Première Partie :
Analyse économique du spread des taux
d'intérêt bancaires
Introduction de la première partie
L'écart entre le taux d'intérêt
débiteur et le taux d'intérêt créditeur est une
variable clef du système financier. En effet le spread des taux
d'intérêt bancaires est un indicateur de l'efficience de
l'intermédiation financière : Il est diminue au fur et
à mesure que cette dernière devient efficiente.
La première partie de cette étude est
consacrée à l'analyse économique du spread des taux
d'intérêt bancaires. Elle comprend deux chapitres : Le
chapitre 1 permettra de passer en revue la littérature relative aux
déterminants du spread des taux d'intérêt bancaires. Tandis
que le chapitre 2 sera consacré à l'analyse descriptive de cette
marge d'intermédiation dans les pays de la zone CEMAC.
Chapitre 1
Revue de la littérature relative aux
déterminants du spread des taux d'intérêt
bancaires
Introduction
Au plan théorique, les travaux consacrés aux
déterminants du spread des taux d'intérêt bancaires
remontent à l'article séminal de Ho et Saunders (1981) dans
lequel ils étudient le comportement des banques jouant le rôle
d'intermédiaire entre emprunteurs et prêteurs. Selon ces auteurs,
la banque est un courtier risquophobe faisant face à un risque de taux
lié à la désynchronisation des flux de dépôts
et de crédits qu'elle tente de mettre en adéquation.
Au plan empirique, la littérature cherchant à
mettre en exergue les variables affectant le spread des taux
d'intérêt bancaires ainsi que la nature de leur impact respectif
sur ce dernier, s'est fortement inspirée du modèle du courtier et
de ses nombreux approfondissements. Cette littérature reconnaît
essentiellement 4 groupes de facteurs ayant un impact sur la marge
d'intérêt des banques. Ces groupes de facteurs sont : Les
caractéristiques intrinsèques des banques, la structure de
marché du secteur bancaire, l'environnement macroéconomique et le
cadre légal et institutionnel.
Ce chapitre, évoquera tout d'abord les deux premiers
groupes de déterminants du spread de taux d'intérêt
bancaires - Section 1 - avant de s'appesantir ensuite sur les deux autres
groupes de facteurs - Section 2 -.
Section 1 : L'impact des caractéristiques
des banques et de la structure de marché du secteur bancaire sur le
spread des taux d'intérêt BANCAIRES
Le spread des taux d'intérêt bancaires est
affecté non seulement par des facteurs relatifs à
l'activité des banques tels que les risques, les coûts
opératoires, etc. Mais aussi par des facteurs propres à la
structure de marché du secteur bancaire tels que la concentration, la
supervision bancaire, etc.
A- L'impact des caractéristiques des banques sur le
spread
Du fait de l'incertitude, de l'asymétrie d'information
ou tout simplement de l'environnement dans lequel elles exercent leurs
activités, les banques sont exposées à de nombreux risques
- risque de taux d'intérêt, risque de crédit, risque de
change, risque légal, etc. - qui affectent leurs marges
d'intérêt. L'ampleur avec laquelle ces différents risques
affectent le spread des taux d'intérêt bancaires dépend
entre autres de la taille de la banque considérée, de ses
coûts opératoires, du volume de ses activités connexes,
etc.
1- Les risques bancaires
Le risque de taux d'intérêt et le risque de
défaut sont les principaux facteurs pris en compte par les banques lors
de la fixation de leurs marges d'intérêt [Angbazo (1997)]. En
effet face à la recrudescence de ces risques, les banques
élèvent leurs taux d'intérêt débiteurs et
accentuent par là même leurs marges d'intérêt.
L'exposition de la banque au risque de taux
d'intérêt est due au caractère désynchronisé
de la maturité des dépôts et de celle des crédits
que cette dernière tente d'harmoniser. C'est ainsi que dans son
rôle de gestion de la liquidité du marché des fonds
prêtables, elle s'expose au risque de prendre une position trop courte ou
alors trop longue. En conséquence, elle fixe ses taux
d'intérêt et partant ses marges d'intérêt afin
d'immuniser son portefeuille contre les fluctuations des taux de marché
[Boutillier et al. (2005)].
La banque est également exposée au risque de
crédit puisqu'elle ne connaît pas ex ante la
probabilité de défaut de ses débiteurs. Afin de se couvrir
contre ce risque, la banque exige des collatéraux, élabore des
restrictions concernant l'utilisation des fonds prêtés et
contrôle les emprunteurs. La banque peut également majorer son
taux d'intérêt débiteur d'une prime de risque dont la
proportion dépend de sa politique de crédit, du coût des
financements alternatifs, du montant du prêt et de la qualité du
client. Cette disposition entraîne l'augmentation du taux débiteur
auquel le prêt sera finalement consenti et contribue à accentuer
le spread des taux d'intérêt bancaires [Ndung'u et Ngugi
(2000)].
Un autre risque majeur ayant un impact sur la marge
d'intérêt des banques est le risque de change. Ce risque
apparaît lorsque la banque effectue des opérations d'emprunt et/ou
de prêt en devises étrangères. En effet, l'incertitude
née de la fluctuation des cours de change, incite la banque à
recourir entre autres techniques à l'accentuation de ses marges
d'intérêt lorsqu'elle perçoit un risque significatif.
La banque accentue également ses marges
d'intérêt lorsqu'elle fait face au risque - légal -
résultant de l'ambiguïté des lois qui encadrent les
collatéraux et les faillites [Ndung'u et Ngugi (2000)]. En effet,
lorsque le taux de recouvrement des créances est faible et que le
délai de réalisation des garanties est long, le spread des taux
d'intérêt bancaires à tendance à augmenter [Gelos
(2006)]. En somme, il a été démontré que
l'efficience judiciaire a un impact négatif et significatif sur le
spread des taux d'intérêt bancaires [Demirgüç-Kunt,
Laeven et Levine (2003)].
Au final, quelque soit le type de risque auquel la banque est
confrontée, son aversion pour le risque l'incite à élever
son taux d'intérêt débiteur et à accentuer ses
marges d'intérêt. D'autres facteurs tels que les coûts
contribuent également à la détermination du spread des
taux d'intérêt des banques.
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