CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
Les objectifs ambitieux et complexes de la conservation des
forêts d'Afrique centrale font face à de nombreuses
difficultés qui entravent parfois gravement la prise de
décisions. Le manque de moyens techniques et financiers, la faiblesse
des capacités humaines et l'insuffisance des connaissances scientifiques
constituent les principaux goulots d'étranglement. Sur le plan
biologique, beaucoup d'espèces restent à décrire et
à nommer, la distribution des espèces reste incertaine, de vastes
régions sont peu ou pas explorées, les comportements de
nombreuses espèces demeurent inconnues tout comme une bonne partie des
relations et interactions entre espèces.
Ce travail portant sur l'analyse de la
diversité des ligneux arborescents des principaux types forestiers du
Nord-est de la Réserve de Biosphère de Luki a permis de
déterminer les groupements forestiers et la composition floristique de
ces forêts en fonction de la topographie et des facteurs
édaphiques et écologiques. Le souci majeur était de
développer d'urgence les moyens scientifiques propres à assurer
le savoir fondamental nécessaire à la conception des mesures
appropriées et à leur mise en oeuvre pour prévenir et
anticiper au plus haut point la perte sensible de cette biodiversité de
la Réserve de Biosphère de Luki. La gestion durable des
ressources naturelles nécessite une bonne connaissance des
biocénoses.
L'objectif principal de cette étude est d'identifier
les types de forêts sur base de différents complexes
(éluvial, colluvial et illuvial), de caractériser chaque type par
la composition floristique essentielle, de déterminer les
caractéristiques quantitatives des principales espèces et de
rechercher les explications de nature écologique qui président
à cette différenciation.
Après les inventaires réalisés, sur une
superficie de 9 ha de 100 m x 100 m à chacun, subdivisés en
quatre placettes de 50 m x 50 m pour les arbres à dhp = 10 cm, nous
avons inventoriés 4804 individus appartenant à 142
espèces, 110 genres et 35 familles. Deux principales
méthodes ont été utilisées afin d'arriver à
bien identifier cette phytodiversité :
1. La méthode des mesures de diamètre
(D130 =10 cm) dont les analyses floristiques ont permis de
définir les espèces et les familles caractéristiques de
chaque groupe, leur densité et dominance ainsi que la diversité
spécifique. Ces analyses floristiques ont permis de déceler les
espèces différentielles et communes pour tous les trois complexes
et de mettre en évidence la prédominance des familles des
Fabaceae/Caesalpinioideae et Malvaceae/Sterculioideae dans
la crête, des Fabaceae/Caesalpinioideae et
Malvaceae/Sterculioideae au niveau de la pente et des
Irvingiaceae et Fabaceae/Caesalpinioideae dans la
dépression et la prédominance des espèces Cola
griseiflora et Cynometra lujae dans la
crête, Cola griseiflora et Hymenostegia laxiflora dans
la pente, Desbordesia glaucescens et Gilbertiodendron
mayumbensis dans la dépression.
Du point de vue abondance, on constate que les familles des
Malvaceae/Sterculioideae et Fabaceae/Caesalpinioideae
dominent dans les deux complexes (crête et pente) et Olacaceae
et Malvaceae/Sterculioideae dominent dans la dépression ;
alors que les espèces Cola griseiflora
et Manilkara sp. dominent au niveau de la
crête, Cola griseiflora et Diospyros
iturensis dans la pente, Strombosa pustulata var pustulata et
cola griseiflora dans la dépression.
La densité par rapport aux complexes n'a pas
montré une différence significative (complexe éluvial,
complexe colluvial et le complexe illuvial). Statistiquement, cela revient
à dire que les différents complexes n'influencent pas la
densité des individus, mais la densité moyenne parait
supérieure sur le complexe colluvial (pente) avec 579 individus, suivie
du complexe éluvial (crête) avec 544 individus et enfin de
complexe illuvial (dépression) avec 479 individus.
Ce même constat est observé au niveau de la
richesse spécifique. Statistiquement, dans les trois complexes
étudiés, on n'a pas trouvé de différence
significative en termes de nombre des espèces par complexes. Nous
pourrons dire que les complexes n'influencent pas sur la richesse
spécifique, mais la richesse spécifique parait supérieure
sur le complexe illuvial avec 77 espèces que sur les complexes
éluvial avec 71 espèces et sur le complexe colluvial avec 65
espèces.
2. Les analyses d'ordinations et de classifications ont permis
de mettre en évidence les principaux groupements floristiques et de
montrer la similarité entre les divers relevés, les
espèces étudiées et les variables de l'environnement.
Ces analyses ont révélé que les
regroupements observés ont été dictés par le
pourcentage en argile, le taux de limon, le taux de sable, le ph, la teneur en
eau et l'altitude.
Ces résultats démontrent que les conditions
édaphiques et topographiques contribuent à déterminer la
composition floristique des types forestiers donnés. Statistiquement,
les variables environnementaux étudiés (l'argile, le sable, le ph
et la teneur en eau) ont influencé la composition floristique.
La proportion élevée des phanérophytes
met en évidence la présence des arbres et la nature
forestière de site de notre étude. L'analyse de l'ensemble de la
florule a révélé la prédominance des espèces
du centre régional d'endémisme guinéo-congolais confirmant
ainsi l'insertion de la Réserve de Luki à l'entité
floristique bas-guinéen tel que proposé par White (1979).
La distribution des ligneux par classes de diamètres
présente un grand nombre d'espèces ligneuses de petits
diamètres qui constituent les espèces d'avenirs pour assurer la
reconstitution des forêts et les espèces ligneuses.
La Sarcochorie est le type de dissémination des graines
qui caractérise nombreuses espèces recensées.
L'élément phytosociologique Strombosio-Parinarietea
renferme un nombre assez élevé des espèces
végétales.
La DCA (Detrended Correspondance Analysis) appliquée
sur les différentes toposéquences a permis de rassembler la
forêt du Nord-est de la Réserve de Biosphère de Luki
à six groupements végétaux.
Nous recommandons vivement de conserver
l'intégrité de cette Réserve et d'entreprendre sa gestion
durable et son aménagement.
Que les travaux botaniques du sous-bois ou encore
pédologiques soient aussi réalisés.
Etant donné que l'écotourisme est une des
activités alternatives pour l'autofinancement de cette Réserve
qui contient des espèces animales phares. Une autre piste pouvant
garantir la conservation de cette Réserve est la valorisation et
l'intégration du savoir endogène des communautés
locales.
La promotion des travaux d'aménagement durable des
forêts dans les forêts secondaires jeunes à Musanga
cecropioides en vue de permettre la régénération
des essences qui vont favoriser la reconstitution de ces forêts.
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