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Les pistes de réforme du système monétaire et financier international depuis la crise

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par Maxime Gasser
Université Pierre Mendès-France Grenoble - Master 1 2010
  

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3. Les DTS : une étape nécessaire vers la réforme du SMI

Nous avons vu précédemment que la monnaie supranationale doit répondre à un doubleobjectif : agir sur l'offre monétaire et sur la demande. L'action sur l'offre suggère l'introduction d'une monnaie supranationale. Or les difficultés évoquées amènent à revoir les ambitions, et la réforme du SMI pourrait se faire par étapes, en se servant des DTS. Ceux-ci présentent l'avantage d'une action sur l'offre et sur la demande monétaire. En effet, si les banques centrales peuvent acquérir des DTS, cela diminue mécaniquement le besoin de constituer des réserves en devises, et notamment en dollar. Par la suite, les DTS pourraient progressivement ouvrir la voie à une monnaie supranationale (DTS ou autre), et ainsi offrir à l'économie mondiale une nouvelle monnaie. La réforme du SMI serait alors institutionnalisée, en donnant un rôle prépondérant au FMI. Mais les DTS ne sont pas une monnaie au sens strict ( cf. Tableau 2) : c'est plutôt un instrument de réserve, une sorte de prêt en dernier ressort. Le principal avantage est que les DTS existe déjà, et sont acceptés par les principales économies en tant qu'instrument monétaire. Cela semble donc plus facile de se servir de cette « quasi-monnaie internationale » (S. Moatti, 2010), afin de donner un ancrage concret aux théories de la monnaie supranationale.

Tableau 4: Les Droits de Tirage Spéciaux

Le DTS est un «instrument de réserve international crée en 1969 pour compléter les réserves

officielles existantes des pays membres» du FMI. Les DTS sont échangeables contre des devises librement utilisables. Ils ont été introduit afin de soutenir le système de parités fixes de Bretton-Woods.

Dans ce système, la valeur des monnaies était gagée sur les avoirs en or des différentes banques

centrales. Et, devant les besoins croissants en liquidité du fait de l'expansion du commerce international, les principales économies n'ont plus été en mesure de maintenir la parité de leurs monnaies. Des allocations de DTS ont été introduit pour pouvoir constituer des réserves et rétablir une confiance dans les monnaies.

Les DTS sont aloués en fonction de la quote-part au FMI de chacun des pays membres. Ils donnent

droit à des avoirs sans frais. Si un pays détient plus de DTS que son allocation de base, cela donne droit à des intérêts. A l'inverse, un déficit de DTS implique le paiement d'intérêts.

La valeur des DTS est déterminée par un panier de quatre monnaies : le dollar, l'euro, le yen et la livre

sterling. Leur part respective est pondérée par le poids des différentes devises dans les échanges internationaux et les transactions financières. En mai 2010, le cours du DTS est : 1 DTS = 1,18 EUR.

 

Le Rapport Stiglitz évoque la possibilité de transférer la responsabilité de la gestion de la monnaie supranationale au FMI (2009, pp. 92-102). Mais il pointe également une alternative : créer une nouvelle institution, la « Banque de Réserve Mondiale » (Global Reserve Bank), qui aurait pour mission la régulation du système de réserves des différentes économies mondiales, mais également la gestion de la monnaie supranationale. Toutefois, nous l'avons vu, les DTS forment l'alternative la plus probable. Et le FMI continue de refléter les intérêts des principales économies occidentales (en premier lieu les Etats-Unis), ce qui semble pencher vers son maintien en tant qu'institution en charge de la stabilité monétaire et financière internationale. En ce qui concerne la mise en oeuvre de la monnaie supranationale, deux propositions sont établies :

Renoncer aux monnaies nationales. Il s'agit d'introduire une nouvelle monnaie, les Certificats Monétaires Internationaux (« International Currency Certificates »), incarnés éventuellement par les DTS. Cela se ferait sur le même modèle que les quotas du FMI, qui sont déjà en vigueur ; cette proposition équivaut à un système de « swaps » mondiaux entre les différentes banques centrales et les différentes devises. La valeur de cette monnaie serait similaire aux DTS, c'est-à-dire basée sur un panier de monnaies,

pondéré par leur poids dans l'économie mondiale.

