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Signe et expression dans les réécritures des recherches logiques de Husserl

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par Lydia AZI
Université de Lille 3 - Master 1 2014
  

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2.2.3. Entre production et compréhension : Bühler et Marty

Les Recherches Logiques, publiées en 1900 et 1901 ont été l'objet de modifications dans les années 1910 par Husserl en ce qui concerne l'expression et de théorie du signe. L'intentionnalité qui est issue des thèses de Brentano est de nouveau développée par Husserl qui opère une distinction entre les types d'intentions possibles. Il y intègre la notion de Tendenz, qui n'existait pas dans ses travaux précédent et de Meinung, de visée, comme deux intentions distinctes possibles. Comme l'explique Ulrich Mell : « Il s'agit de différencier l'intention en tant que tendance, comme l'intention d'indiquer [Hinweisintention] et l'intention en tant que visée62 » [Notre traduction]. Les conséquences de l'introduction de tels concepts dans l'intentionnalité husserlienne permettent alors de clarifier certains points de sa philosophie de l'expression :

« In seiner neuen Ausdrucks- und Erkenntnislehre verbindet die Hinweisintention den Wortlaut mit einer sei es leeren, sei es anschaulichen Meinung, die durch diese Verbindung zum Bedeutungsbewusstsein wird, die aber ebensogut auch ohne diese Verbindung bestehen kann. »

« Dans sa nouvelle théorie de l'expression et de la connaissance, il lie l'Hinweisintention de la Wortlaut avec une visée soit vide, soit intuitionnée, qui grâce à ce lien, devient conscience de signification, mais qui peut aussi exister sans ce lien63 » [Notre traduction].

62 Ibid, « Einleitung des Herausgebers » , p. XXIII, « Es gilt zwischen Intention als Tendenz, als Hinweisintention und Intention als Meinung zu unterscheiden. »

63 Ibid

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Dans les travaux de Husserl, il n'est pas rare de trouver les termes de visée, Meinung, sens, Sinn et signification, Bedeutung utilisés en tant que synonyme puisque Husserl a rarement fait de distinction en question d'intentionnalité. Il écrit même dans l'introduction des Recherches Logiques : « Il n'est malheureusement pas possible de définir les actes de visée [meinenden Akte] sans recourir à l'expression de la chose signifiée64 » [Notre traduction].

Les travaux d'auteurs contemporains, comme Marty et Bühler dans les années 1900 à 1910 ont grandement influencés les travaux de Husserl, apportant de nouvelles problématiques au développement de la philosophie du langage. Bühler propose d'établir une distinction entre les contenus possibles de pensée : Le contenu intelligible et le contenu sensible. Ils deviennent alors, en tant que contenu - bien indépendant de la pensée, ils sont extrinsèques à nos modes logiques. En s'inspirant des premières Recherches Logiques, il s'interroge sur la nature des objets de pensée et il en résulte que pour lui, les représentations ne sont pas de véritables contenus de pensée. Il est loin de lier la visée à la signification comme Husserl l'a fait dans la première recherche. En s'émancipant des théories husserliennes, mais en s'inspirant de ses problématiques, il conçoit en 1909 les prémisses de son Organon Modell et s'éloigne pour ainsi dire, des thèses husserliennes. La signification devient indépendante de la représentation là où Husserl, dans la première Recherche Logique, fait le lien entre la signification et le Meinen, la visée.

Dans ce contexte, si pour Anton Marty, la signification est une fonction de la communication, elle devient pour Bühler l'effectivité de toutes les fonctions de la communication. C'est la réalisation de toutes les fonctions et de toutes les parties du langage. Marty soulève l'importance des états du locuteur et du recepteur dans la réalisation de la communication mais Bühler introduit une nouvelle fonction du langage : La fonction de représentation ou Darstellung du monde ou des objets existants, c'est l'état des choses, le domaine symbolique du langage sans recours à une forme sensible. Il faut alors distinguer trois étapes dans la réalisation de la signification : La logique de la conscience ou Regelbewusstsein et la relation ou

64 E. Husserl, Hua XIX.I, p. 16

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Beziehung obéissent aux mêmes modèles que l'intuition catégoriale que Husserl développe dans la Sixieme Recherches Logiques. Cependant, les intentions, le troisième moment dans la constitution de la signification, sont pour Bühler à distinguer, ce sont des actes signitifis, comme décrit dans la terminologie husserlienne dans la Sixième Recherche Logique : C'est non pas « l'intuition du tout, mais seulement son contenu représentatif65 » [Notre traduction], car « l'acte signitif pur se trouve toujours attaché à une intuition fondamentale. Cette intuition du signe n'a cependant aucun rapport avec l'objet de l'acte signitif pur66 » [Notre traduction]. Il n'est pas remplissant, comme la signification, c'est donc une intention vide : « La signification, dans l'acte ne parait possible alors que lorsqu'elle est liée à une intention avec la présence d'une nouvelle intention, où l'objet intuitif [...] apparait comme un signe67 » [Notre traduction].

En 1909 Bühler publie sa récension sur Marty et developpe sa théorie : si Marty concoit la communication comme une relation entre le locuteur et le recepteur, la fonction de signification chez le destinataire et de manifestation chez le locuteur n'ont pas un statut égalitaire. Il semble que le locuteur dans la production du message fait le message avec intention, avec Absicht, donc influence toujours l'auditeur, qui reçoit le message sous forme d'indice. La fonction d'influence devient alors plus importante que la Kungnahme. Une telle théorie conçoit la communication comme une approximation émotionnelle, où les signes ne peuvent plus être signes intersubjectifs, mais des indices emprunts d'une influence externe. « Le but primaire est bien plus une influence et une domination d'un état d'âme étranger chez le recepteur68 » [Notre traduction].

Bühler revient sur ce point. Toutes propositions communicationnelles ne se réalisent pas toujours dans l'influence du recepteur et ces études le pousse à introduire la fonction de représentation et à distinguer les types d'intentionnalités :

65 Hua XIX.II, VI., 25, p. 619, lignes 20-21

66 Ibid, Lignes 8-10

67 Ibid, Lignes 12-15

68 A. Marty, Untersuchungen zur Grundlegung der allgemeinen Grammatik und Sprachphilosophie , 2e partie, ch. 3, §58 p. 284, Halle a. S., Verlag von S. Niemeyer, 1908, « Das primär Beabsichtigte ist vielmehr eine gewisse Beeinflüssung oder Beherrschung des fremden Seelenlebens im Hörenden. »

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« En conséquence de ce principe, devrait également être prise en compte la proposition selon laquelle, partout où l'intention première du locuteur ne peut ni être décrite comme une intention d'influencer, ni comme une intention d'exprimer, réside justement une nouvelle fonction du moyen linguistique 69 »

Cette nouvelle fonction, que Marty ignore dans ses ouvrages, change les conceptions de la communication. Il y a une nouvelle fonction possible du moyen linguistique : l'expression de l'état des choses. Husserl revient en mars 1910 sur la fonction d'influence et la fonction de représentation que Bühler a developpé dans ses Récensions sur Marty, après avoir longuement étudié le texte.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry