CHAPITRE II : LES ACTIONS POLITIQUES ET
ECONOMIQUES DES COMMUNES DE GAROUA BOULAI, NGAOUI ET
BERTOUA FACE AUX CONSEQUENCES DES CONFLITS CENTRAFRICAINS AU CAMEROUN DE
1960 A 2013
La fin de la guerre froide s'est traduite par un foisonnement
de conflits à caractère intra-étatique dans le monde en
général et en Afrique en particulier1. Par contre,
après les indépendances, nombre des pays africains ont connu des
conflits internes. Dans ce continent, les Etats au rang desquels le Tchad, la
Somalie, le Liberia, la côte d'Ivoire, le Rwanda, la République
Centrafricaine pour ne citer que ceux-ci sont détruits par des crises
politiques et les guerres opposant les acteurs internes. Au lendemain de son
indépendance, la Centrafrique est le théâtre des crises
politiques, opposant les acteurs internes et dont les conséquences
tutoient ses frontières nationales. Depuis 1966, l'instabilité
politique qui règne en République Centrafricaine a eu un impact
négatif au Cameroun. Cette situation qui a
dégénéré des conséquences aussi douloureuses
dans les localités frontalières notamment à Garoua Boulai,
Ngaoui et Bertoua a obligé les communes de ces trois villes à
réaliser des actions importantes.
Relais des actions de l'Etat, les communes sont devenues une
structure à la base de développement local. Au-delà de
l'intercommunalité qui caractérise les communes en
général, les communes camerounaises ont des missions
régaliennes. Ces missions permanentes consistent à fournir les
services de base à ses habitants tels que l'éducation, la
santé, les routes, l'électrification, l'approvisionnement en eau
potable, l'assainissement de la ville, la sécurité des
populations et la promotion des activités culturelles et
sportives2. Par ailleurs, Ilot de paix dans une zone de conflits et
de turbulences, le Cameroun est une destination convoitée des
réfugiés de la sous région3.C'est sans nul
doute conscient de cette réalité que le Cameroun a adopté
la Loi N°2005/006 du 27 juillet portant statut des réfugiés
au Cameroun qui définit le cadre institutionnel et les modalités
de prise en charge des réfugiés au Cameroun.
C'est dans cette logique que les communes de Bertoua, Garoua
Boulai et Ngaoui ont pu étendre leur mission en vue de résoudre
les problèmes soulevés par les conflits
1 Hassatou Baldé, 2003, « L'Union
Africaine et la prévention des conflits », pp.89-107, in
L'Union Africaine face aux enjeux de paix, de sécurité et de
Défense, D. Bangoura (dir) Paris, l'Harmattan, Cité par
Gbowé Gbowé Simplice, « Les conséquences des crises
politiques centrafricaines dans l'Adamaoua et l'Est du Cameroun (1960-2010)
», Mémoire de Master II, Université de
Ngaoundéré, p 22.
2 Entretien avec Jean Ondoh le 10 juin 2014 à
Bertoua.
3 A. Koagne Zoupet, 2009, « la mise en oeuvre de
la solidarité internationale dans la gestion des catastrophes par le
cameroun » Master en Relations Internationales, Option Contentieux
internationales, Institut des Rélations Internationales du Cameroun
(IRIC), pp 32-38.
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centrafricains. Il est question dans ce chapitre de scruter
les actions politiques et économiques des communes de Bertoua, Garoua
Boulai et Ngaoui face aux conflits centrafricaines.
I-LES ACTIONS POLITIQUES DES COMMUNES DE BERTOUA,
GAROUA BOULAI ET NGAOUI FACE AUX CONSEQUENCES DES CONFLITS CENTRAFRICAINS AU
CAMEROUN DE 1960 A 2013
Les crises politiques en RCA ont souvent conduit ce pays
à des guerres ouvertes dont les conséquences franchissent les
frontières camerounaises. La permanence de cette situation a souvent
impacté sur la vie des populations de Bertoua, Garoua Boulai et Ngaoui.
Il est ainsi question dans cette partie de faire ressortir essentiellement les
actions politiques des communes de ces trois villes face aux
conséquences des crises centrafricaines.
1-Etablissement des actes de naissance.
L'article 7 et 8 de la convention des Nations Unies relative
aux droits de l'enfant énonce que les enfants ont droit à une
identité, à un nom et à une
nationalité4. C'est dire que l'acte de naissance est
précieux dans la vie d'un citoyen. Il est au centre de la vie scolaire
des jeunes écoliers. Ainsi, dans les communes de Bertoua, Garoua Boulai
et Ngaoui, il s'est avéré que les enfants refugiés qui ont
respectivement intégré ces trois localités sont en manque
de ce papier précieux. D'autre part, certaines femmes refugiés
qui ont fui les coups de fusil en RCA sont entrées avec des grossesses
et ont accouché en terre camerounaise. D'autres par contre, ont
migré avec toute leur famille et se sont installés depuis des
décennies. Ceux-là continuent tout de même à faire
des enfants 5 . Ces trois villes frontalières du Cameroun
font alors face à une population dont la quasi-totalité est
dépourvue de l'acte de naissance. Conscientes de ce fait, les communes
de Bertoua, Garoua Boulai et Ngaoui ont mesuré tour à tour
l'ampleur de la situation, ce qui les a amené à prendre des
initiatives visant à atténuer le phénomène. C'est
dans cette optique qu'il faut comprendre l'engagement de ces trois communes
à procéder à la délivrance des actes de naissance
aux enfants réfugiés tel que nous pouvons le constater dans le
tableau si dessous.
4 Convention des Nations Unies aux droits de l'enfant,
article 7et 8.
5 Entretien avec Ndinga Ndokayo Simon le 18 juillet
2014 à Garoua Boulai.
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Tableau 5: Récapitulation du
nombre des actes de naissance de 2009 à 2013 dans les communes de Garoua
Boulai, Betoua et Ngaoui6.
Communes
|
Nombres d'actes de naissance
délivrés
|
Garoua Boulai
|
2359
|
Bertoua
|
1828
|
Ngaoui
|
1497
|
TOTAL
|
5684
|
Source :Registres d'état civil des communes de Garoua
Boulai, Bertoua et Ngaoui.
Le tableau 6 nous présente le nombre total des actes de
naissance établis aux refugiés par les communes de Garoua Boulai,
Bertoua et Ngaoui de 2009 à 2013. Soit un total de 5684 actes de
naissances établis par ces trois communes en un record de trois ans.
Dans ce tableau, le premier constat qui apparait est que, ces communes figurent
dans le tableau en ordre des chiffres des réfugiés. Ainsi, on
peut déduire que les villes qui établissent plus des actes de
naissance sont aussi les villes qui accueillent plus les
réfugiés. Dès lors, l'arrondissement de Garoua Boulai qui
accueille plus les réfugiés centrafricains se trouve en
tête de liste. Ensuite suivent les communes de Bertoua et de Ngaoui.
En plus de cette confection des actes de naissance, ces
communes procèdent des démarches auprès des tribunaux pour
que les jugements supplétifs se passent en toute
sérénité et dans un bref délai7. Pour
venir en aide aux refugiés centrafricains, les communes de nos trois
villes d'étude ont aussi octroyés les terres pour l'installation
des réfugiés.
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