LE PASOC COMME UN DISPOSITIF EFFICACE
D'APPROPRIATION PAR LES OSC DES MECANISMES DE CONCERTATION AVEC L'ETAT AU
CAMEROUN
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En signant la convention relative au financement (CF 9624/CM)
du Programme d'Appui à la Structuration de la Société
Civile (PASOC), le 20 juillet 2007, la République du Cameroun et la
Commission Européenne entendent matérialiser la contribution
effective des OSC au coeur du développement socio-économique afin
de lutter contre la pauvreté.
Ainsi, dans le cadre de ce travail qui voudrait saisir
l'approche de l'appropriation par les OSC des mécanismes de concertation
avec l'Etat dans le sillage du PASOC, il s'avère nécessaire de
planter le décor sur le plan légal, juridique et institutionnel
dans lequel le programme émane afin de schématiser ses
visés et ses réalisations. De façon concrète, nous
allons dans cette première partie, faire en premier lieu un briefing sur
l'état des lieux des mécanismes de concertation entre OSC et
pouvoirs publics au Cameroun, avant de comprendre en quoi est-ce que le PASOC
se justifierait comme un dispositif efficace d'appropriation par les OSC des
mécanismes de concertation avec l'Etat.
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CHAPITRE I :
REVUE SUR L'ETAT DES LIEUX DES MECANISMES DE
CONCERTATION ENTRE OSC ET POUVOIRS PUBLICS
Ce chapitre met en exergue le contenu de la pertinence des
fondements du programme. Pour ce faire, il s'articule sur deux grandes parties
qui développent de manière respective, la politique de
concertation entre OSC et Etat à la fois sur le plan international et
national, puis met en évidence les enjeux susceptibles de remettre en
question cette politique.
I. FONDEMENTS DES MECANISMES DE CONCERTATION ENTRE
LA
SOCIETE CIVILE ET LES POUVOIRS PUBLICS
La mise en oeuvre du Programme d'appui à la
structuration de la société civile (PASOC) au Cameroun fait suite
à une politique représentée aujourd'hui par le
schéma directeur du programme national de gouvernance et d'autres
documents politiques et juridiques dérivant à la fois au niveau
international, régional et national. Il s'agit de la retombée des
mesures qui ont été prises dans le secteur de la
corrélation entre la société civile et les pouvoirs
publics dans la conception et la mise en oeuvre des politiques nationales de
développement.
A. Au niveau international et régional
Au niveau international, la problématique de la
société civile et de son renforcement dans les pays du Sud est
aujourd'hui omniprésente dans les politiques de coopération.
Qu'il s'agisse de la Banque mondiale, l'Union européenne ou la plupart
des coopérations bilatérales, les bailleurs de fonds ont
adopté une approche multi-acteurs de la coopération qui maintient
les Etats comme partenaires tout en reconnaissant aux organisations de la
société civile un rôle dans la définition et la mise
en oeuvre des politiques.
C'est ainsi que dans la retombée de la multitude
d'accords internationaux justifiant la pertinence d'une consolidation des
acquis de la société civile, on peut noter entre autres, de
manière prioritaire, l'Accord de Cotonou 2000 et la déclaration
de Paris de 2005.
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L'accord de Cotonou55 représente de
manière fondamentale, un accord signé entre les Etats d'Afrique,
Caraïbes et Pacifiques (ACP) d'une part et la Communauté
Européenne et ses Etats membres d'autre part. Il s'agit de
manière générale d'un partenariat qui vise à
promouvoir et à accélérer le développement
économique, culturel et social des pays ACP, tout en contribuant
à la paix et à la sécurité par le biais de la
promotion d'un environnement politique stable et démocratique.
De manière spécifique, il s'agit d'un
partenariat centré sur la réduction, l'éradication de la
pauvreté de manière cohérente avec les objectifs du
développement durable et d'une intégration progressive des pays
ACP à l'économie mondiale. De par ses fondements, cet accord
s'inscrit dans une logique de management vouée à une
interdépendance des apports des OSC et des pouvoirs publics dans
l'optique de réaliser des avancées considérables en
matière de gouvernance. Pris sous cet angle, l'accord de Cotonou 2000
est considéré comme un modèle innovateur dans les rapports
de concertation entre société civile et pouvoirs publics.
Ainsi, par le biais des articles 2, 4 et 6 de cet accord de
Cotonou et avec sa révision en 2005, l'accord met davantage l'accent sur
la participation effective des OSC dans les processus de développement
impulsés au sein des Etats. C'est ainsi que l'accès direct des
ANE aux ressources des programmes indicatifs, afin qu'ils puissent profiter
directement de financements via des contrats de subvention, devient un
impératif catégorique pour l'UE.
