2.2.2.LE CICR
Un des problèmes cruciaux de
l'actualité Internationale qui suscite toujours davantage et surtout ces
dernières années, une préoccupation croissante de
l'opinion publique mondiale, est le fait de l'inapplication du droit
humanitaire dans la pratique des conflits armés. Le
phénomène est suivi d'un paradoxe qui, sans son côté
profondément tragique pour la personne humaine, risquerait de tourner au
ridicule tout l'effort, aujourd'hui plus que centenaire, de l'humanisation de
la guerre : d'un côté, à la chaîne des
conventions composant le droit de la Haye et celui de Genève, on ajoute
toujours des nouvelles règles et des obligations toujours plus
sérieuses pour les Etats, afin d'augmenter la protection de l'individu
face à la force armée ; de l'autre, la protection de fait se
rétrécit comme une « peau de chagrin » et on
se rend compte que les normes les plus élémentaires de droit, que
l'on avait depuis longtemps considérées comme faisant partie de
la « conscience juridique » de la société
humaine, ne sont plus respectées sur le champ de
bataille ».
Le droit, des conflits
armés, ce droit dit « de la Haye » et « de
Genève » est à son tour profondément
enraciné dans le corpus des droits de l'homme et est moins
empreint de l'esprit humanitaire, vu que son rôle social n'est plus de
protéger en tout premier lieu l'Etat et la
« nécessité militaire », cependant, ce droit
doit répondre aux « exigences humanitaires », car il
représente une des branches les plus élaborés du droit
international public.
Les Etats modernes ont
conquis en apparence le monopole du droit dans l'ordre interne comme dans cet
ordre international dont ils sont les sujets
« originaires ». Et cependant, la morale et l'opinion
publique, auxquelles se réfèrent les Conventions de
Genève, considèrent l'être humain comme la fin ultime du
droit et sont à l'origine d'un grand mouvement au sein duquel la
protection du soldat blessé ou captif a marqué une étape
essentielle mais qui n'a reçu son vrai nom que de nos jours avec la
protection internationale des droits de l'homme. C'est là la source
profonde qui a créé le Comité International de la Croix
Rouge et qui justifie la portée en réalité sa
personnalité juridique. Il a fallu que les blessures, la
captivité, le déracinement, la faim, toutes les épreuves
du malheur physique et moral rendent visible ce caractère sacré
de la dignité des personnes pour que l'être humain retrouve dans
le droit un peu de la place qui lui est due et que les Etats admettent au
niveau de leurs relations cet auxiliaire qu'est le CICR, avec quelques unes des
prérogatives qu'ils se réservent jalousement.
Il a été
convenu à ce sujet que « les parties au conflit accordent au
CICR toutes les facilités en leur pouvoir pour lui permettre d'assurer
les tâches humanitaires qui lui sont attribuées par les
Conventions et le présent Protocole afin d'assurer protection et
assistance aux victimes des conflits ; le CICR pourra également
exercer toutes les autres activités humanitaires en faveur de ces
victimes, avec le consentement des Parties au conflit ».
Ce texte est
important ; il subordonne l'exercice d'autres activités
humanitaires au consentement des Parties au conflit, mais il reconnaît la
capacité potentielle `'ergaomnes'' du CICR, capacité qui se
matérialise par le consentement des parties au conflit. La
capacité potentielle du CICR est d'ailleurs plus large encore, car
suivant les « principes fondamentaux » de 1965
susvisés, « la Croix-Rouge, sous son aspect national et
international ... s'efforce de prévenir et d'alléger en toutes
circonstances les souffrances des hommes ». Il suffit d'un
consentement de l'Etat intéressé pour que cette compétence
s'exerce.
La mission propre du CICR
le conduit à intervenir auprès des Etats pour défendre les
victimes des conflits. Il le fait directement au plan du droit international en
sa qualité de gardien des conventions humanitaires et dans l'exercice
des responsabilités qui lui sont confiées. Ces victimes des
conflits, faut-il le rappeler, englobent les réfugiés, les
déplacés internes, les captifs, etc.
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