CHAPITRE 2 : LE CADRE THEORIQUE
Dans ce chapitre, nous allons présenter la
théorie du taux de change réel d'équilibre qui va
permettre plus tard d'estimer le taux de change réel d'équilibre
de la zone UEMOA. Nous allons donc aborder les différentes
théories du taux de change réel d'équilibre, et expliquer
pourquoi certaines théories ont été abandonnées au
profit d'autres. Nous allons par la suite aborder les développements
théoriques récents concernant le régime de change optimal
et les approches théoriques du lien entre taux de change, croissance et
inflation dans la zone UEMOA.
2.1. Les théories du taux de change réel
d'équilibre
Il existe plusieurs théories qui ont été
développées sur le taux de change réel d'équilibre.
La parité des pouvoirs d'achat (PPA) constitue la théorie qui
était la plus utilisée pour déterminer les taux de change
réel d'équilibre. Cette théorie existe sous deux formes :
la forme absolue et la forme relative.
La forme absolue de la PPA s'applique en l'absence de toute
entrave au commerce international (barrières tarifaires,
barrières non tarifaires, etc.) en supposant négligeables les
coûts de transaction et d'informations. Selon cette approche, la valeur
du taux de change nominal est déterminée par le rapport des
niveaux de prix entre deux pays. Cette définition découle de la
loi du prix unique selon laquelle le prix d'un bien échangeable est
identique partout, une fois converti dans une monnaie commune. La
réalisation de cette loi suppose alors que les taux de change
réels bilatéraux sont toujours égaux à
l'unité. En présence d'entraves au commerce international, la loi
du prix unique ne s'applique plus.
Le principe de la PPA peut alors s'exprimer sous une version
dite relative : une variation du taux de change nominal vient compenser
l'écart d'inflation. On rappelle que cette théorie a
été introduite par Cassel en 1916 qui a suggéré de
définir le niveau du taux de change nominal d'équilibre comme le
taux assurant la parité de pouvoir d'achat entre deux monnaies : un bien
quelconque peut être échangé contre la même
quantité de biens dans son pays d'origine ou dans tout autre pays
après conversion en monnaie locale. Dans ces conditions, le taux de
change réel est constant (mais non nécessairement égal
à l'unité).
AMANI Aya Marie Estelle, DEA/MASTER NPTCI 4ème promotion
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De façon générale, la théorie de
la PPA souffre de plusieurs inconvénients majeurs, tant au niveau
théorique qu'au niveau empirique, bien qu'elle puisse être utile
pour évaluer les parités de long terme entre pays à niveau
de développement similaire.
Au niveau théorique, le taux de change réel
auquel fait référence la PPA ne permet pas de relier le taux de
change réel à la situation économique d'un pays, notamment
à sa position extérieure. Au niveau empirique, les
difficultés sont nombreuses. En particulier, la PPA suppose la constance
du taux de change réel, ce qui semble difficilement compatible avec les
importantes fluctuations observées des parités réelles.
Cependant, la littérature théorique et empirique
actuelle sur les taux de change réel d'équilibre de long terme
sont dominées par trois modèles, à savoir le Fundamental
Equilibrium Exchange Rate (FEER) de Williamson (1994), le Natural Real Exchange
Rate (NATREX) de Stein (1994); Stein et Allen (1995); Stein et Sauernheimer
(1996) et le Behavioral Equilibrium Exchange Rate (BEER) de MacDonald (1997);
Clark et MacDonald (1998).
Pour le modèle FEER ou modèle du taux de change
d'équilibre fondamental, le taux de change d'équilibre est celui
qui assure à la fois, pour l'économie nationale
considérée, l'équilibre interne, défini par son
taux de croissance potentiel et l'équilibre externe au sens du solde du
compte courant potentiel. De plus, de nombreuses difficultés pour
caractériser l'équilibre externe, notamment l'évaluation
des élasticité-prix du commerce extérieur, nuisent
à la fiabilité des estimations obtenues. Cela explique que l'on
préfère utiliser une version différente de ce
modèle, appelée le modèle BEER ou taux de change
d'équilibre comportemental. Pour le déterminer, sont retenues
comme principales variables fondamentales la position extérieure nette
(solde des investissements étrangers dans le pays et des investissements
du pays à l'étranger), la productivité relative
(l'efficacité économique mesurée notamment par la
production du pays rapportée à son volume d'heures de travail) et
les termes de l'échange (rapport des prix à l'exportation aux
prix à l'importation).
Quant au modèle NATREX ou modèle du taux de
change réel naturel, ce modèle reprend la théorie de la
PPA, mais sans l'obligation de considérer comme constant le taux de
change réel et le modèle par la balance des paiements mais sans
l'obligation de voir cette balance équilibrée à chaque
période. Il suffit que les mouvements de capitaux aient une
évolution compatible avec un
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endettement international soutenable à long terme. Il
recherche en définitive le taux de change qui assure des flux de
capitaux optimaux. Ce taux de change doit permettre tout à la fois,
globalement, d'avoir une allocation internationale optimale de l'épargne
et, à chaque économie nationale, de trouver son sentier de
croissance potentielle. Mais le NATREX est également un modèle
opérationnel en ce sens qu'il permet d'établir les estimations du
taux de change courant, en sachant que le taux de change courant doit converger
vers le NATREX et d'autant plus rapidement que son flottement est libre.
Cependant, Edwards (1989) et Elbadawi (1994) estiment le taux
de change réel d'équilibre de plusieurs pays en voie de
développement en régressant le taux de change réel sur des
variables telles que le progrès technique, l'accumulation du capital, le
niveau et la répartition de la dépense publique entre biens
échangeables et non échangeables, les termes de l'échange
extérieur, les tarifs à l'importation, et des indicateurs du
contrôle des changes. Halpern et Wyplosz (1995) utilisent une approche
identique pour les pays en transition d'Europe de l'Est et font notamment
apparaître le rôle de la productivité apparente du travail,
des termes de l'échange et du taux de participation sur le marché
de l'emploi.
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