CHAPITRE QUATRIEME : SUGGESTIONS ET
RECOMMANDATIONS
La dédollarisation de l'économie de la
République Démocratique du Congo que l'on parle d'un
problème, que l'on expose ou que si nous ne proposions pas des
remèdes à cela afin que ça puisse se
concrétiser, alors nous aurions parlé en vain. C'est à la
suite d'un examen méticuleux et d'une analyse approfondie que nous
sommes parvenu à arrêter certaines stratégies ou
recommandations sur la dédollarisation congolaise.
Nos suggestions et recommandations portent sur :
· la dédollarisation de l'économie
congolaise ;
· le Timing d'une nouvelle réforme
monétaire ;
· le Besoin d'une vision différente de
développement du secteur financier.
IV.1. DEDOLLARISATION DE L'ECONOMIE CONGOLAISE
Bien que la dollarisation de l'économie ait
été la réponse rationnelle des agents économiques
aux incertitudes politiques et économiques de la République
Démocratique du Congo, ses effets néfastes devraient maintenant
inciter les autorités du pays à adopter un plan clair de
dédollarisation sur un horizon temporel précis.
Un programme de dédollarisation réussi doit
rendre la monnaie locale plus attractive pour la population. Il doit donc
intégrer un mélange adéquat de politiques macro et
microéconomiques visant à promouvoir l'usage de la monnaie
nationale dans les transactions courantes et à sensibiliser la
population aux coûts additionnels que les risques de change
associés à la dollarisation lui font supporter. Un programme de
dédollarisation réussi doit, en définitive, encourager la
population à abandonner volontairement dans le cas de la
République Démocratique du Congo l'usage du dollar
américain, quitte à user temporairement si cela s'avère
nécessaire, de réglementations forçant la transition vers
la monnaie nationale, assorties de politiques de stabilisation
macroéconomiques appropriées.
En définitive, la dédollarisation pérenne
de l'économie de la République Démocratique du Congo
requiert un certain nombre de conditions préalables : un climat
politique stable, un leadership crédible et visionnaire des
autorités monétaire et politique, et un contexte de
stabilité solide et durable des variables macroéconomiques,
assorti de dispositions microéconomiques et réglementaires
appropriées. Outre la nécessaire stabilité
macroéconomique, la volatilité des taux de change dans les deux
sens et une inflation maintenue à faible niveau sont indispensables pour
établir un environnement favorable. Des politiques et mesures
complémentaires doivent permettre de rompre définitivement avec
l'enracinement et la prédominance du dollar et d'encourager la
population à utiliser la nouvelle monnaie, le franc congolais
reformé. Au nombre de ces initiatives, il conviendra que le Parlement
vote de nouvelles lois encadrant le change (veillant à préserver
l'accès libre aux devises étrangères, en cas de besoin,
mais surtout à sceller la suprématie du franc congolais comme
l'unique monnaie ayant cours légal en République
Démocratique du Congo) et que les autorités s'engagent
parallèlement dans la mise en oeuvre d'une réforme
monétaire complète, assurant que les dénominations de la
nouvelle monnaie soient tout aussi adaptées et pratiques que celles du
dollar américain. Il sera important également qu'une
restructuration de la Banque Centrale soit accomplie, visant à en faire
une institution plus fonctionnelle, indépendante et responsable, et que
le système financier soit intégralement restructuré et
reconfiguré afin d'accroître sa couverture géographique du
territoire et son accessibilité par le grand public, qu'il faudra faire
bénéficier d'un vaste programme d'éducation
financière.
Le décret-loi 004/2001 du 31 janvier 2001 sur le
régime de change applicable en RDC, qui autorise la libre circulation du
dollar et d'autres devises au Congo, devra être amendé de
manière à être en conformité avec les dispositions
constitutionnelles stipulant l'exclusivité et la suprématie du
franc congolais. Les nouvelles lois de change devront veiller à garantir
un accès facile et rapide aux monnaies étrangères en cas
de besoin ; une politique de change autorisant les conversions dans les
deux sens est favorable à la dédollarisation, en rendant le
risque de change plus visible.
Des politiques spécifiques et des mesures
ciblées seront indispensables pour éradiquer la dollarisation
solidement enracinée de l'économie congolaise et augmenter
l'attractivité de la monnaie nationale, ce qui encouragera la
participation aux activités économiques d'acteurs que la
dollarisation avait laissés en retrait. La dédollarisation doit
être traitée à part. Le vaste programme de
dédollarisation doit toutefois être assorti d'une restructuration
complète de la Banque centrale, de réformes de la monnaie
congolaise et du système financier dans son ensemble, et du
développement de sources de financement locales et des marchés
financiers. Il conviendra de systématiquement bannir et réviser
toute réglementation statutaire et toute pratique susceptibles
d'être plus favorables à l'usage de devises
étrangères, et il appartiendra aux autorités d'instituer,
parallèlement à des politiques macroéconomiques
stabilisatrices appropriées, des règles astreignant la population
à utiliser la monnaie nationale.
Un programme réussi de dédollarisation demandera
l'implantation synchronisée de mesures de restructuration de la monnaie
nationale, de la Banque centrale, du système financier, du marché
financier domestique et de l'économie, qui exigeront une collaboration
étroite et fructueuse entre la Banque Centrale du Congo, les instances
concernées du Gouvernement, l'Assemblée Nationale et le
Sénat, le secteur financier et le secteur privé, et enfin, la
société civile et le grand public. Pour assurer la
réussite de tous ces ambitieux mais nécessaires remaniements, il
s'avérera également important d'engager une campagne
d'éducation financière de la population.
Pour un pays aux dimensions continentales, richesses
naturelles immenses et avec une population nombreuse, ce mémoire
relève la pertinence d'une monnaie nationale forte comme étant
l'un des préalables au développement économique et social
équilibré. Au-delà des préalables de
stabilité politique, et de transparence dans la gestion de la chose
publique, ce mémoire aborde les questions de réformes
synchronisées de l'économie, de la banque centrale, du
système financier national et de la monnaie qu'il convient d'amorcer
simultanément avec les autres réformes multisectorielles pour
asseoir la souveraineté nationale et doter le pays d'une monnaie
nationale attractive.
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