pour l'entreprise d'honorer à ses engagements règlementés. On revient ici à la condition économique de l'AUPCAP. En définitive la CIMA et l'OHADA sont deux ordres juridiques entièrement autonomes opérant dans un même espace juridique et ayant du moins en matière de procédure collective un même domaine d'application. Cependant le véritable problème vient de ce que leurs normes de procédure sont à certains égards contradictoires. * 55 V. Guy ISSAC, Droit communautaire Général, Armand Colin, 7éd. Liège * 56 MARTINEAU (V.B), « La cessation des paiements, notion fonctionnelle» RTD com. 2002, page 245 cité par DIEYNABA SAKHO, Les droits communautaires des procédures collectives dans l'espace OHADA, Université Gaston Berger de Saint Louis, Sénégal - DEA 2008 * 57 ASSI-ESSO (A), ISSA-SAYEGH (J), LOHOUES-OBLE (J), CIMA Droit des assurances, Bruylant 2002 page 74 N° 208 |
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