II.6 Impact économique du ravinement
Tout cela n'est pas exempt de conséquences sur le plan
socio - économique et infrastructurel voire le développement
urbanistique de Kinshasa.
Faute d'une enquête sur terrain, nous avons mené
une simulation qui n'est pas loin de la réalité kinoise. Etant
donné que ce phénomène de ravinement extrême se
manifeste en plein espace habité, si nous considérons 25 maisons
détruites par kilomètre de part et d'autre du ravin, nous
obtiendrons 50 maisons détruites au kilomètre. Soit 50 maisons x
94.5 km = 4725 maisons détruites en 50 ans ou 94,5 soit 95 maisons par
an. Une maison coûte en moyenne 12500 euros dans le quartier
périphérique bien que certains ravins puissent se trouver dans
des quartiers nantis de la ville de Kinshasa (Figure 2.3 à gauche). Il y
aurait 12 500 euros13 x 95 = 1 187 500 euros soit environ 1 200 000
euros par an de perte en habitat (1 Euro = 1,20 Usd).
Figure 2.3 : Destruction des maisons dans le quartier
Binza/Delvaux à gauche, et à droite, route Kimwenza
coupée (Photos Fils MAKANZU, CRGM_2009)
13 Ce montant est presqu'équivalent à un
demi - terrain (20 m x 15 m) non encore mis en valeur dans les quartiers de bas
standing de la ville de Kinshasa à l'instar de Kisenso, Kindele, ...
50
Ceci sans tenir compte de voies de communication
détruites dont certaines étaient asphaltées telles que sur
les avenues Laloux à Binza Delvaux (un tronçon de plus d'un km
détruit), De l'école à Binza Ozone (un tronçon de
165 m de route détruite empêchant la mobilité dans ce
quartier), Kimwenza (500 m de route coupée, Figure 2.3 à droite),
Libération ou Ex - 24 Novembre (après un orage et en une nuit,
emportée par la formation d'un ravin de 400 m de long et de 20 - 30 m de
large en 1973 (PAIN, 1984)), ...
D'autres impacts sont :
- la chute des poteaux servant au transport des câbles
électriques par la SNEL14 laissant des quartiers entiers dans
l'obscurité et ainsi créant une insécurité
croissante (Figure 2.4 à gauche) ;
- la coupure des tuyaux de raccordement de l'eau potable de la
RÉGIDESO15 (Figure 2.4 à droite) obligeant les
habitants à parcourir des distances énormes pour
s'approvisionner. Parfois, ils recourent à des sources non
protégées avec comme conséquence l'apparition des maladies
hydriques (dysenterie amibienne, fièvre typhoïde, ...), etc.
Figure 2.4 : Chute des pylônes de la SNEL (Photo
Ph. TREFOIS, MRAC_2003) à gauche, et à droite, tuyau de
raccordement en eau potable en déséquilibre (Photo Aimé
MWANZA, PIC KINEROSION_2007)
La Banque Mondiale par l'entremise du Programme Multisectoriel
d'Urgence de Réhabilitation et de Reconstruction (PMURR) sous le projet
de l'Association Internationale de Développement (IDA) a accordé
un financement de 291 millions de dollars américains pour la
réhabilitation de quelques infrastructures. De ce montant, 10 millions
ont été alloués aux travaux de stabilisation de la seule
érosion de la Drève de Selembao en 2004.
14 SNEL : Société nationale
d'électricité
15 REGIDESO : Régie de distribution d'eau
potable en République Démocratique du Congo
51
La Direction Générale de la Coopération
au Développement du Royaume de Belgique (DGCD/Belgique) a alloué
un montant de 3 millions d'euros au Fonds social urbain à Kisenso
(FSU/Kisenso). De ce financement, 2,1 millions ont été
destinés aux différents micro-projets pour lesquels 17% ont servi
à la lutte anti-érosive entre 2001 et 2005.
L'érosion de Mataba I dans la commune de Ngaliema a
déjà englouti 2 millions de dollars américains
financés par la Belgique pour les études menées par l'OVD
et le PNUD en 2003 et 5,8 millions de dollars américains des fonds Pays
Pauvres Très Endettés (PPTE) pour des travaux de stabilisation en
début 2006 (STEVENS, 2006).
Nous ne disposons pas des données chiffrées
engagées dans la lutte anti - érosive antérieure pour les
autres sites. Nous présentons au Tableau 2.5 les frais prévus
pour continuer la lutte et ainsi endiguer ce phénomène de
ravinement spectaculaire à travers la ville de Kinshasa. Le montant
recherché pour endiguer les ravins équivaut à 29.5% du
budget quinquennal du gouvernement provincial qui est évalué
à 1 527 892 349 dollars américains.
Tableau 2.5 : Budget projeté pour les travaux de lutte
anti-érosive
Institution
|
Nombre de sites
|
Montant en USD16
|
Commission chargée de la LAE17
|
26
|
1
|
459
|
079,98
|
Programme quinquennal de l'OVD18
|
47
|
110
|
477
|
518,82
|
Hôtel de Ville de Kinshasa (HVK)19
|
2520
|
451
|
000
|
000,00
|
Au tableau 2.6, nous présentons des projets et les
financements recherchés par l'Hôtel de Ville de Kinshasa pour leur
réalisation. On comprend bien que les infrastructures de base font
défaut dans cette ville. Les frais alloués jusqu'ici dans la
lutte anti-érosive pouvaient tant soit peu soulager la misère des
habitants. Aussi, le budget alloué pour ces projets sociaux soit environ
29,4% du budget quinquennal équivaut presque à celui
recherché pour endiguer l'érosion.
16 USD : dollars américains
17 Commission chargée de la Lutte anti
érosive, Tableau des répartitions financières des
matériaux, du matériel végétal par site
érosif, érosion pour la ville de Kinshasa, octobre 2007
18 OVD, Programme quinquennal : Etat de lieux des
érosions dans la ville province de Kinshasa, décembre 2006
19 HVK, Programme du gouvernement provincial de
Kinshasa 2007 - 2011, mai 2007
20 HVK a dû effectuer un regroupement par
quartiers ainsi Kisenso seul en a 66
52
Tableau 2.6 : Dépenses prévues pour quelques
investissements dans la ville
N°
|
Domaine
|
Quantité
|
Montant en USD
|
1
|
Construction de quelques routes et ouvrages connexes à
travers la ville pour désengorger celles existantes
et désenclaver certains quartiers
|
247,3 km
|
237 682 786
|
2
|
Construction de quelques ouvrages de franchissement
|
12 ponts
|
6 050 000
|
3
|
Construction de logements de type « Habitat à
loyer
|
|
|
|
modéré » HLM
|
-
|
65 000 000
|
4
|
Eau et énergie
|
-
|
58 265 270
|
5
|
Santé
|
-
|
81 772 225
|
Total
|
448 770 281
|
Source : HVK (2007)
|