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La souveraineté de l'état en période de conflits déstructurés.

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par Paul Mystère Léonnel NTAMACK BATH
Université de Douala - Master II Recherche Droit international public 2010
  

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B. Des résolutions du Conseil de sécurité sur le respect de la souveraineté de l'Etat défaillant

La sauvegarde de la souveraineté de l'Etat en période de conflit armé interne déstructuré par des résolutions du Conseil de Sécurité s'appréhende au regard du fait que le Conseil de sécurité constate l'existence d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix, décide quelles mesures seront prises pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales420(*). Le Conseil de sécurité des Nations Unies a, le pouvoir et le devoir en vertu de la Charte, d'agir à tout moment de la manière qu'il juge nécessaire pour maintenir ou rétablir la paix et la sécurité internationales421(*).

C'est à partir de ce qui précède, qu'il faut comprendre l'action du Conseil de sécurité dans la protection de la souveraineté de l'Etat défaillant dans le cadre du maintien de la paix et de la sécurité internationales. Ainsi, en affirmant surtout le droit d'auto-détermination du peuple somalien à qui incombe « la responsabilité ultime de la réconciliation nationale et de la reconstruction de son propre pays »422(*), le Conseil de sécurité entend signifier que l'extinction de l'Etat irait à l'encontre du droit d'un peuple n'ayant d'aucune manière, exprimé sa volonté d'en finir avec le seul instrument par lequel il peut faire entendre sa voix égale à celle des autres peuples sur la scène internationale423(*). On l'a en réalité plus généralement observé : alors que les définitions dominantes de l'Etat mettent dans l'ensemble l'accent sur le critère de l'autonomie gouvernementale effective, le peuple qui forme la substance de l'Etat devient lors des crises profondes déjà illustrées dans le cas particulier de la debellatio, « l'élément constitutif prédominant », en attendant de retrouver son statut de population une fois rétablie la situation424(*). De plus, en rappelant aussi que « tous les Etats doivent s'abstenir d'intervenir militairement en Somalie et que le territoire somalien ne doit pas servir à compromettre la stabilité dans la sous-région »425(*), le Conseil de sécurité paraît exclure tout recours à la force contre l'Etat défaillant en dehors des hypothèses légalement prévues par le droit international426(*).

Encore, la logique ultime du principe du respect de l'intégrité territoriale est-elle respectée à travers l'application de la règle de l'uti possidetis ; par application de l'uti possidetis, on identifie immédiatement les frontières internationalement protégées427(*). La condamnation de la tentative katangaise par l'organisation des Nations Unies ne s'explique pas seulement par la présence d'intérêts économiques étrangers qui soutenaient les visées séparatistes même si c'est cette présence qui a été de nature à motiver l'intervention du Conseil de sécurité428(*). La résolution du 24 novembre 1961 condamne l'entreprise pour elle-même en la déclarant « contraire à la loi fondamentale du Congo et aux décisions du Conseil de sécurité »429(*). C'est la même idée qui prévaudra lors de la tentative biafraise, alors même que l'arrière-plan était fondamentalement différent, le Secrétaire général des Nations Unies déclarait que l'ONU ne peut accepter et n'acceptera jamais une sécession dans l'un de ses Etats-membres430(*). En plus, la sécession katangaise est la seule hypothèse jusqu'à maintenant où les casques bleus ont mené des combats et utilisé la force pour d'autres motifs que leur propre défense, ainsi, la dernière opération d'envergure entreprise par l'ONUC en décembre 1962 a conduit à l'éviction des dirigeants sécessionnistes katangais431(*).

Dans la poursuite de l'analyse, il est important de relever que l'appel au respect de la souveraineté, de l'intégrité territoriale, de l'indépendance politique et de l'unité de la Somalie comme de nombreux Etats privés d'autorité gouvernementale ou de tout pouvoir effectif pour une période plus ou moins prolongée, est d'ailleurs un leitmotiv des résolutions du Conseil de sécurité, qui entend ainsi réaffirmer les principes juridiques cardinaux protégeant les éléments constitutifs de l'Etat des menaces venues de l'intérieur, mais plus encore et surtout de l'extérieur, en d'autres termes d'Etats tiers432(*).

Le Conseil de sécurité, même lorsqu'il donne son habilitation à une intervention, la nouveauté des justifications et surtout les modalités de l'intervention aboutissent au principe de non-ingérence433(*). La souveraineté ne disparaît pas pour autant puisqu'il s'agit de la rétablir, mais elle doit composer à la fois avec une logique de puissance et surtout avec l'émergence d'une logique de responsabilité434(*). C'est en fait ce qui ressort à la lecture des résolutions du Conseil de sécurité ces dernières décennies (1992-2013).

Le Conseil de sécurité des Nations Unies, dans sa mission, constate que la détérioration de la situation au Libéria constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales, en particulier dans l'ensemble de la région de l'Afrique de l'Ouest435(*). Aussi, il remercie la CEDEAO des efforts qu'elle fait pour rétablir la paix, la sécurité et la stabilité au Libéria436(*). Dans la recherche de solution à la crise au Rwanda, le Conseil de sécurité réaffirme que l'Accord de la paix d'Arusha reste le seul cadre valable pour trouver le règlement du conflit au Rwanda et constitue le fondement de la paix, de l'unité nationale et de la réconciliation dans le pays ; il affirme en plus, sa volonté de préserver l'unité et l'intégrité territoriale du Rwanda437(*).

Gravement préoccupé par la crise à laquelle est confrontée la Guinée-Bissau et par la grave situation humanitaire dans laquelle se trouve la population civile du pays, le Conseil se déclare fermement déterminée à préserver l'unité, la souveraineté, l'indépendance politique et l'intégrité territoriale de la Guinée-Bissau438(*). Aussi dans le cadre du conflit au Kosovo, le Conseil de sécurité réaffirme l'attachement de tous les Etats Membres à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de la République Fédérale de Yougoslavie et de tous les autres Etats de la région439(*). Ensuite, il exige en particulier que la République Fédérale de Yougoslavie mette immédiatement et de manière véritable un terme à la violence et à la répression au Kosovo, entreprenne et achève le retrait vérifiable et échelonné du Kosovo de toutes les forces militaires, paramilitaires et de police440(*).

De plus et à nouveau préoccupé par la précarité de la situation en Sierra Léone, le Conseil de sécurité affirme l'attachement de tous les Etats au respect de la souveraineté, de l'indépendance politique et de l'intégrité territoriale de la Sierra Léone441(*). A la suite du constat par le Conseil de sécurité que la situation au Timor oriental constitue une menace pour la paix et la sécurité, il réaffirme le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale, de l'Indonésie, même s'il reste préoccupé par les informations faisant état de violations systématiques, générales et flagrantes du droit humanitaire international et des droits de l'homme commises au Timor oriental442(*). Le Conseil de sécurité souligne tout de même que le Gouvernement indonésien demeure responsable, du maintien de la paix et de la sécurité au Timor oriental443(*).

La sauvegarde de la souveraineté de l'Etat défaillant par le Conseil de sécurité est de nouveau appréhendé à travers la résolution 1643 (2005) relative à la situation en Côte-d'Ivoire, dans laquelle l'organe chargé du maintien de la paix et de la sécurité internationales réaffirme « son ferme attachement au respect de la souveraineté, de l'indépendance, de l'intégrité territoriale et de l'unité de la Côte-d'Ivoire, et rappel[le] l'importance des principes de bon voisinage, de non-ingérence et de coopération régionale »444(*).

Se déclarant gravement préoccupé par la situation en Jamahiriya Arabe Libyenne, le Conseil de sécurité condamne la violence et l'usage de la force contre les civils445(*), la violation flagrante et systématique des droits de l'homme, y compris les détentions arbitraires, disparitions forcées, tortures et exécutions sommaires446(*). En revanche, il réaffirme son ferme attachement à la souveraineté et l'unité nationale de la Jamahiriya arabe libyenne447(*) même si la situation en Jamahiriya arabe libyenne reste une menace pour la paix et la sécurité internationales448(*). Ainsi, même lorsque le Conseil de sécurité entreprend des mesures coercitives en vertu du chapitre VII de la Charte, celles-ci respectent la souveraineté de l'Etat. A ce titre, en tant qu'organe principal des Nations Unies garant du maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Conseil de sécurité par le biais de ses résolutions, protège, respecte et sauvegarde la souveraineté de l'Etat en décrépitude.

