Les marques ont su identifier l'importance des consommateurs
sur les plateformes sociales, mais les consommateurs l'ont eux aussi compris,
que les cartes avaient été redistribuées en leur faveur.
C'est pour cela, qu'ils on relevé leur niveau d'exigence, car
après avoir été inondé de publicités et
offres commerciales en tout genre pendant des années, sans avoir leur
mot à dire, ils ont aujourd'hui, la possibilité et l'envie de
dialoguer, de juger, de participer et de rechercher eux-mêmes les
informations dont ils ont besoin. Cette nouvelle position de meneur de jeu dont
bénéficient les consommateurs sur les plateformes sociales, leur
permet d'adopter différents comportements sur les plateformes. De
l'ambassadeur au militantisme anti-marque, la nouvelle génération
de consommateurs en fait voir de toutes les couleurs aux marques. Nous
étudierons donc au cours de
25
cette section, la place occupée par les consommateurs
sur les réseaux sociaux, les principales motivations qui les poussent
à interagir avec les marques, leurs attentes et la perception de
celles-ci par les marques, ainsi que la fiabilité qu'ils accordent aux
contenus publiés sur les pages de marques. Enfin nous conclurons avec la
mise en relief de certaines limites à l'engouement des consommateurs
pour les marques sur les réseaux sociaux.
Le consommateur à changé de statut, il est
passé de spectateur à « consommacteur », cette nouvelle
génération de consommateur est responsable, engagé, et a
une attitude réfléchie vis-à-vis de sa consommation. Les
consommacteurs utilisent cet engagement pour influencer plus ou moins
directement le monde dans lequel il vit, en relayant les informations
auprès de leurs égaux. D'après une étude
réalisée par le cabinet Ethicity (2008) dévoila que 83%
des français estiment qu'à travers leurs choix d'achats, ils
agissent au service de leurs convictions. Ils sont également 77%
à faire attention à ne pas acheter de marques appartenant
à une entreprise dont ils réprouvent le comportement. Cette
nouvelle influence des consommateurs est motivée par ce besoin humain de
base à vouloir être utile en donnant des conseils, mais aussi par
cette jouissance commune que les gens partagent dans la recherche de
précieuses informations (Smith, Coyle, Lightfoot, Scott, 2007). Les
consommacteurs produisent, publient, diffusent, indexent, partagent, critiquent
du contenu sur les réseaux sociaux ; il existe tout de même
différent niveau d'implication et différents profils de
consommateurs présents sur les plateformes sociales. Une étude
réalisée en juin 2010 par Performics (Groupe Publicis) portant
sur le comportement des internautes et son évolution au sein des
réseaux sociaux, nous soumet une typologie intéressante des
consommacteurs à travers le site social Facebook (Figure 6).
26
Cette typologie fait ressortir cinq profils d'utilisateurs
différents, qui ont été composés en fonction du
niveau d'engagement des internautes ainsi que leur niveau
d'intérêt envers les pages de marques sur les réseaux
sociaux :
- Les réseauteurs (11%) sont très
impliqués, ils ont tous déjà consulté des pages de
marques, et sont fan d'au moins une page de marque. Ils participent pas mal aux
groupes et savent utiliser la totalité des fonctionnalités
offertes par les logiciels sociaux. Les réseauteurs affirment à
63% être prêts à acheter des produits via les réseaux
sociaux. Ce type de profil est majoritairement représenté par un
public masculin de plus de 35 ans.
- Les participantes (20%) ont un usage très
variés des réseaux sociaux car elles connaissent et utilisent les
fonctionnalités proposées. Elles participent à des
groupes, partagent du contenu (vidéos, photos, musique...), posent des
questions et soulèvent des interrogations. Si l'appellation de ce profil
à une connotation féminine, c'est parce qu'il est
représenté à 74% par des femmes, dont 55% ont moins de 35
ans.
- Les communicantes (38%) ont un usage avancée des
réseaux sociaux mais principalement axé sur les relations
personnelles. Elles connaissent et utilisent les fonctionnalités
proposées, principalement les applications. Ce sont de grandes
consommatrices des différents types de messagerie (message personnel,
messagerie instantanée, mur...). Les participantes ne consultent aucune
page de marques sur les réseaux sociaux, ce n'est pas l'une de leur
motivation première lorsqu'elles se rendent sur les plateformes. Ce type
de profil est lui aussi majoritairement représenté par un public
féminin (73%) plus jeune que la moyenne des utilisateurs.
- Les Avertis réservés (26%) ont un usage
modéré des réseaux sociaux, ils connaissent les
fonctionnalités principales des réseaux sociaux, sans chercher
à en découvrir davantage. Les fonctionnalités principales
leurs permettent de maintenir à jour leurs relations, et de rester
averti. C'est un type de profil qui ne consulte pas de page de marques sur les
réseaux sociaux.
- Les consultatifs (6%) ont un usage restreint des
réseaux sociaux. Ils ne sont pas très à l'aise avec toutes
les fonctionnalités proposées sur les réseaux sociaux. Ils
ont un niveau de participation et un taux de connexion assez faible. Ce type de
profil majoritairement représenté par les utilisateurs les plus
âgés, ne consultent pas de pages de marques sur les réseaux
sociaux.
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Les cinq profils précédemment
détaillés montrent la diversité des internautes, et les
différents rôles que peut adopter chaque consommateur sur les
plateformes sociales, en fonction de leurs types et degré de
participation. Il faut cependant savoir que tous les consommateurs ont un
rôle de prescripteur qu'il soit voulu ou non. Selon T. Stenger et A.
Coutan (2009), il existe différent types de prescription allant de la
moins délibérée aux démarches plus conscientes et
volontaires. Ils définissent en se basant sur ce constat trois
degré de prescription :
· « La prescription a minima est
constituée par la simple notification d'une activité menée
par l'utilisateur (Installation d'une application, ajout d'un ami, d'une photo
de vacances...) qui peut inciter son réseau d'amis à effectuer la
même activité.
· Une forme intermédiaire de volontariat dans
l'expression de ces prescriptions se trouve dans les statuts (texte mais aussi
vidéos, musiques, liens, articles) ainsi que dans les pages des groupes
auxquels adhèrent les utilisateurs. C'est aussi le cas des commentaires
qu'ils effectuent à partir du contenu de leur profil ou de celui de
leurs amis.
· La forme la plus explicite de prescription est
constituée par les nombreuses applications fleurissantes autour des
activités d'évaluation et de recommandation. Elles peuvent
être intégrées par défaut au dispositif, telles les
possibilités d'évaluation des profils et blogs sur Skyrock ou les
« j'aime », « causes » ou l'onglet d'informations
personnelles de Facebook. L'option « partager » disponible sous
toutes les notifications relève de cette même catégorie
puisque l'utilisateur choisit alors consciemment de faire connaître ce
contenu à ses amis. Beaucoup peuvent aussi être ajoutées
comme les applications Facebook « top five », « compare »
ou l'application à succès du début d'année 2009 :
« living social », permettant de créer ses classements sur
tous les sujets imaginables (cinéma, voyages, sport, gastronomie, mode,
culture...). Elles témoignent cette fois d'un soutien explicite,
revendiqué, aux thèmes sélectionnés. »
Les consommateurs ou devrions nous dire, les consommacteurs,
peuvent prendre différente forme et occuper des places divers et
variées, tout en étant évolutives au sein des plateformes
de marque, mais tout cela va dépendre du type et du degré de
motivation qui les poussent à interagir. De nombreuses études
mettent en évidence un accueil favorable des marques sur les
réseaux sociaux par les consommateurs, ainsi qu'un désir
d'échange avec celles-ci (Convergys, 2010). La réaction positive
des consommateurs à l'égard des marques sur les réseaux
sociaux, est motivée par différents facteurs qui les poussent
à vouloir interagir avec elles. Ces principaux facteurs de
28
motivations, ont pu être recueillis à l'aide de
deux études, l'une réalisée par Spintank et Opinionway
(2010) et l'autre par Performics (2010). Les résultats obtenus nous
permettent de les classifier selon leur nature :
· l'accès à des réponses
précises, qualifiées et mises à jour de la part de
l'entreprise ou de la marque,
· le désir de rester informer sur les
activités de l'entreprise et d'entrer en contact avec la marque,
· l'expression d'une insatisfaction, d'une critique ou
l'envie de peser sur la conduite de l'entreprise (environnement,
responsabilité sociale),
· Pour manifester son intérêt pour la
marque ou parce qu'ils se sentent proche de la marque,
· la recherche de bons plans, de l'exclusivité et
la réception de compensation (réductions, cadeaux,
avantage...),
· Pour le plaisir ou la rencontre et le partage avec
d'autres utilisateurs,
· Par curiosité, pour expérimenter une
pratique nouvelle qui a retenu leur attention.
D'après cette hiérarchisation les marques
semblent donc avoir matière à convaincre et à satisfaire
cette nouvelle génération de consommateur. Cependant, une
étude récente réalisée par IBM Institute for
Business Value (2011) nous pousse à nous poser des questions sur la
perception des attentes des consommateurs par les marques. En effet, cette
étude nous fait part d'un écart de perception entre ce que les
consommateurs attendent réellement de leurs interactions avec les
marques sur les réseaux sociaux, et les suppositions que les marques se
font de leurs attentes. En outre, de l'étude il ressort que les attentes
des consommateurs à l'égard des entreprises et marques
concernaient à hauteur de 61% le désir d'obtenir des remises, et
à 55% l'acte d'achat lui-même ; alors que les marques elles
plaçaient au premier plan de ce qu'elles estimaient être les
attentes des consommateurs, la volonté d'acquérir des
informations sur les produits (71%) et le désir d'obtenir des
informations d'ordre général (73%). Ce constat nous pousse
à nous demander dans le cadre de nos recherches, si la capacité
d'une marque à percevoir les attentes des consommateurs au sein des
plateformes de marques à un effet sur l'implication des consommateurs
dans celles-ci. Ce constat nous mène donc à l'hypothèse
suivante :
H1 : Le degré d'implication d'un consommateur
dans une plateforme de marque est conditionné par la capacité de
la marque à percevoir ses attentes.
29
Dans ce sens, une autre étude réalisée et
récemment publiée par LightSpeed Research (2011) du Group WPP,
met l'accent sur le manque d'intérêt ainsi que le manque de
fiabilité perçu par les consommateurs envers les avis
postés sur les réseaux sociaux. En effet, 72% des
répondants affirment chercher des avis sur les produits via les moteurs
de recherches contre seulement 5% qui disent utiliser les réseaux
sociaux. Ce qui met en avant un taux d'intérêt faible pour les
avis postés sur les plateformes sociales, dont la nature semblerait
être la perception d'un manque de fiabilité vis-à-vis de
ces mêmes avis. En outre, l'étude révèle que les
internautes consommateurs accordent à 56% leur confiance aux avis
provenant des associations de consommateurs, qui semblent être à
leurs yeux des entités fiables et neutres. De plus, ils accordent leur
confiance à hauteur de 48% aux avis et recommandations qui leurs sont
faites par leurs proches et amis « réels », alors qu'ils
affirment accorder à seulement 13% leur confiance aux avis postés
sur les réseaux sociaux. Ce chiffre est d'autant plus
représentatif lorsqu'on y ajoute les 63% des consommateurs mis en
exergue dans l'étude, qui estiment que les réseaux sociaux ne
sont pas une source fiable ! A première vue, ces résultats
semblent un peu tirés par les cheveux, mais une seconde étude
réalisée par Goldman Sachs en mars 2011 confirme les
révélations faite par LightSpeed Research (2011). Dans cette
étude, une question portant sur la hiérarchie en matière
de source d'information en rapport avec l'acte de consommation met en
évidence les mêmes tendances que la précédente.
Effectivement, les résultats sont riches d'enseignements car près
de 31% des répondants affirment utiliser comme source d'information
prioritaire les moteurs de recherche alors que seulement 5% affirment utiliser
les réseaux sociaux dans le même cas.
Ces études nous font donc comprendre que le
consommateur à besoin d'objectivité, d'expertise, de
neutralité, de prix, de comparatifs lorsqu'il est à la recherche
d'information relatives à un produit ou une marque, et qu'il n'est pas
encore prêt à faire confiance aux réseaux sociaux comme
sources d'information fiable.
La précédente analyse nous amène donc
à nous demander dans le cadre de notre étude, si le niveau de
fiabilité accordé aux informations postées sur les pages
de marques à un effet sur le degré d'implication des
consommateurs dans celles-ci. Cette analyse nous mène donc à
l'hypothèse suivante :
H2 : Le niveau de fiabilité accordé aux
informations publiées sur les plateformes de marque a un effet sur le
degré d'implication des consommateurs au sein de ces
plateformes.
Nous avons pu expliciter au cours de cette section,
l'évolution comportementale qu'ont connue les consommateurs sur les
réseaux sociaux, les différents positionnements que pouvaient
adopter les consommateurs, ainsi que les principaux facteurs de motivations qui
les poussent à interagir avec
30
les marques. De nombreuses études, montrent une
réelle volonté d'interagir pour les consommateurs et une
montée en puissance de leurs échanges avec les marques, il serait
toutefois intéressant de joindre à notre analyse certaines
limites à cet engouement.
