3.2. De l'engagement mondial en faveur de
l'autonomisation de la femme et
de l'éducation pour tous.
Fort de toute la mobilisation, l'autonomisation de la femme
fait actuellement l'objet des plusieurs traités internationaux et
régionaux. Elle est devenue à la fois un objectif des programmes
de développement et un processus pour le changement social. Elle ne
concerne plus uniquement l'identité personnelle, mais entraine aussi une
analyse globale des droits humains.
3.2.1. Engagement international en faveur de
l'autonomisation de la femme
La prise de conscience mondiale sur la situation de la femme a
suscité l'élaboration, sur le plan international et
régional, des politiques communes et publiques intégrant la
dimension genre et visant spécialement l'autonomisation de la femme. A
la base de ces politiques figurent des traités de promotion des droits
de l'homme, parmi lesquels on peut mentionner la charte internationale des
droits humains, les quatre conférences mondiales sur les femmes, ainsi
que la convention sur l'élimination de toutes les formes de
discriminations à l'égard de la femme.
En effet, la Charte Internationale des droits de
l'homme19 constitue la base juridique internationale garantissant
les droits et libertés fondamentaux à tout être humain.
Certes, la Déclaration universelle des Droits de l'Homme (DUDH)
énonce, à son article 2, le principe général de
non-discrimination dans l'exercice des droits de l'homme. Le Pacte
international relatif aux droits économique, sociaux et culturels
(PIDESC) décrit, de manière très détaillée,
les droits énoncés dans la DUDH et précise les mesures
nécessaires à leur réalisation. Pour le droit à
l'éducation par exemple, les articles 13 et 14 précisent le
devoir, pour les Etats, d'assurer gratuitement l'enseignement primaire
obligatoire et de prendre des mesures en vue d'instaurer la gratuité
dans l'enseignement secondaire et supérieur.
19Formé de la DUDH, du PIDES', et du PIDCP.
60
Pour sa part, le Pacte international relatif aux droits civils
et politiques (PIDCP) développe les droits civils et politiques
énoncés dans la DUDH. Son article 26 garantit
l'égalité devant la loi et la protection, sans discrimination, de
la loi en vigueur dans un Etat ; et l'article 25 garantit le droit de prendre
part à la direction des affaires publiques, en particulier par des
élections périodiques et honnêtes.
Ensuite, les quatre conférences mondiales sur
les femmes, organisées par les Nations Unies, ont
été le moyen de placer la question de l'égalité
entre les sexes au coeur de l'agenda mondial. A en croire l'ONU (2000), ces
conférences ont permis de grouper la communauté internationale
autour d'un ensemble d'objectifs communs, assorti d'un plan d'action effectif
pour la promotion générale des femmes, dans toutes les
sphères de la vie publique et privée.
En fin, la Convention sur l'élimination de toutes les
formes de discriminations faites à la femme (CEDEF),
adoptée en décembre 1979, énonce plus en détail ce
que l'on attend par discrimination sexuelle sous l'angle de
l'égalité entre l'homme et la femme. En outre, elle met l'accent
sur l'obligation faite aux Etats parties de s'abstenir de toute pratique
discriminatoire à l'égard des femmes dans leurs fonctionnements
internes et de prendre des mesures visant à instaurer
l'égalité en droit et en fait dans tous les domaines de la vie,
notamment en faisant disparaitre les comportements, coutumes et pratiques
discriminatoires dans la société.
L'adoption de ces traités, ainsi que de tant d'autres,
et leurs ratifications par les Etats ont suscité et favorisé
l'élaboration des politiques et programmes visant spécialement
l'égalité entre hommes et femmes. Sans être exhaustif, nous
nous proposons de relever, à travers cette section, quelques-unes de ces
politiques développées au plan international, régional et
national.
i. Du Plan d'action de Mexico au Plan d'Action de
Beijing
Les quatre Conférences Mondiales sur les femmes ont
abouti à l'élaboration de quatre plans d'action de :
Mexico, Copenhague, Nairobi et Beijing.
La première conférence mondiale sur les femmes,
tenue en 1975 à Mexico (Mexique), a initié, pour la
première fois, un dialogue de portée internationale sur
l'égalité de sexe et aboutit à l'élaboration et
l'adoption du Programme Mondial d'Action de Mexico. Ce programme
établissait les résultats minimum devant être atteints
avant 1980. Il permettrait également de garantir un accès des
femmes aux domaines tels que l'éduction, en augmentant leurs
opportunités d'emploi, leur
Ce ne sera, en fin, qu'à la quatrième
conférence mondiale sur les femmes, organisée à Beijing
(Chine) en 1995, que l'on assistera véritablement à
l'ouverture
61
chance de participation à la vie publique, aux services
de santé, à la sécurité alimentaire et au planning
familial.
Par la suite, il fut organisé, en 1980, la
deuxième conférence mondiale sur la femme à Copenhague
(Danemark). Ce forum eut pour objectif d'examiner et revoir le Programme
mondial d'action mis en place lors de la conférence de Mexico. Durant de
ces assisses, les représentants des 145 Etats membres de l'ONU
reconnurent, de manière unanime, que des progrès significatifs
avaient été réalisés, parmi lesquels figure
l'adoption, par l'Assemblé Générale des Nations Unies, de
la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
à l'égard de la femme.
Cette conférence releva cependant l'émergence
des disparités entre les droits théoriquement garantis et la
capacité pour les femmes d'exercer effectivement ces droits. D'où
l'adoption du Plan d'action de Copenhague qui appelait à la mise en
place des mesures nationales plus importantes afin de garantir aux femmes la
propriété et le contrôle foncier, ainsi qu'une
amélioration des droits en matières de succession, de garde
parentale et de perte de nationalité.
En 1985, il fut organisé à Nairobi, au Kenya, la
troisième conférence mondiale sur la femme. Et contrairement
à la précédente, celle-ci a eu comme objectif la recherche
des voies nouvelles qui permettrait de surmonter les obstacles de la
décennie 1975-1985 (appelée Décennie des Nations
Unies pour les Femmes). A l'issu de cette conférence furent
développées et adoptées les «
Stratégies prospectives d'action de Nairobi pour l'an
2000», dont la nouveauté réside dans le fait
qu'elles déclaraient que tous les problèmes humains
étaient aussi les problèmes des femmes. Ainsi, la participation
des femmes au processus de prise de décision et à la gestion de
toutes les affaires humaines fut reconnue non seulement comme un droit
légitime, mais aussi comme une nécessité politique et
sociale.
Il faut toutefois signaler que de Mexico à Nairobi, les
efforts développés avaient aidé à améliorer
la condition de la femme et son accès aux ressources. Malheureusement,
ils n'avaient pas permis de modifier les formes élémentaires
d'inégalité existant au sein des relations homme-femme. Les
décisions qui affectaient la vie de la plupart des individus
étaient toujours prises par des hommes.
62
d'un nouveau chapitre dans la lutte pour
l'égalité des sexes. Beijing a, en fait, permis de
déplacer l'attention, jadis focalisée sur les femmes, vers un
concept plus large, le genre. En fait, l'idée était de montrer
que la structure de la société dans son ensemble, de même
que les relations entre les hommes et les femmes qui la composent, doivent
être réévaluées. La conférence de Beijing
attira l'attention internationale sans précédent. Elle aboutit
à l'adoption, à l'unanimité, de la Déclaration et
du Plan d'action de Beijing. Celui-ci définissait douze
domaines critiques estimés être représentatifs des
obstacles principaux à la promotion de la femme et par lesquels une
action concrète des gouvernements et de la société civile
était nécessaire.
A propos de l'éducation, qui fait partie des douze
domaines, les participants à la conférence de Beijing reconnurent
que les filles sont toujours en butte à la discrimination dans des
régions du monde du fait de traditions, des mariages et grossesses
précoces, du caractère inapproprié et sexiste du
matériel didactique et d'enseignement, de harcèlement sexuel,
etc. C'est pourquoi, conscient du fait que l'éducation est un droit de
l'homme et un moyen essentiel d'atteindre les objectifs
d'égalité, de développement et de paix, ils
recommandèrent aux gouvernement de prendre des mesures pour, entre
autre, assurer un accès égal à l'éducation et
mettre au point des systèmes d'enseignement et de formation non
discriminatoire.
ii. La Déclaration Mondiale sur l'éducation
(Jomtien)
Cette déclaration est l'émanation de la
Conférence Mondiale sur l'Education pour Tous (EPT) organisée
à Jomtien (Thaïlande) du 5 au 9 mars 1990.
A travers cette déclaration, les Etats partis à
cette conférence se sont engagés à répondre aux
besoins éducatifs fondamentaux de toute personne - enfants, adolescent
ou adultes. Car ils avaient constaté que dans le monde, plus de 100
millions d'enfants, dont au moins 60 millions des filles, n'ont pas
accès à l'enseignement primaire et que plus de 100 millions
d'enfants et d'innombrables adultes n'achèvent pas le cycle
éducatif de base qu'ils ont entamé.
Ainsi, dans le souci d'universaliser l'accès à
l'éducation et de promouvoir l'équité, la
déclaration accorda une priorité absolue à l'accès
des filles et des femmes à travers l'amélioration de la
qualité de la formation, la suppression des obstacles à leur
participation active et la lutte contre les stéréotypes sexistes
présents dans l'éducation. Elle a ainsi relevé les
conditions requises pour parvenir à
63
une éducation pour tous : mettre en place des politiques
d'accompagnement, mobiliser les ressources pour l'éducation et renforcer
la solidarité internationale.
iii. Le Cadre d'Action de Dakar
Le Cadre d'Actions de Dakar a été adopté
lors du Forum Mondial sur l'Education tenu à Dakar
(Sénégal) du 26 au 28 avril 2000.
Ce forum a été organisé dans le but de
mener une évaluation détaillée sur le Bilan des
engagements collectifs pris à Jomtien en faveur de l'Education pour
Tous. Ces évaluations ont constaté que, durant les dix ans
suivant le lancement de l'EPT, des progrès non négligeables ont
certes été réalisés. A titre illustratif, les
effectifs de l'enseignement primaire au niveau mondial ont augmenté
d'environ 82 millions, le nombre des filles scolarisées en 1998
était supérieur de 44 millions à celui de 1990 et les taux
de redoublement et d'abandon avaient diminué. En outre, le forum a
révélé que l'égalité entre les sexes avait
tendance à s'améliorer dans certaines régions et que
presque tous les pays du monde avaient ratifié la Convention relative
aux droits de l'enfant, et de ce fait, ils ont accepté l'obligation de
garantir à chaque enfant le droit à une éducation de
base.
Cependant, les participants au forum de Dakar ont
soulevé certains défis liés à la réalisation
de l'EPT. En effet :
? Nombre des gouvernements et d'organismes ont
concentré leurs efforts sur ceux qu'ils étaient facile
d'atteindre et négligé ceux qui étaient exclus de
l'éducation de base pour des raisons sociales, économiques ou
géographique;
? L'éducation des filles demeure un défi majeur:
60 % des enfants qui n'ont pas accès à l'enseignement primaire
sont des filles ;
? En Asie et en Afrique Subsaharienne, les progrès ont
été les plus difficiles à réaliser.
Pour faire face à ces défis, le cadre d'action
de Dakar fixa six objectifs et 12 stratégies visant à permettre
à tous les êtres humains d'exercer leurs droits d'apprendre et
d'exercer leur responsabilité en contribuant au développement de
leur société. Parmi ces stratégies, le cadre
prévoyait de créer un environnement éducatif sain et
sûr, qui favorise un apprentissage efficace, notamment en fournissant des
matériels didactiques de qualité qui permettront à tous
les apprenants d'atteindre et de dépasser des niveaux d'acquisition bien
définis.
64
Encadré 2: Les six objectifs du cadre d'action de
Dakar
1. Développer et améliorer sous tous leurs
aspects la protection et l'éducation de la petite enfance, et notamment
des enfants les plus vulnérables et défavorisés;
2. Faire en sorte que d'ici 2015 tous les enfants, notamment
les filles et les enfants en difficulté ou issus des minorités
ethniques, aient la possibilité d'accéder à un
enseignement primaire obligatoire et gratuit de qualité et de le suivre
jusqu'à son terme;
3. Répondre aux besoins éducatifs de tous les
jeunes en assurant un accès équitable à des programmes
adéquats ayant pour objet l'acquisition des connaissances ainsi que des
compétences nécessaires dans la vie courante;
4. Améliorer de 50 % les niveaux
d'alphabétisation des adultes, et notamment des femmes, d'ici à
2015, et assurer à tous les adultes un accès équitable aux
programmes d'éducation de base et d'éducation permanente;
5. Eliminer les disparités entre les sexes dans
l'enseignement primaire et secondaire d'ici 2005 et instaurer
l'égalité dans ce domaine d'ici 2015 en veillant notamment
à assurer aux filles l'accès équitable et sans restriction
à une éducation de base de qualité avec les mêmes
chances de réussite;
6. Améliorer sous tous ses aspects la qualité
de l'éducation et garantir son excellence de façon à
obtenir pour tous des résultats d'apprentissage reconnus et
quantifiables-notamment en ce qui concerne la lecture, l'écriture, le
calcul et les compétences indispensables dans la vie courante.