En clair, l'analyse qui se prête à l'article 2
révèle de manière fondamentale que la Coopération
ACP-CE se fonde sur un régime de droit. Par ailleurs, l'existence
d'institutions conjointes guidée par un plan d'action sur
l'efficacité de l'aide, met en branle le concept d'appropriation en
matière de développement et de responsabilité mutuelle
entre les pouvoirs publics, le secteur privé et les OSC. Elle s'exerce
sur la base des principes fondamentaux suivants :
3. L'égalité des partenaires et
l'appropriation des stratégies de développement : en vue de la
réalisation des objectifs du partenariat, les Etats ACP
déterminent, en toute souveraineté,
les stratégies de développement de leurs
économies et de leurs sociétés dans le respect des
éléments essentiels et fondamentaux ; le partenariat encourage
l'appropriation des stratégies de développement par les pays et
populations
55 Accord signé à Cotonou le 23 juin
2000, révisé à Luxembourg le 25 juin 2005 en suite,
révisé encore à Ouagadougou le 23 juin 2010.
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concernés ; les partenaires de développement de
l'UE alignent leurs programmes sur ces stratégies.
4. La participation : outre l'Etat en tant que partenaire
principal, le partenariat est ouvert aux parlements ACP, aux autorités
locales des Etats ACP et à différents types d'autres acteurs, en
vue de favoriser la participation de toutes les couches de la
société, du secteur privé et des organisations de la
société civile à la vie politique, économique et
sociale.
5. Le rôle central du dialogue, le respect des
engagements mutuels et la responsabilité : les engagements pris par les
parties dans le cadre de leur dialogue sont au centre du partenariat et des
relations de coopération ; les parties oeuvrent en étroite
collaboration pour déterminer et mettre en oeuvre les processus
nécessaires permettant l'alignement et l'harmonisation de la part des
donateurs, de manière à assurer aux Etats ACP un rôle
central dans ces processus.
L'article 4 quant à lui, fonde la concertation entre
OSC et pouvoir public en faisant mention de ce que les Etats ACP
déterminent, en toute souveraineté, les principes et
stratégies de développement, les modèles de leurs
économies et de leurs sociétés. Ils établissent
avec la communauté, les programmes de coopération prévus
dans le cadre du présent accord. Toutefois, les parties reconnaissent le
rôle complémentaire et la contribution potentielle des acteurs non
étatiques, des parlements des Etats ACP et des autorités locales
décentralisées au processus de développement, notamment au
niveau national et régional. A cet effet, conformément aux
conditions fixées dans le présent accord, les organisations de la
société civile tout comme les parlements des Etats ACP et les
autorités locales décentralisées, selon les cas
participent au même titre que l'Etat et ses démembrements.
C'est dans cette mesure qu'ils
sont tenus informés et impliqués dans la
consultation sur les politiques et stratégies de coopération, et
sur les priorités de la coopération, en particulier dans les
domaines qui les concernent ou qui les affectent directement, ainsi que sur le
dialogue politique56
56 Art 2 Accord de Cotonou de 2000.
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Pour rendre effective cette concertation entre OSC et pouvoirs
publics, l'accord s'attèle à mettre sur pied un ensemble de
facilités relative à la formation et surtout au renforcement des
capacités des OSC. C'est ainsi que conformément à cet
accord, les OSC
Reçoivent une assistance au renforcement
des capacités dans les domaines critiques afin de
renforcer les capacités de ces acteurs, plus particulièrement en
termes d'organisation et de représentation ainsi que
l'établissement des mécanismes de consultations, y compris les
canaux de communication et de dialogue, et de promouvoir les alliances
stratégiques 57.
La participation étant un impératif pour la
promotion des approches de concertation entre OSC et Etat, l'Accord mentionne
clairement que les OSC sont impliqués dans la mise en oeuvre des
projets et programmes de coopération dans les domaines qui les
concernent ou ceux dans lesquels ils possèdent un avantage
comparatif58.
Quant à la déclaration de Paris de 2005, elle
fonde la concertation entre pouvoirs publics et OSC sur la base d'une
stratégie dans laquelle, les pays développés et les pays
en développement, les chargés de promotion du
développement, et les responsables d'organismes bilatéraux et
multilatéraux ont pris la ferme résolution de mener des actions
ambitieuses, se prêtant à la participation des populations
bénéficiaires à l'élaboration et au suivi de la
mise en oeuvre des politiques de développement. Cela a constitué
un point déterminant au cadre d'expression des organisations de la
société civile dans la dynamique de concertation avec les
pouvoirs publics sur les politiques nationales de développement.
Au niveau régional, les fondements d'un cadre de
concertation entre pouvoirs publics et OSC découlent de ce que le
décalage entre l'Etat et le citoyen est constamment attribué
à l'indifférence des dirigeants au sort de leurs populations.
Ainsi, en réponse à ces besoins, l'Union Africaine (UA) a
prévu la création d'un Conseil Economique, Social et Culturel
(ECOSOCC) qui est une assemblée plénière des organisations
de la société civile. Il s'agit d'un mécanisme qui fait
état d'un nouveau contrat social entre les dirigeants africains et leurs
peuples. Le but visé est de créer un espace de concertation entre
les OSC et les pouvoirs publics.
57 Ibid.
58 Ibid.
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