Il s'agit ici de montrer quelles sont les solutions
avancées par le G20. Le G20 ou Groupe des 20 est un forum
économique regroupant vingt pays et agissant en faveur de la
stabilité financière. Ses membres représentent près
des deux tiers du commerce mondial et plus de 90 % du PIB : la
représentativité du G20 est donc élevée. Le G20 a
pris une forte ampleur depuis que les chefs d'Etat y participent,
c'est-à-dire depuis novembre 2008 et le sommet de Washington. Ce sommet
a été convoqué afin d'étudier la crise
financière qui venait de se dérouler. Les conclusions ont
été que la crise est due à un manque de coordination
économique, à de trop fort risques financiers mal
évalués
et à un manque de surveillance du système
financier (Déclaration finale, 2008). Ces remarques ont emporté
l'adhésion de la communauté scientifique, et il a
été prévu de prolonger les bonnes intentions par un sommet
au printemps 2009.
Le sommet du G20 à Londres en avril 2009 prend donc le
relais de la réflexion sur les déséquilibres financiers
internationaux. Il est prévu, d'après le Communiqué final
(2009), de renforcer la coordination dans l'épreuve qu'est la crise,
d'assainir le système bancaire, et d'apporter une meilleure
régulation et surveillance du secteur financier. Les pays se sont
engagés à :
« rétablir la confiance, la croissance et les
emplois
restaurer le système financier afin de rétablir
les activités de prêt ; resserrer la réglementation
financière afin de rétablir la confiance ;
financer et réformer nos institutions financières
internationales de façon à surmonter cette crise et à en
prévenir d'autres dans l'avenir ;
promouvoir le commerce et l'investissement mondiaux et
rejeter le protectionnisme, dans le but de soutenir la prospérité
;
instaurer une reprise globale, durable et respectueuse de
l'environnement. En agissant de concert pour remplir ces engagements, nous
pourrons sortir l'économie mondiale de la récession et
empêcher qu'une telle crise se reproduise dans l'avenir».
C'est à cette occasion qu'a été
décidé la nouvelle allocation de DTS, pour 250 milliards de
dollars. Ainsi le G20 a pris en compte la gravité de la crise, et
prône des actions visant à rétablir au plus vite la
confiance, les prêts, les investissements et donc la croissance. Mise
à part les DTS, aucune mention n'est faite de l'aspect monétaire,
et en particulier les problématiques liées au statut dollar que
nous avons vu précédemment.
En ce qui concerne les détails de la
réglementation financière, le G20 ambitionne de prendre «
des mesures afin d'établir un cadre de supervision et de
réglementation renforcé et plus cohérent à
l'échelle mondiale, à l'endroit du secteur financier dans
l'avenir, qui favorisera une croissance mondiale soutenue et répondra
aux besoins des entreprises et des citoyens ». Les idées sont
pleines de vertus, mais force est de constater qu'un an après la
réglementation demeure modeste : les hedge funds opèrent
toujours, les CDS et CDO demeurent, et la spéculation
effrénée perdure, la preuve par
la crise de la dette grecque des derniers mois. Par ailleurs,
les actifs financiers comme les devises continuent de présenter un
extrême volatilité au cours des mois d'avril et de mai 2010. De
plus, il est prévu une cohérence et une coopération «
systématique » entre les pays. Or la coopération
internationale est peu présente, puisque B. Obama entreprend des
réformes de manière unilatérale, et l'UE elle aussi
décide sans concertation (nous somme loin d'une coopération
systématique). L'Europe, qui est traditionnellement
régulationniste, semble dépassée par les Etats-Unis, qui
ambitionnent davantage de régulation que l'Europe : se produit-il une
inversion des rôles depuis la dernière crise ?
Enfin, un dernier point précisé par le
Communiqué est d'« atténuer plutôt qu'amplifier les
cycles financiers et économiques » : ici encore, la crise grecque
et la forte volatilité de l'euro (qui se traduit ici par de
l'instabilité) ne conduit pas à établir un SMFI
international. Ceci étant, il faut reconnaître quelques
avancées, mais qui semblent relever de l'effet d'annonce plutôt
que de réelles réformes : la question des
rémunérations est abordée, les normes comptables
également ainsi que les paradis fiscaux. Mais compte tenu de
l'intensité de la crise et de ses conséquences, cela
apparaît comme clairement insuffisant. Et, encore une fois, l'aspect
monétaire est très peu présent et ses
problématiques cruciales complètement absentes. Par ailleurs, le
directeur du FMI, D. Strauss-Kahn ( La Tribune, 2009), critique le sommet de
Londres en déclarant qu'il laisse de côté la
problématique la plus urgente : « nettoyer le système
bancaire des ses actifs toxiques, qui risquent d'aggraver et de prolonger la
récession mondiale».