Source : Extrait du Cadre d'action de Dakar
Il sied de noter que le Forum de Dakar a été
précédé de six forum régionaux (Les
Amériques, les Etats arabes, l'Asie et le Pacifique, l'Europe et
l'Amérique du Nord, l'Afrique Subsaharienne et les pays
E-920. Ces conférences ont donné naissance aux cadres
régionaux sur l'EPT, et ceux-ci constituent des parties
intégrantes du cadre d'action de Dakar. Pour le compte de l'Afrique
Subsaharienne, la conférence eut lieu à Johannesburg, Afrique du
Sud, du 6 au 10 décembre 1999. Elle a retenu entre autre objectif,
l'amélioration de l'éducation des filles et des femmes, qui
devrait être atteint aux travers des moyens suivants:
20 L'initiative E-9 rassemble ces neuf pays du Sud
à forte population : Bangladesh, Brésil, Chine, Egypte, Inde,
Indonésie, Mexique, Nigeria et Pakistan.
65
· Faire à ce que le nombre des filles inscrites
à l'école, terminant la scolarité et passant d'un niveau
de l'enseignement à un autre soit de plus en plus compatible à
celui des garçons;
· Revoir, et, le cas échéant, adopter des
lois afin de supprimer tous les obstacles à la participation des filles
et des femmes à l'éducation;
· Prendre des mesures pour créer un environnement
d'apprentissage sûr et favorable aux filles et femmes, à
l'intérieur comme à l'extérieur de l'école;
· Généraliser l'action positive pour
améliorer l'accès à l'éducation, en particulier
dans les domaines des mathématiques et des sciences;
· Mener des campagnes de sensibilisation et de formation
attentives aux différences entre les sexes, à l'intention des
parents, enseignants et des gestionnaires de l'éducation en vue
d'accroitre la participation féminine à l'éducation.
Notons enfin que les objectifs de l'EPT occupaient à
eux seuls deux des huit objectifs du millénaire pour le
développement.
iv. Objectifs du millénaire pour le
développement (OMD)
Lors du « Sommet du Millénaire » tenu
à New York en septembre 2000, les Nations Unies ont décidé
du lancement d'un ambitieux programme structuré autour de ce qu'on
appelle les huit «Objectifs du Millénaire pour le
Développement»(OMD). Adoptés par 193 Etats membres de l'ONU,
les OMD recouvraient des grands enjeux humanitaires comme la réduction
de l'extrême pauvreté et de la mortalité infantile, la
lutte contre les épidémies dont le SIDA, l'accès à
l'éducation, l'éducation et le Développement Durable.
Deux objectifs de ce programme réfèrent
à notre sujet de travail. Il s'agit
de :
· L'Objectif 2, visant à assurer
l'éducation primaire pour tous, prévoyait de donner à tous
les enfants, garçons et filles, et partout dans le monde, le moyen
d'achever un cycle complet d'études primaires;
· L'Objectif 3, qui se focalisait sur
l'égalité de sexe et l'autonomisation de la femme, et voulait,
entre autre but, éliminer les disparités entre les sexes dans
l'enseignement primaire et secondaire en 2005 et, si possible, à tous
les niveaux de l'enseignement en 2015.
A leur échéance (en 2015), les huit OMD ont
été remplacés par dix-sept Objectifs du
Développement Durable (ODD)
66
v. Le Protocole de la SADC sur le genre et le
développement
En 2008, les chefs d'Etats ou des Gouvernements des Etats
membres de la SADC ont signé un protocole sur le genre et le
développement. L'objectif de ce protocole fut de favoriser le
renforcement des moyens d'action des femmes, d'éliminer la
discrimination et de réaliser l'égalité entre les sexes
par l'élaboration et la mise en oeuvre des législations,
politiques, programmes et projets soucieux de répondre aux besoins des
femmes comme des hommes. Ainsi, les Etats se sont engagés à
adopter des politiques, stratégies et programmes nécessaires tels
que la discrimination positive.
Ces mesures de discrimination positive devraient être
mises en place avec référence particulière aux femmes et
aux filles afin d'éliminer toutes les barrières qui les
empêchent de participer de façon significative à toutes les
sphères de la vie. De manière spécifique, au terme de ce
protocole, les Etats devraient :
? Edicter, au plus tard 2015, des lois qui promeuvent
l'égalité d'accès au primaire, secondaire,
supérieur, professionnel et non formel (Article 14,1);
? Adopter et mettre en oeuvre au plus tard 2015 des
politiques et programmes éducatifs soucieux de l'égalité
entre les sexes qui s'attaquent notamment aux clichés et à la
violence sexiste (article 14, 2);
? Prendre des mesures appropriées, le cas
échéant les mesures législatives, pour décourager
les normes culturelles, y compris les pratiques sociales, économiques,
culturelles et politiques qui légitiment et accentuent la persistance et
la tolérance de la violence, et ce en vue de les éliminer.
|