B. Le contrôle juridictionnel national
Le contrôle juridictionnel de l'application des normes
internationales se fait également devant les juridictions des Etats
parties. Au Cameroun, ce contrôle est possible en matière
environnementale en général ; il peut aussi en être en
matière d'application des instruments juridiques internationaux de lutte
contre les changements climatiques. En somme, la lutte contre les changements
climatiques fait partie de la protection de l'environnement. Les
contrôles que peuvent effectuer les juridictions nationales portent soit
sur le contrôle des actes d'application, soit sur les manquements qu'on
pourrait observer à l'application.
Quant au contrôle de conformité des actes
d'application, il est question de répondre à la question de
savoir si les actes juridiques pris dans le cadre de l'application des
instruments juridiques internationaux sont en conformité avec les normes
supérieures. Cela donne lieu à au moins deux contrôles : le
contrôle de constitutionnalité qui se fait a priori et
par voie d'action en droit camerounais. L'initiative de ce contrôle est
au demeurant l'apanage d'autorités limitativement
énumérées dans l'article 47, alinéa 2 de la
constitution. Ainsi, avant l'entrée en vigueur d'un traité ou
d'une loi, un contrôle de sa conformité est possible68.
L'autre contrôle est celui de légalité. Celui-ci
relève essentiellement de la compétence de la juridiction
administrative. A ce niveau, il s'agit en réalité de
vérifier la conformité des règlements à la loi ou
tout simplement à un autre qui lui est supérieur. Dans ce domaine
particulier du contrôle de l'application des instruments juridiques de
lutte contre les changements climatiques au Cameroun, la saisine des
juridictions par les particuliers est faible. Cela serait en partie dû
à la rareté des textes juridiques d'application des instruments
de lutte contre les changements climatiques. Toutes choses qu'il convient de
déplorer, ce d'autant plus que les traités climatiques sont des
conventions-cadres, c'est-à-dire des textes foncièrement
programmatoires et donc non précis et non détaillés, ce
qui les rend de ce fait non self-executing. Cependant, les tribunaux
statuent sur de nombreux litiges portant sur l'exploitation illégale de
la forêt69.
Mais l'on pourra ranger cette carence dans les
conséquences de l'ignorance et du désintérêt qui
caractérisent une franche de la population camerounaise en
matière environnementale et notamment de changement climatique. En
effet, si l'action des ONG est louable dans ce domaine, il faut tout de
même relever qu'il est rare que les individus intentent collectivement
une action en justice contre l'Etat ou toute autre personne publique pour
engager leurs responsabilités en matière climatique comme ce fut
le cas au Pays Bas. Or c'est une aubaine ouverte dans le système
judiciaire camerounais. En fait, les parties ont le droit d'ester en justice
pour engager la responsabilité de leur Etat lorsque celui-ci a failli
à son
68 Confer article 74 alinéa 1 et 2.
69 Selon le Communiqué
n°_0121_/C/MINFOF/CAB/BNC du _28 juillet 2016_, il y a en instance
plusieurs affaires pendantes pour le compte du deuxième trimestre 2016 :
certaines en cours d'exécution, d'autres faisant l'objet de voie de
recours. Globalement, c'est l'exploitation forestière non
autorisée en violation de la 94/01 du 20 janvier 1994 sus
évoquée dont il est question dans ce document (exemple : CCJA
d'Abidjan, Etat du Cameroun (MINFOF) c/ Sté HAZIM et Cie. Cette a
été jugée le 14 juillet 2016). Il s'agit d'un arrêt
de rejet pour irrecevabilité du recours en révision formé
contre l'Arrêt rendu par la Cour de céans le 04/02/ 2014.
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obligation d'appliquer un instrument international. Ainsi, une
absence d'une mesure d'application ou encore l'adoption de mesures
inadéquates peut engager la responsabilité d'un Etat.
Le contrôle juridictionnel opéré au niveau
national et international est renforcé par le contrôle non
juridictionnel.
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