La situation récente au Mali a été une occasion de plus pour le Conseil de sécurité de réaffirmer son ferme attachement à la souveraineté à l'unité et à l'intégrité territoriale du Mali449(*). Tout en soulignant que la situation dans le Nord du Mali et le fait que des groupes terroristes et des réseaux criminels y sont solidement implantés continuent de faire peser une grave menace, sur la population du Mali tout entier et la stabilité du Sahel, de l'Afrique en général et de la communauté internationale dans son ensemble450(*). C'est pour cela qu'il demande instamment aux Etats Membres et aux organisations régionales et internationales de fournir aux Forces de défense et de sécurité maliennes un soutien coordonné sous forme d'aide, afin de rétablir l'autorité de l'Etat malien sur la totalité du territoire national ,de préserver l'unité et l'intégrité territoriale du Mali et d'atténuer la menace que représentent les organisations terroristes et les groupes qui y sont affiliés451(*).

Réaffirmant que la Charte des Nations Unies lui assigne la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales, le Conseil de sécurité entend oeuvrer à l'instauration d'une paix durable pour toutes les situations dont il est saisi, qu'il est déterminé à ce que les buts et principes consacrés dans la Charte, y compris les principes de l'indépendance politique, de l'égalité souveraine et de l'intégrité territoriale de tous les Etats qu'il respecte et auxquels il est attaché, soient observés dans toutes les activités de maintien et de consolidation de la paix, et que les Etats doivent s'acquitter des obligations que leur fait le droit international452(*). De plus, dans sa mission de sauvegarde de la souveraineté de l'Etat en toute circonstance, le Conseil de sécurité salue le rôle décisif que jouent les opérations de maintien de la paix des Nations Unies pour ce qui est de maintenir la paix et la sécurité internationales, de prévenir et de maîtriser les conflits, de faire respecter les normes internationales et appliquer ses décisions et de consolider la paix après les conflits453(*). Pour cela, il prend note de la stabilité générale découlant de l'amélioration continue de la situation sur les plans politique et de la sécurité, salue la ferme volonté des autorités timoraises et des autres parties intéressées d'encourager le dialogue national et la participation pacifique de tous, aux mécanismes démocratiques, et les mesures qu'elles continuent de prendre pour promouvoir le maintien de la paix, de la stabilité et de l'unité454(*). C'est pour cette raison que le Conseil de sécurité des Nations Unies accueille avec satisfaction le rapport du Secrétaire Général en date du 18 janvier 2012 (S/2012/43), tout en réaffirmant somme toute, « son attachement sans réserve à la souveraineté, à l'indépendance, à l'intégrité territoriale et à l'unité nationale du Timor-Leste, ainsi qu'à la promotion d'une stabilité durable dans ce pays »455(*).

De ce qui précède, il paraît évident que la mission fondamentale du Conseil de sécurité est la protection de la souveraineté de l'Etat en période de conflit armé, qui plus est déstructuré. En tant qu'autorité internationale garante de la sécurité collective, le Conseil de sécurité participe à la sauvegarde de la paix, de la sécurité et de la coopération internationales. En revanche, si la décision du Conseil de sécurité d'autoriser l'opération de maintien de la paix relève à la fois d'une logique de puissance (accord des cinq membres permanents dont la seule superpuissance existant aujourd'hui) et d'une logique « communautaire » (les intérêts de la communauté internationale)456(*), le déroulement de l'opération n'est pas toujours conforme, dans toutes les interventions récentes au schéma de la Charte ; alors que celle-ci par les article 43 et suivants de la Charte, réalise un compromis entre l'accord des puissances et la collectivisation de l'action, l'habilitation opérée aujourd'hui dans le cadre de ses interventions, aboutit à donner une grande liberté aux acteurs, qui met au premier plan la puissance et notamment celle de l'unique superpuissance457(*). Ainsi, les résolutions adoptées par le Conseil de sécurité en vue de résoudre une situation de déliquescence de l'Etat, sont abondantes et appréciables.

Toutefois, les résolutions non adoptées au sein du Conseil de sécurité à but humanitaire ou du fait des crises menaçant la paix et la sécurité internationales en raison du veto de l'un des membres permanents du Conseil de sécurité au moins, ont contribué à accroître le sentiment de « deux poids deux mesures »458(*). Ainsi que la conscience de l'instrumentalisation d'une idée généreuse au service d'intérêts politiques moins avouables, la frontière entre l'humanitaire et le politique étant assez, floue459(*). C'est pour cette raison que, au regard de la pratique du Conseil de sécurité, il est à noter une réelle et forte instrumentalisation du droit de veto.

