2. Les visites de personnalités politiques
seychelloises
Maxime FERRARI, présenté comme le «
numéro deux » du nouveau régime, est le premier membre du
gouvernement de RENÉ à se rendre en France. Nous constatons que
jusqu'en 1981, il est le seul ministre seychellois en visite à France
à être évoqué par la presse. Cela indique
l'appréciation que porte la France pour ce personnage, comme semble
l'indiquer un dossier paru dans la LOI le 5 décembre 1981.
Sa première visite effectuée en France fut
évoqué par Le Monde dans l'édition du 4 septembre
1977, c'est-à-dire trois mois presque jour pour jour après
l'arrivée au pouvoir de RENÉ177. Il était
ministre de l'Agriculture et des pêches, Maxime FERRARI. D'après
Philippe DECRAENE, il a été présent en France pendant au
moins une semaine. Pendant sa visite, il aurait tenté de justifier le
coup d'État du 5 juin. Nous constatons qu'il a présenté
les principales lignes du gouvernement seychellois dans la politique
intérieure et extérieure. Maxime FERRARI a effectué une
nouvelle visite à Paris en juillet 1978, cette fois en tant que ministre
du Développement et du logement. Il serait arrivé à Paris
le 19 juillet. Le 20, il a déjeuné avec le ministre de la
Coopération, Robert GALLEY, et devait se rendre à Strasbourg pour
visiter le Conseil de l'Europe et prononcer une conférence à la
chambre de commerce avant de partir pour Bruxelles. D'après Philippe
DECRAENE, il est venu en France pour dénoncer « les menaces
extérieures qui [...] pèsent sur son pays » - il
dénonce les partisans de MANCHAM, la « tentative de coup
d'État » d'avril 1978 depuis le Kenya, et Victoria se sent
menacé depuis le coup d'État des mercenaires menés aux
Comores -, et attirer l'attention de Paris pour développer la
coopération bilatérale178. Son passage à
Paris et la crainte d'une intervention de mercenaires payés par les
partisans de MANCHAM sont évoqués par Frédéric
LAURENT dans Libération quelques semaines plus
tard179. Entre le 4 et le 5 décembre 1981, une semaine
après la tentative de coup d'État des mercenaires, la presse
française évoque la présence en France de FERRARI,
envoyé spécial de RENÉ pour dénoncer l'attaque et
chercher l'aide de la France contre le mercenariat mondial. D'après
Pierre HASKI de Libération, il était étroitement
accompagné par quatre gardes du corps à cause de cet
événement : on craindrait donc pour sa sécurité. Il
était prévu qu'il rencontre le ministre de la
Coopération, Jean-Pierre COT, le conseiller du
président aux Affaires africaines, Guy PENNE, et le ministre de la
Défense, Gaston DEFFERRE180. Le Monde
évoque seulement son séjour en France depuis le 2
décembre et ses soupçons le lendemain envers l'Afrique du
Sud181.
177 DECRAENE Philippe, « Le socialisme dans la joie ?
», Le Monde, 4 septembre 1977.
178 DECRAENE Philippe, « Les dirigeants de Mahé
redoutent un éventuel « scénario à la comorienne
» », Le Monde, 21 juillet 1978.
179 LAURENT Frédéric, « La route du
pétrole passe par les Seychelles », Libération, 13
septembre 1978.
180 HASKI Pierre, « SOS contre les mercenaires »,
Libération, 4 décembre 1981.
Ensuite, quelques visites de diverses personnalités
seychelloises sont évoquées par la LOI. Le 24 avril
1982, dans la rubrique « Agenda », l'hebdomadaire annonce la visite
de deux personnalités seychelloises en France pour des raisons
économiques : E. DESBOUSSES, directeur général de la
SEYCOM, et BRADBORN, directeur général de Wel
Supplies182. Dans la même rubrique, on annonce, le 1er
mai de la même année, la visite de Guy SINON, secrétaire
général du SPPF, et sa rencontre prévue avec Lionel
JOSPIN, secrétaire du Parti socialiste183. Enfin, nous
avons la visite d'une semaine en France d'une délégation
menée par Jacques HODOUL, ministre du Développement national,
vers la fin février 1985. Elle se serait entretenue avec des
responsables publics et privées du secteur de pêche industrielle,
et visitée les installations de l'Armement Coopératif
Finistérien, en Bretagne, où des thoniers seychellois sont
construits184.
Les 15 octobre 1988 et 23 décembre 1989, la LOI
évoque les visites en France de Danielle de SAINT-JORRE, alors
secrétaire d'État au Plan et aux Relations extérieures.
Comme nous l'avons vu tout à l'heure, SAINT-JORRE a marqué la
diplomatie seychelloise. Le 15 octobre, la LOI annonce son voyage en
Hongrie et en France. Comme elle a visitée la Hongrie « la semaine
dernière », nous pouvons supposer qu'elle est passée en
France entre le 7 et le 15 octobre. Elle se serait entretenue avec le
ministère de la Pêche pour évoquer l'exportation de thon en
boîte en France et à la Réunion18s. Cette
visite n'a été développée qu'en trois lignes
seulement ! Dans la LOI du 23 décembre 1989, une autre visite
en France de SAINT-JORRE est évoquée en cinq lignes.
D'après l'hebdomadaire, elle se serait entretenu avec le ministre de la
Coopération, Jacques PELLETIER, sur la réunion de la prochaine
commission mixte franco-seychelloise prévue du 6 au 8 mars 1990 à
Paris, la construction d'un complexe sportif pour les Jeux de l'océan
Indien de 1993 prévus aux Seychelles et les projets qui y
impliquent186.
Entre 1990 et 1991, à la place des ministres
seychellois, nous avons des opposants qui apparaissent dans la LOI.
Comme nous le verrons dans une étude postérieure, les opposants,
en particulier l'ancien président en exil, James MANCHAM, et Maxime
FERRARI, lui aussi exilé ont visité la France pour la
sensibilisé sur le combat démocratique aux Seychelles (cf.
chapitre VIII « La diplomatie française des droits de l'Homme
et de la démocratie aux Seychelles », p.). Ainsi, la LOI
du 5 mai 1990 annonce la venue en France de MANCHAM où
il est reçu par Jacques CHIRAC187, une
autre le 4 novembre 1991188, avec FERRARI à Paris vers
juillet 1991189 et encore. Il faut attendre le 28 septembre
2002 pour qu'on évoque une nouvelle fois le déplacement de
l'opposition seychelloise à Paris, justifiant le titre d'un article de
la LOI190.
181 ANONYME, « Le gouvernement demande une enquête de
l'ONU sur l'attaque des mercenaires », Le Monde, 5
décembre 1981.
182 « Visite en France de deux personnalités des
Seychelles », La Lettre de l'Océan Indien, 24 avril
1982.
183 « Seychelles », La Lettre de l'Océan
Indien, 1er mai 1982.
184 « Hodoul en France », La Lettre de
l'Océan Indien, 2 mars 1985.
185 « Visite en Hongrie et en France », La Lettre
de l'Océan Indien, 15 octobre 1988.
186 « Protection de l'environnement », La Lettre de
l'Océan Indien, 23 décembre 1989.
187 « La difficile croisade de James MANCHAM », La
Lettre de l'Océan Indien, 5 mai 1990.
188 CAMBON Paul, « Lénine au paradis »,
Quotidien de Paris, 22 octobre 1991.
189 « Contre-offensive diplomatique du président
René », La Lettre de l'Océan Indien, 20 juillet
1991.
190 « L'opposition en visite à Paris », La
Lettre de l'Océan Indien, 28 septembre 2002.
Le 21 octobre 1995, on apprend par la LOI que
Danielle de SAINT-JORRE, alors devenue ministre des Affaires
étrangères, du Plan et de l'Environnement, est venue à
Paris au début du mois191. Comme le titre de l'article
l'indique, la ministre a discuté avec divers ministres français
sur les différents axes de coopération bilatérale. Ce
serait la dernière fois qu'on évoque la visite en France de cette
femme avant sa mort en 1997.
Enfin, les derniers éléments de notre corpus sur
la visite de personnalités politiques seychelloises se portent sur
celles effectuées par le ministre des Affaires étrangères
mais également président en exercice de la COI,
Jérémie BONNELAME, entre le 2 et le 4 octobre 2002. Il aurait
été reçu par le ministre délégué de
la Coopération et de la Francophonie, André WILTZER. Tous deux
auraient discuté de la politique intérieure des Seychelles, en
particulier sur les élections législatives et les discussions
entre les Seychelles et le FMI, des principales questions de la
coopération entre la France et les Seychelles, et sur la prochaine
réunion de la COI. Ces discussions sont considérées comme
« chaleureuses »192.
En l'absence d'un libre accès aux documents sur les
Seychelles aux archives des Affaires
étrangères193, il nous est impossible de savoir
le nombre exact effectué entre les deux pays sous RENÉ, leurs
raisons et leurs déroulements. Toutefois, la presse française
nous en donne une assez bonne idée. Plusieurs déplacements ont
été cités puis présentés par les
journalistes, les journaux ou les magazines et leurs déroulements sont
plus ou moins décrits. Néanmoins, cela n'aurait pas
été possible sans la LOI : les autres journaux ou
magazines ne nous auraient présenté moins de
déplacements diplomatiques. Nous remarquons que les
articles sur les visites seychelloises en France sont plus nombreux que ceux
sur les déplacements français aux Seychelles. Le cas est
similaire pour le nombre de visites dans les deux camps que nous pouvons
recenser dans notre corpus n°2. Cela indique qu'il y aurait eu davantage
de visites seychelloises que françaises. La fréquence des visites
rapportées par la presse française semble nous indiquer que les
Seychelles paraissent accorder plus d'importance à l'entretien de ses
relations avec la France que celle-ci.
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