2.5. Organisation de la protection sociale selon les
zones
Quels que soient ses modes
d'organisation,
sous la responsabilité
directe
-' 20 -'
(retraite,
chômage,
handicap...), ou
pour permettre l'accès aux soins de
santé, soit en
organisant l'offre de
soins, soit en en
solvabilisant la
demande.
Les mécanismes que
les différents pays ont
mis en place ou les carences
des systèmes doivent être
différemment appréciés
selon le niveau de
développement du pays
ainsi que selon son
évolution
politique,
économique ou
institutionnelle.
Il nous a donc semblé
nécessaire de décrire
les systèmes existants
selon trois types de zones :
les pays en développement (A),
les pays émergents ou à revenu
intermédiaire (B)
et les pays en transition
(C) (1).
2.5.1. Les pays en développement de la zone de
solidarité
prioritaire (ZSP)
Les systèmes
classiques de
sécurité
sociale ne protègent pas
plus de 20 % de la
population active dans
beaucoup de pays en développement. Ce
pourcentage ne dépasse guère les 10 % dans une
grande partie de l'Afrique
subsaharienne. Il
s'agit des
travailleurs organisés au
sein du secteur formel qu'il
soit public,
tels que les
fonctionnaires de l'Etat et
des services publics, ou
qu'il soit
privé, au sein des
grandes entreprises.
Echappent, la plupart du
temps, à cette protection
sociale, les
populations qui exercent
leur activité dans ce
qu'on appelle le secteur
informel : artisans,
commerçants, professions
libérales,
agriculteurs. Le
fait de disposer de revenus leur donne
la possibilité
d'envisager des perspectives
de mise en place de mécanismes
nouveaux.
1°. Le cadre institutionnel de la protection
sociale
a) Les pays francophones subsahariens
Dans les pays de
l'Afrique francophone, les
régimes publics de
sécurité
sociale sont
relativement récents.
Ils ont été fortement
inspirés par la
présence
coloniale.
Les premières mesures
légales de
sécurité
sociale en faveur des travailleurs
africains remontent à 1949 dans
les territoires sous
administration
belge et à 1955 - 1956 dans
les territoires sous
administration
française. Au moment des
indépendances,
l'influence française a
été très forte. Les codes de
la sécurité
sociale de la
plupart de ces pays sont
largement issus des textes
français.
servies aux personnes âgées sont
financées soit par
l'Etat et/ou par les
cotisations des employeurs
et des personnes assurées. A cette couverture
universelle s'ajoute
parfois
-' 21 -'
Conçus au départ pour
compléter les formes
traditionnelles de
soutien fournies par la
communauté d'origine
aux individus
confrontés aux nouvelles structures
économiques et
sociales, ces
systèmes ont dû rapidement faire
face à une inadaptation de ces formes
traditionnelles de
solidarité pour des
travailleurs qui en
étaient
éloignés et qui
dépendaient de plus en
plus d'un emploi
salarié. Les
prestations des premiers régimes de
sécurité
sociale ont donc tout
naturellement concerné les
salariés des
villes, qu'ils
relèvent du secteur public ou de
grandes entreprises
privées.
On a ainsi vu
apparaître dans les pays qui
avaient été
administrés par la
France des mécanismes assurant une
certaine forme de protection du revenu en cas
de maternité ou
d'incapacité de travail,
ainsi que des systèmes de
prestations familiales
selon la technique de
l'assurance sociale
financée par les
bénéficiaires
et par les employeurs.
Après l'indépendance,
ont souvent été instaurés des
régimes servant des prestations
à long terme,
vieillesse,
invalidité,
survivants. Ces
régimes sont gérés par des
organismes publics dont le
dispositif
juridique est parfois
incomplet. Pour 80 % des
organismes, il
s'agit
d'Etablissements publics
nationaux dans lesquels
la représentation de l'Etat est
prépondérante par rapport aux partenaires
sociaux au niveau des
instances de
décision.
Les soins de santé ont,
en général, été
considérés comme
relevant
essentiellement de
la responsabilité des
services nationaux de santé
publique dépendant directement du
ministère de la
santé et financés par
l'impôt. Devant la
difficulté pour
les pouvoirs publics
d'assurer à tous des soins
gratuits et de bonne qualité,
des institutions de
protection sociale de
quelques pays ont ouvert leurs propres
centres médico-sociaux pour permettre
à leurs assurés et à
leurs familles de
bénéficier des
soins dont ils avaient
besoin. Parfois,
ces centres ont même été ouverts à un
plus large public
(1).
b) Les pays "anglophones"
Dans les pays
anglophones, en
général, les prestations
universelles
-' 22 -'
une couverture
complémentaire. La
couverture santé est assurée soit à
travers les soins gratuits
dispensés dans les
hôpitaux, soit par
l'intermédiaire des
dispensaires
publics.
Parallèlement
à un système beveridgien
financé par les
pouvoirs publics,
s'instaurent dans certains pays des
régimes de base basés sur le
travail. Ils permettent au malade de
percevoir tout ou partie du
salaire en cas d'arrêt
maladie ou pour cause de
maternité (1).
E nfin la couverture du
risque accidents du travail
et maladies
professionnelles est
financée soit par
l'employeur seul,
soit conjointement avec
le salarié.
Certains pays
bénéficient
d'un système
d'allocations
familiales financé
par le gouvernement (56).
2°. Les risques couverts
a) Les risques couverts par des mécanismes de
prestations * La vieillesse
Les personnes âgées de plus de
soixante ans représentaient 5 % de
la population dans
les PMA en 1999 (43). Leur nombre a tendance
à augmenter avec la croissance de
la population et
la proportion des personnes ne pouvant
plus assurer par elles-mêmes
la satisfaction de
leur besoin du fait de
leur grand âge tend aussi à
s'accroître.
Pour tenter de se couvrir contre
le risque
vieillesse, la
majorité des
populations de la ZSP
s'appuie sur la
famille
élargie, sur
les solidarités
intergénérationnelles.
Elle compte sur la
propriété des terres ou sur la
dot de leurs filles...
Cependant, le phénomène
d'urbanisation tend à
atténuer les
solidarités
traditionnelles et
le besoin d'une
nouvelle nature de couverture se fait de
plus en plus
ressentir.
Les salariés du
secteur formel s'efforcent
d'y remédier par
l'instauration de
mécanismes faisant appel
au marché ou
administrés par
l'Etat. Toutefois,
ces mécanismes se
développent lentement.
On peut même dire qu'ils
stagnent. Le système est peu
incitatif.
Les indemnités
retraite restent encore
insuffisantes et non
sécurisées.
-' 23 -'
L'absence de confiance dans
le système et
l'insuffisante
capacité
financière des
populations en
période de crise
expliquent la
faible propension
à s'engager dans un système de
prévoyance à long terme.
Des pays ont développé des
systèmes de protection
obligatoire
constitués de fonds de prévoyance.
Dans ce cas, les quotes-parts de
cotisations de
l'employeur et du
travailleur sont versées sur un compte au nom de
l'assuré. A la
survenance du risque, le montant du
capital acquis
(les cotisations
augmentées du produit des placements)
est reversé en une seule fois à
l'assuré. Ici, les
cotisations sont
définies mais
les prestations,
elles, ne seront connues
qu'au moment de la survenance du
risque, sous réserve
qu'une dévaluation
monétaire ne vienne pas
réduire les
prestations à une peau de
chagrin(1).
Dans les pays francophones et
anglophones, les
fonctionnaires jouissent souvent
d'un système de protection
sociale plus protecteur que
les salariés du
secteur privé.
Toutefois, cette tendance est
moins évidente dans
les pays anglophones, et
il arrive même que les
fonctionnaires dans ces pays ne
disposent pas de couverture,
à
l
'inverse du secteur
privé (8).
Depuis 1995,
a été mise en
place une Conférence
Interafricaine des
Marchés d'Assurances
(CIMA) dont l'objet est de
rationaliser les
marchés nationaux d'assurance et de
renforcer la protection des assurés et
des victimes de dommages.
* L'invalidité en cas d'incapacité de
travail
Lorsque des personnes sont trop malades pour
travailler, les pays
industrialisés
leur assurent en général un
revenu de remplacement. Dans
les pays en développement où
la plupart des personnes à bas
revenus, qu'elles
soient en situation de
travailleur indépendant ou comme
salariés, ne sont pas
couvertes par la sécurité
sociale
lorsqu'elles souffrent
d'un handicap qui les
empêche de subvenir à leurs
besoins, elles ne
bénéficient
généralement d'aucune
prestation, si ce
n'est le cas échéant de
l'aide
sociale
lorsqu'elle
existe.
Les systèmes de pension de
la sécurité
sociale mis en
place dans certains pays en
développement comprennent des
prestations
d'invalidité,
mais les
critères auxquels sont
assujetties ces prestations
varient
considérablement d'un
pays à l'autre.
-' 24 -'
Est
officiellement
prise en charge la
participation aux
frais médicaux engendrés par
l'accident ou la
maladie, et dans
la majorité des cas,
une pension est octroyée si
le travailleur ne peut plus exercer
son activité. Dans
la réalité, la
prise en charge gratuite des
soins de santé reste le
plus souvent lettre morte compte tenu de
la défaillance extrême de
la plupart des centres
médico-sociaux et de
l'insuffisance de
médicaments
disponibles dans ces centres
(1).
* Les prestations destinées aux
familles
E n Afrique francophone, les
allocations
familiales
représentaient, au début des
années soixante,
environ la
moitié des dépenses de
sécurité
sociale.
Aujourd'hui, leur
part est tombée à un quart de ces dépenses.
Les
difficultés pour
obtenir des prestations
familiales sont telles que
les
bénéficiaires
potentiels préfèrent
bien souvent y renoncer.
C'est l'une des
raisons pour lesquelles
les caisses
d'allocations
familiales peuvent être
bénéficiaires.