Le prolongement a ensuite été le G20 de
Pittsburgh de septembre 2009. L'objectif est l'aboutissement des mesures
adoptées lors du G20 de Londres. Il s'agit des paradis fiscaux, des
bonus-malus liés aux rémunérations dans le secteur
bancaire, et de promouvoir la coordination internationale. A Pittsburgh, les
propositions venaient largement de la France et de l'Allemagne. Mêmes si
ces derniers ont emporté l'adhésion des Etats-Unis et du
Royaume-Uni, le G20 laisse à nouveau l'ensemble des problèmes
monétaires de côté. Et pourtant, il se profile à
l'horizon une probable « guerre de changes », comme le précise
P. Artus (2009). Ainsi, le risque est un affront entre les pays, par
l'intermédiaire des taux de change afin de favoriser les exportations,
précieuses en temps de crise. L'auteur pointe notamment une guerre des
changes entre les pays de l'OCDE mais également entre les Etats-Unis et
la Chine, dont la monnaie est structurellement sous-évaluée.
Il apparaît que lors du G20 de Pittsburgh les
problématiques déjà abordées ont été
approfondies. Mais le problème réside dans les
problématiques ignorées. Or nous avons vu qu'une réforme
de la finance internationale ne serait que superficielle si elle ne
s'accompagne pas de
réformes du SMI, et notamment la relation Chine
-Etats-Unis, et le statut du dollar dans le semiétalon dollar. A
l'inverse, le gouvernement français pointe lui «des avancées
considérables » (Gouvernement Français, 2009), en
précisant avec un détail minutieux la réforme des bonus.
Or les bonus octroyés en 2009 ont été colossaux, loin de
l'ambition de les réduire.
En outre, la satisfaction des membres du G20 semble
exagérée. Ces derniers précisent que « nos pays
avaient alors décidé de faire tout ce qui était
nécessaire pour assurer la reprise, remettre en état nos
systèmes financiers et préserver les flux mondiaux de capitaux.
Cela a marché. ». Le G20 qualifie son action d'«
énergique », vante les « progrès accomplis » :
« les engagements que nous avons pris au niveau national pour
rétablir la croissance ont constitué le soutien budgétaire
et monétaire le plus vaste et le mieux coordonnée de tous les
temps. Nous avons agi ensemble pour augmenter radicalement les ressources
nécessaires afin de stopper la diffusion de la crise à l'ensemble
du monde. Nous avons pris des mesures pour remettre en état le
système de régulation et nous avons commencé à
mettre en oeuvre des réformes radicales afin de réduire le risque
que des excès financiers ne déstabilisent à nouveau
l'économie mondiale ». Ainsi, il apparaît difficile de
s'autosatisfaire lorsque la plupart des pays industrialisés
présentent des niveaux de chômage record, une croissance en berne,
et que la spéculation financière bât son plein.
Pour finir, les ministres des finances et les gouverneurs des
banques centrales du G20 se sont réunis le 23 avril 2010 afin d'assurer
la transition vers une croissance stable et pérenne, dans un contexte de
sortie de crise. Tout en reconnaissant que les résultats
n'étaient pas à hauteur des espérances, le
communiqué final précise que les membres vont continuer à
travailler de la sorte, et notamment sur la régulation
financière. Or, en ce qui concerne la mise en oeuvre concrète de
la régulation financière, les membres se sont
révélés être en désaccord. Selon R. Hiault
(2010), les gouvernements sont divisés sur les caractéristiques
des nouvelles taxes sur les banques. L'idée du FMI d'instaurer deux
taxes a provoqué des clivages, et la vision de la réglementation
des banques diffère entre les partisans et les opposants de Bâle
II. Ainsi, nous sommes loin du consensus et de la coopération
systémique de 2009.
Pour conclure, il semble que le G20 entreprend des
négociations et des travaux indispensables. L'ampleur de la
récession aurait été plus grande sans ces actions
concertées. Cela peut poser les premiers jalons d'une gouvernance
globale, notamment sur les solutions pour recouvrer une croissance
pérenne. Par contre, en ce qui concerne la régulation de la
finance, il n'apparaît presque que des réformes nécessaires
mais de second plan : bonus des traders, agences de notations, normes
comptables, qui sont annoncées comme des révolutions. Notons tout
de même le
travail sur les paradis fiscaux. Mais l'aspect le plus
important est que l'ensemble des problématiques monétaires sont
occultées des négociations. Le semi-étalon dollar n'est
pas mis en doute, ou en tout cas rien ne le laisse penser. Ainsi, si le SMI
venait à subir des transformations, ce sera sans doute sous l'effet de
forces déjà à l'oeuvre (l'ensemble des réformes et
évolutions déjà vus) et probablement pas grâce aux
travaux du G20. Il convient maintenant de porter un regard sur les politiques
entreprises aux Etats-Unis et en Europe.