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Les conditions d'accès à  l'emploi des jeunes diplômés bac plus deux et plus des zones urbaines sensibles de l'agglomération nantaise

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par Jean-Baptiste DROUET
UFR de Sociologie de Nantes - DESS 2005
  

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3.2. L'enquête qualitative au près des jeunes diplômés

Notre hypothèse englobante est qu'il existe un lien entre la dynamique culturelle de la famille et du quartier et la représentation des jeunes, ainsi, les sociologues de l'école de Chicago disaient ceci : « les bandes ou plus simplement les groupes de jeunes ne sont qu'un phénomène consacré et ordinaire au regard des cultures populaires et/ou au regard des cultures de minorités ethniques. D'une façon générale, leur intégration s'effectue graduellement par l'éducation des parents et l'éducation scolaire 18». Cette dynamique culturelle se traduit d'une part, par une rupture avec le réseau relationnel à l'extérieur du territoire, en reprenant les termes de la sociologie des réseaux (Granovetter)». Les liens forts » (familiaux) et « les liens faibles » (scolaires, amicaux, professionnels) se combinent pour apporter aux jeunes une plus ou moins bonne connaissance du marché du travail ». Et d'autre part s'exprime en terme de dépendance comme le logement (le fait d'habiter chez ses parents), professionnelle (le chômage, l'emploi précaire...), matrimonial (célibataire sans enfant).

Ce qui détermine le choix du travail sur les jeunes est que le facteur territorial ne peut évidemment pas être isolé des autres caractéristiques de la population concernée qu'il s'agisse du statut socioprofessionnel des parents, de la nationalité. Comme le montre l'enquête « génération 98 » du CEREQ, « le fait d'entrer sur le marché du travail avec un diplôme de l'enseignement supérieur reste fortement corrélé à l'origine sociale. Ainsi, 66 % des jeunes diplômés d'une école de commerce sont issus d'une famille dont au moins un des parents est cadre contre 6 % pour les jeunes sortant du milieu scolaire sans aucune qualification ». D'un autre coté, l'attitude des intermédiaires (mission locale, ANPE, associations...) fortement mobilisés par les jeunes qui disposent moins de capital social, est influencée par l'anticipation vis-à-vis des critères de recrutement. À ceci s'ajoute l'attitude des jeunes qui est marqué par l'intériorisation du fait discriminatoire et la dévalorisation de son capital social.

Autres indicateurs : l'habitat est corrélateur de l'accès à des sources culturelles ou linguistiques, sociales, économiques, juridiques...

Les ZUS signifient une « concentration et une ségrégation » de l'habitat des populations, et de ce fait, une précarité des ressources et de l'environnement de ces populations.

18 Extrait de « la crise des banlieues » de J.M STEBE, PUF 1999

Il existe un paradoxe entre la difficulté de créer des relations en dehors du quartier, l'environnement des amis, les réseaux sont plutôt restreints... et l'existence du lien social à l'intérieur du quartier, les liens de proximité et de solidarité, les liens communautaires. Est-ce seulement un paradoxe ou est-ce que l'existence de ces liens à l'intérieur du quartier limite la création de liens à l'extérieur ? Les jeunes diplômés qui habitent en ZUS ont peut-être moins de contacts pour trouver du travail correspondant à leur diplôme. Leur réseau lié au marché du travail est peut-être plus restreint.

Il s'agit de mettre en évidence le mécanisme existant entre ces logiques, la perception des jeunes diplômés et leur condition d'accès au marché du travail. Pour cela, il faut dégager des constantes, faire apparaître les différences et réussir à construire des familles de cas de façon thématique.

J'ai fait le choix de partir de ce qui se dégageait de façon globale, pour ensuite mettre en évidence les spécificités quant aux situations diverses et variées.

Les similitudes dans les discours tenus par les jeunes diplômés, qu'ils soient issus de l'immigration ou non, résidants en ZUS ou non, se retrouvent surtout dans leur perception du marché du travail. Le rapport à établir est celui d'un jeune diplômé et de son accès à un emploi. La majorité partage le même discours quand à la situation du marché du travail, les difficultés liées à la conjoncture, le manque d'expérience, et également leur regard sur les dispositifs publics. Je ne pense pas qu'on puisse opérer une problématique ZUS et Hors ZUS à partir de ces éléments. Cependant il est important de souligner que les formes de discours sont similaires quand à la vision du marché du travail.

Par ailleurs, il me semble judicieux de partir de ces thèmes (conjoncture, marché, difficulté à l'embauche), pour comprendre ce qui se cache derrière. Si à partir de ces thèmes, les perceptions sont similaires, il en va autrement dans la façon d'aborder les difficultés, de mettre en place les stratégies pour trouver un emploi. La question du marché du travail est ramifiée à une multitude de questions, qui font apparaître les distinctions dans le rapport à l'emploi entre le fait d'être en quartier ou non, d'être issu de l'immigration ou non, d'être une fille ou un garçon...Le principe de l'entretien est d'ailleurs posé comme tel, partir de la situation du diplômé et de sa recherche d'emploi pour aborder des questions plus personnelles, des trajectoires de vie, des évènements marquants, et faire apparaître des profils parfois fragiles, mais aussi pour comprendre ce qui fait levier et ce qui fait frein.

3.2.1. Capital social, logiques de distinction et d'identités, logiques de la discrimination et de l'employabilité :

Les hypothèses sur la question des jeunes diplômés et de leurs conditions d'accéder au marché de l'emploi doivent également reposer sur une analyse et un travail qui s'attachent à comprendre les ressentis, les comportements, les logiques de réception, les attitudes face à leur situation et à l'accès au marché du travail.

Pour cela, nous nous sommes appuyés sur un certain nombre de questions élaborées à partir des hypothèses soulevées. Pour que le travail d'entretiens soit le plus significatif possible, afin de rendre compte de la diversité des situations, et comprendre les processus entre les jeunes et leur rapport à l'emploi, les hypothèses sont élaborées à partir de trois pôles centraux et des jeux d'interaction entre ces pôles.

Il faut s'intéresser à la sphère du capital social, c'est-à-dire la mobilisation des ressources qui peuvent faciliter l'accès au marché du travail ; la sphère des logiques de distinction et d'identités ; et enfin la sphère même des logiques de la discrimination et de l'employabilité.

Il s'agit de comprendre le mécanisme entre ces 3 pôles, les mécanismes d'interaction entre les sphères. Par exemple, les situations d'attente, les stratégies, les résistances.

Une seule et même hypothèse n'est pas attachée à un seul et même pôle, elle se construit à partir de l'interaction entre les trois pôles.

En ce qui concerne les questions de la grille d'entretiens, on va s'intéresser à développer chaque thème (amis, famille, quartier, entreprise, services publics...) du point de vue de chaque pôle.

Les hypothèses les plus concrètes et les questions les plus factuelles sont attachées au pôle du capital social et au pôle de la logique de la discrimination et de l'employabilité. Le troisième pôle, celui de la question de l'identité joue un mécanisme ou processus d'interaction entre les deux premiers pôles. Il est en quelque sorte la clef de voûte pour comprendre la relation entre le capital social et l'accès à l'emploi, c'est par lui que s'élaborent les types de discours, les sentiments, les façons d'être, ...une production d'éléments qui peuvent nous aider à comprendre une situation donnée dans les difficultés à accéder à l'emploi.

Du fait du jeu des interactions entre les sphères, certains éléments peuvent constituer un frein ou un moteur selon la manière dont ils sont vécus, perçus et parfois utiliser en terme de capital, de revendication, ou de stratégie.

Bien sûr, il faut faire attention aux prises de décisions et aux choix qui peuvent être faits de façon consciente ou non consciente. Les hypothèses soulevées comme la proposition des « pôles » ne fonctionnent pas indépendamment les unes des autres. Une hypothèse peut se vérifier dans un cas et s'infirmer dans l'autre, les processus ne peuvent se comprendre qu'à travers l'analyse des différents éléments, liés entre eux. Un changement de situation par rapport à la famille pourra entraîner un changement dans le rapport aux amis, au quartier et peut être dans la façon de concevoir le monde du travail.

C'est l'ensemble des réponses données par le jeune qui nous permettront de dégager une cohérence au travers de la trajectoire, du discours, du comportement, et donc d'expliquer telle ou telle situation quant à l'accès à l'emploi.

Il existe une corrélation et un rapport de cause à effet entre le fait de quitter la cellule familiale, avoir moins de relations avec les amis du quartier, et davantage avec l'extérieur, d'une mobilisation plus importante des outils et des services d'informations quant à l'accès au travail, d'un dynamisme et d'une motivation plus soutenus, de discours et de perceptions abordés avec plus de quiétude quant au marché du travail...

L'application d'un de ces éléments n'entraîne pas l'application des autres de manière systématique ; le jeune diplômé peut avoir son propre logement, ses amis dans le quartier et vivre de petits boulots...mais la jonction entre ces éléments, la prise de décisions dans ce sens, font preuve d'une certaine cohérence et font naître une situation qui semble plus appropriée et plus profitable à la recherche d'un emploi.

Reste à savoir si un de ces éléments a plus d'impact sur les autres, et s'il peut exister « un effet boule de neige », lequel de ces éléments serait alors « prioritaire » ?

Pôle logique de discrimination : la question de l'employabilité.

-Les patrons, les entreprises

-Les calculs faits par un patron, les injonctions -La discrimination raciale

-La valeur du diplôme et de la formation sur le marché du travail

Pôle logique identitaire, (les effets de distinction).

-Discours tenus sur le quartier.

-Discours tenus sur l'avenir, la société, le monde de l'entreprise, la discrimination, l'intégration.

-Le rapport aux amis et les discours tenus par les amis. -Le rapport à la famille, à la tradition, à la religion.

-La question des ressentis, des sentiments quant à la recherche d'un emploi, lors d'un entretien d'embauche.

Interaction

Pôle logique du capital social : les ressources et les mobilisations.

-La famille

-Le quartier

-Les amis

-Les ressources financières

-Les conditions matérielles de vie -Les trajectoires

-Les contrats de travail

Interaction

Il s'agit de comprendre le mécanisme entre ces 3 pôles, les mécanismes d'interaction entre les sphères. Par exemple, les situations d'attente, les stratégies, les résistances.

Aucune

participation à la vie du quartier

Relations hors quartier

Eloigné de la

famille

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"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon