Le cadre cohérent d'évaluation des risques des
institutions de microfinance présente une analyse objective des
problématiques de développement institutionnel et de
viabilité financière en distinguant quatre types de risques
à savoir : les risques institutionnels, les risques
opérationnels, les risques de gestion financière et les risques
externes.10
a- Risques institutionnels
Le succès d'une institution de microfinance est
défini comme la capacité de cette dernière à
fournir de façon indépendante des services
10 CARE International 2001, Manuel de gestion des risques en
microfinance
financiers à un nombre important de personnes à
faible revenu et de façon durable.
L'évaluation de ce risque par rapport à cette
définition expose l'organisation à trois niveaux de risques :
· . Risques liés à la mission
sociale
La mission sociale est de fournir des services financiers
abordables à un nombre important de personnes à faible revenu
afin de les aider à améliorer leurs conditions de vie. Cette
mission les expose à des risques importants si les groupes cibles ou les
parts respectives de la clientèle ne sont pas bien définies.
· . Risques liés à la mission
commerciale
La mission commerciale des IMF est de fournir des services
financiers de manière à permettre à l'organisation de se
pérenniser et devenir autosuffisante. Les IMF seront exposées au
risque commercial si leurs revenus ne sont pas suffisants pour couvrir leurs
charges (opérationnelles et financières) et si elles ne sont pas
gérées efficacement comme une entreprise commerciale.
· . Risques de dépendance
Les IMF qui sont soutenues par les organisations
internationales sont les plus affectées par ce type de risque surtout en
ce qui concerne les activités de microfinance qui sont
gérées comme projet et qui ne sont pas des institutions
indépendantes. Ces IMF sont vulnérables à la
dépendance des bailleurs de fonds. Bien que ce soutien paraisse
avantageux au début, il pourrait considérablement affaiblir les
efforts vers une institution indépendante à long terme.
b- Risques opérationnels
Le risque opérationnel est la
vulnérabilité à laquelle est confrontée l'IMF dans
sa gestion quotidienne et par rapport à la qualité de son
portefeuille (risque lié au crédit, risque lié à la
fraude). Pour déterminer la vulnérabilité d'une
institution au risque de crédit, on doit revoir les politiques et les
procédures à chaque niveau dans les processus d'octroi de
crédit pour déterminer si les risques de défaillance et de
perte sur créances sont réduits à un niveau suffisamment
raisonnable.
· . Risques de crédit
Le plus grand risque en matière de microfinance est
d'octroyer un crédit et de ne pas se faire rembourser. Ce risque est une
préoccupation pour les IMF dans la mesure où la plupart des
micro-crédits ne sont pas garantis. Or ce portefeuille est de loin
l'actif le plus important pour une IMF et le risque qu'il pose pour
l'institution est assez difficile à mesurer.
· . Risques de fraude
N'importe quelle organisation qui gère une importante
somme d'argent est extrêmement vulnérable à la fraude.
Cette vulnérabilité est souvent prédominante dans les
milieux démunis. La vulnérabilité à la fraude est
particulièrement plus grande dans le contexte où l'argent change
de main ; c'est encore plus critique dans les IMF qui disposent d'un
système d'information, de gestion peu fiable ou peu cohérent ;
des politiques et procédures non clairement définies ; un taux
élevé du renouvellement du
personnel technique ou encore si l'IMF atteint
précocement un fort taux de croissance. La gestion des
dépôts d'épargnes particulièrement des
épargnes libres augmente la vulnérabilité dans la mesure
où toute la défaillance dans la détection de fraude
pourrait conduire à la perte d'actifs liquides circulants et à
une rapide détérioration de la notoriété de
l'institution.
c- Risques de gestion financière
A ce niveau, on distingue trois grandes catégories de
risque.
·
· Risques liés à la
gestion du bilan
La vulnérabilité financière des IMF se
résume aux risques réels subis par ses emplois et ses ressources.
Elle est composée des risques liés au taux
d'intérêt, des risques de liquidité. Le risque lié
au taux d'intérêt s'élève quand les termes et le
taux d'intérêt de l'actif et du passif sont mal
négociés ; par exemple, si le taux d'intérêt sur le
passif à court terme augmente avant que l'IMF ne puisse ajuster son taux
de crédit.
Le différentiel entre le revenu d'intérêt
et les charges financières va diminuer, affectant ainsi la marge
financière de l'IMF. Les IMF implantées dans les environnements
inflationnistes sont particulièrement vulnérables à ce
type de risque. Le risque de liquidité est la possibilité
d'emprunter des ressources financières exigibles à court terme
pour faire face à des besoins de financement immédiats tels que
décaissements de prêts, les paiements de factures ou
remboursements de dettes.
