2 Introduction
L'automobile rend la banlieue possible, mais la banlieue rend
l'automobile indispensable (Meyer, 2003). Cette affirmation décrit bien
l'importance et même la place capitale qu'à eu l'apparition puis
la généralisation de la voiture dans l'avènement du
résidentiel périurbain. Celle ci a ainsi permis une
mobilité plus facile pour ces ménages recherchant un espace et un
cadre de vie plus vert qu'en centre ville, mais aussi et surtout une
volonté évidente à occuper un habitat
individualisé, avec des coûts moindres, tant par le foncier que
par le bâti (CERTU, 2000). Le développement des espaces
périurbains, puis leur pérennité dépendent donc de
cette notion de mobilité individuelle. Celle ci a été
grandement appuyée par l'idée d'un coût abordable,
même pour les plus modestes, du carburant, ainsi que du foncier. Sur
cette base, il n'est donc pas étonnant d'évoquer un certain
idéal d'habitat, auquel aspire encore une majorité de
française, c'est à dire près des trois quarts (Wiel,
1999). Signe de cette tendance, plus de la moitié des constructions de
logements, et près de 70% de la surface construite en France, concerne
ce type de territoires (CERTU, 2000). Si la vitesse de la voiture ne fait pas
toujours gagner du temps, elle fait indubitablement gagner de l'espace de
vie.
Mais ce véritablement mode vie nouveau n'est pas sans
contrainte. A composition sociale et démographique égale, un
ménage habitant en périphérie consommera plus de carburant
plus qu'un ménage habitant au centre (CERTU, 2000). L'automobile
représente donc non seulement un moyen d'habiter, mais elle est
également au fur et à mesure une contrainte économique
voire sociale. En effet, les communes du périurbain ne sont pas toutes
égales en terme d'offre de services, et encore moins face aux centres.
Les déplacements sont donc nécessaires et, du fait de l'offre
souvent inexistante de transports en commun, il n'y a aucune alternative
à la voiture. Les ménages périurbains sont donc
« condamnés » à ce type de trajet,
révélant ainsi une certaine dépendance à
l'égard de l'automobile.
Cette notion a été développé
relativement récemment par Newman et Kenworthy dans leur ouvrage
Cities and Automobile Dependence de 1989. Dans une approche spatiale,
ils definissent alors la consommation de carburant comme un indicateur de cette
dependance puisque la comparaison entre la consommation des habitants selon
qu'ils vivent en centre-ville, en proche banlieue ou en grande peripherie
revelent de grandes differences. La consommation de carburant est en effet en
relation inverse tres marquee avec la densite urbaine. Pour aller un peu plus
loin, il conviendrait de retenir la part du budget des menages consacre au
carburant (Heran, 2000). Dans cette definition, ce sont les villes qui sont
dependantes ou non de l'automobile.
D'autres auteurs, comme Dupuy dans son ouvrage, la
dependance automobile: symptomes, analyses, diagnostic, traitement, voient
plutot cette dependance automobile concerner les usagers, les habitants de ces
villes, en developpant l'idee d'un cercle
\u171á magique \u187â qui contraint aussi bien les
personnes a l'interieur, et qui voudraient en sortir, et celles a l'exterieur,
qui voudraient y rentrer (Dupuy, 1999).
Les menages periurbains seraient ainsi confrontes a
d'importants besoins de deplacements, d'ou resultent des difficultes et des
contraintes particulieres en termes de mobilite du fait de leur localisation
residentielle (Coutard, Dupuy, Fol, 2002). Ces difficultes sont d'autant plus
marques que la periurbanisation residentielle est bien plus importante que la
periurbanisation des emplois, ce qui affecter davantage les ménages des
catégories socio-professionnelles modestes (Berger, 1999), surtout au
regard de l'inflation des coûts de déplacements. Ainsi, ce
coût représente parfois plus de 20% du budget des
périurbains, dans la banlieue parisienne (Polacchini, Orfeuil, 1999). Au
final, le coût des transports et celui des loyers, ou du foncier, suivent
des courbes opposés à mesure que l'on s'éloigne des
centres villes. Mais le premier augmentant, rendant ainsi le déplacement
automobile de moins en moins accessible pour certains, alors qu'il
apparaît comme indispensable, il est tout à fait envisageable que
la dépendance automobile peut constituer un facteur expliquant les
mouvements résidentiels des ménages périurbains, surtout
pour les plus modestes.
Pour vérifier cette affirmation, nous commencerons par
analyser certains travaux sur le sujet, en particulier celui de Motte, Massot
et Byrd, réalisé pour le périurbain parisien, que nous
appliquerons alors sur trois aires urbaines de rang successivement
inférieur: Lyon, Toulouse et Rennes. Ce travail permettra ainsi de
vérifier si la dépendance automobile du périurbain peut
s'observer à différents seuils, et si celle ci peut expliquer une
part des déménagements. A cet effet, nous créerons des
cartes de ces aires urbaines afin d'observer la dépendance automobile
des communes, puis nous utiliserons une méthode régression
logistique à partir de données de recensement dans le but de
définir les raisons des déménagements. Enfin, nous
tenterons de confronter ces tendances aux politiques d'aménagements des
villes, afin de voir si ce phénomène est pris en compte.
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