III.6 Premier centre
d'intérêt : fondements de l'enseignement de la Culture
nationale.
A partir du résultat obtenu par rapport à la
connaissance des textes fondamentaux à savoir : le Rapport des
Etats Généraux de la Culture, le rapport des Etats
Généraux de l'Education, la Loi d'Orientation de l'Education au
Cameroun et les Actes du séminaire de lancement de la Culture Nationale
dans le secondaire, nous constatons que la plupart des enseignants n'ont qu'une
idée approximative de ces textes.
S'agissant du Rapport des Etats Généraux de la
Culture 54% d'enquêtés disent qu'ils ont entendu parler de ce
texte. Par contre, 2% seulement disent l'avoir lu et exploité. Pire
encore en cumulant le résultat des deux dernières
catégories c'est-à-dire ceux qui en ont entendu parler et ceux
qui n'en ont aucune idée, on obtient 92%. Ces résultats peuvent
signifier deux choses : soit les enseignants n'ont pas la volonté
d'acquérir et d'exploiter ce texte, soit ils en ont la volonté
mais sa distribution n'est pas bien menée, ce qui est dommage pour le
système éducatif car comme le dit si bien Ntebe Bomba
(2006 : 3) « Les Etats Généraux de la
Culture camerounaise ont enfanté un autre Cameroun, le Cameroun
culturel ». Qu'en est-il du Rapport des Etats
Généraux de l'Education ?
Tout comme le premier texte, les enseignants n'ont qu'une
idée approximative du Rapport des Etats Généraux de
l'Educaton et pourtant, ce texte est indispensable pour tout enseignant digne
de ce nom.
S'agissant de la Loi d'Orientation de l'Education au Cameroun,
elle est également peu connue des enseignants du Secondaire. Les
résultats indiquent que seulement 6% des enquêtés ont
exploité ce document contre 45% qui n'ont aucune idée, comme
l'indique le tableau 13. Lorsqu'on sait que c'est ce texte qui place les jalons
de la nouvelle orientation de notre système éducatif, on ne peut
que déplorer le fait que les enseignants ne l'exploitent pas.
L'autre texte très important pour l'Enseignement
Secondaire et qui est aussi pris à la légère par les
enseignants est l'acte du séminaire de lancement de l'enseignement de la
culture nationale dans le secondaire tenu à Yaoundé en 2007. Ce
texte constitue un tournant important pour l'Enseignement Secondaire car c'est
pour la première fois qu'au Cameroun, on envisage en termes concrets
d'introduire la Culture nationale dans cet ordre d'enseignement.
III.7 Deuxième centre
d'intérêt : Contenu des programmes de la Culture nationale au
Secondaire.
Partant de l'analyse minutieuse des résultats de
l'enquête par rapport aux éléments du contenu de
l'enseignement de la Culture nationale dans le Secondaire, il se dégage
clairement le constat selon lequel la plupart des enseignants
enquêtés pensent qu'il faut puiser le contenu de cet enseignement
dans les rites sociaux traditionnels (cf. tableau 15), l'art culinaire
traditionnel (cf. tableau 18), l'art vestimentaire traditionnel(cf. tableau
21), l'art musical traditionnel (cf. tableau 24), les danses traditionnelles
(cf. tableau 27) et les codes moraux traditionnels(cf. tableau 30).
Pour chaque aspect, nous avons demandé aux
enquêtés de citer trois contenus concrets et presque tous les ont
cités en insistant sur les contenus faciles à trouver dans
l'environnement de l'élève.
Nous leur avons demandé de justifier leurs
réponses. Beaucoup ont souhaité qu'on enseigne aux enfants les
rites sociaux traditionnels afin de sauvegarder le patrimoine culturel et de
les enraciner dans les us et coutumes du terroir. Il s'agit selon eux de lutter
contre l'acculturation des jeunes et de les préparer à
résister contre la mondialisation dévastatrice des
cultures ; et Ntebe Bomba (226 :4) d'insister :
La promotion de sa culture est simplement un devoir
et un droit du citoyen, de tout citoyen. Il s'agit pour nous Africains de nous
défendre « becs et ongles » d'abord contre
nous-mêmes ; ensuite contre autrui, tout autrui dans son aspect
envahissant.
S'agissant de l'art culinaire, ceux qui ont souhaité
qu'on enseigne l'art culinaire traditionnel aux enfants soutiennent que
certains mets traditionnels ont des ingrédients qui ont des vertus
thérapeutiques et que ces mets sont naturels et plus nourrissants que
les mets étrangers.
Quant à l'art vestimentaire, un pourcentage important
des enquêtés soutiennent qu'enseigner l'art vestimentaire aux
élèves du Secondaire c'est préserver notre identité
culturelle. D'autres ont justifié leurs réponses en estimant que
nos vêtements traditionnels sont moins coûteux, plus décents
et mieux adaptés aux climats camerounais. Ces points de vue tiennent, eu
égard à nos comportements vestimentaires quotidien. Il n'est pas
rare de voir dans nos rues les jeunes filles qui marchent presque torse nu,
copiant ainsi les modèles vestimentaires qui ne cadrent pas avec nos
moeurs. Enseigner aux enfants le Kaba Ngodo, la gandoura, le Djoumba et autres
tenues traditionnelles qui habillent décemment corrigera à coup
sûr cet état de chose.
En ce qui concerne l'art musical, 80% d'enquêtés
estiment que en enseignant l'art musical aux enfants, on les enracine dans la
culture en même temps qu'on sauvegarde le patrimoine culturel national.
Il s'agit ici de multiplier les occasions où les élèves
vont chanter les chants de chez nous.
S'agissant des danses traditionnelles, 84% sont pour que nos
danses soient enseignées dans l'enseignement Secondaire. Ils justifient
cela par le fait que la danse est le signe matériel de l'identité
culturelle d'une part et pourvoyeuse d'emploi d'autre part. Le Cameroun regorge
des rythmes et des danses extrêmement riches et variées. Dans
l'aire culturelle Mèdûmbà par exemple, on compte une
pléthore de danses qui, si elles sont enseignées aux
élèves du Secondaire pourront leur permettre de s'enraciner dans
la culture camerounaise.
Quant au code moral, les justifications sont variées
mais la majorité 80% estiment qu'enseigner les codes moraux
traditionnels aux élèves c'est préserver d'une part le
patrimoine culturel et d'autre part lutter contre certains comportements
déviants qu'on observe dans la société aujourd'hui. C'est
dans cette optique que Mvesso (2005 :89) déclare :
l'Ecole Camerounaise doit poursuivre la finalité de
l'enracinement culturel des jeunes Camerounais en devenant un foyer de
transmission des valeurs de l'Afrique ancestrale qui font l'admiration des
autres parties de l'humanité (...) Ce patrimoine culturel c'est la
langue, l'art de la danse, et les arts figuratifs.
Comme on le voit, les enquêtés ont la même
préoccupation que les penseurs et les autres chercheurs que nous avons
cités au chapitre précédent. Tous pensent que notre
école doit cesser d'être un champ d'expérimentation des
cultures étrangères ; qu'elle doit se tourner vers les
valeurs du terroir pour y puiser la sève nourricière avant de
s'ouvrir à la modernité car, pour aller au
« rendez-vous du donner et du recevoir » il faut
avoir quelque chose à donner. Abordons à présent le
troisième centre d'intérêt.
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