I / DISCUSSIONS
Suite à ce travail d'enquête, nous allons
principalement orienter nos discussions vers :
- le statut des cadets et des juniors dans les clubs,
- les attentes des joueurs par rapport à celles de leurs
parents,
- la responsabilité des parents face à la rupture
scolaire de certains joueurs,
- la qualité de l'encadrement,
- la compatibilité entre le sport et les
études,
- les initiatives ou les structures sport études.
Les cadets et les juniors dans les clubs où nous avons
mené notre enquête ne sont pas salariés dans leurs clubs et
se contentent par conséquent des primes de match.
Cependant, presque 70% de ceux là ne sont pas
scolarisés ou n'exercent pas d'activité scolaire pour des raisons
diverses allant du désintéressement au manque de moyens en
passant par l'inadaptation scolaire où encore à l'échec
scolaire.
L'impact du football sur la rupture scolaire est
considérable car certains élèves sont prêts à
abandonner leurs études pour s'y consacrer définitivement.
Cet impact combiné avec les attentes de certains
parents peuvent plus ou moins pousser les élèves à
négliger leurs études, ce qui fait que le football occupe une
place très importante dans la vie de ces joueurs.
Par ailleurs, nous avons noté que le taux
d'encadrement et le niveau de qualification des encadreurs ne sont pas toujours
élevés alors qu'au plan juridique, la FSF se préoccupe de
leur formation et de leur qualification à travers le Plan National de
Développement.
A cause de ces raisons entre autres, beaucoup de joueurs ont
été bon gré ou malgré contraints à l'abandon
précoce de leurs études au profit du football à propos
duquel ils espèrent pratiquement tous réussir dans leur vie.
Ce qui fait que leurs aspirations vis-à-vis de cette
activité sportive sont souvent énormes et contrastent avec le
nombre élevé d'aspirants à coté des
possibilités réelles de réussite qui elles sont
minimes.
Face à cette situation, nous sommes tentés de
nous demander si le jeu en vaut réellement la chandelle.
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Beaucoup de parents de joueurs voudraient que leurs enfants
réussissent dans leurs études, d'autres
préféreraient les voir réussir à la fois dans le
football et les études, pendant que la majorité d'entre eux
aimerait voir leurs enfants réussir dans le football.
A travers cette analyse, la responsabilité des parents
est donc plus que jamais engagée dans la rupture scolaire ou dans la
poursuite des études car à quelques exceptions près,
l'avenir de ces joueurs dépendra en grande partie de l'orientation, du
suivi, ou de l'assistance permanente et scrupuleuse que leurs parents
manifesteront ou pas à leur égard.
Ceci va nous permettre de faire un bref survol sur la
situation actuelle de l'éducation dans le pays qui mérite
à notre avis une attention particulière.
L'éducation scolaire voit son importance à la
baisse à travers les analyses que nous avons faites. Et il est plus que
jamais nécessaire de la revaloriser pour espérer de meilleurs
lendemains au peuple sénégalais tout entier.
Dans cette recherche, nous avons constaté que plus de
80% des joueurs n'exercent pas d'activités
rémunérées ; ce qui semble vouloir dire qu'ils n'ont que
le football comme activité principale et espèrent sans doute y
réussir.
Cependant, les entraîneurs doivent d'avantage
améliorer le niveau de leur qualification du fait qu'on y compte plus
d'animateurs, d'initiateurs que de détenteurs du 1er ou
2èmedegré, ce qui peut quelque part remettre en cause
la qualité de leur travail d'autant plus que nous avons noté que
dans certains clubs, un (1) seul entraîneur s'occupe à la fois de
l'entraînement des cadets et des juniors au sein d'un même club.
Cet état de fait peut avoir des répercussions
sur la qualité même des entraînements car, on note dans ces
clubs un manque criard de matériels sportifs indispensables pour un
travail de qualité.
D'autres encore estiment avoir fait plus de dix (10) ans
d'expérience mais n'ont pas encore le 1er degré
d'entraîneur, ce qui reflète un certain manque d'implication ou de
persévérance de leur part alors que leur niveau intellectuel ou
scolaire peut constituer une limite.
Ils doivent donc à ce titre faire preuve de beaucoup
plus de volonté et d'implication dans ce domaine car ils ont tous entre
six (6) et sept (7) ans de service au moins dans ce milieu.
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La compatibilité du football avec les études
chez les élèves joueurs dans les clubs demeure
problématique car ils éprouvent des difficultés à
satisfaire en même temps les exigences d'ordre temporel que
requièrent les deux activités.
Une partie importante des joueurs n'est pas au courant de
l'existence de centres sport-études, ce qui témoigne à la
fois de leur récente genèse et de leur petit nombre en même
temps qu'ils laissent imaginer l'aspect onéreux sur leur mise en oeuvre
car c'est grâce à des millions qu'ils ont tous été
construis.
La possibilité de concilier le sport et les
études existe, à l'image des quelques structures de formation
préexistantes et dont nous saluons l'idée. Elle est à
concrétiser davantage par la création d'autres nouvelles et le
soutien et la promotion de celles qui existent.
II / PERSPECTIVES
Les perspectives de notre réflexion portée
jusqu'ici sur : « la situation scolaire des cadets et juniors
dans les clubs de football du département de Dakar »
s'esquissent sous les deux angles éducatif et sportif.
4 Au plan éducatif :
La difficulté de conciliation entre le football et les
études peut également résider dans la situation actuelle
de crise notée dans certains milieux scolaires à cause des
nombreuses conséquences qu'elle peut engendrer à savoir le
désintéressement, l'abandon etc.
Il est impératif que des mesures coercitives soient
prises par les autorités administratives en sanctionnant positivement ou
négativement l'assiduité, la ponctualité ou encore le
comportement des élèves aux cours afin d'éviter les
probables perturbations qui peuvent survenir dans le fonctionnement du
système éducatif et sportif actuel. C'est ainsi que le directeur
de l'enseignement moyen secondaire par rapport à la crise scolaire qui
sévit actuellement confiait en ces termes : « il faut trouver un
consensus dans l'espace scolaire »*
Les autorités de ce pays doivent rapidement intervenir
pour prendre ces problèmes d'ordre éducatif à bras le
corps en créant par exemple un pacte entre les élèves,
leurs parents, les chefs d'établissements, les enseignants et
professeurs pour pacifier et stabiliser les milieux scolaires en les rendant
plus attrayants, par des dotations en matériels didactiques,
logistiques, pédagogiques entre autres pour se mettre au diapason des
progrès scientifiques et technologiques tout en essayant de motiver les
élèves.
* MR LEOPOLD FAYE, dans : « le soleil »du Vendredi 6
Janvier 2006 n°10682 page 8
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Autrement dit, ce cadre de concertation et de rapprochement
pourrait permettre de discuter des problèmes des élèves et
d'anticiper sur les éventuelles manifestations d'humeur dès le
départ avec l'autorité qui sied pour des réponses plus
efficaces à leurs préoccupations.
Il est crucial de réaménager les moments
d'entraînement dans les clubs afin de permettre aux élèves
de participer massivement aux séances.
C'est ainsi que grâce à la particularité
du football que Henry Hélal et Patrick Mignon (1999) diront : «
...À la base du développement du mouvement sportif, son essor
irrésistible pourrait être à l'apprentissage d'un civisme
perdu chez les jeunes et servir ainsi de vecteur de renouveau des banlieues et
des cités » (Page 33). 20
On perçoit à travers cette citation
l'éloge fait par nos deux auteurs sur le football et toute la
portée éducative de cette activité.
Les parents ont également leur part de
responsabilité dans cette affaire et un rôle
prépondérant à jouer dans la protection, le soutien et la
sensibilisation de leurs enfants car si ces derniers n'ont pas le niveau
intellectuel minimum requis, c'est le Sénégal tout entier qui va
reculer, ce sont eux qui vont perdre et leurs enfants le leur reprocheront.
4 Au plan sportif :
Il faudrait peut être l'implication du ministère
des sports par le biais de la F.S.F dans la programmation des séances
d'entraînement des petites catégories et l'instauration par le
ministère de l'éducation des « journées continues
» obligatoires dans presque tous les établissements scolaires de
DAKAR et l'arrêt des cours au plus tard à 16 heures 30 minutes.
Les matinées coïncidant exclusivement aux horaires
des enseignements scolaires, ce n'est que lorsque les séances
d'entraînement des cadets et juniors se dérouleront pendant les
après-midi dans la majorité des clubs à partir de 17
heures qu'on marquera un pas significatif vers l'encouragement des jeunes en
général et des élèves en particulier dans leurs
activités sportive et scolaire au bénéfice du football
sénégalais tout entier.
La pratique du football étant une activité tout
aussi importante que l'activité scolaire, il faudrait donc donner aux
jeunes élèves qui veulent éprouver leurs
possibilités dans les clubs de foot les chances de vivre leur passion et
de s'épanouir.
Le problème majeur pour les encadreurs tournerait alors
autour de cette question de DIETRICH à savoir : « comment peut-on
satisfaire petit à petit et en tenant compte du développement des
élèves, les exigences que posent le football en tant que sport
d'équipe, sport d'opposition ou sport de performance ? ».21
Il serait donc important que les entraîneurs prennent en
compte la situation scolaire des jeunes joueurs et certains paramètres
qui en sont inévitablement inhérents afin de mieux les
intégrer au sein du club.
L'U.A.S.S.U doit également être redynamisé
et renforcé en faisant l'objet d'un suivi scrupuleux et régulier
aussi bien au niveau scolaire et universitaire surtout dans l'organisation
permanente de compétitions sportives durant l'année
académique.
Les ministères de l'éducation et des sports
devront étroitement collaborer et travailler en synergie dans la
programmation des heures d'entraînement et celles de cours pour que
l'élève en général soit prédisposé
à concilier harmonieusement ses études avec le football en
club.
En outre, comme a eu à le souligner DAOUR GAYE, «
le football sénégalais est dans une situation de
précarité telle que, seule, l'introduction du professionnalisme
peut aider à renverser la tendance ».22
Nous pensons effectivement que notre football a besoin
d'être réformé, professionnalisé pour favoriser
aussi bien l'émulation chez les jeunes que l'amélioration de
leurs conditions de vie familiale et sociale surtout au plan financier.
Cette professionnalisation pourrait ainsi permettre
d'élever le niveau de notre football sur l'échiquier africain
voire mondial tout en offrant aux footballeurs des possibilités de
reconversion après leur arrêt.
Mais ici et ailleurs, dans l'évolution actuelle du
football moderne il faut nécessairement un véritable management
en amont et en aval du sport considéré avant de pouvoir
prétendre à des résultats positifs et progressistes.