Le dessin du bonhomme chez des enfants autistes : quatre études de cas à l'association burkinabè d'accompagnement psychologique et d'aide à l'enfance (abape).( Télécharger le fichier original )par Wendpanga Daniel OUEDRAOGO Université Ouaga 1 Professeur Joseph Ki-ZERBO - Maitrise en psychologie clinique et pathologique 2015 |
4.2.3.L'affectivitéDans notre analyse, nous avons remarqué que les dessins de ces enfants sont très pauvres en couleur. La plupart d'entre eux n'utilisent qu'une seule couleur qu'ils répandent sur l'ensemble du bonhomme. On observe des bouches assez larges traduisant des préoccupations orales ou des difficultés relationnelles avec l'environnement maternant. Deux (2) dessins sur quatre (4) sont situés dans la partie gauche de la feuille mettant en évidence le fait que ces enfants sont tournés vers leurs mères. L'intérieur des formes est dominé soit par le vide soit par un remplissage systématique d'une couleur unique. Des difficultés à établir des contacts sociaux sont également observables. Ces indices sont observés chez les enfants ayant une carence affective, ce qui nous amène à conclure que notre troisième hypothèse secondaire est confirmée : Le dessin du bonhomme de l'autiste burkinabè, tout comme celui de l'autiste européen reflète des carences affectives précoces (Tustin, 1986 ; Haag, 1989, Boutinaud, 2013). L'analyse des quatre dessins enfantins nous permet d'observer une déficience intellectuelle chez la majorité. Ceux-ci ont un retard au niveau du graphisme car la majorité se situe au stade du réalisme manqué (3 à 4 ans selon Luquet) et au stade du dessin éparpillé (4 à 6 ans selon Royer). L'image du corps est troublée car ces enfants présentent des angoisses corporelles archaïques. Les limites du corps ne sont pas solides et le corps est comme un sac dépourvu de son contenu. Les carences affectives sont observées à travers les caractéristiques graphiques mais aussi à travers l'observation des bonshommes dessinés. Le dessin du bonhomme a donc permis l'évaluation du niveau intellectuel, l'étude de l'image du corps et de la vie affective de ces enfants autistes. D'une manière générale, cette évaluation a mis en exergue une immaturité de ces enfants par rapport à ces composantes majeures de la vie psychique. Nous pouvons donc conclure que notre hypothèse générale est confirmée : une ressemblance existe entre les dessins des bonshommes des enfants autistes décrits dans la littérature et les dessins des enfants autistes du Burkina Faso. Ce travail nous a permis de savoir que le dessin du bonhommereflète à la fois la maturité intellectuelle et la vie affective (Widlöcher, 2002) de l'enfant quel qu'en soit son milieu culturel et son niveau d'équilibre psychologique. Nous constatons que chez les enfants autistes, il y a un véritable problème de régulation de l'émotion comme l'a souligné le modèle de la régulation émotionnelle (Rogé, 2003). Cependant nous pensons que ce trouble de la régulation émotionnelle est la conséquence d'une défaillance du contenant plus qu'à des perturbations du cerveau. Cette analyse nous permet de confirmer les travaux de Haag (1989, 1995) sur la structuration de l'image du corps. Celle-ci affirme que l'intégration de l'image du corps passe d'abord par l'intégration de la tête, puis de la moitié supérieur du corps et enfin des membres inférieurs. Nous remarquons que tous les enfants ont suivi cette logique dans la représentation du bonhomme. Contrairement à l'affirmation de Royer21(*), nous constatons que Alpha et Brahim dont les QI sont respectivement de 50 et 60 sont parvenus à dessiner le bonhomme. La seule fille présentée a obtenu les meilleurs scores au niveau de la représentation de la tête et de la structuration du schéma corporel. Royer (1984) avait constaté que les filles étaient légèrement en avance sur les garçons du point de vue développement graphique. Nous voyons qu'il n'y a pas de morcellement des dessins contrairement au constat de certains auteurs (Boutinaud, 2013). En définitive, nous pouvons dire que la plupart des enfants autistes rencontrés au Burkina présentent un retard mental mais pas tous et des difficultés affectives aigues (Lenoir ; Malvy &Bodier-rethore, 2007 ; Tustin, 1986). Cependant, l'absence de travaux de validation des outils que nous avons exploités au Burkina Faso constitue la principale limite de notre travail. En effet, au lieu de considérer ces enfants comme déficients mentaux, il serait plus prudent pour nous de supposer qu'il s'agit d'un déséquilibre affectif avec un retentissement sur le plan intellectuel. * 21Pour elle, réussir à bien dessiner un bonhommenécessiteun minimum d'intelligence qu'on pourrait situer aux alentours d'un Q.I de 80 à 90. |
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