b. L'enjeu pour la survie de la Trame verte et bleue,
sensibiliser ?
Le concept de Trame verte et bleue est menacé par
l'apparition du concept d'hémicycle, qui rencontre l'engouement des
équipes d'urbanisme, des cabinets d'architecture, des élus, et
qui a le soutien de la Chambre d'Agriculture. La différence entre ces
deux notions est mince, et pourtant, elles remportent des adhésions fort
différentes. Peut-être cela peut être imputé au fait
que le concept d'hémicycle ne connaît aucune réalisation,
et reste pour l'instant du domaine de la conception. Mais il est toutefois
nécessaire pour les défenseurs de la Trame verte et bleue de
continuer leur combat pour son acceptation et sa pérennisation.
Il apparaît que l'un des points centraux pour permettre
la continuation de la TVB est la sensibilisation. L'agence d'aménagement
et d'urbanisme est « à la fois obligée de traduire ces
questions, de sensibiliser et de faire face au désir de
développement des élus »398. Pour Laure
Cormier, « il faut sensibiliser les urbanistes
»399 car « les urbanistes qui inscrivent dans le
SCOT et le PLU la TVB sont les moins sensibles aux questions
écologiques, et la prônent comme une contraintes
supplémentaires »400. Pour sensibiliser les
élus, il faut donc au
394 Ibid.
395 Entretien avec Emma Raudin, responsable du SCOT à
l'Agence de Développement et d'Urbanisme de Lille, le 20 février
2015 à Lille
396 Mathilde Ballenghein, Valérie Bridoux, Oriol Clos,
Marie Defay, Franck Lemerle, Gaël Smagghe,
« Eléments pour une synthèse - La consultation
Lille Métropole 2030 », Comité syndical du SCoT de Lille
Métropole - 19 juin 2014
397 Entretien avec Pierre Dhenin, directeur d'Espace Naturel
Lille Métropole, le 27 février 2015 à Lille
398 Entretien avec Emma Raudin, responsable du SCOT à
l'Agence de Développement et d'Urbanisme de Lille, le 20 février
2015 à Lille
399 Entretien avec Laure Cormier, géographe, le 5 mars
2015 à Paris
400 Entretien avec Laure Cormier, géographe, le 5 mars
2015 à Paris
95
préalable sensibiliser les urbanistes, afin que la
réglementation concernant la TVB ne soit pas vécue comme une
dépossession du territoire pour les élus.
Les élus perçoivent souvent mal la limitation de
l'urbanisation, et le classement en zones naturelles. Pour eux, l'attrait de la
commune est un attrait qui est d'abord économique, ce qui explique que
cet aspect soit souvent mis en avant par le syndicat mixte ENLM. Ils veulent
répondre à la demande des résidents, qui est souvent
entendue comme étant celle du logement ou de zones d'activité. La
sensibilisation des habitants est donc cruciale, l'acceptation de la Trame
verte et bleue passe par l'éveil, chez les citadins, des enjeux qu'elle
soulève. ENLM prend très à coeur cette mission de
sensibilisation. Le « carnet de l'explorateur », publié chaque
année par le syndicat mixte, ambitionne de générer une
prise de conscience des enjeux de biodiversité sur le territoire
métropolitain. Ce carnet s'adresse aux enfants, et rencontre une
approbation générale. Pour Daniel Béguin, membre d'EELV et
vice-président du conseil général de Lorraine, «
l'intervention auprès des élus et de la population est
importante d'un point de vue pédagogique. Il s'agit de les sensibiliser
aux enjeux de la conservation en montrant qu'il n'y a pas
systématiquement des implications monétaires, stratégiques
ou politiques »401.
Il apparaît donc que la Trame verte et bleue doit
continuer à diffuser les informations concernant la biodiversité,
tout en attirant les habitants dans les espaces naturels dont Espace Naturel
Lille Métropole à la gestion si elle ne veut pas être
balayée par le concept d'hémicycle.
La Trame verte et bleue lilloise nait d'un désir de
promouvoir la ville, et d'attirer les classes créatives afin de
redynamiser l'économie locale. De ce marketing territorial naît
une politique de protection de la biodiversité, en s'appuyant sur
l'expertise scientifique. Si la corrélation entre marketing territorial
et politique environnementale est audacieuse, la protection des espèces
indigènes et les opérations de restauration des
écosystèmes montrent l'empreinte anthropique, même si elles
ambitionnent de servir la nature. Finalement, on peut se demander quelle est la
place de la nature en ville, et également, quel avenir pour la Trame
verte et bleue qui ne cesse jamais de démontrer son utilité et
son aspect multifonctionnel pour plaire aux acteurs du territoires et aux
résidents, pour assurer sa durabilité sur le territoire
métropolitain.
401 Moune Poli, « Recréer la nature »,
Espaces naturels, n°1, janvier 2003
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