* 420 Article 39 de la Charte des Nations Unies, du 26 juin 1945, entrée en vigueur le 24 octobre 1945, ratifiée par le Cameroun le 20 septembre 1960.

* 421 Article 51 de la Charte des Nations Unies, op. cit.

* 422 S/RES/794 (1992), 3 décembre 1992, §16 du préambule ; S/RES/886 (1994), 18 novembre 1994, §4 du préambule, il s'agit aussi d' « aider le peuple somalien à promouvoir et à faciliter la réconciliation politique, grâce à une large participation de tous les secteurs de la société somalie, ainsi que le rétablissement des institutions nationales et régionales et celui de l'administration civile dans l'ensemble du pays » (S/RES/814, 26 mars 1993).

* 423 Gérard CAHIN, « L'Etat défaillant en droit international : quel régime pour quelle notion ? », Droit du pouvoir, pouvoir du droit, Mélanges offerts à Jean Salmon, Bruxelles, Bruylant, 2007, p. 191.

* 424 Ibid., voir J.-D. MOUTON, « L'Etat selon le droit international : diversité et unité », in L'Etat souverain à l'aube du XXI siècle, Colloque de Nancy, Paris, Pedone, 1994, pp. 731-754.

* 425 Gérard CAHIN, « L'Etat défaillant en droit international : quel régime pour quelle notion ? », op. cit., p. 192, voir S/PRST/2001/1, 11 janvier 2001, 2000/22, 1999/16, 1957/57, 1993/31.

* 426 Ibid.

* 427 Hélène RUIZ FABRI, « Genèse et disparition de l'Etat à l'époque contemporaine », op. cit., p. 158.

* 428 Ibid.

* 429 Ibid., voir Déclaration de U.Thant citée in CALOGEROPOULOS-STRATIS, Le droit des peuples à déposer d'eux-mêmes, Bruxelles, Bruylant, 1973, 388p., p. 347

* 430 Ibid., pp. 158-159

* 431 Hélène RUIZ FABRI, « Genèse et disparition de l'Etat à l'époque contemporaine », A.F.D.I.., 1992, p. 159.

* 432 Ibid., voir S/RES/1519 (2003), 16 décembre 2003

* 433 Jean-Denis MOUTON, « Retour sur l'Etat souverain à l'aube du XXIe siècle », op. cit., p. 332.

* 434 Ibid.

* 435 S/RES/788 (1992), 19 novembre 1992, §6 du préambule

* 436 Ibid., §1.

* 437 S/RES/912 (1994), 21 Avril 1994, §§ 12 et 14

* 438 S/RES/1216 (1998), 21 décembre 1998, §§ 3 et 4.

* 439 S/RES/1244 (1999) 10 juin 1999, §12 du préambule

* 440 Ibid., §3

* 441S/RES/1245 (1999), 11 juin 1999, §§ 4 et 5 du préambule

* 442 S/RES/1264 (1999), 15 septembre 1999, §§ 15, 13 et 14 du préambule

* 443 Ibid., §5

* 444 S/RES/1643 (2005), 15 décembre 2005, §3 du préambule

* 445 S/RES/1970 (2011), 26 Février 2011, §2 du préambule

* 446 S/RES/1973 (2011), 17 mars 2011, §6 du préambule

* 447 S/RES/1970(2011), 26 Février 2011, §15 du préambule

* 448 S/RES/1973 (2011), 17 mars 2011, §§21 et 22 du préambule

* 449 S/RES/2085 (2012), 20 décembre 201, §3 du préambule

* 450 Ibid., §4 du préambule

* 451 Ibid., §7

* 452 S/RES/2086 (2013), 21 janvier 2013, §§ 2 et 3 du préambule

* 453 Ibid., § 4 du préambule

* 454 S/RES/2037 (2012), 23 février 2012, § 5 du préambule

* 455 Ibid., §§ 3 et 4

* 456 Jean-Denis MOUTON, « Retour sur l'Etat souverain à l'aube du XXIe siècle », in Etat, société et pouvoir à l'aube du XXIe siècle, Mélanges à l'honneur de François BORELLA, p. 332.

* 457 Ibid.

* 458 Abdelwahab BIAD, Droit international humanitaire, Paris, Ellipses, 2007, p. 95

* 459 Ibid.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault