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La gestation pour autrui : etude comparative entre la france et les etats-unis

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par Geoffrey WATRIN
Université de Strasbourg - Master 2 - Droit comparé 2015
  

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2. Le right of privacy : un champ d'application plus large que son équivalent français

Si l'interprétation du right of privacy émanant de la Cour suprême est similaire à celle de la France, elle ne dispose pour autant pas des mêmes limites.

En effet, la conception de la vie privée aux Etats-Unis est plus large, ce qui a donné lieu à de nombreuses affaires sur des thèmes assez diversifiés. C'est ainsi par exemple que la Cour suprême a jugé dans Roe v. Wade, que l'avortement, en plus de constituer une liberté de la femme de disposer de son corps, devait entrer dans le cadre du right of privacy. De même, elle a établi dans Meyer v. Nebraska128(*) que l'Etat ne pouvait dicter la manière dont un parent ou un enseignant devait éduquer un enfant, sans quoi cela porterait atteinte à sa vie privée.

Néanmoins, parmi ces thèmes abordés par la Cour suprême, il en est un qui intéresse particulièrement la gestation pour autrui, à savoir le droit fondamental de procréer.

Sous cette forme de protection, on ne se place néanmoins plus du côté de la mère porteuse, mais de celui des parents d'intention. En effet, le droit américain préfère protéger la génitrice sur le terrain des libertés et de la libre disposition de son corps.

Le droit de procréer a intéressé la Cour suprême, en ce que beaucoup d'affaires sur ce sujet lui ont été soumises. La première affaire qui érigera la procréation au rang de droit fondamental sera Skinner v. Oklahoma129(*). C'est précisément dans ce cas que le juge Douglas énoncera dans son opinion que « le mariage et la procréation sont fondamentaux pour l'existence et la survie de la race ».

Skinner sera suivi par de nombreuses affaires portant sur cette question. Parmi elles figure notamment, Eisenstadt v. Baird130(*).

Ici, la Cour fut exposée à un problème en lien avec une loi du Massachussetts qui criminalisait la distribution de contraceptifs à des couples non-mariés. Pour établir sa décision, les Justices vont dans un premier temps se baser sur une affaire antérieurement tranchée par la Cour et reprenant des faits similaires, à savoir Griswold v. Connecticut131(*). Ainsi, le juge Brennan, rejoint par les juges Douglas, Stewart et Marshall, rappelle que le right of privacy est « le droit pour un individu, marié ou célibataire, d'être libre de toute intrusion injustifiée du gouvernement au sein d'affaires qui affectent si fondamentalement une personne, comme par exemple la décision de porter ou d'engendrer un enfant ».

Cette décision vient donc préciser l'état du droit de procréer, érigé au rang de droit fondamental avec Skinner. Néanmoins, au vu de cette définition, un problème de taille se fait sentir. En effet, elle ne concerne que la procréation par voie naturelle, ou ce que l'on appellerait en anglais la coital reproduction. Cela ne peut donc en aucun cas fonder le recours à la GPA pour un couple infertile, qui nécessiterait l'intervention d'une FIV.

Ce problème fut notamment soulevé par la Professeure Janet L. Dolgin132(*), qui affirme que le droit de se reproduire de manière artificielle doit être déduit du droit de se reproduire. Pour ce faire, elle expose un argument qui fût avancé dans l'affaire Baby M, basé sur le principe américain de protection égale de la loi (equal protection of law). En l'occurrence, il s'agissait de dire que la gestation pour autrui revêtait la seule manière possible pour des parents infertiles de pouvoir avoir leurs propres enfants. De ce fait, l'Etat qui empêcherait ces personnes de bénéficier d'une telle procédure, enfreindrait le principe d'equal protection of law, dans la mesure où des parents fertiles seraient, eux, protégés contre les intrusions de l'Etat, alors que des parents infertiles ne le seraient pas.

Pour conclure sur le droit au respect de la vie privée, on peut dire que le droit américain offre plus de possibilité que le droit français, en ce sens que par son champ d'application large, il permet de trouver un fondement à la gestation pour autrui. Néanmoins, il faut souligner que malgré cela, ce fondement, unique de surcroit, reste fragile. En effet, l'argument soulevé dans Baby M, ne permet pas à lui seul d'obtenir la garde de l'enfant en cas de conflit, comme ce fut le cas dans cette affaire. Il ne peut de ce fait que justifier le recours à la maternité de substitution en tant que droit fondamental. C'est ce qui fut soulevé dans J.R v. Utah133(*), jugé par la Cour de district de l'Utah.

A cela, il faut ajouter que si le droit français applique le droit au respect de la vie privée dans un champ restrictif, ce n'est pas forcément la façon de faire de la Cour européenne des droits de l'Homme, dont la jurisprudence est applicable sur le territoire français. En effet, cette dernière interprète l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme dans un style beaucoup plus libéral, élargissant de ce fait le champ d'application de la protection accordée à la vie privée. On peut citer à ce titre les affaires Mennesson et Labassée c. France, du 26 juin 2014134(*), où la Cour avait jugé que le refus de la France de transcrire les actes de naissance des enfants nés de GPA à l'étranger constituait une violation de l'article 8 de la CEDH, et donc du droit au respect de la vie privée de ces enfants.

* 128Meyer v. Nebraska, 262 U.S. 390 (1923).

* 129Skinner v. Oklahoma, 316 U.S. 535 (1942).

* 130Eisenstadt v. Baird, 405 U.S. 438 (1972).

* 131Griswold v. Connecticut, 381 U.S. 479 (1965).

* 132J. L. DOLGIN, Status and Contract in SurrogateMotherhood: An Illumination of the SurrogacyDebate, 38

Bu . L. Rev. 515 (1990).

* 133J.R. v. Utah, 261 F. Supp. 2d 1268, 1272 (D. Utah 2002).

* 134MENNESSON c. France, CEDH, cinquième section, 26 juin 2014, n° 65192/11et LABASSEE c. France, CEDH, cinquième section, 26 juin 2014, n°65941/11.

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote