3.2 S'autoriser un point de vue
Pour lui, le décès de Jean-Claude n'a pas
changé grand-chose dans sa relation à Sarah. Il n'y aurait
vraiment eu que le début de la séparation qui était
compliqué. Sarah avait sept ans, il pense qu'elle le voyait comme un
étranger qui venait bousculer l'équilibre familial. Elle pleurait
beaucoup. Puis, il y a eu beaucoup d'évènements douloureux pour
elle. Peu de temps après la séparation de ses parents, l'une de
ses demi-soeurs (née du premier mariage de son père) est
décédée à 25 ans d'une crise cardiaque. Elle a
perdu ensuite deux grands-mères.
François trouve que Sarah est très
résistante. Au début, lui et Michelle avait pensé que ce
serait bien qu'elle soit vue par un pédopsychiatre pour voir s'il n'y
avait rien de particulier. Pour être sûre qu'elle puisse parler
à un tiers de ce qui est difficile. L'initiative est venue de sa
mère mais François était d'accord, il trouvait que
c'était judicieux. Il trouvait qu'elle n'exprimait pas grand-chose,
qu'elle était réticente à se montrer. Lui et Michelle
avait peur qu'elle garde son ressenti pour elle. Puis, au bout de deux
séances, elle n'y est plus retournée. Selon François, elle
n'était pas contre mais elle allait bien, elle n'était pas en
colère et il était inutile de psychiatriser. La mère prend
les initiatives mais François parvient à se sentir
légitime pour donner son point de vue, son approbation, ce qui
correspond à un investissement éducatif, même s'il se fait
toujours en retrait par rapport à la mère.
François explique que la relation avec Jean-Claude
était compliquée du fait de sa relation avec Michelle.
Jean-Claude refusait de le voir et de lui parler. François pense que
ça aurait été dans l'intérêt de Sarah qu'il y
ait un dialogue, une relation non pas amicale mais respectueuse. Pour la
résidence alternée, Jean-Claude ne serait jamais venu chercher sa
fille, et ne l'aurait jamais ramenée. François serait
resté dans la voiture. Il aurait essayé de ne pas trop le montrer
à Sarah mais il pense qu'elle a entendu des choses, que Jean-Claude
parlait de lui en mal.
148 RAUCH André (2007), Pères d'hier,
pères d'aujourd'hui : du paterfamilias au père ADN, Paris,
Nathan, p.100-101.
François exprime - du moins en entretien - son opinion
dans des choix concernant Sarah : la laisser seule ou pas, voir un
pédopsychiatre, l'intérêt de Sarah dans la relation qu'il
entretient avec son père tout en restant prudent parce qu'il s'agit du
père (il essayait de ne pas trop le montrer à Sarah). Il ressent
donc, par la cohabitation, par la vie quotidienne, une légitimité
à penser l'intérêt de Sarah. Mais tout se joue dans la
prudence. Par ailleurs, François ne m'a parlé de sa relation
difficile avec Jean-Claude qu'au moment où je lui ai demandé de
me le présenter.
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