Etablir les DTS en parallèle des monnaies nationales. Ils auraient le statut de « monnaie globale » (global currency), et seraient alloués par le FMI. Il n'y aurait aucune garantie spécifique, hormis l'assurance que les banques centrales acceptent les DTS comme une monnaie internationale, et les échangent contre leurs devises respectives. Mais il est envisageable que l'émission de DTS soit gagée par des dépôts auprès du FMI (ou de la Banque de Réserve Mondiale), et que cette institution monétaire internationale soit autorisée à acheter des bons du Trésor des pays membres. Dans ce cas, les DTS en tant que nouvelle devise internationale auraient la même garantie et confiance qu'ont les devises nationales grâce aux avoirs détenus pas les banques centrales.

Quel que soit le schéma choisit, l'introduction des DTS comme « monnaie globale » permettrait d'assurer une certaine stabilité dans les échanges commerciaux mais également dans les stratégies de réserve des différentes économies. Toujours d'après le Rapport Stiglitz, l'objectif est que les pays concernés par la constitution de fortes réserves (principalement les pays asiatiques, cf. I.1.) substituent des DTS à une partie de leur réserves en devises traditionnelles, au premier rang desquelles le dollar. Cette détention de « monnaie globale » donnerait droit à un paiement d'intérêt par l'institution en charge de l'émission (le FMI si ce sont les DTS). Par ailleurs, il est envisageable de pouvoir administrer les taux de change de manière à réguler le SMI et éviter que les ajustements d'un pays affecte la position de change d'un autre ; c'est en outre un des objectifs du FMI actuel. Les fluctuations des principales monnaies se verraient harmonisées entre elles et avec la « monnaie globale » : ceci toujours dans la perspective de rendre le SMI davantage stable. La principale utilité d'une telle monnaie incarnée par les DTS est que la « diversification des monnaies pourrait générer plus de stabilité dans la valeur des réserves » et, par là, plus de stabilité parmi les principales variables monétaires (changes, épargnes, politiques monétaires...).

Le renforcement du rôle des DTS est également prôné par d'autres auteurs. Selon M. Aglietta (2010), les DTS sont susceptibles de réformer le SMI en imposant une gestion des réserves de change. En effet, nous avons vu que ce sont les principaux vecteurs d'instabilité. Le DTS pourrait se substituer au dollar dans les réserves de changes des pays asiatiques, limitant de facto les déséquilibres dus au semi-étalon dollar actuel. Ensuite, l'allocation de DTS par le FMI réduirait le besoin de réserves, puisque cette forme de prêt en dernier ressort pourrait rassurer les pays dont le taux de change est instable : en ces temps de crise, cela limiterait l'instabilité monétaire internationale. Enfin, les DTS devraient être couplés à la création d'un « compte de substitution ».

L'idée d'un tel compte est de proposer des obligations en DTS aux pays émergents et en développement, en contrepartie de dépôts en dollar. Cela permet de « faciliter la diversification des réserves en dehors des marchés des changes ». Le risque de change est ainsi transféré au détenteur du compte de substitution, et peut être éliminé en changeant les dollars contre des avoirs dans les quatre principales monnaies du DTS, dans leurs parts respectives.

En résumé, les DTS sont une « solution de transition » (Bénassy-Quéré & Pisani-Ferry, 2009). Crées à l'origine par peur d'un manque de liquidités internationales (qui est une menace sur la convertibilité du dollar), ils sont aujourd'hui une solution à un surplus de liquidités. Nous avons vu que les DTS pourraient impulser une réforme du SMI en endossant le rôle de « monnaie globale ». Ce statut, qui se rapproche de celui de la monnaie supranationale et du bancor de Keynes, produirait une régulation des principaux facteurs d'instabilité à l'oeuvre actuellement. Les DTS peuvent ainsi agir sur la demande, en devenant la devise de réserve internationale, ce qui pourrait contenter les pays émergents et en développement, qui doivent se prémunir du risque par la constitution de réserves de change. Et cela peut être une transition vers une nouvelle offre monétaire, si le DTS acquiert le statut de monnaie internationale. Par ailleurs, nous avons vu que les DTS peuvent soit supplanter les devises nationales soit devenir une monnaie globale qui côtoie les autres devises, à la manière du bancor. Si le rôle de monnaie globale leur est conféré, les DTS permettraient la gestion et la régulation des changes, car ils sont diversifiés et institutionnalisés (par le FMI dans leur forme actuelle). Ceci étant, la mise en oeuvre concrète des DTS requiert des changements et des adaptations.

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