La consommation d'alcool en milieu scolaire : cas de la ville de Yaoundé( Télécharger le fichier original )par Ulrick Lilyan MVE ONA Institut Sous-régional des Statistiques et d'Economie Appliquée (ISSEA) - Ingénieur 2006 |
CHAPITRE IV : L'APPERCU DE LA CONSOMMATION D'ALCOOL EN MILIEU SCOLAIRE
« La dangerosité d'un composé en terme d'addiction se mesure non seulement aux efforts fournis pour se procurer le produit mais à l'énergie considérable dépensée pour tenter d'échapper à la dépendance. » Bernard ROQUES Dans ce chapitre, nous verrons successivement les habitudes de consommation d'alcool chez les scolaires, l'impact de cette consommation sur la santé et l'éducation, les causes afférentes et les attitudes prises par la société pour lutter contre ce fléau à travers les résultats de l'ECAS. SECTION 1 : LA CONSOMMATION DES BOISSONS ALCOOLISÉESLes consommations d'alcool des scolaires peuvent être appréciées à différents niveaux. 1. La première consommation d'alcool
La majorité des jeunes ont déjà eu à consommer une boisson alcoolisée (bière, vin, spiritueux) comme le montre le tableau suivant : Tableau 11 : Distributions conditionnelles des élèves suivant la première prise d'alcool et le sexe
Source : ECAS, nos calculs Il ressort de ce tableau que 83,2%, soit 846 élèves, ont déjà goûté à l'alcool. De plus, la fréquence des garçons qui ont déjà bu (84,3%) est supérieure à celle des filles (82,4%) ; un test de comparaison des proportions41(*) (p=0,000) montre que cette différence est significative. Cependant, la première consommation est indépendante du sexe de l'individu, cela se vérifie par un test de Khi-deux42(*) (÷2 =0,619 ; p=0,432).
Les élèves débutent généralement dans l'alcool à l'âge de la raison respectivement entre 6 et 12 ans (36,6%) et entre 12 et 16 ans (35,3%) comme le montre le tableau suivant : Tableau 12 : Distributions conditionnelles des élèves suivant l'âge de la première consommation et le sexe
Source : ECAS, nos calculs Autrement dit, la majorité des scolaires goûtent à l'alcool au Primaire43(*) et au Collège44(*). Cependant, ce sont généralement les garçons de 6 à 12 ans qui s'essayent plus rapidement à la consommation des boissons alcoolisées (41,1%) ; alors que les filles boivent un peu plus tard entre 12 et 16 ans (34,9%). Par ailleurs, seuls 4,4% des élèves ont pu patienter jusqu'à la fin de l'adolescence (entre 19 et 26 ans) avant de se lancer dans l'alcoolisme. En outre, les statistiques de Khi-deux (÷2=8,495 ; p=0,037) confirment qu'il existe une relation entre l'âge et la première consommation chez les élèves. Dans le cas particulier des consommations d'alcool à moins de 6 ans, ce sont les filles (naturellement plus vaillantes que les garçons) qui sont dominatrices (7,7%). En effet, nous savons que certains parents (pères) s'amusent souvent à donner une ou deux gorgées de vin ou de bière à leurs petits enfants.
Les causes de la première prise d'alcool sont nombreuses et difficiles à diagnostiquer. En général, c'est le consommateur qui seul peut donner réellement une idée du pourquoi il s'engage dans l'alcool. Néanmoins, les enquêtés s'accordent à reconnaître que les principales raisons qui les ont conduit à boire sont celles présentées dans le graphique 8. Graphique 8 : Répartition des élèves suivant le mobile de première consommation Source : ECAS, nos calculs Les principales causes chez les garçons comme chez les filles, qui expliquent déjà 93,4% de la consommation d'alcool juvénile, sont respectivement : la curiosité (42,5%), l'initiation en famille (35,6%) et l'initiation par les amis/amies (15,3%). En effet, les jeunes veulent souvent découvrir ce qu'autant de buveurs (parents, proches...) trouvent dans l'alcool ; puisque sa consommation se fait au su et au vu de tout le monde (à table, fête, bar...). En plus, les alcooliques (parents, amis, amies...) sont très attirants ou charitables lorsqu'il s'agit d'initier un apprenant à l'alcool. Par ailleurs, d'autres jeunes ont débuté dans la boisson à cause des mobiles tels qu'en se rebellant (2,2%), parce que la drogue «alcool» permet de se sentir « en forme » (1,7%), en voulant afficher leurs goûts (1,6%) ou pour d'autres raisons non élucidées (1,1%). En outre, la raison de la première consommation d'alcool est lié au sexe (÷2=14,285 ; p=0,027). 2. La consommation actuelle d'alcool
« Quand le vin est tiré, il faut le boire» Locution proverbiale Quelques jeunes ayant bu de l'alcool affirment avoir arrêté d'en consommer. Mais la majorité des scolaires en sont devenus dépendants comme l'illustre le graphique suivant : Graphique 9 : Répartition des élèves buveurs et anciens buveurs suivant le sexe Source : ECAS, nos calculs Seulement 16,5% des garçons et 18,5% des filles prétendent avoir réussi à se défaire de la boisson. En effet, bien que ces dernières proportions soient déjà faibles, il faudrait encore les sous-estimer car l'alcool est une drogue à très fort effet de dépendance. Les élèves déclarent parfois l'arrêt d'alcool lorsque la date des examens est proche, ou ont connu un précédent échec scolaire, alors qu'ils boiront lors des fêtes de fin d'année scolaire.
Les élèves buveurs sont prêts à dépenser énormément pour l'achat des boissons alcoolisées. L'envie d'alcool « surplombe » parfois le besoin primaire de se nourrir. Tableau 13 : Distributions conditionnelles des élèves par sexe suivant le niveau de dépenses mensuelles.
Source : ECAS, nos calculs Tandis que 51,1% des élèves, dont 53,8 % des filles et moins de la moitié (47,7%) des garçons, dépensent moins de 500 FCFA par mois dans l'achat des boissons alcoolisées ; d'autres (19,9%) dépensent un peu plus entre 500 FCFA et 10000 FCFA. Notons par ailleurs que les rations alcooliques sont croissantes en fonction du lieu de consommation (boîte de nuit, snack-bar, restaurants...) où certains apprenants peuvent dépenser des sommes d'argent importantes (plus de 50 000 FCFA). En outre, il existe une liaison entre le sexe et la dépense en alcool (÷2=17,97 ; p= 0,006). Par ailleurs, comme nous le verrons, notamment à la SECTION 3 - 1, certains élèves se voient généralement offrir les boissons qu'ils consomment. * 41 Le test de proportion teste l'hypothèse nulle selon laquelle les données sont issues d'une distribution dont chacun des 2 groupes (garçons ou filles) à la même probabilité (1/2). Nous acceptons l'hypothèse nulle si p>0,05 ; c'est-à-dire qu'il n'y a pas une différence significative entre les 2 proportions.
* 42 Le test de Khi-deux teste l'hypothèse nulle selon laquelle les variables sont indépendantes. Le test de Khi-deux de Pearson est la forme habituellement utilisée. Une statistique p>0.05 permet d'accepter l'hypothèse nulle. Cependant, le test de Khi-deux n'indique pas le degré ou la direction de l'association. * 43 De la SIL au CM2 * 44 De la 6ème en 3ème |
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