B. Les atteintes à
la présomption d'innocence par le traitement des illustrations dans
Sidwaya
Trois articles publiés dans la période
d'étude contiennent des illustrations pouvant porter atteinte à
la présomption d'innocence.
Le premier est paru dans le numéro 7 196 du jeudi 14
juin 2012 à la page 13. L'article est ainsi
intitulé : « Commissariat de police de
Boulmiougou : 10 malfrats dont un enfant de 12 ans dans les
filets ». La photo des dix personnes alpaguées par la
police les présente à visage découvert. Le journal n'a pas
fait recours à la bande noire parfois utilisée pour flouter les
images en pareille circonstance. De ce fait, l'article peut être
considéré comme préjudiciable à l'innocence
présumée des personnes poursuivies.
Bien plus, dans la légende accompagnant l'image des
suspects, le journal les qualifie de « bandits aux
arrêts ». A l'étape policière de la
procédure judiciaire, la formulation d'une telle légende ne tient
pas compte de l'innocence. Le jugement n'étant pas encore
prononcé, il aurait été convenable de traiter les
personnes mises en cause comme étant des suspects ou encore des
présumés bandits.
En procédant comme il l'a fait, le journal a
risqué une plainte pour diffamation ou pour injure. L'emploi du terme
« bandit » dans la légende pourrait
échapper à la qualification de diffamation, si
l'allégation ou l'imputation d'un fait précis n'est pas
retenue. Mais il y a une forte probabilité qu'il tombe dans la
qualification juridique de l'injure, définie comme une expression
outrageante ou méprisante qui ne renferme pas l'imputation d'aucun fait
précis.
Dans tous les cas, l'atteinte à la présomption
d'innocence dans cet article est indéniable.
Le numéro 7 228 du mardi 7 août 2012 de
Sidwaya comporte à sa page 31 un article où le journal
n'est pas allé au bout de sa logique tendant au respect de la
présomption d'innocence. Dans cet article portant le titre
« Démantèlement d'un réseau de
délinquants à Ouagadougou : « Satan» et ses
compagnons entre les mailles de la gendarmerie », le journal a
flouté à sa manière les visages des personnes
arrêtées.
Mais les bandes cachant les visages sont très minces au
point que leur effet se trouve réduit. De plus, à lire la
légende des photos, on croirait que les suspects ont déjà
été jugés coupables des faits à eux
reprochés. En effet, le quotidien d'Etat formule successivement à
propos des deux images : « Les faussaires ont
été arrêtés et leurs produits
confisqués » et « Ali Zida alias Satan
à gauche, et les deux récidivistes en face de leur
butin ».
Par ces légendes, les atteintes deviennent nombreuses
dans cet article. Elles se manifestent à la fois par les images et les
termes employés. Au-delà de l'atteinte de la présomption
d'innocence par les illustrations, il y a également des signes de
diffamation. Dire des personnes poursuivies qu'elles sont des faussaires, donc
des auteurs de faux avant tout jugement peut tomber dans la qualification de
la diffamation. Le fait d'ajouter que deux des personnes arrêtées
sont des récidivistes peut également comporter un risque de
diffamation. Car, lorsque les faits commis remontent à plus de 10 ans,
ils bénéficient de l'oubli et le journaliste est interdit d'en
parler. Dans ce cas, même si les faits sont avérés, la
preuve de la vérité des faits ou l'exceptio veritatis,
censée disculper le journaliste est inopérante.
L'article de la page 31 du numéro 7 228 du mardi 7
août 2012 précité, comme déjà
mentionné, recèle plusieurs manifestations d'atteinte à la
présomption d'innocence. Comme nous l'avons répertorié
parmi les articles violant la présomption d'innocence, sa prise en
compte dans une autre catégorie, nous aurait conduit à le
comptabiliser doublement.
Dans sa livraison numéro 7 291 du jeudi 8 novembre
2012, Sidwaya rapporte à sa page 32 l'arrestation
d'«une présumée voleuse d'enfant ». Le
visage de la dame est traversé d'une bande noire. Mais le journal
présente la dame en gros plan, si bien que l'effet de la bande est
insignifiant. L'identification de la dame est bien possible, même
au-delà du cercle familial. Ici l'usage du
« zoom » entraîne une atteinte à
l'innocence présumée, réduisant presqu'à
néant la technique tenant à cacher le visage du suspect par la
bande noire. La photo en question n'est pas légendée.
Tous ces exemples confirment qu'il subsiste des cas d'atteinte
à la présomption d'innocence dans Sidwaya. Dans
L'Observateur Paalga également, en dépit des efforts
fournis pour respecter la présomption d'innocence, des atteintes audit
principe demeurent.
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