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Les communes des borderlands camerounais face aux conséquences des conflits centrafricains de 1960 à  2013. Cas de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua.

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par (pas de prénom) GAMBO
Université de Ngaounderé-Cameroun - Master 2014
  

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2-Les conséquences culturelles des crises centrafricaines à Bertoua, Garoua Boulai et Ngaoui

A cause de leur contigüité, l'instabilité politiques et les exactions sur les

populations en République Centrafricaine ont eut un impact culturel très certain sur le territoire camerounais, mais dans les villes de Garoua Boulai, Bertoua et Ngaoui en particulier. Il est ainsi question dans cette partie de faire un état des lieux des conséquences culturelles des crises centrafricaines dans ces trois villes qui constituent le champ de notre étude.

a-Difficultés de prise en charge

Les personnes qui migrent de la Centrafrique pour le Cameroun sont à majorité des

peuls. Toutefois, il faut noter que ce groupe ethnique n'a pas souvent attaché une grande importance à l'école. Ceux-ci ont souvent privilégié dès leur bas âge des écoles coraniques par rapport aux écoles occidentales. Les acteurs de gestion des conséquences des crises centrafricaines dans les localités de Garoua Boulai, Bertoua et Ngaoui ont toujours fais face aux coutumes de ces réfugiés dont la majorité est constituée des Bororo. En effet, ces peuples nomades et apatrides ont des traditions propres à eux qui, en réalité ne cadrent pas toujours avec les programmes humanitaires. Ces coutumes, conviennent mieux aux peuples sédentarisés. C'est le cas par exemple des Bororo qui de tradition nomade, pratiquent constamment la transhumance. Ces déplacements ne concernent malheureusement pas que les hommes mais toute la famille. Ce mode de vie impacte alors sur l'éducation des enfants85 dans la mesure où ces derniers abandonnent leur étude. On note également un abandon des infrastructures qui ont été octroyées en leur faveur. C'est le cas des deux salles de classe qui ont été construites par le HCR dans le village Mbonga dans la commune de Garoua Boulai qui est aujourd'hui abandonnées pour manque des élèves.

Toujours en matière éducatif, il faut noter que la religion musulmane est un frein pour l'éducation de la jeune fille86. Les parents de la jeune fille musulmane ont souvent préféré la non scolarisation de leur enfant en vue de garantir sa virginité pour un mariage

85 J-C. Aoudou, 2010, « Les événements socio-naturels et la scolarisation des enfants réfugiés », Mémoire de CAPIEM, ENIEG de Batouri, p. 35

86 J-C. Aoudou, 2010.

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heureux87. Selon El Hadj Hamissou, le fait pour la jeune fille d'aller à l'école va provoquer en elle le conformisme à la vie moderne et du coup, elle va perdre ses habitudes traditionnelles88.

Une autre difficulté est également celle de l'augmentation du taux de mortalité. En effet, comme nous l'avons souligné si haut les réfugiés qui viennent de la RCA sont à majorité les Bororo et nombreux d'entre eux n'ont pas intégré les sites des réfugiés. Ces peuples qui fuient la guerre en Centrafrique arrivent au Cameroun le plus souvent avec des maladies de nature diverse. Ainsi dès leur installation dans nos trois localités d'étude, ils refusent de se faire soigner auprès des hôpitaux et des organismes internationaux s'occupant de la santé des réfugiés. Ce comportement est dû au fait que, ces peuples attachent plus de confiance à leurs gris-gris et guérisseurs traditionnels qu'au traitement des hôpitaux89. Selon les responsables des Médecins Sans Frontières (MSF) dans le département de Ngaoui, C'est dès lors que les cas sont les plus graves et dont les féticheurs n'ont plus des solutions appropriées que ces réfugiés prennent le chemin de l'hôpital90. La conséquence est fatalement la mort sauf dans les cas exceptionnels où certains parmi eux parviennent à survivre. En bref, la prise en charge des refugiés centrafricains dans les villes de Ngaoui, Garoua Boulai et Bertoua rencontre des difficultés. Ces difficultés proviennent des traditions des réfugiés qui, volontairement ou non, sont un frein à leur propre prise en charge.

b-De la cohabitation à la coexistence

Qualifié de « pays fantôme »91, la République Centrafricaine a toujours été socle d'instabilité politique. Les coups d'Etat perpétrés dans ce pays ont donné naissance à des groupes de rébellion qui, à leur tour ont exercé sur les peuples, de graves exactions et des atrocités signifiantes. Ces actes insupportables ont provoqué le départ massif des Centrafricains vers le Cameroun. À cause de la proximité, ces réfugiés ont choisi les villes de Ngaoui, Garoua Boulai et Bertoua comme lieu de leur installation par excellence. Certes, leur migration parait importante dans la mesure où c'est un peuple qui fui la hache de guerre. Cependant, leur présence dans ces trois localités a eu un impact négatif sur le plan culturel.

87Ibid

88 Entretien avec El Hadj Hamissou le 27 juin 2014 à Garoua Boulai.

89 Entretien avec Hamaselbe Paul le 3 juillet 2014 à Ngaoui

90 Entretien avec Paul Djoumessi Arnold le 5 juillet 2014 à Meiganga

91 Rapport Afrique de Crisis group, N° 136, « République Centrafricaine anatomie d'un Etat fantôme»

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Les conflits qui minent la Centrafrique depuis les décennies sont de nature diverses. On note entre autres des crises politiques, des crises interethniques, des crises frontalières et des crises interreligieuses92. De manière générale, il faut relever que tous ces conflits qui se sont perpétrés dans ce pays ont eu un impact non négligeable au Cameroun. Dans le cadre de la dernière crise par exemple, l'on a assisté à un conflit religieux. En effet, la troisième guerre civile centrafricaine est un conflit intercommunautaire93 apparu au cours de l'année 2013 en République Centrafricaine. Elle a opposé notamment les milices de la « séléka », à majorité musulmane et fidèle au président Michel Djotodia, à des groupes d'auto-défense chrétiens, soutenus par des anciens militaires des forces armées centrafricaines fidèles à l'ancien président François Bozizé94. Le conflit se caractérise par de nombreuses exactions contre les civils, musulmans ou chrétiens. Cette situation qui a débouché sur une crise humanitaire importante, aggravé par le chaos sécuritaire s'est vue déportée dans les localités de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua au Cameroun. Après les vives atrocités des « séleka »sur les chrétiens, c'est les « anti-Balaka » qui prendront le contrôle. Pour se venger, les rebelles « anti-Balaka » vont commettre des massacres et exercer des exactions contre les civils musulmans. Ces fidèles musulmans arrêtés, sont tués ensuite mangés cru. D'autres par contre, ont été soumis à la torture et brûlés au feu95. Tous ces actes inhumains causés par l'un comme l'autre groupe rebelle « anti-Balaka » et « séléka ») sur les civils vont provoquer un léger divorce entre ces deux religions dans les communes de Garoua Boulai, Ngaoui et Bertoua.

En effet, les réponses obtenues aux interrogations adressées aux réfugiés musulmans et chrétiens venus depuis la RCA, nous laisse croire que la guerre qui se déroule en Centrafrique est selon eux, une guerre intercommunautaire comprise à l'échelle internationale96. Cette haine qui existe entre ces deux peuples en Centrafrique s'est alors déportée en territoire camerounais et a contaminé leurs différents frères qui constituent la population locale. Cependant, si dans les villes de Ngaoui et Bertoua cette situation semble être moins visible, à Garoua Boulai c'est un vécu quotidien qui risque peut-être dégénérer un conflit de même nature que celui de la Centrafrique. Déjà dans la journée du 17 novembre 2013, un conflit de ce genre est né entre les chrétiens et les musulmans au sujet d'un forage. En effet, ce forage public situé au marché central est géré par un chrétien,

92 Rapport Afrique de Qestions internationales, N° 11 janvier-février 2005, « Les conflits en Afrique »

93 Rapport Afrique de Qestions internationales, N° 15 novembre-décembre 2013, « L'ONU à l'épreuve »

94 Entretien avec Poutia Madeleine le 5 juillet 2014 à Ngaoui.

95 Entratien avec Hamadjida Ibrahima le 17 juillet 2014 à Ngaoui.

96 Les réfugiés centrafricains qui ont fui la guerre dans pays croyaient que cette guerre qui se vit en RCA était une guerre que se déroulait aussi au Cameroun.

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cependant les fideles musulmans mécontents, estimaient que l'accès à l'eau était plus favorable aux chrétiens. Ainsi ce jour, c'était alors la goutte d'eau qui a débordé la vase. De violents affrontements sont nés entre ces peuples. Heureusement le sous-préfet, les forces de l'ordre et les chefs traditionnels ont su tenir le taureau par les cornes et le conflit n'a pu durer de longues heures97.

À l'échelle internationale, les massacres commis contre les civils musulmans en République Centrafricaine ont provoqué également des réactions de la part des « djiadiste ». Dans un communiqué publié le 14 février, le groupe armée « Boko Haram » promet de venger le sang des musulmans massacrés en Centrafrique. Le 20, le mouvement armé Révolution et Justice prétend d'ailleurs avoir capturé deux hommes de « Boko Haram » Sido, au nord du pays98. Le mouvement « salafiste » déclare également aux dirigeants français : « Vos crimes ne resteront pas impunis, la guerre entre vous et nous se poursuit ». Le 22 février, les Talibans afghans publient également un communiqué dans lequel ils dénoncent un « génocide de musulmans » commis par des « bandits chrétiens criminels »99. Tout ceci a eu un impact dans la vie culturelle des peuples de ces trois villes dans la mesure où apparait un divorce entre les deux civilisations. Ces deux peuples qui auparavant cohabitaient ensemble, se retrouvent désormais entrain de coexister.

En définitive, il était question dans ce chapitre de faire une présentation des communes de Bertoua, Garoua Boulai et Ngaoui. De ce qui précède, il ressort que l'étude historique nous a permis de jeter un regard rétrospectif particulièrement sur les trois communes de la zone de notre étude et de se faire une idée sur les dates et les contextes de leur création. Elle nous a également permis de comprendre les forces et faiblesses de chacune d'entre elles d'une part et l'organisation et le fonctionnement de la structure communale d'autre part.

La deuxième partie de ce chapitre était consacrée à l'étude des conséquences politiques, économiques, sociales et culturelles des conflits centrafricains dans les villes de Garoua Boulai, Bertoua et Ngaoui. Mieux, il s'agissait de faire un état des lieux des conséquences des conflits centrafricains dans ces trois villes camerounaises. De ce qui précède, force est de constater que les conflits en Centrafrique dans leur dynamique ont eu d'impact direct sur la vie politique, économique, sociale et culturelle dans les villes de

97 Entretient avec Pkao Raymond à Garoua Boulai le 24 juin 2014.

98 http://fr.wikipedia.org/wiki/Trois%/C3%A8me_gruerre_civile_centrafrinainecité_note-66

99 http://fr.wikipedia.org/wiki/Trois%/C3%A8me_gruerre_civile_centrafrinainecité_note-67

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Bertoua, Garoua Boulai et Ngaoui. La première raison qui justifie la fluidité et l'impact de ces conflits réside dans le fait le Cameroun et la RCA sont contigus et partage une longue frontière terrestre. Ainsi, c'est bande frontalière que sont situées les villes de Ngaoui, Garoua Boulai et Bertoua.

Aussi, Ngaoui du côté de l'Adamaoua et Garoua Boulai et Bertoua du côté de l'Est sont plus rapprochés des théâtres des affrontements et des exactions des rebelles, des coupeurs de route vulgairement appelés « Zarguina » et des preneurs d'otage en Centrafrique, ces villes ont à leur sein les mêmes populations que l'on retrouve du côté de la Centrafrique. La présence des refugiés centrafricains dans ces trois villes camerounaises a ainsi eu de l'impact négatif mais aussi des désavantages.

Du point de vue positif, il est convenable de souligner que les réfugiés installés dans ces trois villes camerounaises n'ont pas seulement bénéficié d'une stratégie endogène de la prise en charge. Toutefois, il faut préciser que ces réfugiés ont bénéficié aussi d'une prise en charge exogène. C'est dans cette mesure que les organismes humanitaires ont réalisé dans ces trois villes des infrastructures réfugiés qui font aussi bénéficier les populations locales. La présence de ces réfugiés centrafricains a aussi offert un rapprochement entre les deux populations voisines par le biais d'une coopération par le bas et une contribution à la lutte contre le chômage à travers la création de plusieurs emplois des organismes humanitaires.

Du point de vue négatif, la présence des réfugiés a également dégénéré dans ces trois villes des avantages. Sur le plan politique et social, ces réfugiés ont souvent été utilisés lors des échéances électorales. On enregistre aussi une insécurité grandissante, une pluralité des conflits, des cas de vole de toute nature, des agressions multiples, des maladies diarrhéiques, épidémiques et pandémiques et un taux de mortalité de plus en plus croissant. Du point de vue culturel et économique, on note un ralentissement des activités économiques dû à la fermeture des frontières et une rupture de cohabitation entre les populations locales et les réfugiés.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote