Paragraphe 2 : La systématisation d'un
contrôle a posteriori
Lorsque les prestations objets du marché sont
réceptionnées par l'autorité contractante, s'exerce un
autre type de contrôle, se substituant au contrôle a priori. Il
s'agit du contrôle a posteriori, opéré à titre
accessoire par l'autorité contractante elle-même, et à
titre principal par l'autorité de régulation. Il sera donc
question dans un premier temps d'analyser l'aspect bicéphale de ce
contrôle (A) pour aboutir dans un second temps au droit de recours non
juridictionnel mis en oeuvre auprès de l'autorité de
régulation (B).
A- Un contrôle à deux visages
La bicéphalie du contrôle a posteriori de la
passation des marchés au Sénégal et au Togo se
dénote déjà à travers une exploration sommaire des
différents codes régissant les marchés publics dans ces
deux pays. Partant de ce constat et conformément aux dispositions des
articles 143 et 144 du code sénégalais des MP, on remarque qu'il
existe au sein de chaque autorité contractante, un organe de
contrôle interne qui doit s'assurer du respect rigoureux des dispositions
légales et réglementaires applicables aux marchés publics.
Pour cela, chaque cellule de passation des marchés a l'obligation
d'établir avant le 31 mars de chaque année à l'intention
de l'autorité dont elle relève et aussi de la DCMP et de l'ARMP,
un rapport annuel sur l'ensemble des marchés publics passés
l'année précédentes. C'est à travers ce rapport que
la cellule de passation fournit
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 46
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
la liste des entreprises jugées défaillantes,
précise la nature des manquements constatés et donne un compte
rendu détaillé des marchés passés par entente
directe.
En ce qui concerne le Togo, lorsque nous analysons les
attributions de la CCMP conformément au décret n°
2009-297/PR, ou peut lire dans le dernier alinéa que la CCMP «
établit à l'attention du représentant de l'autorité
contractante, un rapport annuel d'activités ». Ce rapport
comme au Sénégal porte sur l'ensemble des marchés
déjà passés au cours de l'année
précédente. De ce constat, on comprend à suffisance qu'il
s'agit là d'un contrôle a posteriori exercé au plan
interne.
Cependant, au-delà du contrôle interne a
posteriori exercé à titre accessoire par la cellule de passation
des marchés (Sénégal) et la commission de contrôle
des marchés publics (Togo), existe un autre type de contrôle a
posteriori, exercé à titre principal et au plan externe par
l'ARMP. Le contrôle a posteriori de l'ARMP est une exigence communautaire
qui consiste en l'exercice d'une série de prérogatives,
conformément à la directive 05 de l'UEMOA.
A ce titre, l'autorité de régulation des
marchés publics est chargée de veiller, par des études et
avis réguliers, à la saine application de la
réglementation et des procédures relatives à la passation
des marchés publics et de proposer au gouvernement et aux institutions
en charge des marchés publics toutes recommandations ou propositions de
nature à améliorer et renforcer l'efficience du système de
passation des marchés publics.
Par ailleurs, un aspect important qui mérite
d'être évoqué et qui fait office de convergence dans les
deux codes est le pouvoir de l'ARMP à mener des opérations de
contrôle et d'audit126 portant sur la transparence dans la
passation des marchés.
C'est le lieu d'évoquer les conclusions du rapport de
synthèse des marchés conclus par 31 autorités
contractantes au Togo et qui ont été rendues en mai
2015127. Ce rapport fait état des résultats des
travaux portant sur les marchés passés au titre de la gestion
2012, l'examen du traitement des litiges, les marchés passés par
entente directe et ceux conclus suivant la procédure
126 Cf. Art. 145 CMP Sénégal relatif au
contrôle externe et a posteriori et l'article 13 du CMP Togo relatif aux
missions et attributions de l'ARMP.
127 Revue indépendante de la conformité de la
procédure de passation des marchés publics passés par les
Autorités contractantes au titre de l'année 2012
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 47
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
d'appel d'offres restreint.
D'une manière générale, il ressort au
terme de ces travaux que des manquements ont émaillé d'une
manière significative la passation des marchés, portant ainsi un
coup dur aux dispositions législatives et règlementaires
régissant le principe fondamental de la transparence.
Quant au Sénégal, l'ARMP procède
annuellement comme au Togo à la revue a posteriori des marchés
publics, sur la base d'un échantillon représentatif. Un
système de ciblage est conçu pour la sélection des
structures à auditer. A cet effet toutes les structures publiques
gérant un budget supérieur à dix (10) milliards sont
systématiquement auditées128 contre 50% des structures
gérant un budget compris entre 5 et 10 milliards; 25% des structures
gérant un budget compris entre 1 et 5 milliards et 10% des structures
gérant un budget inférieur à 1 milliard.
Toutefois, quoiqu'on puisse dire, il faut admettre que ces
différents rapports ont permis aux organes de régulation
sénégalaise et togolaise d'interpeler les autorités
contractantes pour plus de rigueur tout en leur proposant des actions
correctives et préventives de nature à améliorer la
qualité de leurs performances, dans un souci d'économie, de
transparence et d'efficacité dans les procédures de passation.
Par ricochet, des mesures coercitives ont aussi été
érigées pour sanctionner les contempteurs des normes relatives
à la transparence. A cet effet, des personnes physiques ou morales
défaillantes se sont vues imposer des sanctions financières et
certaines ont même été exclues des procédures de
passation et sont répertoriées sur une liste tenue par l'ARMP.
Somme toute, les rapports de contrôles annuels a
posteriori effectués par l'ARMP doivent être transmis aux
autorités étatiques pour être ensuite publiés. Mais
étant dans une logique de transparence garantie par un organe de
régulation, il importe que nous puissions appréhender une autre
façon dont use ce dernier pour assurer le respect des règles et
la sanction des manquements constatés. La charte de transparence et
d'éthique, garantissant un droit de recours lié au contentieux
à tout candidat qui estime être injustement évincé,
nous allons donc nous en inspirer pour aborder la fonction contentieuse de
l'ARMP dans le règlement non juridictionnel des différends
relatifs à la passation.
128 ARMP Sénégal, Rapport annuel 2011, P.14
Titre 1, Chapitre II : Garantie d'une transparence dans les
mécanismes de contrôle 48
La transparence dans les marchés publics au
Sénégal et au Togo
|