I- CONCEPT DE L'EVALUATION DES PROJETS DE DEVELOPPEMENT
1 - Définition
Dans la plupart des définitions que l'on pourrait
rencontrer, le concept de l'évaluation est bien souvent réduit
à l'évaluation économique et financière. Mais en
réalité, la définition du concept « évaluation
» est plus large et implique le concours de plusieurs disciplines. PLATON
l'a signalé depuis l'antiquité quand il affirmait que la
détermination de la valeur d'une chose est le problème le plus
difficile de toute la science.
Le CNEP (1992) explique que le terme évaluation, d'une
manière générale, consiste en une opération qui
vise la façon la plus objective possible, la pertinence,
l'efficacité et l'efficience qu'une intervention particulière
(projet ou programme) aura, a, ou a eu en termes de coût, avantage et
réalisation des objectifs.
STUFLEBEAUM et al. (1971) cité par ERAAJ (1992) ajoute
que l'évaluation est un processus qui permet de tracer, de collecter et
d'offrir des informations utiles pour juger des décisions
alternatives.
LA COMMISSION EUROPEENNE (2001) quant à elle pense
qu'on peut définir l'évaluation comme une vérification
périodique de la pertinence, de l'efficience, de l'efficacité, de
l'impact, de la viabilité économique et financière, et de
la viabilité d'un projet dans le contexte des objectifs qui lui ont
été assignés.
Depuis les années 30, la notion d'évaluation
existait déjà mais était réservé à
des domaines comme la santé et l'éducation. C'est après la
deuxième guerre mondiale que le concept fut étendu à
d'autres domaines comme les projets de développement qui font l'objet de
notre étude.
2 - But de l'évaluation des projets de
développement
Le but de l'évaluation est d'examiner les
réalisations d'un projet par rapport aux attentes initiales, et de tirer
parti de l'expérience acquise dans ce projet pour améliorer la
conception des projets et programmes à venir. L'évaluation se
base sur les comptes-rendus réguliers produits pendant la mise en
oeuvre, et peut comporter des enquêtes supplémentaires
réalisées par des auditeurs externes ou par des missions ad hoc.
(COMMISSION EUROPEENNE, 2001)
ZANA (2003) pense que l'évaluation consiste à
déterminer dans quelle mesure et avec quel degré, de
succès ou encore d'échec, les objectifs prévus du projet
ont été atteints. Elle
est entreprise pour comparer les réalisations avec les
prévisions, et tirer des enseignements des expériences
passées.
L'évaluation est effectuée par un comité
d'évaluation selon une approche participative. Selon la typologie de
l'évaluation, ce comité peut être interne, externe ou
mixte.
3 - Typologie de l'évaluation
Le CNEP (1992) dénombre 3 typologies d'évaluation
selon la position de l'auteur de l'évaluation par rapport à
l'organisme d'exécution : évaluation interne, externe et
mixte.
- Evaluation interne ou autoévaluation :
L'évaluation est interne quand elle est
réalisée par l'organisme d'exécution du projet. Dans ce
type d'évaluation, l'organisme ou l'institution qui a
exécuté le projet réalise les évaluations de leurs
propres interventions.
- Evaluation externe ou indépendante :
A l'inverse du précédent, l'évaluation
externe est entreprise par un organisme autre que celui chargé de
l'exécution. Ces genres d'évaluation sont surtout
réalisés par les bailleurs de fonds comme la banque mondiale.
- Evaluation Mixte :
Comme son nom l'indique, l'évaluation mixte combine les
évaluations internes et externes dans sa démarche. Elle est
réalisée par une équipe composée des membres de
l'organisme d'exécution et des membres externes à
l'organisme. Le CNEP (1992) souligne l'intérêt de ce genre
d'évaluation en notant qu'elle apporte un regard externe tout en ayant
une parfaite connaissance de la genèse du projet, des processus de
planification et d'exécution, des problèmes rencontrés et
des solutions apportées.
Bien que dans le cours normal du cycle de projet, la phase
d'évaluation vienne après celle de la mise en oeuvre, il est
courant de procéder également à des évaluations
avant et pendant la mise en oeuvre pour examiner ou rectifier certains points
du projet.
4 - Critères d'évaluation des projets de
développement
Le choix des critères dans tout processus
d'évaluation, a toujours constitué le noeud véritable du
problème. Les analystes et les évaluateurs travaillent avec des
critères qui présentent parfois des différences d'un
organisme à un autre. L'UE (2001) quant à elle a recours à
certains critères suivants :
- Pertinence : l'adéquation des objectifs
du projet avec les problèmes à résoudre et le contexte
dans lequel il s'est déroulé ;
- Efficience : concerne le coût, la
rapidité et l'efficience en matière de gestion quant à la
conversion des intrants et des activités en résultats et à
la qualité des résultats obtenus ;
- Efficacité : une évaluation de
la contribution faite par les résultats en vue de la réalisation
de l'objectif spécifique et la manière dont les hypothèses
ont affecté l'issue du projet ;
- Impact : l'effet du projet sur son
environnement le plus large et la contribution du projet aux objectifs
sectoriels plus larges résumés dans les objectifs globaux du
projet ;
- Viabilité : la probabilité de
maintien du flux des avantages produits par le projet,
notamment la poursuite des activités et de la
réalisation des résultats.
5 - Principales caractéristiques des
différents types d'évaluation
OBJECTIFS PRINCIPAUX
|
Evaluation Ex- anté
ou appréciation
|
Evaluation à
mi- parcours
|
Evaluation finale, ou RAP
(rapport d'achèvement du projet)
|
Evaluation rétrospective
ou évaluation ex post
|
Examen de faisabilité et de rentabilité du
projet.
Aide à la prise de décision
|
Examen de continuité de la pertinence des
objectifs du projet.
Introduction des mesures correctives
|
Compiler des
informations relatives au projet, Comparer les
coûts, les délais et les produits planifiés
et effectivement réalisé
|
Mesures des outputs, effets et impact du projet ;
Mesure de l'écart en termes de temps, coût et
avantage
|
TIMMING
|
Avant l'exécution
|
Pendant l'exécution
|
Tout juste après le projet
|
Le passage d'un temps significatif pour
mesurer l'effet et l'impact.
|
SOURCE D'INFORMATION
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Rapport administratifs
Etudes sectorielles Etudes spécifiques
|
Rapport administratif Etudes rapides Observation des
participants
Enquêtes par
échantiionnage
|
Rapports administratifs ;
Ensemble des rapports techniques, financier ;
Enquête et observation.
|
Rapport administratif ; Rapport de suivi ;
Rapport d'achèvement ;
Rapport socioéconomique.
|
DESTINATAIRE
|
Décideurs et responsables hiérarchiques,
bailleurs de fonds
et autres acteurs
|
Décideurs de projet ;
Décideurs des
politiques économiques et
sociales,
bénéficiaires et
bailleurs de fonds
|
Idem
|
Idem plus les autorités politiques
|
6- Les facteurs liés à la réussite
d'un projet
Ces facteurs sont consignés dans le schéma
ci-dessous :
Bonne et prudente planification
Gestion Efficace du Projet
Les parties impliquées doivent respecter
leur engagement
Equipe compétente et motivée
Représentation équitable des
différentes parties par le biais de la participation
Facteurs liés à la réussite des
projets
Le projet doit aborder les problèmes réels du
groupe
Les bénéficiaires sont clairement
identifiés par genre ou groupe socio-économique.
SCHEMA No 1 : Quelques facteurs clés
liés à la réussite des projets (Source : UE,
2002)
MEMOIRE DE DESS/MASTER II AEP, présenté par KAMDEM
Jacques François, ITGR ; Octobre 2010 Page 25
7- Avantages et limites des projets de
développement
a) - Avantages
Le concept de projet s'est révélé
être un puissant instrument pour rationaliser et améliorer le
processus d'investissement. Son principal avantage réside dans
l'établissement d'un cadre et d'un déroulement logiques, à
l'intérieur desquels on peut recueillir et analyser des données,
établir des priorités d'investissement, envisager plusieurs
options pour le projet et aborder des questions de politique sectorielle.
Il impose une discipline aux planificateurs et aux
responsables nationaux, et permet de s'assurer que les problèmes et
questions importantes sont pris en compte et soigneusement analysés
avant que les décisions ne soient prises et appliquées. Si ce
concept est correctement appliqué, il peut accroître
considérablement l'impact de ressource d'investissements limités
sur le développement d'un pays.
b) - Limites
Le concept de projet a aussi ses limites. Il dépend en
effet de la disponibilité quantitative des données et sa
fiabilité est fonction de celles de ces dernières. Il
dépend également de l'estimation et de la prévision, qui
sont très souvent sujettes à l'erreur humaine. Il faut
procéder à des jugements de valeur, mais cette approche permet au
moins de les rendre explicites. Les risques peuvent être
évalués mais non évités, et les projets sont
conçus et exécutés dans un contexte évolutif de
changements politiques, sociaux et économiques. En dernière
analyse, l'efficacité du concept de projet dépend des
compétences et du bon sens de ceux qui l'appliquent.
II - METHODE DE COLLECTE DE DONNEES : CADRE
LOGIQUE
Selon la définition relative à la typologie
d'évaluation, le type d'évaluation appliqué à notre
étude tient lieu d'externe mais sans toutefois être bailleur de
fonds.
Ainsi, nous nous limité à l'exploitation des
donnés d'une enquête faite par le groupe BCOM/SCET
commandité par la CAMWATER dans le cadre de la réhabilitation et
d'amélioration du réseau de distribution d'eau potable dans les
villes de Yaoundé, Edéa et Ngaoundéré. Les autres
données proviennent des archives de l'association ERA-Cameroun, obtenues
pendant notre période de stage dans cette association et du
ministère en charge de l'eau dans le cadre normal de nos
activités professionnelles d'une part et, des investigations sur la zone
sous projet d'autre part. Ainsi des extraits ont été
opérés et collectés pour illustrer notre travail.
CADRE LOGIQUE DE L'EVALUATION
Objectif Global
|
Objectif spécifiques
|
Activités
|
Méthodologie
|
Résultats attendus
|
Evaluer la rentabilité socio- économique du projet
AQUA
|
Analyser la situation avant projet
(diagnostiquer)
|
- Déterminer les systèmes d'approvisionnement en
eau ;
- Décrire les comportements et les pratiques des
populations susceptibles d'accroître les risques de santé ;
|
Enquêtes et les observations directes avec illustrations
photographiques ;
Exploitation des différents rapports du projet et Archives
(ERA-Cameroun, MINEE, CAMWATER) ;
|
La situation de la zone avant projet est connue
|
Analyser la dimension opérationnelle du projet
|
- Faire l'état de la mise en oeuvre du projet ;
- Examiner les procédures de mises en place ;
Vérifier si les besoins des bénéficiaires
ont été bien identifiés ;
- Vérifier si les décisions sont
matérialisées en action
|
Exploitation des archives de l'association ERA-Cameroun
Observations directes sur le terrain
|
La dimension opérationnelle du projet est connue
|
Caractériser les impacts socio- économiques du
projet
|
- Vérifier si la réalisation des extensions
d'eau potable a contribué à l'amélioration de la
santé des populations des zones concernées.
- Vérifier si l'accès à l'eau potable a
été amélioré dans les quartiers sous projet ;
- Vérifier si le projet a réduit les corvées
d'eau surtout pour les femmes et les enfants
|
Exploitation des fiches d'enquêtes, observations directes
sur le terrain
Analyse documentaire
|
La situation sur l'accès à l'eau potable et
l'assainissement est connue
|
Analyser la pérennisation du projet
|
- Identifier les perspectives d'amélioration -
Identifier les mécanismes d'appropriation - Déterminer le
processus de pérennisation
|
Exploitation des fiches d'enquêtes, observations directes
sur le terrain
|
Les perspectives d'amélioration du projet sont connues
ainsi que le processus de pérennisation du projet
|
Source : cette étude
CHAPITRE IV : SITUATION AVANT PROJET DANS LES ZONES
D'INTERVENTION
Pour mieux apprécier les résultats d'une
évaluation, il est nécessaire de préciser le
référentiel de départ, c'est-à-dire la situation
avant projet dans la zone d'étude. Dans le cas présent, il s'agit
des quartiers de la Commune d'Arrondissement de Yaoundé 6.
Quartiers Centraux concernés
:
· 12 quartiers du Bassin versant de la MINGOA :
Elig-Effa 1 à 7, Melen 1, 3, 4, 5, Messa Mezala et le quartier Melen 8B.
Ces quartiers sont à habitat spontané et on dénombre
environ 7000 ménages.
· Les treize quartiers sont constitués
majoritairement des locataires 4 ménages sur 5 environ. Un ménage
sur trois connecté au réseau d'eau potable et la majorité
s'approvisionne chez le voisin. Les principales causes du non raccordement sont
: le statut d'occupation et le coût des branchements. En plus un
ménage sur cinq dispose d'un puits et pratiquement tous les
ménages utilisent des latrines traditionnelles.
Quartiers périphériques
concernés:
· Nkom-Nkana Plateau : Avec 920
ménages environ en 2007, le quartier est situé derrière la
localité de Mendong dans l'arrondissement de Yaoundé VI. Huit
blocs constituent le quartier pour une population d'environ 4000 âmes.
Un ménage sur trois est locataire. On enregistre un
faible taux de connexion au réseau d'eau potable soit un ménage
sur cinq, tout comme l'accès à l'assainissement viable.
· Eba'a ou Mvog-Betsi : Avec 2000
ménages environ en 2007, le quartier est situé dans la
périphérie de la ville de Yaoundé VI. Il est
constitué de 8 blocs pour une population de 5600 âmes.
Un ménage sur deux est propriétaire. Le taux de
connexion au réseau d'eau potable est nul et les populations n'auront
pour seule sources d'approvisionnement que les puits et sources situés
dans la localité. L'assainissement dans le quartier est autonome avec
l'abondance des latrines à fonds perdus qui côtoient les puits.
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