·
· Risques liés à
l'inefficacité
L'efficacité reste l'un des plus importants défis
à relever par les IMF. Elle traduit la capacité de l'organisation
à minimiser les coûts marginaux
d'exploitation, de production, et dépend
subséquemment de la maîtrise des coûts et du seuil de
rentabilité.
·
· Risques liés à
l'intégrité
Un autre aspect de risque de gestion financière, c'est
l'intégrité de son système d'information y compris le
système de gestion comptable et le dispositif de gestion du portefeuille
de crédit.
d- Risques externes
A l'inverse des autres familles de risques sur lesquelles
l'IMF peut exercer une influence directe, les risques externes eux sont
totalement hors de contrôle de l'institution. Car il s'agit avant tout,
d'évènements ou faits externes pouvant l'affecter
négativement.
On distingue plusieurs types de risques externes :
·
· Risques de
réglementation
Il s'agit de l'ensemble des textes réglementaires
régissant l'IMF. Ce
sont :
- la loi PARMEC;
- le décret d'application de la loi PARMEC ;
- la loi portant définition et répression de
l'usure ;
- la convention-cadre ;
- les instructions de la BCEAO ;
- le code de travail ;
- le code des contrats commerciaux ;
- etc.
L'IMF est tenue de se conformer à la
réglementation qu'elle se doit de connaître au
préalable.
· . Risques de concurrence
Le secteur de la microfinance peut très rapidement
devenir concurrentiel. Cela aura pour conséquence la désertion de
certains clients de l'IMF au profit d'autres SFD concurrents. La concurrence
peut également se jouer sur les taux d'intérêt
appliqués aux crédits alloués à la clientèle
ainsi que sur la rémunération des dépôts.
Elle peut se prolonger à l'offre globale de services
financiers de l'IMF. La concurrence est toujours bénéfique au
client mais peut être fatale à toute institution non
préparée à l'affronter.
Aujourd'hui, le secteur de la microfinance au Bénin
compte plus de 1000 «initiatives», dans lesquelles sont comprises les
caisses d'épargne et de crédit, les fédérations de
réseaux coopératifs et mutualistes, les Institutions de
Crédit Direct (ICD), les projets à volet microfinance et les
tontines. En regroupant les caisses affiliées, le secteur compte alors
300 institutions, dont seulement une quarantaine est agréée par
la Cellule de Microfinance du Ministère de l'Economie et des Finances
(aujourd'hui Ministère délégué chargé de la
microfinance et des petites entreprises), avec environ 80% de la
clientèle.
Le marché de la microfinance au Bénin est
dynamique, très concurrentiel et en forte croissance. Il existe au moins
quatre cents (400) points de services financiers animés par une
soixantaine d'IMF. Une demidouzaine d'institutions de microfinance (les plus
importantes) partage plus de 80% du marché et 40% de l'encours de
crédit. Il est à noter que le secteur est largement dominé
par la FECECAM, le plus grand réseau mutualiste du pays.
· . Risques socio-démographiques
Les caractéristiques socio-démographiques peuvent
influencer sur l'activité de l'IMF. On peut citer :
- le niveau d'éducation des clients ;
- l'esprit d'équipe des clients cibles ;
- la cohésion sociale : niveau d'entente entre les
membres de la communauté sociale ;
- l'attitude sociale face à la fraude et à la
corruption ;
- le taux de criminalité ;
- le taux de mortalité ;
- le taux de VIH / SIDA ;
- les expériences de crédit des ONG
déjà présentes sur le territoire ; - etc.
·. Risques macroéconomiques et
socio-politiques
Ce sont les risques de :
- mauvaise conjoncture économique ;
- baisse du pouvoir d'achat ;
- taux de chômage élevé ;
- politique fiscale incommodante du gouvernement en place ; -
guerre civile ou rébellion armée ;
- troubles sociaux ;
- dévaluation.
Les dirigeants des structures de micro financement ont
l'obligation de se tenir informés de l'évolution des indicateurs
économiques de leurs pays afin de ne pas être surpris par les
récessions économiques. Par ailleurs, c'est en restant
éveillés sur les tendances lourdes de l'économie qu'ils
peuvent imaginer les nouveaux produits et services financiers à proposer
à leurs clients.
·. Risques liés à
l'environnement physique
Il s'agit d'une part des intempéries de la nature
telles que : famine, inondation, tsunami, péril acridien,
sécheresse, pandémies,
etc. et d'autre part, de l'état des
infrastructures économiques : route, téléphone,
électricité, etc. Le péril acridien pour ne prendre que
cette intempérie-là a causé beaucoup de désastres
dans nos pays ouest-africains. Les dirigeants des IMF doivent donc être
au courant de ce phénomène. A cet effet, ils gagneraient à
lire tous les magasines traitant de ce sujet afin de mieux se préparer
à gérer ces périodes d'invasion des criquets
pèlerins.