2.2. Les différentes technologies de
conservation des eaux et des sols
La dégradation des ressources environnementales est
une des préoccupations majeures dans le monde entier et dans le monde en
développement en particulier. En effet, dans ce dernier l'agriculture
est la principale source d'alimentation des populations. Cette agriculture est
aujourd'hui confrontée à de sérieux problèmes dont
la dégradation des ressources environnementales et celle des sols en
particulier. Le problème est que cette dégradation touche les
ressources naturelles renouvelables à un point critique tel qu'il
convient de connaître les causes réelles de celle-ci afin de lui
affronter une lutte curative. Les causes de cette dégradation sont
multiples, variées et liées à l'activité de
l'homme. Dans ce sens, Malthus avait trouvé que la croissance
exponentielle de la population était à la base de cette
dégradation environnementale. En effet, pour lui, plus la population
s'accroît, plus les espaces et ressources disponibles par tête
diminuent engendrant ainsi une pression démographique sur les sols, en
particulier, qui supportent l'activité de production. Southgate et al
(1990) trouvent qu'en plus de cette pression démographique, les
politiques gouvernementales et les attributions des droits de
propriété jouent sur la dégradation de ces ressources
environnementales. L'érosion des sols est aussi citée comme une
des causes principales au phénomène de dégradation. Pour
le cas du Burkina Faso, Mazzucato et al (2000) attestent la dégradation
des sols aux taux élevés de croissance démographique
conjugués à une pauvreté très répandue ainsi
qu'à un manque d'intensification agricole. Bandré et Batta
(1998)
distinguent cinq causes majeures de la dégradation des
terres au Burkina Faso : les pratiques traditionnelles1, la
sécheresse, l'utilisation des tracteurs et autres machines pour la
préparation du sol, l'exploitation intensive des pâturages, le
changement du répertoire des semences2.
Face à ce phénomène, les techniques ou
stratégies développées par les agriculteurs et la
recherche sont variées. Ces techniques visent toutes le contrôle
de l'érosion, le maintien de la matière organique et des
propriétés physiques du sol (Bandré et al 1998).
L'importance accordée à la conservation des sols ou à la
récupération de l'eau peut varier selon la moyenne
pluviométrique, le type de sol et la situation du terrain dans le
relief. Ainsi, dans les zones humides où le lessivage des
éléments nutritifs du sol et l'érosion en nappe sont des
problèmes pour la production agricole, les mesures de conservation des
sols sont d'une importance capitale. Par contre, dans les zones sèches
où l'eau est la contrainte de la production agricole, les techniques de
collecte d'eau sont à valoir (Bandré et al, 1998).
Selon donc les zones agro-climatiques dans le pays on
dénombre une panoplie de techniques traditionnelles de conservation des
eaux et des sols à effet plus ou moins efficace dans la
préservation et la restauration des ressources naturelles. Ces
techniques comprennent le zaï, le paillage, le cordon pierreux, la fumure
organique, les demi-lunes, la régénération naturelle
assistée, les haies vives, le compostage en tas et les
aménagements sur les bassins versants.
1.2.1. Le Zaï
Une des techniques traditionnelle de CES pratiquée
dans le Plateau Central du Burkina est le « Zaï ». Dans cette
zone, la pluviométrie moyenne est de 562 mm (Bandré et al, 1998)
et les sols y sont fortement encroûtés. Par définition, les
« Zaï » sont des trous ou des cuvettes à diamètre
compris entre 20 et 30 cm avec une profondeur de 10 à 15 cm
(Bandré et al, 1998). Les dimensions des Zaï varient en fonction
des types de sols sur lesquels ils sont creusés. Ainsi, sur les sols
latéritiques à capacité de rétention d'eau
limitée, ils sont le plus souvent grands. Par contre, sur les sols
argileux moins perméables à l'eau, les « Zaï »
sont plus réduits. La terre excavée est déposée en
croissant vers l'aval du creux afin de capter les eaux de ruissellement. Le
nombre de cuvettes par hectare est fonction de leur espacement et fluctue entre
12.000 et 15.000. Les lignes de Zaï doivent être
décalées et perpendiculaires à la plus grande pente du
terrain
1 Il s'agit des feux de brousse, des cultures sur
brûlis, la coupe du bois
2 C'est l'utilisation abusive des produits chimiques
due aux variétés modernes
Cette technique est surtout utilisée dans l'optique de
réhabiliter les sols latéritiques et sabloargileux devenus
dénudés. La période appropriée pour mettre en place
le zaï est la saison sèche (Novembre à Mai) en raison de la
disponibilité de la main d'oeuvre nécessaire.
Le temps nécessaire à la mise en «
zaï » d'un champ de l'ordre d'un hectare est d'environ 60 jours de
travail. Les « zaï » captent la litière et les sables
fins transportés par le vent. A cela, les paysans ajoutent une certaine
quantité de fumier dans les cuvettes afin d'attirer les termites. Les
termites quant à eux creusent des galeries et facilitent ainsi
l'infiltration profonde des eaux de pluie et de ruissellement. En plus de leur
contribution à l'amélioration de la porosité des sols et
à la capacité de rétention de l'eau, les termites
transportent également les éléments nutritifs des couches
supérieures profondes vers des horizons supérieurs et
inversement. Les zaï sont efficaces parce qu'ils concentrent l'eau et la
fumure en un même point (Ouédraogo et Kaboré, 1996). Les
rendements en céréales (mil et sorgho) à partir des
zaï sont remarquables en année de pluviométrie normale avec
environ 500 à 1000kg/ha (Bandré et al, 1998). Pendant la seconde
année de culture de zaï, les paysans sèment à nouveau
dans les cuvettes existantes ou dans de nouvelles cuvettes si l'espacement
entre les anciennes cuvettes permet d'en creuser de nouvelles. Ainsi,
après environ cinq années de culture, l'ensemble de la surface
aménagée est amélioré par les zaï et l'action
des termites (Roose et al, 1994). Dans le Plateau central, le zaï a un
taux d'adoption compris entre 60 et 80% (Ouédraogo et al, 2006).
|