D'après une étude académique
menée par Thomas STENGER et Alexandre Coutant, l'engouement pour les
marques présenté dans les différentes études doit
être pris en compte avec une certaine réserve. Cette étude
a été réalisée selon un protocole d'enquête
pluriel, soit 24 mois d'observations en ligne, 67 entretiens individuels et de
groupe, 637 questionnaires en ligne et 7041 profils analysés avec le
logiciel Tétralogie. Elle révéla que de nombreux
consommateurs présents sur les plateformes de marque, du type « Fan
Page Facebook », déclarent ne pas avoir noué de relation
avec des marques. Plus encore, certains consommateurs révèlent
même que malgré leur présence sur des pages ou des groupes
de marques, qu'ils ne les soutiennent pas réellement et qu'il s'agit
plutôt de clins d'oeil entre pairs. D'autres répondants affirment
même ne jamais avoir participé ou visité les pages
auxquelles ils ont adhéré. Les interrogés reconnaissent
aussi oublier ces groupes aussi vite qu'ils s'y sont inscrits (Stenger,
Coutant, 2009). Les résultats publiés par les différents
cabinets d'étude qui sont strictement basés sur le nombre
d'adhérents à des pages de marques se trouvent fortement
discrédités par la réelle nature de ces adhésions.
Ces révélations qui remettent tout en cause, nous poussent
à nous demander si l'adhésion à une plateforme de marque
garantie réellement l'implication du consommateur dans celle-ci. Ces
révélations nous mènent donc à l'hypothèse
suivante :
H3 : L'adhésion du consommateur à une
plateforme de marque ne garantit pas son implication dans celle-ci.
4 Toutes les analyses portant sur la présence des
marques et des consommateurs sur les réseaux sociaux ont montré
l'importance qu'ont prise les réseaux sociaux pour les marques, les
opportunités qu'elles leurs offrent et les facteurs stratégiques
importants que les marques doivent maîtriser pour réussir leur
implantation et leur pérennité sur ces plateformes.
L'évolution majeure sur les réseaux sociaux, est la position
centrale qu'occupe cette nouvelle génération de consommateur, qui
a maintenant une place sur le devant la scène. En effet, ils peuvent
adopter différents rôles et positionnements, en fonction des
principales motivations qui les poussent à interagir avec les marques.
De nombreuses études, montrent une réelle volonté pour les
consommateurs et une montée en puissance de leurs interactions avec les
marques, il a toutefois été démontré qu'il existait
certaines limites à cet engouement, souvent trop mis en avant. Il
ressort en outre, de certaines études et recherches, qu'il existe un
écart de perception entre ce que les consommateurs attendent
31
réellement de leurs interactions avec les
marques sur les réseaux sociaux, et les suppositions que les marques se
font de leurs attentes. De plus, deux études, l'une
réalisée par LightSpeed Research, et l'autre par
Goldman Sachs, dégagent que les consommateurs ne sont pas encore
prêts à faire confiance aux réseaux
sociaux comme source d'information fiable. Enfin, les
recherches et observations réalisées par T. Stenger et A.
Coutant, nous ont démontré que l'adhésion
à une page de marque ne garantissait pas
forcément une implication ou un intérêt
pour celle-ci, mais aussi, qu'il existait de nombreux
consommateurs présents sur des pages de marques qui avouent ne
s'être jamais rendus sur la page et n'avoir jamais
noués de relation avec ces marques.
Toutes ces contradictions, nous conduisent
à nous interroger sur la réelle implication des
internautes à l'égard des pages de marque
auxquelles ils sont associés, ainsi que l'effet de
différentes variables sur cette implication. Nous
tenterons donc dans la seconde partie de ce mémoire, de mener une
étude permettant d'évaluer le degré d'implication
réelle des consommateurs dans les pages de marques
auxquelles ils sont associés, ainsi que les différentes
variables ayant un effet sur celui-ci. Pour cela, nous
articulerons cette étude, en nous efforçant de
vérifier les hypothèses de recherche
précédemment émises, et
présentées ci -dessous :
· Hypothèse 1 (H1) 4 Le
degré d'implication d'un consommateur dans une plateforme de
marque est conditionné par la capacité de la
marque à percevoir ses attentes.
· Hypothèse 2 (H2) 4 Le
niveau de fiabilité accordé aux informations
publiées sur les plateformes de marque a un effet sur le degré
d'implication des consommateurs au sein de ces plateformes.
· Hypothèse 3 (H3) 4
L'adhésion du consommateur à une
plateforme de marque ne garantit pas son implication
dans celle-ci.