2-Les chefs traditionnels
Les chefs de villages et les lamibés sont des acteurs
endogènes qui ont réalisé de nombreuses actions dans la
gestion des conséquences des crises centrafricaines. En effet, plus que
les catastrophes naturelles, les guerres sont les véritables
productrices des réfugiés et des personnes
déplacées. La République Centrafricaine depuis son
indépendance est un foyer de crise et de désordre
politique10. Cet état de chose est la principale source de
déplacement de ses populations en direction des pays voisins. Cette
situation a provoqué une installation spontanée11 des
réfugiés centrafricains dans les villes de Ngaoui, Garoua Boulai
et Bertoua ainsi que ses environs. Les chefs locaux qui agissent sous
l'impulsion des lamibés et des sous-préfets sont ceux qui ont
été responsables aussi bien de l'hébergement que l'octroi
des terres aux réfugiés pour leur installation. Dès leur
arrivée dans ces trois villes en 2005 par exemple, les
réfugiés centrafricains ont été
hébergés temporairement par les chefs locaux qui leur ont offert
le gîte et le couvert. Cette sollicitude particulière provient du
fait qu'en Afrique, le droit d'asile ne fait pas systématiquement partir
des législations. Elle se fait beaucoup plus sur les bases
d'affinité religieuses, culturelles et familiales que sur des bases
juridiques12. La cession de ces terrains n'a pas concerné
exclusivement les terrains d'habitation mais aussi les terrains arables
où ils ont fait des cultures de consommation courante13.
C'est d'ailleurs, la raison pour laquelle il existe de nombreuses habitations
des réfugiés centrafricains à la lisière des
communes de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua.
9 J. Kourouma, 1983, « Protection et
assistance internationale aux refugiés africains : de Kousseri à
Poli/faro, cas des refugiés tchadiens au Cameroun (mars
1980-décembre1983) », Thèse de Doctorat
3ème Cycle à l'IRIC, Université de
Yaoundé pp. 70-89.
10GbowéGbowéSimplice, Les
conséquences des crises centrafricaine dans l'Adamaoua et l'Est du
Cameroun (1960-2010) P129, Mémoire de Master II, Université
de Ngaounderé, 2010 P. 102.
11 Il existe deux types d'installation des
réfugiés : spontanée et structurée. Dans le cadre
de notre travail nous faisons allusion à la première.
12 J. Kourouma, 1983, p. 48.
13 Entretien avec Poutia Jean le 13 juillet 2014
à Ngaoui.
123
Comme c'était le cas avec les réfugiés
congolais et tchadiens qui ont déferlés respectivement dans les
villes de Bertoua et Kousseri en 1990 et 1982, les réfugiés
centrafricains entraient en masse et s'installaient dans les confins de Garoua
Boulai, Ngaoui et Bertoua14. Cette installation ne s'est pas faite
sans conséquences. On assiste alors à l'augmentation des
fréquences de vol qui dégénère des conflits entre
les réfugiés et les populations locales. C'est dans cette optique
que les chefs locaux ont joué des rôles des arbitres et parfois
des sapeurs-pompiers pour résoudre des problèmes. D'autre part,
on note également des efforts que fournissent ces chefs en
matière de recensement au fur et à mesure que les
réfugiés arrivent15. Incontestablement, il est
judicieux de reconnaître l'implication active des chefs traditionnels
dans la gestion des conséquences des crises centrafricaines. Sans le
concours de ceux-ci, les réfugiés centrafricains n'auraient
véritablement pas pu s'installer et s'intégrer comme cela a
été le cas dans les villes de Garoua Boulai, Ngaoui et
Bertoua.
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