Dans ces conditions,
on peut se poser la question de
l'opportunité de
continuer à couvrir ce
risque. Par
ailleurs, les
allocations
familiales ne sont servies
qu'à un faible
pourcentage de la population
issue
principalement des
milieux urbains et parmi les
familles les mieux
éduquées (1).
b) L'organisation et le financement des
systèmes de santé * La fourniture de soins médicaux par
l'employeur
Dans de nombreux pays, et notamment dans
la plupart des pays
africains francophones, la
législation
du travail impose aux employeurs de mettre en
place une protection contre
la maladie en
organisant directement un
service de santé pour les
salariés de
l'entreprise. Ce
service déborde largement
la prise en charge des
problèmes de santé qui se
manifestent sur le lieu de
travail pour prendre en charge en fait toutes
les manifestations
pathologiques auxquelles est
confronté le
salarié (et ses ayant
droits).
Le service est alors
organisé soit au sein
même de l'entreprise qui
gère ainsi des
équipements
sanitaires tels que
cliniques,
dispensaires et qui
paie directement
les professionnels de
soins, ou dans le cadre de
conventions passées entre
l'entreprise et des
institutions
existantes. De petites et
moyennes entreprises
géographiquement
maladies
transmissibles.
Dans la
réalité, ces centres assurent
une offre de soins et
-' 25 -'
proches se sont parfois regroupées
pour créer un service commun de soins
médicaux (1).
* La fourniture des soins médicaux dans le
cadre des mécanismes de sécurité sociale
L'action de
la sécurité
sociale dans le
domaine des soins de
santé est différente
selon les
régions. Elle est
très peu développée en
Afrique subsaharienne,
contrairement par exemple à
l'Amérique
latine. Il faut sans doute
rechercher des explications à cet
état de fait en Afrique francophone
dans l'influence du
modèle français
d'assurance maladie
fondé sur le principe
de remboursement des frais. Or,
ce mécanisme s'adapte
difficilement dans des pays
où l'infrastructure
médicale et
sociale est peu
développée.
La plupart des pays à
faible revenu ont des
caisses qui n'assurent pas
le risque
maladie et sont engagées dans une
réflexion portant sur une
protection sociale
élargie, y
compris à ce risque.
Certains, à
l'image du Burkina Faso, du
Mali mais aussi de pays
anglophones comme la
Tanzanie, s'efforcent de
redistribuer les ressources
en faveur des districts
sanitaires et de favoriser
les expériences de
mutualisation aux
différents niveaux
local,
régional et
national. D'autres
pays, comme la Côte
d'Ivoire, posent
directement la question du
passage à une assurance maladie
nationale
obligatoire.
Les rares systèmes de
sécurité
sociale qui
fournissent des soins
médicaux sont en général
financés par une partie des
cotisations dues au titre du
régime général par
les employeurs et leurs
salariés.
Dans les pays francophones
d'Afrique, à
défaut d'avoir mis en
place un mécanisme
d'assurance maladie,
ou parfois à côté de ce
mécanisme, des
caisses de sécurité
sociale ont mis en
place une action
sanitaire et
sociale qui sert entre autre
des prestations
médicales et
sociales à travers
les centres médicaux
sociaux. Ces prestations
sont destinées à la
protection de l'assuré en
général, ainsi
que de sa famille, avec un accent
particulier sur la
protection de la mère et de
l'enfant. Les centres
médico-sociaux
participent aux programmes
nationaux de vaccinations et
à la lutte des
-' 26 -'
remplissent une
mission de santé
publique qui s'adresse
bien au-delà des
seuls ressortissants de
l'organisme de
sécurité
sociale (1).
* Le recouvrement des coûts
Les
difficultés
économiques des pays en
développement ont fortement pesé sur
les dépenses sociales
et le secteur de la santé en a
été l'un des plus
affectés. La réduction des
dépenses publiques de santé a eu des
répercussions négatives
importantes sur la
disponibilité et
la qualité de l'offre
de soins. Des mesures
spécifiques ont été
prises pour compenser en partie
l'insuffisance de ces ressources,
mais elles n'ont
pas suffi à surmonter tous les
problèmes.
Depuis 1993, presque tous
les pays de l'Afrique
subsaharienne ont abandonné la
gratuité des soins au
profit de systèmes de recouvrement des
coûts. Il
s'agissait
là d'une démarche
plutôt
d'inspiration
anglo-saxonne consistant à demander
une contribution
financière aux usagers
afin de couvrir une partie
des coûts des soins de santé et
d'améliorer
l'approvisionnement en
médicaments. Diverses
expériences de financement
décentralisé ont ainsi
été
initiées avec
plus ou moins de succès.
Elles sont certes
loin de répondre à
l'ampleur de la
question du financement de
la santé dans les pays en
développement, mais
la démarche est intéressante
même si elle peut poser des
problèmes
d'équité et
d'accès aux soins pour
les couches les plus pauvres
(1).
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