5.2 Effets dynamiques de la privatisation sur la
rentabilité des entreprises
L'intégration explicite du temps renouvelle les
analyses plus traditionnelles. Elle se justifie par le fait qu'il est peu
vraisemblable que l'effet de la privatisation sur la performance soit
immédiat dans des organisations complexes, de grande taille et dont le
portefeuille d'activités est souvent très diversifié. Pour
mieux rendre compte de cet effet, il faut évaluer l'éventuel gain
de performance de façon progressive et non pas uniquement à
travers un saut quantitatif se produisant à la date de la privatisation.
La procédure que nous appliquons maintenant consiste à mesurer le
gain (ou la perte) dynamique de performance, dû à la
privatisation.
L'estimation du modèle PERFit = ái +
131i Tit + 132iPit + 133iTPit + 134 tailleit+ 135 cycleit +åit
donne les résultats exposés au tableau 13 ci-dessous
:
Tableau 13: Analyse de l'effet dynamique de la
privatisation sur la rentabilité commerciale
Entreprises
|
Taille
|
Cycle
|
R2 ajusté
|
|
0,032
1,336
|
0,872
|
|
T
|
P
|
TP
|
|
-0,275
|
0,006
|
0,250
|
0,112
|
AES-SONEL
|
-6,261***
|
0,318
|
1,424
|
5,214***
|
|
-0,636
|
0,165
|
0,199
|
-0,085
|
CAMRAIL
|
-4,96***
|
2,777***
|
1,070
|
-1,755*
|
|
-0,291
|
0,004
|
0,114
|
0,03
|
CDC
|
-6,146***
|
0,198
|
1,669*
|
1,307
|
|
0,213
|
-0,013
|
-0,275
|
0,061
|
CHOCOCAM
|
3,71***
|
-0,516
|
-3,302***
|
2,181**
|
|
-0,057
|
0,01
|
0,013
|
0,008
|
HEVECAM
|
-3,821***
|
1,683*
|
1,406
|
1,108
|
|
0,181
|
-0,018
|
0,686
|
0,172
|
SEPBC
|
1,754*
|
-0,382
|
1,779*
|
3,412***
|
|
0,406
|
-0,095
|
-0,395
|
0,135
|
SOCAMAC
|
4,926***
|
-2,486**
|
-3,30***
|
3,356***
|
|
0,001
|
-0,003
|
0,043
|
0,013
|
SOCAPALM
|
0,141
|
-0,062
|
1,114
|
2,312**
|
|
Source : l'auteur à partir des
données de l'ARSEL, la CTR, l'INS et la SNI
60
Avant d'interpréter les données individuelles,
il faut mentionner que la variable taille à un effet positif et
significatif au seuil de 5% sur la performance alors que le cycle a un effet
positif et non significatif sur la performance. Cet effet positif est conforme
aux anticipations habituelles. Cependant, la non significativité de la
variable cycle sur la performance des entreprises privatisées s'explique
par le fait que les entreprises privatisées sont des cas
spécifiques étant donné qu'elles connaissent
généralement des changements stratégiques au niveau de
leurs politiques managériales, la nature des nouvelles stratégies
prises et mises en application peut ne pas permettre aux nouveaux
acquéreurs de profiter des bonnes conjonctures économiques.
Le fait de retenir ces deux variables comme facteurs communs
implique que les interprétations portent sur des
coefficients'° pour lesquels ces effets ont
été neutralisés. Pour mieux comprendre le contenu du
tableau, prenons l'exemple de la SOCAMAC, entreprise pour laquelle tous les
coefficients sont significativement différents de 0 à 1 %. Le
coefficient lié à la variable T est négatif ce qui
signifie qu'il n'ya pas eu une hausse de la rentabilité sur l'ensemble
des neuf (9) années. Le coefficient de la variable P, également
négatif, représente une baisse de la rentabilité lors de
la privatisation (effet de seuil). Enfin, le coefficient positif de TP signifie
que l'augmentation de la rentabilité se fait plus vite, en moyenne,
après la privatisation (année 0 à + 5), donc que
l'efficacité post privatisation croît davantage.
En effet, L'effet exercé par le temps (T) sur la
rentabilité est positif et significatif pour deux (2) entreprises
(CAMRAIL et HEVECAM) et négatif et significatif à 5% pour une (1)
entreprise (SOCAMAC). A priori, il parait qu'au fur et à mesure que le
temps passe l'entreprise s'adapte mieux à son environnement, accumule
d'expériences et arrive mieux à s'organiser ce qui lui permet
d'investir davantage et augmenter sa rentabilité.
10 .Le chiffre de la première ligne est le
coefficient et celui de la seconde ligne, le t de Student.
* : coefficient significativement différent de
zéro à 10%
** : coefficient significativement différent de
zéro à 5%
*** : coefficient significativement différent de
zéro à 1%
En outre, l'examen du tableau 5 impose de tenir compte d'un
certain nombre de réalités :
- premièrement, lorsque le coefficient lié
à la variable T est positif, cela traduit le fait que globalement,
l'on
observe une hausse de l'indice de productivité sur
l'ensemble des 9 années considérées pour l'entreprise ;
- deuxièmement, un coefficient de la variable P positif,
indique une hausse de l'indice de productivité lors de la
privatisation (effet de seuil) ;
- troisièmement, un coefficient de la variable TP positif
signifie un redressement de la productivité plus rapide en
moyenne, après la privatisation (de l'année 0
à l'année + 5), c'est-à-dire une augmentation de
l'efficacité dynamique de la privatisation sur l'indice
de productivité de l'entreprise considérée.
61
Le coefficient de la variable P fournit une information de
nature statique (effet seuil)11. L'effet seuil de la privatisation
est positif pour six (6) entreprises sur les huit (8) de l'échantillon.
Cependant, même si l'effet seuil apparaît favorable pour une
majorité des firmes privatisées, il n'est positif et significatif
que pour deux (2) entreprises (CDC et SEPBC). Inversement, il est
négatif et significatif pour deux (2) entreprises (CHOCOCAM et
SOCAMAC).
L'évaluation du coefficient de P ne permet toutefois
que de cerner les effets de seuil, statiques, de la privatisation. Pour
évaluer l'efficacité dynamique, c'est-à-dire
l'évolution de la rentabilité après la privatisation, il
faut considérer les coefficients de la variable (TP). Ces coefficients
sont positifs et significatifs pour cinq (5) entreprises (AES-SONEL, CHOCOCAM,
SEPBC, SOCAMAC et SOCAPALM) ; inversement, le coefficient de la variable TP est
négatif et significatif pour une (1) seule entreprise (CAMRAIL).
En somme, environ 62,5% des entreprises de notre
échantillon ont subi l'effet positif de la privatisation (effet seuil et
effet dynamique). De même, nous remarquons que les entreprises qui ont
été affectées négativement au moment de la
privatisation (effet seuil) ont pu améliorer leurs performances durant
la période post-privatisation. Les tests de l'effet dynamique
effectués sur les deux autres indicateurs12 confirment aussi
une amélioration dans les mêmes proportions de leur
rentabilité financière et globale. Ainsi, la privatisation a eu
une incidence positive sur la rentabilité des entreprises camerounaises
sur l'horizon considérée.
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