Tableau1 : Différents éléments de la
Structure de la Conduite et de la Performance des marchés
Source : adapté de Lutz (1994)
Le paradigme Structure-Conduite-Performance postule qu'il
existe une relation entre les trois niveaux ci-dessus
énumérés. Bain (1968), l'explique de la façon
suivante : «la structure détermine la conduite et ces deux
éléments ensemble déterminent la performance».
Le paradigme Structure-Conduite-Performance permet de montrer
le fonctionnement global d'un marché et non de manière
spécifique.L'approche SCP a connu de nombreuses critiques. Elle
s'étend de la réfutation de la causalité à sens
unique assumée par la forme la plus simple de l'approche aux
problèmes du choix des variables constitutives de la
« Structure » du « Comportement » ou de
la « performance ». En réalité, tant la
théorie économique la plus ancienne que la plus récente
ont défié les propositions du paradigme SCP et ont
démontré par exemple que le lien uniforme entre la concentration
structurelle et la performance du marché peut disparaître dans les
conditions particulières (Mbengue, 2005 cité par Gabszewicz,
2007).
Friedman (1971),cité par Gabszewicz (2007),a
montré qu'un grand nombre de firmes au sein d'un marché peuvent
tacitement s'associer pour appliquer des prix élevés s'ils
pensent à plus long terme. En effet, les profits provisoires qu'une
firme pourrait individuellement réaliser aujourd'hui en engageant une
guerre des prix avec ses rivaux pourraient être plus que compensés
par les pertes suivantes si ses rivaux exercent des représailles en
baissant leurs prix.
Malgré ces critiques, l'approche SCP est encore
efficace pour l'analyse des marchés. Elle a servi dans le cadre de notre
étude pour montrer la structure globale ainsi que la conduite des
différents acteurs de la filière ananas et enfin pour analyser la
performance du système de commercialisation de l'ananas au
Bénin.
1.2.5. La chaîne de valeurs ajoutées
La notion de «chaîne de valeurs» tire son
origine de la notion de «filière» (Raikes et al.,
2000). Dans une analyse de filière, on se préoccupe de l'analyse
de la succession d'actions menées par des acteurs (qui ne se connaissent
pas nécessairement) pour produire, transformer, vendre et consommer un
produit. Dans une chaîne de valeurs, par contre, les acteurs se
supportent mutuellement et chacun travaille dans le souci d'améliorer la
compétitivité de l'autre et surtout en visant la satisfaction du
consommateur (Kit, Faida Mali et IIRR, 2006). A l'intérieur d'une
filière donnée, on peut rencontrer plusieurs chaînes de
valeurs. Une chaîne de valeurs peut être définie comme
l'ensemble des activités qui sont nécessaires pour amener un
produit ou un service du lieu de production aux utilisateurs finaux, tout en
passant par les différentes phases de production, de transformation
physique et d'apport de services aux différents acteurs et de livraison
aux clients finaux (Kaplinsky et Morris, 2003). Les acteurs qu'on retrouve
généralement dans une chaîne de valeurs inclus les
fournisseurs d'intrants, les producteurs, les transformateurs, les
transporteurs, les collecteurs, les grossistes, les détaillants, les
exportateurs et les consommateurs finaux. Il y a un ensemble d'activités
de transformation, de conditionnement, de stockage, de transport, de
labellisation du produit fini et autres dans la chaîne, qui sont toutes
liées les unes aux autres. A chaque étape, le produit se voit
ajouter de la valeur grâce au processus de cette étape. On y
retrouve également différents types de relations ou de
«liens»: les relations entre les activités, les relations
entre les entreprises/acteurs, les relations entre l'entreprise et ses
acheteurs et les fournisseurs. Selon Shank et Govindarajan (1992), une analyse
de chaîne de valeurs prend explicitement en compte
l'interdépendance entre les activités des acheteurs et des
fournisseurs.
Dans cette analyse, la chaîne de valeurs est
décomposée en activités stratégiquement
pertinentes. Ensuite les coûts, les revenus et les actifs sont
affectés à ces «activités à valeur
ajoutée». En réalité, il n'existe pas de
méthode unique pour l'analyse de chaîne de valeurs. Mais, il y a
de bonnes raisons de recommander l'utilisation d'une combinaison de
méthodes qualitatives et quantitatives aussi bien dans la collecte que
dans l'analyse des données. Selon Rich et al., (2011),
l'utilisation de l'approche qualitative seule ne permet pas de répondre
aux questions telles que : quand (et comment) investir et quel sera l'impact
économique d'interventions spécifiques sur les différents
acteurs de la chaîne.
Au plan pratique, il existe quatre (4) principales composantes
dans une analyse de la chaîne de valeurs (Kaplinsky et Morris, 2001):
(i). la cartographie et la caractérisation des acteurs
participant à la production, la distribution,au marketing et aux ventes
du produit donné;
(ii) une évaluation des mécanismes de
gouvernance de la chaîne de valeurs, en termes de structure des relations
et des mécanismes de coordination qui existent entre les acteurs de la
chaîne de valeurs, de manière à identifier les arrangements
institutionnels qu'il serait indispensable de cibler pour améliorer les
capacités, remédier aux distorsions distributionnelles et pour
accroître la valeur ajoutée. Cette analyse de la gouvernance
permet d'identifier les gouverneurs-clés de chaque chaîne de
valeurs en se basant sur des indicateurs donnés (tableau 1.2) ;
(iii) une analyse des possibilités de perfectionnement
au sein de la chaîne par les différents acteurs de la
chaîne ; et
(iv) le calcul et l'analyse de la répartition des
bénéfices entre les acteurs de la chaîne pour
déterminer celui à qui profite la chaîne de valeurs, quels
acteurs pourraient bénéficier d'un soutien accru ou quelle
organisation particulière mettre en place.
Indicateurs
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Force et faiblesse
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Source de données
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Part des ventes dans la chaîne
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Cet indicateur n'est pas un indicateur fort étant
donné qu'on peut vendre de grandes quantités sans avoir
influencé le marché
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Les bilans des entreprises
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Part de la valeur ajoutée
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Un meilleur indicateur pour mesurer la taille car il
reflète la part des activités de la chaîne
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Interviews au niveau des entreprises
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Part du profit de la chaîne
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Peut être un bon reflet de la puissance de la
chaîne
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Les bilans, mais il est probable que ces données ne
soient disponibles que pour les entreprises publiques
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Taux du profit
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Un mauvais indicateur puisque les petites activités de
la chaine peuvent être relativement rentables, mais peuvent avoir
d'influence sur la filière ou l'étape concernée de la
filière
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Les bilans, mais il est probable que ces données ne
soient disponibles que pour les entreprises publiques
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Part du pouvoir d'achat dans la
chaîne
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C'est aussi un bon indicateur de la puissance de contrôle
de la filière ou de cette étape de la filière
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Interviews au niveau des entreprises
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Détenteur de l'identité du marché
de la chaîne
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Cet indicateur peut être critiqué dans les
marchés où l'image de marque est très importante
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Interviews au niveau des entreprises, étude de
marchés
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