B. Les fondements
juridiques de la présomption d'innocence
La présomption d'innocence est un droit de la
personnalité. Il fait partie des attributs que la loi reconnaît
à tout être humain. Sa protection est assurée au même
titre que celle des droits à la vie et à
l'intégrité corporelle, à l'intimité de la vie
privée, à l'image, à l'honneur et à la
considération. Ces droits visent à préserver la personne
humaine dans toute sa dignité. Ils sont en principe hors du commerce
juridique et dotés d'une opposabilité absolue.
A l'origine, tous ces droits ont été
dégagés par la jurisprudence. A ce propos, l'éminent
juriste français, Raymond Lindon a parlé de la «
construction prétorienne des droits de la
personnalité ». Telle est d'ailleurs le titre d'un de ses
ouvrages. Mais de nos jours, le législateur est intervenu dans la
protection des droits de la personnalité. C'est à travers de
nombreux textes aussi bien nationaux qu'internationaux que le principe de la
présomption d'innocence a été affirmé.
Le principe selon lequel « toute personne
accusée d'une infraction est présumée innocente
jusqu'à ce que sa culpabilité ait été
légalement établie » est énoncé à
l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de
1789, à l'article 6 § 2 de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l'homme, à l'article 14 § 2 du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques de 1966 et à
l'article 11 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de
1948.
La Loi fondamentale française de 1958, parce qu'elle
reprend dans son préambule le premier texte cité, donne une
valeur constitutionnelle à la présomption d'innocence. Au plan
législatif, le Code de procédure pénale français,
précisément la loi du 15 juin 2000 qui l'a modifié,
prévoit la présomption d'innocence. Le Code civil français
en son article 9-1 dispose : « Chacun a droit au
respect de la présomption d'innocence ».
Lorsqu'une personne est, avant toute condamnation,
présentée publiquement comme coupable de faits faisant l'objet
d'une enquête ou d'une instruction judiciaire, le juge peut, même
en référé, sans préjudice de la réparation
du dommage subi, prescrire toutes mesures, telles que l'insertion d'une
rectification ou la diffusion d'un communiqué, aux fins de faire cesser
l'atteinte à la présomption d'innocence, et ce au frais de la
personne, physique ou morale, responsable de cette atteinte ».
En droit burkinabè, la présomption d'innocence
est essentiellement conventionnelle et constitutionnelle. En effet, certains
instruments juridiques internationaux ratifiés par le Burkina Faso
défendent la présomption d'innocence. Il s'agit, entre autres, du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 (art.
14 § 2), de la Déclaration universelle des droits de l'Homme
de 1948 (art. 11-1) et de la Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples de 1981 (art. 7-1-b).
Le préambule de la Constitution burkinabè fait
allusion à ces textes juridiques internationaux. Bien plus, son article
4 consacre la valeur constitutionnelle de la présomption d'innocence en
des termes plus explicites. « Tout prévenu est
présumé innocent jusqu'à ce que sa culpabilité soit
établie », dit l'article 4 al 2.
Mais au plan législatif, les textes traitant de la
présomption d'innocence sont quasi-inexistants. On retrouve tout de
même dans la législation burkinabè des dispositions qui se
présentent comme les conséquences directes ou indirectes de la
présomption d'innocence. Il en est ainsi de l'article 11 du Code de
procédure pénale burkinabè. Il
dispose : « Sauf dans les cas où la loi dispose
autrement et sans préjudicier des droits de la défense, la
procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est
secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est
tenue au secret professionnel dans les conditions ou sous les peines
prévues par les dispositions du Code pénal relatives au
révélations de secrets ».
|